Chine: la stabilité à tout prix (1)

Première partie

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1805

“La Chine est l’autre pôle de l’expérience humaine”
André Malraux, 1926

“Pour moi, la Chine est un nouveau pâturage où mes cinq sens vont brouter”
Nikos Kazantzakis, 1935

“Il faut préparer la jeunesse européenne à la part de la Chine qui figure dans son avenir”
Jean-Pierre Raffarin, 2019

Route:
Septembre-novembre 2017 – périple du nord-ouest près des Kazakhstan/Russie, jusqu’au sud près des Laos/Vietnam, via le centre-est. Djungharie (Lac Kanas)-Urumqi (Xinjiang)-Lanzhou (monastère Labrang)-Nanjing-Anhui & Jiangxi (villages traditionnels)-Xiamen (face à Taiwan)-Tulou (vieux immeubles architecturellement intéressants)-Guangzhou (jardin Baomo)-Zhangjiajie (tours de granite)-Chengdu (base du Panda)-Shangri-la (monastère Petit Potala)-Tiger Leaping Gorge-Lijiang (ville d’art)-Shaxi (vieux marché de village)-Kunming-Yuangyuan (rizières en terraces)-Laos

19août 2019. Un bon jour pour commencer ce récit de voyage, j’ai reçu des courriels de deux amies chinoises, d’abord Shery. Eh oui, ils ont l’habitude d’adopter un nom occidental. Une jeune artiste rencontrée lors d’un précédent voyage et qui se remémorait notre séjour chez elle il y a deux ans.

À partir de magazines et même de brochures de compagnies aériennes, j’avais fait au fil des ans une liste d’anciens villages ou bourgs à visiter. Nous avions vu suffisamment Xi’an, Shanghai et Beijing lors de nos trois voyages précédents: l’armée des soldats en terre cuite, le Bund et la Cité interdite avec ses sculptures en marbre de Feu et de Nuage, les symboles omniprésents de la Passion et de la Vanité. «Une flamme a créé tous ces miracles, s’est éteinte, s’est transformée en fumée et a continué comme un nuage. Seul l’esprit qui se souvient et aime peut venir ici, et forcer le nuage à reprendre sa forme originale […] ‘Je déclare la guerre au temps’, crie l’esprit, et il fait tourner la roue du temps, et tout revient à la vie ». C’est ce que l’écrivain grec et ancien ministre de la Culture, Nikos Kazantzakis, a ressenti en errant toute la journée dans l’ancienne résidence des empereurs chinois, 23 ans après que Puyi, le dernier d’entre eux, l’ait quitté (jusqu’à ce que les Japonais le remettre sur le trône pendant 13 ans).

J’ai mis les vieilles villes sur une carte et les ai reliées par le réseau ferroviaire très dense. A commencer par les plus proches de Nanjing où notre autre amie au nom occidental, Rose, vit: Xidi, Hongcun, Fengcun, Chengkan, Shexian, Yuliang, d’anciens villages Anhui. Ainsi que de la province voisine du Jiangxi: Little Likeng et Sixi. Certains de ces endroits sont sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco et sont envahis de visiteurs (chinois), mais nous avons toujours trouvé une chambre sur place, moins difficile que pour un siège dans les trains.

Magasin de création de sacs Heirloom, “combinant techniques chinoise et occidentale avec une juxtaposition parfaite de style et d’élégance, fondé par deux femmes, Lynn Lu et la “Millennial Entrepreneur” Tiffany Yu. Il a fallu deux décennies au Japon après la Seconde Guerre mondiale pour développer son goût du luxe et le réaliser, la Chine le fait en quelques années.

Des centaines de millions de personnes prenaient la route pour les vacances d’octobre, une semaine complète de fête nationale, le 68e anniversaire de la République populaire. Nous avons eu la chance, le premier jour, de trouver des billets pour le train de Nanjing à Huangshan, mais debout, sans place assise. Nous n’aurions pu le faire sans notre chère Rose qui a trouvé des billets par son téléphone, a fait la réservation par son téléphone, a payé par son téléphone, puis est venue avec nous pour récupérer les billets à l’immense gare du sud de Nanjing. Tout est énorme en Chine, des milliers de personnes faisaient la queue devant une vingtaine de guichets.

