Les ébats d’un sénateur en zing de contrariété

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L'insaisissable sénateur Riché faisant le point avec des membres de la presse. Mal en point dans ses idées laloz, il arrive rarement à faire passer un point. Un démagogue. Point barre.

J‘avais prêté peu d’attention à l’existence même du sénateur Andris Riché, depuis cet échange très vif qu’il avait eu avec Jean Monard concernant sa position relative au départ de Martelly le 7 février 2017. Jamais, le mec n’avait été aussi “superbe” dans ses minables et piteuses voltiges de trapéziste démagogue  au point où Monard agacé par les acrobaties du voltigeur avait parlé de position laloz. Pendant près d’une demi-heure d’échange, Monard n’avait jamais pu déterminer la position exacte du lalozeur, tant il était insaisissable, glissant, kalaloutant. Le mardi 23 janvier dernier, pour mon malheur, j’allais retrouver Riché qui allait se livrer à un de ces spectacles tempêtants, piaffants, lalozants dont il a seul  le secret.

C’était à l’émission Di m m a di w animée par Marvel Dandin, sur les ondes de Radio Kiskeya. Les deux invités du jour étaient Eustache Auguste César et Journald Ornel, deux jeunes ingénieurs de Dame Marie, venus exposer, au nom de leur organisation “Repons”, les problèmes confrontés par la communauté dame-marienne, particulièrement ceux liés à l’environnement, aux infrastructures et au littoral menacé par les avancées de la mer.

Repons” (ce n’est pas un sigle) est une organisation de jeunes intellectuels, professionnels comprenant des ingénieurs, des agronomes, des comptables, des travailleurs sociaux. Leur raison d’être? Observer, rapporter les manquements, la gestion peu satisfaisante ainsi que les déficiences des autorités locales, leurs élus, et les inciter à prendre leur responsabilité et à apporter les corrections et solutions nécessaires. Leurs interventions concernent les problèmes vécus dans leur patelin, Dame Marie; les mêmes observés à l’échelle du reste du pays en ce qui a trait à la démission de l’État par rapport aux priorités de la nation.

César et Ornel ont commencé par exposer le problème du littoral de Dame-Marie. Ils ont expliqué que la mer gagne de plus en plus sur le rivage. Ainsi, au cours de ces trente à quarante  dernières années, les avancées de l’eau ont été telles qu’il ne reste plus grand chose de plusieurs maisonnettes, masures et arbres le long de la côte. Un problème qui s’est aggravé avec le cyclone Matthew. Même, ils ont averti que, à la longue, si la mer devait empiéter sur le centre-ville et atteindre un étang voisin, ce sera une catastrophe humanitaire où quelque 60 000 dame-mariens et leurs propriétés se trouveront sous les eaux. Les autorités vont et viennent, elles sont au courant de la situation, elles voient, mais c’est le cadet de leurs soucis.

Des tronçons de route sont réduits à des chemins, des “tracés”, d’autres sont impraticables, ce qui présente un problème très sérieux de transport des produits vivriers: ignames, patates, bananes plantains, lam veritab, etc. Marvel glisse: “Je pensais que la Caravane  avait atteint Dame-Marie. César de répondre: “Nous en avons entendu parler, mais cette Caravane, c’est de la bonne blague; elle n’arrivera pas”. Quid des autorités locales ou régionales? “C’est la passivité même”, avance Ornel qui enchaîne: “Une route commencée depuis sous Madame Pierre-Louis est restée inachevée jusqu’à présent”. C’est tout dire.

Au fil de la conversation, on apprend que la route allant de Jérémie aux Irois date de l’époque de l’arrière grand-père de César. La route de Jérémie à Dame Marie est “impraticable, se tèt chaje.” La rivière de la zone n’a jamais été curée depuis belle lurette. Des propositions ont été faites au maire dans ce sens, sans lendemain. Kirolo Loiseau, le député de Dame-Marie, longe le littoral chaque jour pour rentrer chez lui. Il est bien au fait des dangers de la mer qui avance année après année. “En êtes-vous satisfait?”, demande Marvel. “À la vérité, il a encore beaucoup d’efforts à faire”, répond César.  C’est un “agent de développement” peu enclin à saisir le taureau par les cornes.

