Pleins Feux Sur : Pierre « Captain Jean » Provilus

« Une empreinte copulative » | (P-au-P – 1965)

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Pierre « Captain Jean » Provilus avec sa tenue et casquette de majorettes qui ont complété son image d’artiste.

Après avoir été au bercail bercé par la tonitruance de multiples courants musicaux des années 1970. Ce qui a eu pour effet de bousculer son enfance dans l’univers des  groupes primitifs, que Pierre Provilus a animé sans complexe. Rêvant sans doute de pouvoir un jour faire la fête à des supporters dévoués. Donc, il s’est retrouvé prestement au ‘’state’’. Où l’ambiance qui y règne dans ses quartiers de Brooklyn ; fulmine  de culture et de musique afro caribéenne. Puisque son frère ainé James, préalablement installé à NY est déjà un musicien et multi-instrumentiste établi dans le milieu antillais anglophone. Prospectant les multiples rythmes afro et caribéens tels : calypso, soca, reggae, raga, rap,  rock, dance-hall etc. avec son groupe « Moon Light ». Un climat qui a fini par convaincre P.P du bien-fondé du show-business. 

Puis, ses études de H.S à accomplir à Erasmus de Brooklyn, tunnel des durs à crever. Et les directives de James qui compensent son intuition naturelle de la musique, en l’inoculant dans ces instruments : basse, guitare, batterie et les claviers pour lesquels il a plus d’affinité. Ce qui va d’avantage aidé la cause, lorsque le claviériste du groupe est tombé malade. Et en deux trois mouvements, James lui a révisé les accords et les modalités et, Pierre fut  en mesure d’être le claviériste ‘’bouche-trou’’ de l’ensemble pour quelques performances. Tout en entamant sa progression sous la supervision de son frère, mettant le grappin sur les intervalles de l’échelle diatonique. Encore que la mansion familiale au 450 E. 26th, entre Newkirk et Foster à Brooklyn est le refuge et point de ralliement des aspirants musiciens. Avec des habitués : Raymond Divers Kino, Frantzy Larèce, Lemy Raymond, Pédro César parmi d’autres.

C’est là que Pierre s’empresse d’élever son talent, impressionné par la grandiloquence de Prince son idole dont il admire la versatilité. A l’étape suivante, l’entourage se sent de poids pour lancer le groupe « The 5 Brothers » lequel expérimente toujours les approches afro-caribéennes ; pas en symbiose avec la sensibilité native. Bien qu’entre-temps P.P s’est déjà accoutré de son manteau de rapper créole, devenant l’un des originaux en diaspora. Sa reconversion ‘’Tipoul la’’ en fut l’attestation. En tout cas, les « 5 Brothers » ont continué à ruer dans les rancarts de l’immobilisme. Jusqu’à ce qu’un jeune immigrant fraichement débarqué d’Haïti a pris le groupe d’assaut, d’aplomb. Il a pour nom Jensen, et a fini par convaincre la bande que rien ne va bouger pour eux s’ils ne jouent pas du konpa. En plus du zouk qui vient de frapper à nos portes avec persuasion.

En leur dépouillant de leur statut de co-fondateurs et, allant jusqu’à reformuler le nom du groupe qui est devenu « Fanttoms », Ce fut la goutte d’eau qui a renversé le vase

D’où la mutation vers un regroupement plus homogène. Et subséquemment une nouvelle appellation du groupe qui devient « The Partners », formation pionnière de la nouvelle génération à N.Y. Une phase qui l’a vu apprêter de son sobriquet de star ‘’Captain Jean’’ ; avec sa tenue et casquette de majorettes qui ont complété son image d’artiste. Trouvant sa voie multidirectionnelle comme chanteur, compositeur, arrangeur, show-man, ainsi que son groove de claviériste avec Ansyto Mercier comme référence. De là, son toucher volubile et sa marque orchestrale ; agrémentant une stabilité harmonique d’une saveur indélébile. Pendant que les « Partners » s’activent à sortir des sentiers battus dans deux œuvres impromptues dont un album de calypso et ‘’Panzou’’. Des initiatives qui leur donnent droit de jouer en lever de rideau pour le « Tabou Combo ».