Avisés les Chinois, sur le quai un homme vendait des petits sièges pour 5 yuans (moins d’un dollar), mais même s’asseoir n’était pas facile dans les couloirs bondés. Un groupe de jeunes jouaient aux cartes par terre dans l’étroit couloir. Sans parler de la fumée de cigarettes, mais rien de comparable à la première fois où nous sommes allés, en 1994, quand nous avons dû quitter un train car nous ne pouvions pas nous voir à travers l’épaisse fumée bleue de chaque homme qui fumait. Ici nous avons passé six heures et demie sur ce petit siège portable. Un homme fumait (jetant par terre le mégot encore allumé) tout en criant dans son téléphone portable.

Rose, l’autre amie qui m’a écrit aujourd’hui, était assistante administrative dans la joint-venture entre l’Université des Postes et Télécommunications de Nanjing et le New York Institute of Technology. Intelligents les Chinois, ils ont conçu le Double First Class University Plan en 2015 pour transformer certaines universités en centres éducatifs de niveau mondial d’ici 2050, et ont recruté des étrangers comme professeurs. Tom, notre voisin de Brooklyn en était un, enseignant la production de programmes télévisés dans cette université. J’ai passé un bon moment à Nanjing malgré un froid glacial, chauffant un grand appartement moderne avec un petit radiateur. Mao avait déclaré qu’au sud de la rivière Huai et des montagnes Qin – latitude 33 degrés nord – il ne faisait pas froid donc pas besoin de chauffage central (dans le nord, ils chauffent entièrement avec des subventions gouvernementales). Et nous avions de la chance, les étudiants devaient se contenter de grosses vestes ou étudier à la bibliothèque. L’automne et l’été sont tout aussi infects: humides comme sous les tropiques.

j’aime les Chinois, même beaucoup, et chaque fois un peu plus.

En plus de ces deux amies m’écrivant le même jour, de régions différentes de la Chine, j’ai commencé cette journée du 19 août 2019 en lisant que Xi Jinping avait eu une mauvaise … journée, enfin, une mauvaise année. C’est le 70e anniversaire de la “Fondation de la Nouvelle Chine”, en octobre. “Les experts” résument les mauvaises nouvelles: une guerre commerciale étatsunienne mordante, les protestations incessantes à Hong Kong contestant son règne et la condamnation internationale du traitement par Beijing des minorités ouïghoures au Xinjiang, la province centro-asiatique de Chine (fin 2019 on ajoutera le coronavirus).

Shery rapporte la même chose, la dernière fois elle et Ray, son mari qui produit une série de mangas très bien faite sur Internet, nous avaient dit que personne n’ose parler de politique, et qu’il y a tellement de corruption. Maintenant elle écrit : “L’économie de la Chine est pire, tandis que la situation politique est plus dangereuse, nous devons donc faire quelque chose pour nous donner plus de chances et d’opportunités à l’avenir”.

Très, très accueillant et serviable le peuple chinois, et curieux sur les Occidentaux. Ici la responsable d’une librairie accueille avec le sourire et du thé une visiteuse étrangère. Elle fait partie d’une très grande chaine, dont le logo “Xin hua Shu dian” (New China Book Store) a été réalisé au pinceau par Mao en 1948. Photo par Alexandra Panaguli.

Le lendemain, le magazine étatsunien Atlantic publiait une longue histoire sur la répression des Ouïghours par Beijing même loin de la Chine. En octobre 2017, notre premier visa de 30 jours allait expirer. Nous nous sommes renseignés à Xiamen (appelée Amoy par les Occidentaux), une grande ville sur la côte en face de Taiwan. Après avoir eu beaucoup de mal à trouver l’emplacement du Bureau de la sécurité publique (c’est-à-dire la police ) traitant des visas, et après avoir déposé quelques formulaires et attendu quelques heures, on nous a dit que le processus de visa prendrait deux semaines. Nous avons laissé tomber. De même, nous ne pouvions pas visiter la «charmante» île de Gulang Yu avec son architecture de l’ère victorienne – l’enclave étrangère au moment des échanges commerciaux du 19e siècle avec l’Europe – parce que nous n’avions pas le droit embarquer sur le ferry pour la traversée de sept minutes avec les Chinois mais aurions dû réserver une coûteuse croisière.

