L’exploitation minière : Un projet colonial écologicide promue par le FMI et la Banque Mondiale en Ayiti

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La Banque Mondiale

L’exploitation minière est considérée comme l’une des activités des plus destructives et des plus écologicides. Elle est associée à la déforestation et à la dégradation des forêts, à la guerre, aux dictatures et à la violation des droits de l’homme, à l’aggravation de la pauvreté et de l’inégalité sociale. En plus d’être non durable, du fait qu’elle exploite des ressources non renouvelables, elle laisse sur son sillage un environnement et une société ravagés, la plupart du temps de manière irréversible. Cependant, certaines institutions internationales comme Le FMI et la Banque Mondiale  présentent l’exploitation des mines métalliques comme seule stratégie que les pays classés “sous-développés” comme Ayiti doivent suivre pour arriver au “développement”.  Cet article est une tentative d’éclaircissement du rôle de la FMI et de la Banque Mondiale dans la promotion et la mise-en place de cette activité destructrice en Ayiti ; aussi un appel de lutte contre ce projet et contre le FMI et la Banque Mondiale.

 

L’extractivisme : Un modèle colonial proposé par la Banque Mondiale aux anciens territoires déjà pillés pour leur « développement ». 

L’Extractivisme, comme modèle de développement propose et impose aux pays classés Sud par les institutions internationales, est un mode d’accumulation, conditionné par la demande des matières premières du centre métropolitain depuis plus de 500 ans avec la conquête et la colonisation de l’Amérique, de l’Afrique et de l’Asie et qui a marqué le début de la structuration de l’économie mondiale du système capitaliste. Pratiquement parlant, selon Alberto Costa, l’Extractivisme a été un mécanisme de pillage et d’appropriation de type colonial et néocolonial et ne se limite pas aux minerais ou au pétrole. Aujourd’hui encore, des territoires, des hommes et des femmes de ces territoires portent encore les marques de cette expérience dans leurs chairs et leurs pensées et que des institutions internationales comme le FMI, la Banque Mondiale et les dirigeants de ces anciennes colonies continuent à imposer aux peuples l’extractivisme comme stratégie de sortie du marasme de toutes sortes auquel ils sont confrontés. En ce sens, les gouvernements sous l’influence de l’internationale communautaire ont reproduit la colonialité et après  plus de deux décennies d’application de cette politique économique, les résultats sont catastrophiques sur le plan économique, socio-politique, environnemental. Le chapitre suivant va montrer le mode opératoire, les actes de la FMI et de la Banque Mondiale dans l’application du projet colonial écologivore qu’est l’exploitation minière dans le monde, particulièrement dans les sociétés appauvries.

L’extractivisme : Un modèle colonial proposé par la Banque Mondiale aux anciens territoires déjà pillés pour leur « développement ».

  Les apports de la FMI, Banque Mondiale dans le secteur extractiviste à travers le monde

Tous les rapports sur les expériences témoignent que les interventions du Groupe de la Banque mondiale dans le secteur des industries extractives ont été de divers ordres. D’abord, la Banque a constamment conseillé aux gouvernements de modifier les codes miniers nationaux de manière à permettre aux compagnies étrangères d’introduire dans les pays des projets miniers à grande échelle. Dans la promotion du développement national par la libéralisation du marché, l’ajustement structurel et la promotion de l’investissement étranger direct, la Banque mondiale a constamment conseillé aux pays de réécrire leurs codes miniers nationaux de manière à faciliter aux entreprises étrangères l’exploitation minière à grande échelle. Ces codes miniers révisés ont été imposés partout, sans la participation des peuples autochtones et sans prendre en compte leurs considérations ni leurs droits ; ils ont affaibli les protections légales dont les peuples jouissaient auparavant. Ensuite, le Groupe Banque Mondiale, par l’intermédiaire de la Banque internationale pour la Reconstruction et le Développement, l’Association internationale de Développement, la Société financière internationale et l’Agence multilatérale de Garantie des Investissements – a directement appuyé des entreprises minières, pétrolières et gazières sans une évaluation appropriée des conséquences environnementales et sociales et sans prendre en compte le manque de bonne gouvernance et de capacité institutionnelle ou normative dans les régions ou les pays concernés.

Prenons l’exemple de la Colombie et des Philippines où les codes miniers révisés ont intensifié les pressions sur les terres indigènes et affaibli ou éliminé les protections légales dont les peuples indigènes jouissaient préalablement. En Colombie, les réserves de minéraux, de pétrole et de gaz sont exploitées par d’innombrables compagnies, qui bénéficient d’impunité légale. La SFI a même financé l’industrie minière dans des pays déchirés par la guerre, tels que la République démocratique du Congo, par des compagnies au dossier suspect et dont les projets avaient été condamnés par les Nations unies.   Qu’en est-il pour Ayiti?

