Un apprentissage contextuel et éthique en guise de modèle d’aide à la décision

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Introduction

À l’occasion de la journée mondiale de la statistique, qui sera célébrée le 20 octobre prochain, nous proposons d’aborder la troisième partie de notre réflexion sur le triangle stratégique insignifiant de la gouvernance haïtienne à l’aune de l’un des thèmes clés retenus pour célébrer cette journée en Haïti. Comment les données statistiques peuvent-elles être utilisées de manière efficace pour évaluer et améliorer la transparence et la responsabilité dans le processus décisionnel haïtien ?

Pour cette question, nous formulons l’objectif modeste, qu’au bout de cette intervention, nous ferons émerger un modèle contextuel d’aide à la décision qui explicitera ce « comment » et qui pourra, selon sa pertinence, servir de référence pour des discussions approfondies dans les milieux de la gouvernance publique et d’entreprise du pays. Si tant est que dans ces milieux, épinglés par les sanctions internationales, il y a une volonté sincère de repenser leur modèle de gouvernance. Douce folie me confie ma connaissance contextuelle de l’écosystème haïtien totalement gangstérisé, comme du reste le révèlent les sanctions internationales ; mais abondance de générosité inébranlable me rétorque ma conscience éthique.

Cadrage de la thématique

La question de la thématique soulève une problématique en apparence rébarbative, mais pourtant combien mal appropriée dans le contexte de la prise de décision en Haïti.  La problématique est manifestement rébarbative, car tout un chacun sait que pour décider il faut des données structurées sous forme statistique, lesquelles seront exploitées dans un certain contexte (évaluation, optimisation) de responsabilité professionnelle ou personnelle, avec plus ou moins de transparence. Pourtant, elle n’est pas moins mal assimilée par les décideurs haïtiens de la gouvernance publique et d’entreprise, puisque depuis de nombreuses années le pays figure dans la liste des mauvais élèves de la bonne gouvernance. Et si les indicateurs de la bonne gouvernance sont mauvais, cela traduit objectivement des niveaux de défaillance dans le processus décisionnel qui oriente l’action publique haïtienne.

la statistique ne peut être qu’un outil d’anoblissement de l’improvisation et/ou de la corruption.

Mais quelles peuvent être les défaillances qui entachent la mécanique décisionnelle haïtienne ? À quel niveau le processus grince-t-il ? Les mauvais indicateurs du pays en matière de bonne gouvernance, traduisent-ils une incapacité des décideurs haïtiens à prendre de bonnes décisions en matière de politiques publiques ?

Empressons-nous de dire que la valeur d’une décision ne s’évalue pas en termes binaires de bonne ou mauvaise, de rationnelle ou d’irrationnelle. D’ailleurs, la complexité du contexte de la prise de décision rend incertaine la quête d’une décision qui serait la bonne. De fait, il est admis que la rationalité du décideur est toujours limitée. Face à ce flou dans lequel est noyé la finalité de l’acte de décider et qui rend improbable toute ‘‘bonne décision’’ comme une limite inaccessible, chacun se permet des degrés de libertés qui tentent davantage à dénaturer, sinon à trivialiser le processus décisionnel plutôt qu’à le baliser pour réduire les incertitudes qui limitent sa rationalité.

Problématisation

Dès lors, la problématique des données statistiques et de leur exploitation efficace pour évaluer et améliorer la transparence et la responsabilité dans le processus décisionnel haïtien nécessite d’être problématisée pour faire émerger un sens partagé autour de la valeur des données et autour même de l’acte de décider. Cette construction du sens est d’autant plus nécessaire qu’ « elle est la valeur qui permettra d’accepter ou de rejeter[i] » la décision. Parce que quand on décide, que ce soit dans le cadre d’une responsabilité personnelle et encore plus collective, cela induit toujours des conséquences pour autrui. Alors la prudence voudrait que tout décideur apprenne à objectiver la qualité du contexte de sa prise de décision. Car c’est la valeur de ce contexte qui donnera du sens à la décision même si elle devait se révéler mauvaise ultérieurement.

Nous avons fait jaillir le contexte comme premier jalon éclairant pour cheminer vers la démarche qui doit optimiser le processus décisionnel haïtien. Mais qu’est-ce qui structure ce contexte ? Quel contour le délimite ? Comment savoir quand on s’en éloigne ?