À Hong Kong, le visa nous a pris moins de 24 heures. Heureusement car il n’y avait qu’une seule chambre abordable dans toute cette ville très chère, disponible pour une seule nuit. Mais quand nous avons essayé de rentrer en Chine ma compagne a été arrêtée. Pendant deux heures la police lui a posé des dizaines de questions parce qu’elle avait deux visas turcs sur son passeport, suite à des séjours culturels dans ce pays. Pire, nous avions commencé notre visite en Chine par le Xinjiang. Or, les Ouïghours sont d’origine turcique avec beaucoup de traditions communes et d’importants liens commerciaux entre la Turquie et le Turkestan oriental comme les Ouïghours appellent leur région. Donc les officiels chinois voient avec méfiance tout rapport avec la Turquie où vivent de nombreux Ouïghours susceptibles, selon eux, d’activités anti-chinoises ou pro-indépendance. Ma compagne – qui n’a rien ni de Chinois ni de Turc – aurait pu suivre un programme d’entraînement secret!

Mais les officiels savent aussi que le Xinjiang est une destination touristique, avec les lieux de la Route de la Soie et le parc national de Kanas. J’ai dû détailler tout notre itinéraire (heureusement j’avais gardé l’entrée du parc national et du musée ainsi que les billets de train) , et ils ont parcouru toutes mes cartes mémoire d’appareil photo.

ils nous ont emmenés avec nos lourds bagages sur leurs motos-taxi, parés de leurs casques noirs.

Je dois ajouter que c’était le deuxième jour du 19e Congrès du Parti communiste à Pékin – qui a lieu tous les cinq ans – et les responsables de la sécurité devaient s’inquiéter et agir selon des instructions venant de haut. Quelques jours plus tôt, à Xiamen, nous attendions notre train pour les Tulous (voir plus loin) dans la gare principale, comme d’habitude un immense hall. Soudain nous avons vu du personnel assembler une vingtaine de tables et des dizaines de barrières métalliques à l’une des sorties des quais, puis une trentaine de femmes et d’hommes en uniforme sont arrivés. Ils ont formé une longue file de voyageurs, ouvert chaque sac, vérifié les papiers. Il y a eu une scène de cris avec une femme jetant sa carte d’identité au sol et hurlant tandis que les fonctionnaires essayaient de la calmer. J’ai demandé à un membre du personnel où allait le train: «À Beijing», c’était une semaine avant le Congrès du Parti communiste.

Même topo à Urumqi – pardon, Wulumùqí, le nom chinois – la capitale de la région autonome ouïgoure du Xinjiang. Dans la nouvelle gare, toute illuminée et bien sûr immense, il y avait trois contrôles de sécurité approfondis, plus stricts que dans les aéroports. Ils ont confisqué notre spray déodorant et bien sûr notre canif. Et sur les routes menant au lac Kanas, il y avait des caméras surplombant la route à intervalles réguliers, et ce, même dans un endroit qui n’aurait pas pu être plus isolé, niché entre le Kazakhstan, la Mongolie et la Sibérie. Il y avait des policiers et des soldats armés aux grands carrefours comme si on était en état de siège. Plus vers le nord, des postes de police barricadés avec fers et barres, deux fois on a dû sortir du bus pour un contrôle. Habitués aux cartes d’identité chinoises le jeune policier ne savait même pas comment ouvrir nos passeports, encore moins les déchiffrer.

Mais j’aime les Chinois, même beaucoup, et chaque fois un peu plus. Comment pourrais-je ne pas l’être étant un Occidental. Comme l’a dit Tom, “à New York, personne ne me regarde, ici tout le monde me regarde!” Quand nous logions au Hongkeng Tulou (j’y reviendrai) un car de touristes chinois est arrivé. Toutes des femmes d’âge mûr, eh bien, elles sont toutes venues vers moi, ont demandé si elles pouvaient prendre une photo avec moi, et une par une, elles ont posé à côté de moi. Mes mâchoires étaient fatiguées de sourire – non seulement pour la photo, mais pour cette situation divertissante.

Et tant de cas où ils ont été utiles et accueillants, comme à Wuyuan lorsque nous avons été déposés à un grand carrefour, au milieu d’une autre grande ville. Après avoir été vu le prix de 700 yuans (plus de 100 euros) au Boyue Huizhou Resort Hotel, un hôtel d’affaires, j’ai demandé à un taximan un endroit moins cher. Ne parlant pas anglais il a interpelé une femme qui passait avec deux adolescentes, toutes souriantes. Elles se sont empressées de tapoter sur leurs téléphones portables à la recherche d’hôtels moyens dans la région où nous étions, en ont trouvé un, les ont appelés, ont obtenu un prix (un cinquième de l’autre), puis nous ont emmenés là, pas très loin, et nous ont escortés jusqu’à notre chambre.