Concernant le réseau électrique du lieu gravement endommagé par le cyclone Matthew, il n’a pas encore été restauré. De l’argent a été débloqué à cet effet dont 2.5 millions de gourdes en principe utilisés pour commencer les travaux de réparation. Les invités de l’émission reprochent au député Loiseau d’avoir confié la besogne à une compagnie dont la lenteur à “atterrir” irrite les attentes. La conversation passe rapidement sur le sénateur “gwo vwa” Sorel Jacinthe et sur Guy Philippe pour qui les deux ingénieurs avaient voté. De fil en aiguille et d’aiguille en kout zegui, Marvel, sans malice, fait allusion à l’ancien sénateur-pasteur Andris Riché.

Est-ce que les deux invités gardent de bons souvenirs du sénateur? “Il a fait beaucoup de choses, mais il y a aussi à son actif des choses que je n’aime pas, répond Eustache César. Ainsi, il y a un pont qui devait relier La Haie à la petite Rivière. En saison pluvieuse, c’est une catastrophe. Lors d’une fête patronale, à La Haie, Martelly s’était adressé à Riché pour lui demander: “Vi n di pèp la kote lajan pon sa a pase”. Et Marvel d’enchaîner: “Qu’a-t-il répondu?” “ Li pat di anyen. Et il s’est esquivé”, a dit César.

En période de crue, la rivière emporte bêtes et humains. Rien n’a encore été fait jusqu’à présent; c’est ce que César reproche à Riché: «Si l’argent pour le pont est encore là, que le sénateur Riché le fasse trouver, ou du moins si c’est une compagnie qui le détient, que le sénateur force cette compagnie à rendre gorge, auquel cas je viendrai à ce micro et m’excuserai auprès du sénateur. Le fait qu’il n’ait encore rien fait, c’est ce qui me dérange. Je crois que c’est à cause de cela que la population l’a sanctionné [aux dernières élections].” On notera que l’invité n’a nullement fait d’accusation tendancieuse à l’endroit du sénateur sanctionné.                                                                                                           La conversation a continué sur la production agricole de Dame-Marie “méprisée” [par l’État], la combativité du peuple haïtien malgré la démission des pouvoirs, la “Caravane” qui devrait enfin montrer le nez à la Grand’ Anse,  les perspectives d’établir des plages, la protection du littoral qui fout le camp sous le regard impassible des autorités concernées, les gravissimes problèmes de distribution d’eau rendus pires par une compagnie censée les améliorer. Alors que Marvel s’apprêtait à recevoir, comme à l’accoutumée,  les interventions et commentaires des auditeurs, s’amène bruyamment dans les studios de Radio Kiskeya, san zatann, sans invitation, l’insaisissable sénateur  Andris Riché.

L’accueil fait par Marvel en dit long sur ce que va être la présence de l’illustrissime intrus à l’émission: “Senatè a pa toujou gen bon pawòl anba bouch li, non”, et d’enchaîner: «Ou sou san w jodi a?”  On ne lui demande pas le pourquoi de sa visite, mais il s’empresse de préciser: “Ce n’est pas pour ça que je suis venu; ce que je voulais dire…” Dès qu’un politicien haïtien s’annonce, s’introduit en français, surtout dans un environnement où des intervenants s’expriment seulement en créole, ou mèt konnen se sou blòf li ye.

En daki, le sénateur reproche aux “deux intellectuels” de n’avoir pas mentionné “les investissements” (sic) qu’il a faits à Dame-Marie “dans tous les domaines” (resic). Marvel interrompt le monsieur et lui fait remarquer que ses invités ont parlé avec respect de lui et mentionné ses côtés positifs. Qu’à cela ne tienne, Riché s’empresse de se réclamer d’être l’auteur “des études” relatives à la construction d’un pont qui devait coûter 74 millions de gourdes. Martelly n’avait pas cet argent dans le budget, mais le bon papa est “passé par un quelconque subterfuge” (sic) pour débloquer 24 millions de gourdes, ce qui  devait faciliter l’érection du pont. Mais le cyclone s’est mis de la partie et a tout détruit.

Il n’y a pas que le mauvais temps à être contre les “études” du sénateur. En effet, “ malheureusement, il y a des agitateurs politiques (sic), ki di que kòm si m ta di w la a, qu’il y aurait eu un argent ki te versé anba a pour ça, ce qui est faux. Mais c’est du passé pour moi”. Vous aurez noté la tortuosité du propos. Marvel interloqué et insatisfait reprend l’impertinence de Martelly à savoir où est passé l’argent du pont. C’est alors qu’ont commencé les piaffades, ruades et rouspétades du sénateur “sanctionné”.