Vers une modélisation contextuelle de la décision

Pour structurer le contexte de valeur qui doit donner du sens à un processus décisionnel, commençons par expliciter les éléments qui participent à ce processus.  A cet effet, appelons que, dans le cadre des sociétés humaines, tout processus décisionnel implique :

  • Un lieu humain, se trouvant dans une situation problématique (critique) à un moment donné, au regard d’un certain nombre de critères ;
  • Un acteur décisionnel, bénéficiant d’une légitimité l’habilitant à agir pour faire évoluer cette situation problématique vers une situation plus satisfaisante pour ledit lieu humain.

Précisons que la dimension critique de la problématique, par ses éruptions de crises, suggère l’imminence de la décision. En effet, on se rappellera que l’étymologie grecque du mot crise est Krisis qui signifie jugement, décision. Donc quand une problématique devient critique et qu’il y a crise, c’est parce qu’une décision est imminente. En conséquence, si la décision prise facilite la récurrence et la durabilité de la crise, c’est que ce processus est défaillant. C’est manifestement ce que nous vivons en Haïti : les crises suivent un cycle récurrent, sinon permanent. On peut déjà noter que c’est une mauvaise approche scientifique de parler de crise[ii] en Haïti, et de vouloir appliquer les procédures conventionnelles et normatives de la bonne gouvernance. Car en appliquant de possibles bonnes solutions à un faux problème (mal connu, mal diagnostiqué, mal pensé, mal documenté), on ne fait que compliquer la complexité. Notre propos est de montrer que la défaillance du processus décisionnel haïtien est en amont une défaillance humaine.

En effet, comme nous venons de le voir, un processus décisionnel implique : un lieu humain soumis à une problématique critique, un acteur décisionnel investi d’une légitimité pour conduire l’action collective au nom et au bénéfice de ce lieu humain. A partir de ces deux entités, faisons ressortir les interactions et les rétroactions. Qui dit lieu humain, dit relations humaines, cohésion sociale, activités organisationnelles, centre d’intérêts communs et valeurs collectives partagées. Qui dit acteur décisionnel dit motivation personnelle, culture, niveau d’imagination et indépendance d’esprit. Le contexte du processus décisionnel est objectivement structuré par ces différents éléments qui se déploient autour de trois piliers formant un triangle stratégique dont les sommets sont le lieu humain, la problématique et l’acteur décisionnel. Il va de soi que la valeur de la prise se décision se mesure au respect de la préservation de la cohésion de ce lieu et de la protection du socle de l’intérêt collectif. On peut déjà admirer la pertinence de la démarche contextuelle : En partant du jalon de valeur pour construire le sens du processus décisionnel, nous avons mis en lumière des éléments structurants qui peuvent rigoureusement modéliser le processus de la décision : un lieu humain sous-tendant des liens de cohésion, des valeurs partagées, des intérêts collectifs ; une problématique critique, Un (ou plusieurs) acteur (s) légitime (s) (compétence technique, compétence humaine[iii]) dans des jeux de rôles décisionnels engageant leurs responsabilités à travers  leurs intentionnalités et leurs motivations.

On peut structurer la prise de décision comme processus dimensionné par quatre variables : Processus Décisionnel (Lieu Humain, Problématique Critique, Acteur Légitime, Valeur Recherchée). Autour de ces quatre variables se tisse tout un ensemble complexe de liens épars, diffus, tendus, confus, mais solidaires, soumis à des contraintes qui font surgir des conflits entre les individus et la société. D’où l’impérieuse obligation pour le décideur de prendre en compte ces conflits dans sa prise en charge de la problématique critique pour chercher à les atténuer, en orientant le plus que possible son processus décisionnel vers un socle de valeurs partagées et le respect de l’intérêt collectif. Voilà la modélisation à partir de laquelle nous proposons de regarder la problématique de l’exploitation des données statistiques pour l’évaluation et l’optimisation du processus décisionnel haïtien en termes de transparence et de responsabilité.

En finir avec le mythe des données et la statistique comme anoblissement de l’improvisation ou de la corruption

Et oui, j’entends gronder l’étonnement des experts statisticiens, experts économistes, experts en gouvernance de données et en e-gouvernance, tous experts non contextuels, qui demandent : mais où est l’argument statistique ? Où sont les données ?