Dans un autre patelin, Chen Youlan, la jeune femme dirigeant la librairie Xinhua, nous a fait asseoir et nous a apporté du thé avec des arachides bouillies, très savoureuses. Nous étions les seuls clients, pourtant, c’est une société paraétatique, avec … 14 000 magasins, dont un dans le Queens à New York, et un gratte-ciel (la ville du livre de Jiefangbei) à Chongqing, une autre grande ville (5 millions d’habitants) que nous avons traversée à proximité après le fleuve Yangtze. Le logo composé de quatre lettres chinoises “Xin hua Shu dian” (New China Book Store) a été réalisé au pinceau en 1948 par Mao …

la punition par humiliation publique a toujours fait partie des cultures chinoise et même des autres.

Et je n’oublierai pas nos deux anges gardiens à Wushan sur le fleuve Yangtze. Rencontrés à notre descente de bus de Yichangdong, ils nous ont emmenés avec nos lourds bagages sur leurs motos-taxi, parés de leurs casques noirs. C’était le soir et il n’y avait pas d’hôtel en vue, seulement des bâtiments et des magasins, tous fermés. Nous avons dévalé vers le bas de cette ville construite sur le flanc raide d’une montagne. Le premier hôtel était un 7 Days Inn au 3ème étage d’un grand immeuble (c’est souvent le système en Chine, un étage de bâtiment entier converti en hôtel). Mais ils ont refusé de nous loger. Naturellement personne ne parlait un mot d’anglais mais nous avons compris qu’ils n’avaient pas de permis pour accueillir des étrangers, du moins des personnes sans carte d’identité chinoise.

Nous sommes remontés sur les motos, et cette fois ils nous ont emmenés dans un endroit vraiment luxueux au bord du fleuve Yangtze, l’hôtel Maple. Très détendus, les deux sont entrés avec leurs casques sur la tête dans l’endroit le plus chic de la ville, et se sont assis dans des fauteuils pendant que je marchandais avec la réceptionniste, un peu décontenancée, n’étant pas habituée aux motos-taxis mais aux limousines, ni aux bagages sur un chariot. Trop cher. Le troisième hôtel était le bon. Et à nouveau le duo a attendu que nous ayons fini l’enregistrement. Ils ont hésité à prendre un pourboire, et ont exigé très peu pour cette longue course. Je devrais mentionner ici que nous n’avons jamais été roulés en Chine, même pas par des chauffeurs de taxi dans des régions isolées.

La chambre avait de grandes fenêtres sur la rivière Daning qui se jette un peu plus loin dans le Yangtze, dont nous pouvions voir le pont illuminé. A l’intérieur nous regardions le petit écran de la télé avec un programme sur … les chauves-souris où nous avons appris qu’elles sauvent la tequila mexicaine en mangeant l’insecte qui détruit l’agave. C’était un documentaire BBC Earth de 2014 de David Attenborough, pendant lequel nous sirotions de la bière au nom inconnu puisque tout était en chinois, et grignotions des “Chongqing Strange-Taste Horsebeans”, en anglais sur l’emballage.

La télévision d’État CCTV, maintenant CGTN (China Global TV Network), présente des programmes intéressants en anglais. Nous nous sommes rapidement familiarisés avec deux de leurs speakerines, Tian Wei du programme World Insight avec ses bajoues, et Liu Xin interviewant un colonel dans un anglais impeccable. Ils étaient dans un pays africain, la zone conflictuelle du Darfour au Soudan, la première fois que les casques bleus chinois envoyaient un hélicoptère militaire à l’étranger. Ils se lancent des fleurs dans ces programmes mais c’est élégamment présenté. Puis elle a montré une fusillade à Vegas, un bon reportage avec des journalistes et des interviews, disant que le problème en “Amérique” est récurrent et toujours le même: absence de contrôle des armes. Ils ont également brièvement parlé de l’accord nucléaire iranien et des 461 millions de touristes intérieurs chinois.

La première fois que les casques bleus chinois envoyaient un hélicoptère militaire à l’étranger c’était dans la zone conflictuelle du Darfour au Soudan en 2017.