 

Banque Mondiale et ses rôles dans le processus de mise-en place de l’exploitation des ressources naturelles en Ayiti.

Ayiti a une longue histoire avec la FMI et la Banque Mondiale en matière de la promotion des Méga-Projets inutiles, mais avec l’industrie minière, ces institutions internationales, plus particulièrement la Banque Mondiale joue ses rôles traditionnels, c’est-à-dire son rôle d’investisseur dans des compagnies multinationales extractives qui pillent les ressources du pays et donnent des appuis « techniques »  aux autorités de l’Etat en Ayiti afin qu’elles puissent modifier ou changer les cadres juridico-légales pour légitimer ce pillage.

En février 2010, le Centre Financier International, une filiale de la Banque Mondiale a investi 5.3 millions de dollars dans Eurasian, une compagnie qui a eu des permis d’exploration et de recherche entachés de soupçon d’illégalité et de corruption. C’est cette même Banque Mondiale, comme investisseur qui, après le moratoire du Sénat en février 2013 sur le projet d’exploitation minière, va appuyer le gouvernement pour la révision du Décret minier de 1976 à travers un Taks Force composé d’expert de la Banque Mondiale et de certains ministères comme celui des Finances et de l’Économie.

Le Taks force a accouché d’un Projet-loi minier qui est actuellement au Parlement et qui a fait office dans la Politique générale de Jean Henri Céant et de ses prédécesseurs. Pourtant dans le processus d’élaboration de ce projet-loi, les compagnies sont consultées alors que la société civile n’a même pas été informée voire consultée jusqu’à présent, malgré la plainte déposée au Panel Inspection en janvier 2015 par le Kolektif Jistis Min (KJM) pour violation du droit à l’information,  manque de transparence et absence de participation citoyenne dans la révision de la législation minière soutenue par la Banque mondiale. La Plainte a également mis en évidence un défaut d’évaluation des répercussions sociales et des risques environnementaux inhérents à l’exploitation minière et l’absence de protections adéquates dans le projet de loi, ce qui constitue une violation des propres politiques de la Banque mondiale.  Le Panel d’inspection a admis que les questions soulevées par la demande étaient « graves et légitimes » et que l’exploitation minière présentait des risques importants, mais il a néanmoins rejeté les allégations sur la base d’arguments techniques restreints dans une lettre datant du 17 février 2015. Au-delà de la rédaction de la loi minière, la Banque mondiale et le gouvernement d’Ayiti ont défini « le renforcement des capacités institutionnelles » et « la transparence » comme étant « des étapes essentielles pour autoriser l’exploration et l’exploitation des ressources du sous-sol ayitien. À ce jour, le processus de réforme n’a néanmoins été consacré qu’à la révision du cadre juridique régissant l’industrie minière.

 

En guise de conclusion

Partout, le FMI et la Banque Mondiale participent à légaliser et à légitimer des projets extractifs qui ne se soucient nullement de la vie, de l’économie, de la culture, de la santé, de l’environnement des citoyens où ses projets sont implantés. Partout, dans toutes les expériences, ce qui intéresse le FMI et la Banque Mondiale est la destruction des cadres légaux qui protègent les populations afin de piller les ressources de ses territoires avec plus de facilité. Le FMI et la Banque Mondiale violent les mécaniques, les politiques qu’eux même mettent en place. L’extractivisme comme modèle de développement pour lequel le FMI et la Banque Mondiale font promotion, de par ses impacts sur la vie des populations, sur l’environnement, l’économie, la santé, est remis en question partout à travers le monde. En ce sens, comme l’a démontré Alberto Acosta, la difficulté, les impacts ne sont pas dus à nos manques de capacité, mais résident dans l’extractivisme lui-même, qui, en substance, est toujours d’origine coloniale et toujours violent, avec tout ce que cela implique. Et en conséquence, nous sommes condamnés au sous-développement. Donc, construire la force pour chasser le FMI, la Banque Mondiale et ses projets extractifs et faire sauter le monde colonial, la division internationale coloniale du travail est désormais une image d’action très claire, très compréhensible qu’Ayiti doit lancer comme elle l’avait faite en 1804. Il est de la responsabilité de tous les peuples dominés de s’unir pour une lutte internationale contre le modèle extractiviste et contre le FMI et la Banque Mondiale, ses promoteurs.

Peterson DEROLUS

Environnementaliste anti-extractivisme

Port-au-Prince, Ayiti ; 3 octobre 2018

 

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