Si on se tient au mythe de la gouvernance en vogue dans le monde, et enseigné dans les grandes écoles de la statistique et de l’économie appliquée, ma modélisation est branlante, car elle oublie les données probantes comme argument statistique de toute prise de décision. D’autant plus que le dogme de la bonne gouvernance résonne comme un évangile partagé : Pas de décision intelligente, pas d’évaluation performante sans données probantes. Tel est en effet le postulat le plus assimilé par les praticiens du suivi et de l’évaluation et véhiculé par les stratèges de la prise de décision dans les organisations du monde entier. Ce postulat est si bien répandu dans les organisations (notamment haïtiennes), qu’il a nourri l’illusion d’un triangle vertueux porté par des axes de certitudes performantes : Décision, Données et Évaluation.

Notre modèle, basé sur une approche contextuelle du processus décisionnel, cherche justement à prouver l’incomplétude de ce triangle vertueux. Car, celui-ci laisse croire que ‘‘l’intention de la prise de décision précède la recherche d’informations’’ et s’autorise à solliciter l’évaluation en dernier recours pour valider le cycle des résultats. Et c’est là hélas une confusion (voulue) qui délégitime le processus décisionnel intelligent qui lui repose sur une recherche permanente et intranquille de l’information qui doit précéder la décision et par laquelle le décideur cherche à apprendre de son écosystème.

Et pour cause car, si comme Galilée l’a postulé, la nature est écrite en langage mathématique, s’y plonger avec attention peut offrir de vertueux apprentissages. Et c’est cette approche apprenante et intelligente qui oblige le décideur, en quête de construction de sens et de production de valeur de cohésion pour le lieu humain pour lequel il décide, à se mettre en posture d’anticipation et de veille pour capter les signaux faibles qui lui permettront de décider dans le respect des valeurs de l’écosystème sans attendre la catastrophe. Dans cette posture de veille anticipative et de recherche de signaux faibles, l’évaluation est permanente, car elle doit décider de la valeur de l’information pour prévenir. Puisqu’après tout gouverner, c’est prévoir. Dans cette posture, le décideur s’ouvre à la pensée critique et ne travaille pas qu’avec ceux qui lui disent qu’il est beau et intelligent, car il sait que l’intelligence de son processus décisionnel repose sur sa capacité à estimer (évaluer) sans cesse la valeur de plusieurs scénarios contraires.

Il va de soi que les décideurs haïtiens n’ont pas l’esthétique pour de telles postures. Et pourtant, cette incapacité des décideurs haïtiens à tenir cette posture de veille anticipative qu’éclaire la pensée critique est la grande faille qui invalide le processus décisionnel du pays et l’oriente vers cette culture managériale indigente matérialisée par trois syndromes :

  1. Le syndrome du management de l’agitation angoissante par la gestion permanente de l’urgence. Ce management entraine les institutions dans une culture de l’incomplétude et de l’improvisation où l’on apprend à se contenter du minimum insignifiant confortable qui finit par devenir une culture de la routine invariante ;
  2. Le syndrome du management de l’insignifiance et aux missions non maitrisées. Ce management multiplie des réunions incessantes qui ne débouchent sur aucune décision, et commande un nombre croissant de rapports illisibles, inintelligibles et inexploitables pour la prise de décision ; car il n’y a aucune maitrise du contexte problématique et donc de la mission de gouvernance.
  3. Le syndrome du management de l’entre soi et de la culture de l’allégeance. Ce management, parce que maitrisant mal sa mission, entraîne les organisations dans une culture de la soumission, de redevances, où l’on récompense, non pas ceux qui sont les plus talentueux et les plus compétents, mais ceux qui ne contredisent pas le management, ceux qui font allégeance à sa médiocrité, ceux qui lui vouent loyauté.

Dans ce contexte managérialement défaillant, la statistique ne peut être qu’un outil d’anoblissement de l’improvisation et/ou de la corruption. Son rôle va se limiter à justifier la prise de décision à partir des résultats des activités mises en œuvre. Or, l’évaluateur doit, avant d’analyser les données, s’efforcer de comprendre la logique de leur production et de leur génération. Et pour cela, il doit au-delà des données des résultats, évaluer tout le processus ayant conduit à la matérialisation des données. Car le vrai but de l’évaluation n’est pas de célébrer l’activité, mais de faire germer un apprentissage pour la connaissance et l’innovation[iv].