Selon les nouvelles en anglais du People’s Daily, “La Chine est devenue la plus grande source de personnel de maintien de la paix parmi les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies et le deuxième contributeur au budget des opérations de maintien de la paix des Nations Unies depuis qu’elle participe aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies en 1990”.

CCTV avait bien sûr un grand programme sur le colloque quinquennal du Parti communiste, mettant l’accent sur le bon travail qu’il fait pour l’environnement, pour la démocratie, et répétant qu’il s’agit du socialisme avec des caractéristiques chinoises. Il énumérait également ses réalisations: il y avait 50 millions de classes moyennes quand le parti a introduit la propriété privée en 1997. En 2017, ils étaient 200 millions, chiffre qui devait monter à 400 millions cette année. En 1997 il y avait une ligne de train express, en 2017 il y en avait 30, tandis que la Chine a rejoint l’Organisation mondiale du commerce en 2001.

Parlant toujours dans un anglais parfait Liu Xin a interviewé l’Etatsunien Joel Rubin, ancien sous-secrétaire d’État adjoint et actuellement professeur auxiliaire à l’Université Carnegie Mellon ainsi que commentateur régulier de la politique étrangère des États-Unis, et le Britannique Martin Jacques de l’Université de Cambridge, ancien rédacteur en chef de Marxism Today, et auteur de «Quand la Chine gouvernera le monde», où il soutient qu’au 21e siècle, «l’Occident ne sera plus dominant et il y aura de nombreuses façons d’être moderne. Dans cette nouvelle ère de ‘modernité contestée’, l’acteur central sera la Chine”, qui, ajoute-t-il, «n’est pas un État-nation conventionnel mais un ‘État-civilisation’».

Cela a été suivi d’un programme d’affaires sur Alex Xu, un expatrié chinois marié à une Etatsunienne qui est rentré chez lui à Shanghai pour lancer le restaurant haut de gamme Baoism où le petit pain cuit à la vapeur – l’humble baozi – “est élevé au-dessus de son rôle de base du petit-déjeuner, notamment dans les restaurants à la page», et sur deux femmes, Lynn Lu et la “Millennial Entrepreneur” Tiffany Yu, qui ont lancé la société créatrice des sacs Heirloom,«incorporant un travail de treillis traditionnel chinois subtilement cousu avec une finition trapunto, créant une juxtaposition parfaite de style et d’élégance ”

Les produits de luxe doivent être uniques, les goûts chinois deviennent de plus en plus sophistiqués. Il a fallu deux décennies au Japon après la Seconde Guerre mondiale pour développer son goût du luxe et le réaliser, la Chine le fait en quelques années.

Tout comme les Français, les Britanniques, les Russes et les Arabes, les Chinois utilisent désormais pleinement le “soft power”, soit l’aspect culturel. Ces programmes TV chinois sont diffusés dans pas moins de 140 pays et en 65 langues. En parallèle, il y a 525 Instituts Confucius dans le monde disséminant la culture et la langue chinoises, contre 86 Institutos Cervantes (Espagne) dans 45 pays, 159 Goethe Instituts (Allemagne) dans 50 pays (le premier ouvert à Athènes en 1952 …), et 850 Alliances Françaises dans 137 pays. Bien que les Chinois aient commencé tard (à Séoul en 2004), ils ont rattrapé et dépassé tous les autres avec leur rythme infernal habituel, et avec l’objectif de disposer prochainement de 1000 instituts.

Au-delà des actualités, parfois la chaîne de télévision officielle met en scène les aveux de fonctionnaires, journalistes ou hommes d’affaires accusés de corruption. Les critiques disent que ces gens ont simplement critiqué le système qui veut alors décourager une telle pratique. Et que c’est de toute façon humiliant, comme pendant la révolution culturelle quand des fonctionnaires tombés défilaient dans les rues avec une pancarte et la tête rasée.

Il faut tempérer, la punition par humiliation publique a toujours fait partie des cultures chinoise et même des autres.« Ces pratiques d’aveux publics ont existé très longtemps chez les chrétiens. La spécificité chinoise tient au fait que la confession ne s’effectue pas devant Dieu, mais devant un pouvoir laïque ». Comme avec le voile des femmes ou les guerres de religion que les Occidentaux critiquent tant et désignent les musulmans du doigt, les mêmes pratiques existaient jusqu’à très récemment en Occident, notamment la boucherie en Yougoslavie – au cœur de l’Europe – dans les années 1990.

(A suivre)

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