Lundi 21 et mardi 22 mai 2018, les rues de la capitale étaient bondées de travailleurs de la sous-traitance qui exigeaient du Patronat haïtien l’augmentation du salaire minimum à 1.000 gourdes et également la réintégration avec des compensations pour les 200 ouvriers qui ont été récemment révoqués arbitrairement et illégalement avec accompagnements sociaux pour eux tous sans distinction.
C’est sous le leadership des centrales syndicales Respect des ouvriers haïtiens de la manufacture (ROHAM), de la Plateforme syndicale des usines textiles (Plasit) et de la Centrale nationale des ouvriers haïtiens (CNOHA) que les employés du parc industriel métropolitain ont occupé les rues de la capitale, depuis le Parc industriel Sonapi, pour se rendre à l’avenue Charles Sumner devant les locaux du ministère des Affaires sociales et du Travail (MAST) pour délivrer leur message en passant au Bicentenaire particulièrement devant le Palais Législatif. Arrivés au Parlement, les manifestants ont été reçus par le sénateur Antonio Chéramy, les députés Jean Robert Bossé et Joseph Manès Louis.
Cette manifestation a totalement paralysé la circulation dans toute la zone métropolitaine. Aux cris de : « Nou mande 1000 goud » Nous demandons un salaire de 1000 gourdes, tel a été le slogan prioritaire que les ouvriers scandaient tout au cours du parcours de la marche. «Nous voulons que le gouvernement entende nos voix et satisfasse nos revendications. Nous voulons un salaire de 1000 gourdes par jour »
Alors que les ouvriers protestaient, le président de la république Jovenel Moise pour sa part accompagné des Ministres des Finances, de l’Agriculture et du Commerce rencontrait au Palais National, le lundi 21 Mai 2018, un groupe d’investisseurs du secteur privé des affaires. Cette rencontre n’a pas été faite relative aux revendications des salariés de la misère, mais autour de la nécessité de dynamiser la production nationale afin de favoriser le développement économique du pays.
De quel pays parle t-il et qui veut-il tromper ? Dans un communiqué publié par la présidence on pouvait lire ceci au sujet de cette rencontre au Palais national : « Conscient du rôle fondamental que doivent jouer les investisseurs locaux dans le processus de création de richesses au profit de l’essor économique d’Haïti, le Président Jovenel Moïse entend tout mettre en œuvre pour faciliter la participation du secteur privé des affaires et à la mise en place des mécanismes devant aboutir à l’accroissement de la production nationale de biens et de services ».
« Nous dénonçons un État au service des patrons », déclarait Télémarque Pierre de la Plateforme syndicale des usines textiles pour ajouter ensuite « Aucun ouvrier ne peut vivre avec 350 gourdes dans un pays où l’État n’accompagne pas les plus pauvres. Après avoir payé les frais de transports et de nourriture, il ne reste plus rien à l’ouvrier ».
« Nous dénonçons un État au service des patrons »
Dans la même veine, Camito St-Clair, coordonnateur général de l’organisation Respect des ouvriers haïtiens de la manufacture (ROHAM) enchaînait : « Cette situation dans laquelle vivent les ouvriers du secteur textile devient de plus en plus difficile, vu que les coûts des produits de première nécessité augmentent démesurément ».
Alors que le pouvoir refuse d’augmenter la main d’œuvre à 1000 gourdes comme le demandent les ouvriers, il s’adonne plutôt à une campagne de sensibilisation de l’opinion nationale en vue d’augmenter au mois de juin prochain selon les diktats du Fond Monétaire International (FMI) les prix du carburant, un produit transversal qui impliquera coûte que coûte une augmentation certaine des prix du transport et des produits de première nécessité.
« Les ouvriers ne sont pas favorables à cette augmentation », a averti le gouvernement Dominique St-Eloi, de la Centrale nationale des ouvriers haïtiens (CNOHA) pour ajouter ensuite « cette mesure ne ferait qu’enfoncer les couches les plus vulnérables du pays dans la misère ». Le syndicaliste semble faire la leçon au gouvernement de façon à le forcer de prendre conscience. Ignorait-il que c’est une position de classe, quand le gouvernement épouse le camp des patrons et qu’il n’est aucunement concerné par la vie des masses ouvrières? Sans doute non.