Transition politique en perspective, confusion et division dans l’opposition! (4)

(4e partie)

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Walsonn Sanon, un célèbre inconnu du pays, avait été contacté au nom du Secteur Démocratique et Populaire (SDP) par des partis proches du pouvoir en vue de trouver un accord politique entre le régime et l’opposition

 Les Partis Fusion des sociaux démocrates, OPL (Organisation du Peuple en Lutte), MOCHRENAH (Mouvement Chrétien pour une Nouvelle Haïti), AAA (Ayiti An Aksyon), VERITE, Veye Yo, INIFOS, INITE et bien entendu le fer de lance de l’opposition, SDP (Secteur Démocratique et Populaire), la plupart de ces partis et mouvements politiques entendent obtenir le départ du chef de l’Etat si possible avant le 7 février 2021. Mais, conscients de la faiblesse de l’opposition en général ces dernier temps, ils préfèrent tabler sur cette date qu’ils croient être le bon timing pour imposer la « Transition », d’où la création de la « Direction Politique  de l’Opposition Démocratique » dont on ignore qui en est le chef, c’est-à-dire qui a pris le leadership de cette opposition qui peine à se faire représenter par un chef unique, une autorité et une voix forte qui fait cruellement défaut à l’ensemble de l’opposition comme on l’a décrit dans les textes précédents. 

 Plusieurs des chefs de partis qui ont contribué au lancement de cette direction collégiale avaient fait le déplacement au Le Plaza. Parmi eux l’ex-sénateur de l’Artibonite, Youri Latortue et dirigeant de AAA qui a souligné qu’« Il n’existe pas de système électoral, par conséquent aucune élection avec Jovenel Moïse n’est possible ». D’autre part, Edgard Leblanc Fils, ancien Président de l’Assemblée Nationale et Coordonnateur général de l’OPL qui apparaît de plus en plus comme le potentiel leader de la Transition, vue que Jean-Charles Moïse, le Président du Parti Pitit Dessalines semble exclure lui aussi toute participation dans le futur gouvernement de transition, croit que la « Transition commence le moment à partir duquel la norme constitutionnelle et le fonctionnement normal des institutions ne sont plus respectés. La transition prend fin jusqu’au retour à l’ordre. Or, depuis janvier 2020, avec un Parlement caduc, le pays fonctionne hors du cadre constitutionnel. 

 Contrairement à l’article 150 de la Constitution, le chef de l’État s’attribue tous les pouvoirs, nous sommes déjà en transition. En ce sens, avant que le Président quitte le pouvoir, il revient aux acteurs de réfléchir sur l’orientation de la transition, le dialogue national à initier. » Enfin, très loquace lors de cette rencontre au sommet ce 15 octobre, l’ancien sénateur des Nippes, Edgard Leblanc Fils, estime que c’est le Président de la République qui impose la transition à la société non l’inverse. « Certains laissent croire que c’est l’opposition qui ne jure que par la transition. En réalité, si nous sommes obligés d’en parler, c’est parce que Jovenel Moïse l’a voulu ainsi et l’a imposé à la société.» Mais, cette belle unité de façade cache mal la mésentente qui existe au sein de l’opposition plurielle et le cavalier seul que continue de faire le leader du Parti Pitit Dessalines, Jean-Charles Moïse, refusant pour le moment de participer à la « Direction politique de l’opposition démocratique ». L’ancien Maire de Milot et ex-sénateur veut rester cohérent dans sa ligne solitaire tout en restant ferme sur sa position vis-à-vis du pouvoir en excluant toute négociation et discussion avec les partis politiques proches du pouvoir ni avec le Président Jovenel Moïse. 

selon Nènel Cassy, le leader du Parti Pitit Dessalines joue le trouble-fête et cherche à affaiblir l’opposition devant le pouvoir.

 Cette ligne lui permettra, pense-t-il, d’être au-dessus de la mêlée durant la Transition. En effet, Jean-Charles Moïse veut garder sa liberté de parole et d’action et ce pour pouvoir se porter candidat à la présidence sans entrer dans des conciliabules, de « Primaire » et négociations avec le reste de l’opposition. Une stratégie risquée dans la mesure où si l’opposition estime que le seul moyen de battre un candidat venu du camp du PHTK serait de présenter une candidature unique cela peut faire du tort au Président du Parti Pitit Dessalines comme à celui de l’opposition plurielle. Gare à la répétition de 2016 ! Mais, il y a pire dans cette confrontation inter-opposition. Après la polémique et la division qui s’ensuivent suite aux révélations du dirigeant du parti du Président Jovenel Moïse PHTK, Line Balthazar, qui admet qu’il y a bien des discussions en cours et ce depuis quelques mois entre son Parti et divers leaders politiques de l’opposition, la dissension ne cesse de déchirer l’opposition plurielle et particulièrement la branche dite « Secteur Démocratique et Populaire » que dirige le trio André Michel, Marjorie Michel et Nènel Cassy. Une division qui a occasionné la démission de l’ancien Président de l’Assemblée Nationale, Dr Kelly C. Bastien, de cette entité suivie d’une cohorte de leaders politiques locaux dans le grand Nord du pays en soutien aux deux anciens sénateurs de la région : Kelly C. Bastien et Evallière Beauplan lui aussi mis en cause par les responsables du SDP dans l’affaire de négociation avec le pouvoir. Pour ne rien arranger dans cette division interne et faisant à juste cause l’affaire du Président Jovenel Moïse, c’est au tour de Jean-Charles Moïse d’essuyer les attaques des dirigeants du Secteur Démocratique et Populaire qui l’accusent de faire le jeu du chef de l’Etat en refusant de se joindre à l’opposition plurielle lors des manifestations du 17 octobre et 18 novembre 2020 marquant d’une part le 214e anniversaire de l’assassinat de l’Empereur Jean-Jacques Dessalines, le Père Fondateur de la nation et d’autre part le 217e anniversaire de la bataille de Vertières. 

