Le GARR s’adresse aux Parlementaires haïtiens
Lettre ouverte adressée aux Parlementaires haïtiens autour de la nécessité de ratifier la Convention Internationale sur la Protection des Droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles
Honorable parlementaires,
A l’occasion de la Journée Internationale des Migrants, célébrée le 18 décembre de chaque année, le GARR entend attirer votre attention sur la nécessité pour le Parlement haïtien de ratifier la Convention internationale sur la Protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 18 décembre 1990 dans sa résolution 45/158. En effet, l’institution de promotion et de défense des droits des migrants salue le premier pas déjà fait par Haïti avec la signature de cette Convention en décembre 2013. Il croit qu’il serait opportun pour le pays d’achever le processus en la ratifiant. Ce qui rendra effective la volonté d’avoir un cadre protecteur en faveur des migrants.
Aujourd’hui, Haïti est un pays d’émigrants. Mis à part les déplacements de populations internes qui sont en constante évolution pour de multiples raisons, l’émigration haïtienne prend une ampleur surprenante. Une bonne partie de la population vit à l’extérieur ; les estimations se chiffrent à plus de trois millions d’Haïtiens. Certains se retrouvent dans des pays d’accueil où le racisme et la xénophobie sont très marqués et se traduisent en des actes d’abus, de cruauté et de discrimination. Les femmes et les enfants sont encore plus exposés dans les mouvements migratoires, non seulement par ce qu’ils/elles sont des étrangers mais aussi à cause de leur sexe ou de leur âge. Les activités de monitoring du GARR au niveau de la frontière haïtiano-dominicaine montrent que ces deux groupes- quoiqu’en nombre inférieur par rapport aux hommes, ont vécu des expériences qui affectent à jamais leur corps et leur esprit. De janvier au 13 décembre 2017, le GARR a enregistré 31 cas emblématiques de violations à l’encontre des migrantes et migrants haïtiens dont 7 cas d’assassinat. Les 24 autres se réfèrent à des sévices corporels. Les pays concernés sont la République Dominicaine, le Brésil et le Chili.
La protection des droits et de la dignité des migrants et migrantes haïtiens est au centre des préoccupations des institutions de droits humains qui accompagnent les personnes migrantes. La ratification de la convention leur donnera un argument crucial dans les actions de plaidoyer auprès des Etats qui sont les principaux récepteurs de migrantes et de migrants haïtiens, notamment la République Dominicaine.
Honorables parlementaires, le GARR estime que la Convention de 1990 fournit un cadre juridique international qui permet d’analyser et d’orienter les politiques migratoires. Avec un tel instrument, l’Etat haïtien pourra entreprendre des pourparlers avec ses homologues étrangers pour d’éventuelles coopérations. Il sera en mesure d’établir de manière proactive des accords bilatéraux en matière de migration de travail et prévenir d’autres phénomènes tels que la migration irrégulière, le trafic et la traite de personnes.
De nouvelles tendances émergent et présentent un tableau sombre du parcours migratoire des ressortissantes et ressortissants haïtiens qui utilisent les pays de l’Amérique latine comme zone de transit et de destination. Même s’il est actuellement difficile de donner des chiffres par rapport au nombre de migrants haïtiens irréguliers, les observations des organisations montrent l’urgente nécessité de faire face à ce phénomène.
La ratification de la Convention facilitera également la garantie des mesures de protection en faveur des immigrantes et immigrants qui sont sur le territoire national. Le GARR reçoit régulièrement des personnes de nationalité étrangère notamment des Dominicains, des Nigérians, des Cubains, des Colombiens, pour ne citer que ceux-là, qui nécessitent de la protection et de l’accompagnement. Etant un pays ouvert, Haïti renforcera son cadre de protection en adaptant les lois nationales sur la migration aux prescrits de la Convention.
Le GARR en tant qu’institution qui s’investit depuis plus de 26 ans dans la promotion et la défense des droits des migrants, vous invite, Honorables parlementaires, à affirmer votre engagement unanime par rapport aux valeurs substantielles partagées et reconnues, qui sont inscrites dans la Convention, en faveur de tous les hommes et les femmes même en étant des Travailleurs migrants.
Tout en vous souhaitant de joyeuses fêtes de fin d’année 2017, le GARR vous prie d’agréer, Honorables parlementaires, ses salutations patriotiques.
Saint-Pierre Beaubrun
Coordonnateur
GARR (Groupe d’Appui aux Rapatriés et Refugiés) 15 décembre 2017