Massacre des policiers à Village de Dieu, la PNH au bord de l’implosion !

(1e partie)

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Les 5 policiers qui ont été tués à Village de Dieu le vendredi 12 mars 2021

« Suite à la tragédie des policiers tués par des terroristes à Village de Dieu, le Secrétariat général de la Présidence a l’avantage de porter à la connaissance du grand public que le pays observe trois journées de deuil qui commencent à partir du lundi 15 mars jusqu’au mercredi 17 mars 2021 sur toute l’étendue du territoire national, pour saluer la mémoire de ces braves policiers tombés dans l’exercice de leur fonction. Les drapeaux seront mis en berne sur tous les édifices publics. L’ensemble de nos concitoyens doit pouvoir se joindre à cet hommage bien mérité aux policiers Georges Renois Vivender, Désilus Wislet, Eugène Stanley et Ariel Poulard, tués à Village de Dieu.  

Ils étaient engagés dans des opérations visant à rétablir l’ordre, à assurer la sécurité de leurs compatriotes, à combattre la criminalité et le kidnapping et à protéger les vies et les biens, selon la noble mission confiée à l’institution policière par la Constitution du pays. En servant la République, ces policiers sont tombés en Héros, laissant leur famille, leurs enfants, leurs proches, leurs frères d’armes du SWAT, du BOID, de la PNH toute entière et la Nation dans l’émoi et la tristesse », c’est par ce long communiqué de presse que les autorités haïtiennes avaient réagi suite au massacre de cinq agents de la police nationale qui s’était déroulé à Village de Dieu, un quartier de « non-droit » à Port-au-Prince, le vendredi 12 mars 2021. Pourquoi cette boucherie ? Tout a commencé par une décision des autorités gouvernementales et policières de mener une opération de police contre le gang dirigé par un dénommé « Izo 5 secondes » qui a établi son QG au Bicentenaire dans un bidonville appelé Village de Dieu. Depuis des années, ce quartier vit sous l’emprise de divers groupes armés qui ont transformé cette zone en « Centre de détention » pour les personnes kidnappées. 

 D’après toutes les anciennes victimes d’enlèvement, c’est dans ce coin, au bord de la mer, qu’elles ont été conduites et séquestrées durant tout le temps que durent les négociations entre leurs parents et les kidnappeurs. Devenu le point noir de la capitale, Village de Dieu,  avec ses ribambelles de chefs de gangs et principalement ce redoutable « Izo 5 », est placé sous l’œil des autorités qui, finalement, ne savent plus comment s’en débarrasser. Or, il ne se passe pas un jour sans que Village de Dieu ne fasse la « Une » de l’actualité. Surtout à travers ses protecteurs et particulièrement le véritable maitre des lieux, le tout puissant « Izo 5 », qu’on voit sur les réseaux sociaux en train de jouer à la provocation, paradant téléphone en mains à l’intérieur de son fief lançant des menaces et des défis à la police et aux pouvoirs publics en général sans être inquiété. Le pouvoir, un temps très complaisant vis-à-vis de ces malfrats, cherche aujourd’hui par tous les moyens à reprendre le contrôle de cette bande de terre qui longe une partie du boulevard Harry Truman.

Les opérations policières se soldent par des fiascos en série, avec des victimes surtout du côté de la police et très peu d’arrestations.

 Attaqué de toute part par l’opposition, les organisations des Droits humains et même par la Communauté internationale tantôt pour son laxisme tantôt pour sa collusion avec les chefs de gangs, le pouvoir, finalement, ne sait plus comment prouver le contraire et sa bonne foi quand il dit vouloir se détacher de ce cancer qui devient presque incurable pour la société. Depuis quelques temps déjà, plusieurs tentatives ont été faites en vue de déloger ces gangs de leurs différentes bases : Grand-Ravine, Village de Dieu, Martissant, Savien à Petite Rivière de l’Artibonite, etc. Mais toutes interventions des forces de l’ordre se sont traduites par des échecs cuisants. Les opérations policières se soldent par des fiascos en série, avec des victimes surtout du côté de la police et très peu d’arrestations. Jamais les bandits qui colonisent l’ensemble de la zone du Bicentenaire ne se sont sentis menacés et poursuivent comme si de rien n’était leurs forfaits sur la population et les gens qui prennent cette route en rentrant ou sortant des départements du Grand-Sud du pays. Un mois auparavant, deux ressortissants dominicains et un haïtien faisant partie d’une société de Production artistique ont été enlevés dans les parages de Martissant et de Village de Dieu.  

 L’affaire avait fait grand bruit puisque même le gouvernement dominicain avait proposé ses bons offices pour faire libérer ces Dominicains. Finalement, ces trois personnes ont été libérées de façon bizarre et même rocambolesque. Dans la mesure où les autorités haïtiennes qui ont pu obtenir leur libération n’ont jamais donné des explications convaincantes sur cette libération. A part qu’on sait que des proches du pouvoir, entre autres madame Magalie Habitant, ancienne Directrice Générale du SMCRS (Service Métropolitain des Collectes de Résidus Solides) était chargée d’aller récupérer les personnes libérées aux environs de 20 heures au coin des rues Chavannes et Capois à Port-au-Prince. Suite à ce kidnapping qui a fait couler beaucoup d’encre tant à Port-au-Prince qu’à Santo Domingo, en République Dominicaine, et compte tenu que beaucoup de monde avaient pointé du doigt comme d’habitude les proches du pouvoir dans cet enlèvement, le gouvernement voulait marquer un grand coup en s’attaquant au redoutable chef de gang « Izo 5 » de Village de Dieu. Peut-être une façon pour faire taire les critiques et accusations portant sur ses relations supposées avec les groupes armés qui sèment la terreur dans la capitale. 