 Ainsi, après Kelly C. Bastien qui a rendu son tablier à ce groupe qui l’accuse de traitre, c’est à Jean-Charles Moïse de subir les vindictes de l’ancien sénateur des Nippes, Nènel Cassy, qui ne comprend pas qu’il ait préféré manifester au Cap-Haïtien au lieu de venir grossir les troupes des manifestants dans la capitale le 17 octobre afin de pousser le Président de la République à la démission et le 18 novembre et qu’il ait choisi de se rendre devant l’ambassade américaine au lieu de prendre la route de Delmas vers le Palais national.  De fait, selon Nènel Cassy, le leader du Parti Pitit Dessalines joue le trouble-fête et cherche à affaiblir l’opposition devant le pouvoir. Une attaque qui a mis en rage Jean-Charles Moïse qui, lors d’une Conférence de presse lundi 19 octobre 2020, a dit sans citer de nom tout ce qu’il pense, et de manière ironique et moqueuse, des chefs du Secteur Démocratique et Populaire « Jai honte pour eux » dit-il, tout en profitant pour annoncer des mobilisations générales à travers tout le territoire à partir du 17 et 18 novembre jusqu’à la fin de l’année 2020 afin de forcer le Président Jovenel Moïse à quitter le Palais national et prendre la fuite. 

 Dans la foulée de la polémique, la division et la confusion qu’offre l’opposition plurielle à l’opinion publique, on apprend qu’un certain Walsonn Sanon, un célèbre inconnu du pays, avait été contacté au nom du Secteur Démocratique et Populaire (SDP) par des partis proches du pouvoir en vue de trouver un accord politique entre le régime et l’opposition. Information aussitôt démentie par Me André Michel et ses amis qui, dans une note, déclarent que ce militant politique n’a jamais participé aux réunions ni aux activités du SDP depuis au moins une année. En outre, celui-ci n’a jamais eu ni mandat ni mission de représenter le SDP dans une quelconque rencontre avec les partis politiques pro-Jovenel. Watsonn Sanon, sans hésiter, a répondu à Me André Michel qu’il traite de menteur et d’amnésique : « André Michel peut souffrir d’une certaine amnésie. C’est ce qui explique probablement pourquoi il a oublié d’où nous sommes sortis avec le secteur. Il a aussi oublié le rôle que j’ai toujours joué au sein du Secteur démocratique jusqu’à notre dernière réunion. 

Walsonn Sanon révèle qu’il a été à l’origine de la création du SDP et que personne ne peut lui enlever ce droit

La réunion qui avait abouti à la création de la commission de passation des pouvoirs a eu lieu à mon bureau à Delmas 75. C’était au mois de janvier ». Enfin, ce Walsonn Sanon qui en sait quelque chose, sans doute un peu trop sur le mouvement, révèle sur Radio Magik 9 le mercredi 14 octobre 2020 qu’il a été à l’origine de la création du SDP et de fait il est « membre fondateur » du Secteur Démocratique et Populaire et que personne ne peut lui enlever ce droit. Assez bavard, celui qui rentre dans la ligne de mire de André Michel, Marjorie Michel et Nènel Cassy rapporte qu’il a participé à titre de membre du SDP en mars dernier à une rencontre à la résidence de l’ex-sénateur Evallière Beauplan « C’est la dernière réunion à laquelle étaient présents tous les acteurs. À cette réunion où était présente également ma femme, Betty Lamy, le sénateur Nènel Cassy avait pris la parole pour la remercier pour le support que nous avons apporté au secteur durant toute la bataille », affirme-t-il.

  Et il avoue être en discussion avec les organisations politiques qui soutiennent le pouvoir pour le compte d’une partie de l’opposition. « La corde raide et le refus de dialoguer font beaucoup de torts au pays. J’ai eu des rencontres avec des représentants de PHTK, de VERITE… et des gens de l’opposition, y compris le Secteur Démocratique et populaire auquel j’appartiens. On doit trouver un minimum d’entente entre nous afin d’empêcher le pays de sombrer dans le chaos » dit Walsonn Sanon. Durant cette période de délire et de non dit politique en Haïti, c’est le Président Jovenel Moïse lui-même qui en a rajouté une couche lors de son adresse à la nation le vendredi 23 octobre 2020 tout en cherchant, sans doute, à apporter le coup de grâce à son opposition en annonçant qu’il était personnellement en discussion avec de « Grands acteurs de la scène politique » et de la plupart de grands leaders de l’opposition depuis quelques trois mois sur de nombreux sujets importants, entre autres, la stabilité politique, la croissance économique, la réforme constitutionnelle et la modernisation du pays. Une déclaration qui a jeté l’effroi et l’émoi parmi tous les dirigeants politiques de l’opposition obligés de clarifier leur position dans cette partie de poker-menteur où la crédibilité des uns et des autres en pâtit devant l’opinion.

(A suivre)

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