Faut-il rappeler qu’en Haïti, dans les agences de renforcement institutionnel et les ONG fournissant conseils, assistance et expertise au processus décisionnel du pays, c’est le culte de la célébration qui est le modèle dominant pour l’évaluation. D’où l’imposture de la gestion axée sur les résultats célébrée (GAR) par ce management. Grace à ce mythe, GARé dans les parcs d’obsolescence de la pensée complexe, beaucoup de décideurs haïtiens vivent dans la certitude que faire appel à un statisticien pour évaluer leurs projets (recherche, étude, projet social) doit se limiter à l’analyse des données des activités qui cristallisent les résultats obtenus. Er par une confusion de terme, ces résultats sont souvent présentés comme la performance que l’outil statistique doit prouver et justifier. Notons que performer vient de l’anglais to perform qui signifie accomplir, exécuter, et pourtant le commun des mortels voit dans la performance une mesure de l’excellence. Donc la performance que célèbre la gestion axée sur les résultats n’est que le déroulement du cycle de la décision, et non sa valeur.  Pour évaluer la valeur d’un processus décisionnel, les résultats des activités ne suffisent pas, il faut remonter toute la chaine de la production des données. Chaine qui remonte, complexité oblige, jusqu’à l’intentionnalité du décideur : a-t-il vraiment la volonté de prendre une décision pour résoudre la problématique dans le sens de la cohésion et de l’intérêt collectif du lieu humain concerné.

Et c’est là que notre modèle s’avère être une alternative pertinente pour évaluer et optimiser le processus décisionnel haïtien, car il postule que les données statistiques ne peuvent améliorer la transparence et la responsabilité d’un processus décisionnel que si le processus décisionnel en question a un sens et donne lieu à une recherche de valeur pour celui qui le pilote et pour ceux qui sont concernés par cette décision. Deux questions peuvent servir d’exemple de cas pour évaluer la qualité du processus décisionnel haïtien : on peut juste se demander si la majorité des Haïtiens qui se mobilise autour du visa Biden pour quitter le pays se soucie de ce que fait l’actuel gouvernement ? De même, on peut se demander si l’actuel gouvernement, qui encourage les gens à partir pour qu’ils envoient des devises à leurs proches pris au piège dans le shithole (puisque tous ne peuvent pas partir), se soucie de prendre des décisions qui peuvent assurer la cohésion du pays et donner envie de l’habiter ?

Tout cela pour dire que les données statistiques n’ont aucune valeur en elles-mêmes ; elles ne prennent sens que dans un contexte humain qui est contraint par des problématiques, pour lesquelles des activités sont mises en œuvre par des décisions. L’intelligence de ces décisions dépend des liaisons entre l’intelligence du climat d’affaires (cohésion sociale), l’imputabilité des activités des organisations (cohérence organisationnelle) et l’intégrité des acteurs métiers de ses réseaux socio-professionnels (engagement pour habiter son pays dignement). On retrouve la fameuse reliance par SOI formant le tryptique Société, Organisation, Individu.

Beaucoup de décideurs haïtiens se contentent de magnifier les dogmes normatifs de la statistique (comme ils le font en ce 20 octobre décrété journée mondiale de la statistique) pour justifier la réalisation (performance) de leurs activités, mais ils n’ont pas l’intelligence et les compétences (technique et éthique) pour chercher à les relier au contexte problématique pour lequel ils décident. Or, on ne peut évaluer des décisions en se focalisant uniquement sur les données des activités. Il faut questionner la cohésion du contexte humain où la prise de décision doit se faire, son modèle de valeurs, l’indépendance, l’intégrité et la légitimité des acteurs décisionnels. La statistique n’est qu’un sous-produit des activités humaines. Celles-ci ne sont que l’opérationnalisation de ce qui est codé dans le génome processuel de l’écosystème humain (valeurs, culture, intentionnalité, motivations) et les données ne sont que la matérialisation des rapports et des liens entre les entités habitant un certain lieu humain.

