Durant une interrogation devant la chambre des députés, l’ancien ambassadeur des Etats-Unis, Pamela White, questionnée à propos de ce qu’on devrait faire de Jovenel Moise, déclarait tout bonnement « il faut l’isoler et nommer un Premier ministre à sa place ».
Quelle signification doit-on donner au mot « isoler », quand bien sûr, il est utilisé dans un langage diplomatique par l’ambassadeur White, qui de plus, avance que Jovenel ne démissionnera pas ? N’est-ce pas pour dire qu’on n’a pas d’autre choix que de l’isoler.
Signalons que les recommandations de l’ambassadeur White ont été sans l’ombre d’un doute exécutées puisque le rôle que joue actuellement le Premier ministre Ariel Henry est bien l’option qu’elle essayait de vendre en mars 2021 devant la commission des affaires étrangères de la Chambre.
Dans la foulée, le mercenaire haïtien Rodolphe Jaar arrêté en République Dominicaine et extradé aux Etats-Unis n’a-t-il pas dévoilé, durant son interview au New York Times que sa motivation de participer au crime contre le 58e président d’Haïti relève d’une certaine assurance car on lui avait dit qu’il (le crime) bénéficiait du soutien total des États-Unis.
L’ex- militaire colombien, Mario Antonio Palacios Palacios, formellement accusé dans l’assassinat du président Jovenel Moïse, chez lui le 7 Juillet 2021, a affirmé qu’il a été recruté pour assurer la sécurité et participer à une opération pour arrêter le président Jovenel Moïse, c’est-à-dire à un coup d’état.
Enfin de compte, pourquoi a-t-il décidé de coopérer avec la justice américaine plutôt qu’avec celle d’Haïti où il a commis le forfait ? Selon l’affidavit présenté au juge fédéral, c’est lui-même qui a demandé « après un certain temps de parler aux forces américaines » pour faire la lumière sur l’affaire. Ainsi Palacios a été la première mise en accusation officielle dans cette affaire, non par le juge d’instruction haïtien Garry Orélien mais par une juge fédérale américaine Alicia Otazo-Reyez, le 4 janvier en Floride pour complot en vue de tuer le président haïtien Jovenel Moïse.
Est-ce que cela veut dire que les Etats-Unis étaient partie prenante de la planification du crime ? Mais pourquoi soudainement, 6 mois après l’assassinat, ils y sont plus intéressés, ce qui n’a pas été le cas tout au début de l’enquête ? Est-ce du fait que la justice haïtienne n’a pas les moyens et qualités requis pour faire aboutir le dossier ou bien parce qu’on ne lui fait pas confiance ? En fait, quels sont les intérêts des Etats-Unis dans la poursuite de certains hommes impliqués dans l’assassinat du 58e président d’Haïti ?
Le sénat vient d’introduire un projet de loi “Haiti Development, Accountability, and Institutional Transparency Initiative Act (S. 1104)” qui doit être soumis à la Chambre des représentants réclamant que l’administration Biden mette en branle les services préposés, le FBI, la CIA, DHS, à faire la lumière sur l’assassinat du président Jovenel Moïse, le 7 juillet 2021.
N’est-ce pas un rapport d’autopsie de cet assassinat que demande le Congrès américain ? Nous doutons sérieusement de l’efficacité de ce projet de loi applaudi par le très réactionnaire sénateur Marco Rubio (R-FL) et Ben Cardin (D-MD). Cette proposition de loi suggère qu’« au plus tard, 90 jours après la date de promulgation de la présente loi, le secrétaire d’État, en coordination avec le procureur général, le secrétaire à la Sécurité intérieure et le directeur de l’Agence centrale d’intelligence, soumet à la commission des relations extérieures du Sénat et à la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants un rapport sur l’assassinat, le 7 juillet 2021, de l’ancien président d’Haïti Jovenel Moïse »
Rappelons que l’ancien ministre des Affaires étrangères Claude Joseph avait bien sollicité une enquête internationale, est-ce dans cette perspective que fonctionnent les Etats-Unis ? Car un rapport exigé que « 180 jours après la présentation du rapport requis par la sous-section, le Secrétaire d’État, en coordination avec l’Attorney General, le Secrétaire à la sécurité intérieure et le Directeur de la Central Intelligence Agency, soumettra à la Commission des relations étrangères du Sénat et la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants une version actualisée du rapport qui inclut tout développement significatif lié à l’assassinat de l’ancien président d’Haïti Jovenel Moïse. Et cette loi, doit inclure une description détaillée des événements qui ont conduit à l’assassinat de l’ancien président Jovenel, une description et un résumé de l’enquête, une identification des dates clés et les noms des personnes étrangères liées à l’assassinat et à l’enquête sur l’assassinat. Une description du soutien apporté par les États-Unis aux les efforts déployés par les autorités haïtiennes pour enquêter sur l’assassinat de l’ancien président Jovenel Moïse, une évaluation de l’indépendance et de la capacité des autorités haïtiennes à enquêter sur l’assassinat de l’ancien président Jovenel Moïse. Une description de l’existence de toutes personnes étrangères précédemment employées par ou ayant servi de contracteur ou d’informateur pour le gouvernement des États-Unis américain impliqués dans l’assassinat de l’ex-président Jovenel Moıse. Cette loi veut aussi que les parlementaires américains obtiennent également une description et l’identification des personnes étrangères impliquées dans l’exécution et la planification de l’assassinat de l’ancien président Jovenel Moïse et une évaluation des intentions de ces personnes étrangères ».
A quelle fin se demande plus d’un ? Est-ce pour cacher la vérité, brouiller les pistes sinon pour rassurer qu’aucune institution de l’Etat américain ne soit impliquée ? Sans doute le sénat aurait des soupçons que des personnalités officielles de l’administration Biden seraient amplement impliquées. Il ne reste que d’attendre le dénouement.
Le gouvernement haïtien a-t-il désisté et demande aux Etats-Unis de faire le travail en son nom ? Ce sont autant de questions qu’il faut poser de façon à comprendre ce qui est en train d’être concocté.
Qui vont croire alors, aux trouvailles des Etats-Unis ? Auront-ils le courage d’affirmer leur implication à savoir que les bourreaux étaient à leur solde ? De toute façon, la précipitation avec laquelle les Etats-Unis ont pris en main le dossier d’assassinat de Jovenel Moise laisse à désirer et fait peur. Car ce n’est ni pour rendre service à Haïti ni à son peuple qui aimeraient bien connaître tous ceux qui sont vraiment impliqués dans le financement de ce projet criminel.
La cotisation de Jaar à hauteur de 130 000 $ environ ne représente rien de la somme mise à contribution. Qui va donc nous dire qui sont les autres contributeurs financiers de ce crime ?
Par ailleurs, pas de nouvelles de Samir Handall lui arrêté en Turquie ; mais la dernière arrestation en date est celle de l’ancien sénateur John Joël Joseph, qui avait fait l’objet d’un avis de recherche de la Police nationale d’Haïti dans le cadre de cet assassinat, et qui a été arrêté à la Jamaïque, le samedi 15 janvier par la police jamaïcaine. Il va sans doute, à l’instar de Jaar et Palacios, être extradé également aux Etats-Unis. Le ministre de la Justice et de la Sécurité publique (MJSP), Berto Dorcé, un homme sans scrupule, en a fait ouvertement la demande aux autorités américaines en déclarant, au journal de Wall Street « Le gouvernement haïtien souhaitait réclamer l’extradition de M. John Joël Joseph, de la Jamaïque, toutefois […], il est préférable que les autorités américaines s’en chargent pour l’instant »l