Riché a osé prétendre que “Martelly ne saurait s’arroger le droit de le faire”, entendez, de lui demander où est passé l’argent du pont. Alors, Marvel, face à l’audace du zig à nier la question que lui avait posée Martelly, n’a pas pu s’empêcher de se lâcher et de lâcher: “ Enben, m mele wi la a”. Même, le sénateur sanctionné a avancé, sans rire, que “Martelly est un homme qui a un minimum de respect pour le pasteur Riché” (sic). Laissez-moi me pincer. Riché a-t-il la tête enfouie dans le sable?                          Les invectives obscènes et les injures visant la mère d’une cinquantaine de députés, en particulier celle d’Arnel Bélizaire, en présence du Premier ministre Garry Conille durant la séance de ratification de l’énoncé de sa politique générale, ce vendredi d’octobre 2011? Riché ne s’en souvient pas? Le pasteur oublie-t-il aussi  les grossières obscénités de Martelly à l’adrese de cette miragoânaise qui, lors d’un meeting électoral, avait, à bon droit, osé interpeller ce chien d’homme, ce politichien surnommé Sweet Micky. Vous avez dit ”respect”, sénateur? Quelle ironie et quelle dérision!

Face à l’insistance du sénateur à tempêter, à s’égosiller, à fulminer, à lalozer, Marvel lui rappelle que la construction du pont, la question de Martelly ne faisaient pas l’objet de l’émission et qu’il ne tenait pas à avoir une confrontation [certainement inutile] entre ses invités et Riché. Qu’à cela ne tienne. L’animal a continué à s’embourber dans son intervention mal venue, insistant que c’était lui qui avait reproché à Martelly de ne pas avoir veillé à terminer la construction d’une école à La Haie. Quel rapport ?

Poursuivant avec ses ruades, le sénateur a avancé, que c’était lui qui avait enjoint à  Martelly de donner satisfaction aux dame-mariens en ordonnant l’achèvement d’un pont que lui-même [Martelly] avait commencé depuis longtemps. «Publiquement?” a demandé Marvel. «Oui, publiquement. Si Martelly est à l’écoute, il peut confirmer». Mais, que vaut le témoignage d’un voyou, fieffé menteur par surcroît? Le mec sait bien que l’animal  Martelly est toujours occupé à fouetter ses chats obscènes, et qu’il n’appellerait jamais Radio Kiskeya qu’il assimile, dédaigneusement et sans raison, à «Ti Lili».

Riché continue avec ses rouspétades:  “Martelly a appelé le ministre Rousseau des PTC pour lui dire: “Qu’est-ce qu’il y a? […] Rousseau, m pa konnen ki akwobasi li fè (sic), il a appelé ECOMA” qui a pris les choses en main. Et puis le cyclone est arrivé. Au départ de Martelly, le pasteur prétend qu’il a été voir Privert, lui a fait une sorte de leçon de morale pour le porter à finir le pont: “Il m’a promis d’envoyer quelqu’un là-bas, ce qui n’a jamais été fait”. Est-ce vrai? Était-ce un coup de griffe à Privert?

Toujours obsédé par l’accrochage avec Martelly à La Haie, le pasteur revient à la charge: “Si quelqu’un te dit que Martelly kanpe sou tribune, m kwè se dènye bagay Martelly k ap fè, li pa t ap janm kanpe an public pou l poze m yon kesyon kon sa. Ce sont des jeunes de  Dame-Marie qui l’ont entendu, mais m ta renmen konnen nan bouch kiyès et à quel moment. Il y avait quand même des milliers de gens qui étaient là, il doit y avoir un ‘son’…” Sans doute, il voulait dire un enregistrement que semble posséder César puisqu’il a insinué de le faire entendre sur les réseaux sociaux. Riché, vous êtes dans les zen.                                                                                                                                                                       César intervient, appuyé par Marvel k ap fè bas: “C’est moi qui ai cité le nom du sénateur, je viens de dire que j’ai beaucoup d’estime pour lui, se senatè mwen, m vote l chak fwa li senatè, nous avons parlé de toutes vos réalisations dans la commune […] Martelly est venu en hélicoptère à La Haie où il a été rejoint par le sénateur. Il a donné l’accolade au sénateur Riché. Li di l vin pale ak popilasyon an, di popilasyon kote kòb pon an pase.” C’est clair, n’est-ce pas?