Ainsi, il avait été décidé au sommet de l’Etat une opération de police d’envergure à Village de Dieu en vue de marquer les esprits et surtout de donner des gages de confiance à l’opposition et à la Communauté internationale (OEA et ONU) qui pressent le Président Jovenel Moïse de reprendre ces zones de « non-droit » dans la perspective des élections générales prévues cette année. Le CSPN (Conseil Supérieur de la Police Nationale) composé d’un ensemble de ministres et de hauts responsables de la police nationale, placé sous la présidence du chef du gouvernement, Jouthe Joseph, en sa qualité de Premier ministre, avait donné son feu vert à Léon Charles, le Directeur général de la PNH pour monter avec son état-Major une opération qui était fixée pour le 12 mars 2021. Il est 16 heures ce vendredi 12 mars 2021, quand débute l’opération policière dont personne n’a jamais pu nous donner le nom. 

C’est là la première anomalie. Parmi tous les responsables policiers que nous avons contactés et qui nous ont donné une foultitude d’informations sur le déroulement de l’opération, aucun ne se rappelle le nom de cette opération qui a coûté la vie à au moins cinq (5) policiers dont quatre de l’unité d’élite du SWAT et un de la Brigade d’Opération et d’Intervention Départementale (BOID) et plusieurs blessés. Autre anomalie dans cette opération qui a mal tourné, l’absence de chiffre exacte du nombre de policiers qui étaient intervenus à Village de Dieu ce vendredi 12 mars. On sait seulement qu’au moins trois blindés légers y étaient présents. Si l’on compte le nombre de policiers que peut contenir un de ces engins, on peut estimer à 18 policiers présents à raison de 6 policiers par blindé. On sait aussi que deux de ces blindés ont été pris dans un traquenard à l’intérieur du Village dans la mesure où les bandits à la solde de Izo 5 avaient piégé les ruelles en creusant d’énormes tranchées.

La récupération du véhicule blindé, le mardi 16 mars 2021, qui représentait un danger pour la population, constitue une première étape.

 Des tranchées qu’ils avaient recouvertes de branchages. Une fois que les blindés eurent investi le Village, c’était impossible pour eux de faire demi-tour. Résultat : plusieurs policiers qui se trouvaient dans les blindés ont été vite encerclés par les habitants du Village et contraints de sortir de leur machine de guerre avant de les conduire aux chefs de gangs. Un des deux blindés a été incendié sur place et l’autre gardé comme prise de guerre. Tandis que le troisième, par miracle, a pu s’échapper de cette souricière. Malheureusement, 18 policiers vont être la proie de la barbarie des membres du gang Izo 5 et d’une partie de la population du Village de Dieu qui s’est faite complice des bandits. Cinq policiers : Ariel Poulard, Georges Renoit, Santey Eugène, Georges Vivender Alexis, Wislet Desilus du corps spécialisé GIPNH (Groupe d’Intervention de la Police Nationale d’Haïti) qu’on appelle SWAT vont être tués dans des conditions absolument odieuses auxquels il faut ajouter 8 autres blessés et un disparu, Lucdor Pierre, dont les autorités ont mis du temps à citer le nom. Les images insoutenables des policiers mutilés, décapités, totalement démembrés, brandies par les  bandits ont fait le tour du monde. Quant à la société haïtienne, elle a été sous le choc et le gouvernement, immédiatement, fut accusé d’avoir envoyé ces policiers à la boucherie. 

Ces images ont provoqué un regain de colère chez une grande partie des citoyens qui assistent impuissants à l’incapacité de la police nationale de venir à bout de ces groupes armés qui tiennent tête à l’Etat. Cette intervention de la police qui est un vrai fiasco et une défaite cinglante pour cette institution a suscité bien des commentaires venant de tous horizons politiques. Pour l’ancien Premier ministre de Michel Martelly, Evans Paul (KP), c’est échec doit être considéré : « comme une catastrophe, une débâcle de la police et de l’image du pays ». Mais surtout de l’opposition qui accuse le pouvoir d’avoir envoyé les policiers dans un Guet-apens en parlant de complicité avec les gangs du Village de Dieu. Pour honorer la mémoire de ces cinq policiers tombés dans l’exercice de leur fonction en voulant « Protéger et Servir », pour reprendre la devise de la police, le Président Jovenel Moïse a décrété trois jours de deuil national sur l’ensemble du territoire national. 

 Mais, le pire, c’est que le chef de gang « Izo 5 » a refusé de livrer aux autorités et à leur famille les corps des policiers martyrisés et prétend même avoir organisé des funérailles dignes de la mémoire des victimes tombées au champ d’honneur. Une attitude qui a provoqué une série de réaction verbales et violentes de la part des deux syndicats de police et du groupe « Fantom 509 » ne comprenant pas pourquoi le gouvernement ne réagit pas plus fermement à l’encontre des assassins qui se cachent à Village de Dieu. Ils ne se contentent pas des propos du Directeur général qui a déclaré sur la page Facebook de la PNH : « La Police Nationale d’Haïti est déterminée à récupérer les cadavres de nos vaillants policiers tombés en héros à Village de Dieu vendredi dernier. La récupération du véhicule blindé, le mardi 16 mars 2021, qui représentait un danger pour la population, constitue une première étape. Les bandits seront poursuivis jusque dans leurs derniers retranchements ». Suite à ce massacre perpétré sur des policiers dans cette zone de « non-droit », la capitale haïtienne a vécu plusieurs semaines de tension provoquée par les policiers eux-mêmes, notamment par le groupe de policiers dénommé « Fantom 509 » et durant lesquelles on a enregistré beaucoup de pertes en matériels et en vies humaines, surtout d’autres policiers.

(A suivre)

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