Attendant le hit qui devait être le déclic. Mais Kino s’en est allé avec ‘’Sa fè mal’’, pour le compte d’un nouveau projet avec le « Kajou ». Pourtant, ce coup de frein en plein démarrage n’avait pas ralenti l’ardeur de l’ensemble et de ‘’Captain Jean’’ qui renforce ses capacités au gré des divers courants dominants. En s’imposant, jusqu’à être sollicité dans d’autres associations ; incluant une tournée au pays avec le groupe «Kalito Koupe», alors détenteur du tube ‘’boujon boujoli’’. De retour à la base, pour mettre le cap sur le prochain album des « Partners ». A ce carrefour, c’est James le maestro qui désiste avec son annexe. Et, c’est Kino devenu King Kino revenu de ses périples d’opportunités qui refait surface ; donnant le ton pour un nouveau nom « Phantoms ». A ce tournant, Pierre Provilus s’affirme avec assurance dans l’arène du show-biz local. Au sein du phénomène spontané que fut l’ascension soudaine des ‘’Zombis’’, alors le reflet des contestations, rébellions audaces et inventivité ; trait d’union et synthèses du moment.

En tout cas, au cours d’une décade pleine de rebondissements et de controverses, le « Phantoms » a bien pesé dans la balance. Et ‘’Captain Jean’’ en a bien contribué à cette domination. Fort de sa vision, son talent, ses vocalises,  son rap, ses compositions telles : 14 Février, lanmou nan kalalou, tipoul la, Kisa ki lanmou ?, Mwen bezwenw mennaj, pwen sansib, Joseph, Zo, kavalye. Et sa marque florissante qui a instillé les zones de clarté et les subtilités harmoniques. En plus des envolées solistes qui ont caractérisé les allures diverses d’un groupe ayant connu l’apothéose dans les trois premiers albums : ‘’Louvri baryè’’, ‘’Pa bouje’’ et du double cd ‘’Résurrection’’. Une époque triomphale qui a empiété sur ses activités de collégien. Ayant eu à prendre une pause dans ses études en informatique, pour tourner avec le groupe alors très en demande. 

Pierre « Captain Jean » Provilus spécialiste en thérapie respiratoire

D’ailleurs, l’étiquette d’anti de facto dont la bande s’ est affublée, au temps où  les militaires mettaient Haïti à feux et à sang, a bien poli leur image et catalysé leur ascension. Ce qui allait être à leur détriment, car pour certains ce n’était qu’un moyen de se faire de la publicité. Et les fans n’ont pas du tout apprécié. Ce qui allait créer le creux de la vague pour le « Phantoms », qui ne s’est pas remis. En plus des antiques du ‘’king’’ devenu kinomorsa qui n’a voulu faire qu’à sa tête, avec des tentations politiques, en plus des dissensions, désertions et les conflits intestins. Mais, lorsque les acolytes Jensen et Kino se sont mis avec Lyonel Lamarre pour administrer ce coup de cochon au reste de la bande. En leur dépouillant de leur statut de co-fondateurs et, allant jusqu’à reformuler le nom du groupe qui est devenu « Fanttoms ». Ce fut la goutte d’eau qui a renversé le vase.

Dans cette période d’instabilité, ‘’Captain Jean’’ s’est fait pragmatique, en retrouvant le chemin de l’université pour parachever ses études. En plus, c’est un père de famille dévoué qui tient à ses responsabilités. Quelqu’un avec qui j’ai toujours partagé la chambre d’Hôtel lors des tournées du groupe, auxquelles je suis associé. Ainsi la musique étant devenue secondaire, puisque son influence avait grandement diminué au sein du groupe, dont les paramètres originaux sont délaissés. Du fait que sa sonorité adaptative  n’était plus de mise, remplacée par celle de J. M. Valcourt. Mais, puisque la musique est dans la peau, il s’est contenté de faire partie d’un ensemble qu’il a grandement contribué à l’élévation. Bien qu’à cette intersection, son rôle de père de famille le satisfait amplement. Revêtant ses pantoufles de ‘’papa gâteau’’ et utilisant ses dons multiples de décorateur, façonnier et touche à tout. Pouvant aménager son propre sous- sol  professionnellement. Et faire fleurir un beau jardin botanique dans sa cour.

Pourtant, la deuxième décennie de ce millénaire n’a pas été clémente envers notre ami qui a perdu sa femme d’un cancer. Le laissant avec deux enfants à élever. Tâche ardue, mais réalisable pour Pierre Provilus qui a mis tout son dévouement dans l’éducation de ses progénitures. Une visite chez lui dans son domicile à Seaview, Brooklyn confortera cette certitude. Malgré que son investissement dans l’entreprise Tonèl Club à Brooklyn s’est envolé en fumée. Encore que cette année l’ait capitulé à la première ligne dans la lutte du covid-19, comme spécialiste en thérapie respiratoire. Une mission qui l’a complètement aguerri, étant au pied du mur dans le traitement des infectés, imbu de l’importance des vies à sauvegarder. Pendant que la musique demeure une accoutumance. Puisqu’il trouve le temps pour prendre part aux retrouvailles du groupe, lorsqu’un ralliement s’impose. Un sacré numéro ce ‘’Captain’’.

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