“Je ne sais si Martelly l’a dit avec une intention maligne, mais il l’a dit en public. Il l’a dit, tout le monde l’a entendu”, a poursuivi César. Si je ne dis pas vrai, un auditeur à l’écoute qui voudrait appeler pour infirmer mon témoignage peut le faire, je présenterai alors mes excuses au sénateur. Devant l’insistance de César, Riché a encore fait appel à Martelly: “Je sais que Martelly a horreur de cette station de radio, mais je le mets au défi, en tant qu’ancien président de la république, pou l t a rele la a pou l di l manti sa mousye sot di a”. C’est dire que Riché a du mal à se débarrasser  d’un mal causé par Martelly.

César a alors repris, appuyé par Marvel: “M pa di kòb la nan men w, si kòb la se nan men yon konpayi ke l ye, que le sénateur force cette compagnie à achever le travail”. Alors a commencé une sorte de corps à corps verbal entre César et Riché, ce dernier ne cessant de hauser le ton jusqu’à insinuer une “méchanceté” de la part de César. S’adressant à ce dernier, Riché a eu l’inélégance de dire: “Li di Martelly pase men sou zepòl mwen, quelle horreur! Vous n’étiez pas là, vous ne pouvez pas dire des choses que vous ne savez pas. Talè, w a di li te manyen tete m”. Quelle inélégance! Quelle ressemblance morale à Martelly!

Poursuivant dans l’absurde, le fèwè et le ridicule, Riché s’est laissé aller à dire: ” S’il (César) dit qu’il est de Dame-Marie, li ka di w comment est ma maison. C’est la seule maison sur cette planète (sic) qui reçoit 100 moun pa jou andedan kay mwen […] Moun Dame-Marie konnen lakay mwen 40 a 50 asyèt manje ap sòti chak jou […] des centaines d’enfants m ap peye ekolaj pou yoMen m pat vini pou sa”. Quelle indigence d’esprit! Quelle platitude de comportement! Quelle petitesse d’arriviste, quelle insignifiance de parvenu!

Pourquoi était-il donc venu? Pour dire que Donald Trump est “un con”, que Jovenel l’inculpé n’a pas à répondre du tac au tac au connard, que lui-même Riché [et tous les autres Haïtiens, sous-entendu] n’a qu’à “ramasser son caractère”, s’il lui en reste encore bien sûr, maintenant qu’il est conseiller de Jovenel après avoir été un “bel” équilibriste pendant les cinq ans de Martelly. Et Marvel n’a pas pu s’empêcher, avec raison, de demander au sénateur bienfaiteur, benefactor de la patria: “Se jistifye w ap jistifye silans prezidan an? La a, se konseye a k ap pale…” Et le lalozeur a tout de suite répondu par une de ces acrobaties démagogiques dont il a le secret: “les relations dans ce monde se font de façon bilatérale (sic) et multilatérale” (resic). J’y perds mon latin…

Le corps à corps verbal a repris sur la question de la distribution de l’eau à Dame-Marie, le sénateur s’entêtant à dire qu’il n’y a pas un problème d’eau mais que “l’eau est là” (sic). Là, ki bò? En fait, le  sénateur veut en venir à sa petite personne: “et puis, yon lòt bagay pou w ta di, vous devriez dire par exemple que le sénateur Riché a commencé à construire yon bagay nan La Haie, rezèvwa La Source laMen pwoblèm la mesye, fòk nou aprann apresye, c’est comme ça qu’on peut construire”. Oui, n’empêche que ledit réservoir n’a pas encore apporté l’eau au robinet des Dame-Mariens. Finalement, le lalozeur s’est rendu compte qu’il avait “pris l’émission en otage”, et il a pris la poudre d’escampette.

Tout compte fait le mec n’était pas venu exhorter les Haïtiens à ne pas répondre du tac au tac au con Trump, mais bien pour se laver de l’offense que lui avait faite Martelly: vin di moun yo kote lajan pon an pase. Pourquoi ne l’avoir pas fait au moment même de l’affront? Quel sentiment de culpabilité doit encore habiter le sénateur?  Que sait-il et qu’il ne dit pas? Martelly qui connaît bien le monde de petits flatteurs sans importance gravitant autour de lui, et qui n’a aucun savoir-faire, avait peut-être   voulu délibérément embarrasser le sénateur. Et c’est sans doute la raison pour laquelle Riché, le pasteur en principe au-dessus de tout soupçon, est venu à Radio Kiskeya se défendre avec tant de véhémence, tant de piaffance, tant de rouspétance, tant de fulminance, tant de  tempêtance, tant d’arrogance, tant de suffisance, et, aussi, tant d’insuffisance.

29 janvier 2018

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