L’éthique comme apprentissage pour la prise de décision

La valeur d’un processus décisionnel n’est pas que dans ses données d’activités. Elle est au cœur de tout le cycle des données du contexte problématique que confronte un certain lieu humain et pour lequel des individus légitimes et intègres doivent trouver la bonne posture de transparence et de responsabilité en puisant dans leurs valeurs pour s’aligner sur les valeurs de l’écosystème global. Contexte et valeurs sont les deux dimensions structurantes de tout processus décisionnel intelligent. Les données statistiques ne peuvent devenir vecteurs de connaissance (transparence, responsabilité) pour la décision innovante que si tout l’écosystème que forme ce lieu humain est connecté et se meut dans une reliance qui garantit la cohésion sociale par l’engagement de soi. C’est là la base des communautés apprenantes. On ne s’engage collectivement les uns pour protéger les autres que si on a conscience de partager les mêmes valeurs et d’habiter un lieu pour lequel on a le même intérêt.

C’est dans cet enchaînement synchronisé que chaque maillon d’un écosystème s’inscrit comme gradient de valeur de la boucle qui assure la dynamique globale que se trouve la valeur résiduelle du processus décisionnel. C’est de là que vient la pertinence de l’axiome de l’intelligence éthique que nous magnifions comme brèche d’un potentiel transformationnel porteur d’innovation pour les écosystèmes défaillants. On peut donc formuler l’affirmation qui balise notre modèle d’optimisation du processus décisionnel haïtien comme un prolongement de notre engagement TIPÉDANT : L’action intelligente pour l’innovation, dans un écosystème, n’est possible que si les processus décisionnels, qui la supportent, s’articulent autour d’une maitrise du contexte problématique pour donner lieu à des choix estimés selon des critères de valeurs ouverts à une évaluation complète et permanente.

Comme on peut le voir, le processus décisionnel ne saurait se résumer à une affaire de données statistiques. Croire qu’il suffit mettre en œuvre des activités et de les faire valider par un recours aux statistiques pour atteindre la performance de la bonne gouvernance est une erreur à l’origine de bien de déconvenues managériales et de de lourdes défaillances organisationnelles. La vraie performance décisionnelle se construit dans le prolongement d’un cycle structuré et dimensionné où s’imbriquent toutes les entités de l’écosystème autour de son système de valeurs et de mesure : Contexte et stratégie, processus et activités, métiers et procédures, parties prenantes décisionnelles et acteurs opérationnels, valeurs et culture.

D’où le concept d’écosystème des données qui s’impose chaque fois qu’on veut trouver les variables d’action pour agir dans la complexité. C’est seulement ainsi, loin de toute improvisation, de toute précipitation, de tout déni méthodologique, de tout refus d’aborder la complexité, de toute peur des incertitudes que l’action humaine peut générer des données contextuelles qui se prêtent à une évaluation méthodique et scientifique pour extraire les retours d’expérience enrichissants comme vecteurs mémoriels de connaissance pour l’écosystème.

C’est la structuration de ce cycle d’apprentissage en démarche d’amélioration continue, par la richesse de l’évaluation, qui le rend transférable et transmissible comme modèle d’intelligence pour agir dans la complexité. Mais ce modèle d’intelligence ne prend forme que dans une boucle d’intranquillité qui cherche à contextualiser la connaissance, problématiser le réel et objectiver les contraintes pour faire émerger l’innovation comme l’espérance d’un possible transformationnel dans un écosystème livré à l’invariance.

Qui en Haïti possède la disponibilité épistémique, pragmatique et éthique pour soutenir ce modèle décisionnel TIPÉDANT qui s’apparente à ce qu’Érasme appelait ‘‘une folie visionnaire et généreuse’’ ?

 

Erno Renoncourt, 19/10/2023


[i] René Auclair, Valeurs, prise de décision et action sociale, 1995.

[ii] Edgar Morin, Pour une crisologie. In: Communications, 25, 1976. La notion de crise. pp. 149-163.

[iii] Humbert Lesca, Nicolas Lesca, Les signaux faibles et la veille anticipative pour les décideurs, 2011, Lavoisier.

[iv] Daniel L. Stufflebeam, l’évaluation en éducation et la prise de décision, 1980, NHP.

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