Les Haïtiens doivent se relever de l’insécurité sociale, de la faillite financière et économique, par eux-mêmes, tout en acceptant l’aide d’alliés sûrs

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« Changer Haïti » signifie concrètement « changer les conditions de vie de la population haïtienne ». La « révolution » est réalisée au profit et pour le bien-être du peuple.

« Le plus grand mal, à part l’injustice,
serait que l’auteur de l’injustice ne paie pas sa faute. »
Platon

Le processus de balkanisation du territoire national est né d’une idée criminelle des instances impériales de la communauté internationale. Elles ont implanté des gangs armés dans les quartiers populeux pour contrôler, subjuguer, terroriser les riverains. Le degré de pauvreté qui est constaté dans ces zones franchement défavorisées fait craindre un mouvement de révolte généralisée qui pourra en toute facilité déboucher sur une insurrection populaire. Le rôle du banditisme aveugle consiste à garder les couches misérabilisées dans une situation de phobie permanente, afin d’empêcher la tenue des réunions et l’organisation des meetings politiques sur une base de conscientisation idéologique et libératrice.

Envoyer ses enfants dans les établissements scolaires de Port-au-Prince et de ses banlieues constitue un risque énorme et une source d’inquiétude permanente pour les parents.

Aucun politique qui ferait le choix de mener la République d’Haïti vers les portes d’une « Révolution totale » ne peut pénétrer de manière sécuritaire à La Saline, Grand-Ravine, Savane Pistache, Cité de Dieu, etc. Ils en sortiront les deux pieds devant. Bientôt, toutes les villes principales, les communes, les bourgs et les villages seront infestés de bandits lourdement armés. Ils sèmeront la terreur le jour et la nuit. D’ailleurs, le « Mal » commence déjà à se répandre. Les enfants ne pourront plus s’asseoir en toute quiétude dans une salle de classe pour s’adonner à leurs activités d’apprentissage. Envoyer ses enfants dans les établissements scolaires de Port-au-Prince et de ses banlieues constitue un risque énorme et une source d’inquiétude permanente pour les parents. Si certains d’entre eux en avaient les moyens, ils auraient retenu, comme les bourgeois, les services des précepteurs. Car – sans le souhaiter – les chefs de gangs, qui ont été formés à la même école que Boko Haram, armés par les mêmes États mercenaires et voyous, iront enlever les écolières et les écoliers sur la cour de récréation. Exigeront des rançons mirobolantes. Violeront des gosses dans les montagnes. Et nous assisterons à la démagogie « Rendez-nous nos enfants ». Comme celle dans laquelle l’on a vu Michèle Obama avec sa pancarte dans les mains, photographiée et filmée probablement depuis les jardins florissants de la Maison Blanche.

Boko Haram continue de tuer les paysans nigériens dans la forêt sur laquelle il règne comme Élizabeth II, au milieu des malfrats qui le soutiennent et l’accompagnent dans ses aventures de criminalité organisée. Boko Haram est le Francis Drake du G7. Le pirate qui parcourait les mers pour enrichir l’économie de la Grande Bretagne. Les bandes criminelles qui sèment la terreur dans le pays des Haïtiens servent les intérêts des ambassades, de la présidence, de la primature, du parlement, de l’appareil judiciaire, de la police nationale et des groupements politiques véreux. Des secteurs de cette classe politique rebutante n’ont-ils pas collaboré avec les États-Unis, le Canada et la France pour qu’ils kidnappent le président Jean-Bertrand Aristide, et mettent le pays sous l’autorité de Gérard Latortue, le « palefrenier » de l’Organisation des nations unies (ONU)?

Pour comprendre les comportements des politiciens haïtiens, il serait important de lire ou de revisiter les ouvrages avant-gardistes de Frantz Fanon. Cet auteur est décédé le 6 décembre 1961 à Bethesda dans un hôpital militaire de Washington.  « Peau noire, masques blancs », le livre maître de l’intellectuel révolutionnaire, convient parfaitement à la description du cas qui nous intéresse. L’Haïtien constitue en lui-même un handicap majeur à son développement personnel, que nous traduisons par la valorisation de sa potentialité intellectuelle et professionnelle, par la capacité de parvenir à la concrétisation de ses rêves, et par le pouvoir d’imposer les principes légitimes de son autodétermination.

Où va la République d’Haïti?

Nous croyons avoir mal formulé la question. Car un pays n’a pas le pouvoir de se définir une orientation sociopolitique et économicoculturelle. L’échec catastrophique d’un État est avant tout celui de ses élites. Car l’État n’existe qu’à travers les femmes et les hommes qui l’ont constitué. Il leur est incombé la responsabilité patriotique d’entretenir les éléments de sa croissance et de sa modernisation, à tous les points de vue. Dans tous les domaines. Sur le plan aussi bien du constructivisme que du cognitivisme. La famille, l’école, l’église sont donc chargées de façonner les êtres qui ont le devoir de s’occuper et d’alimenter substantiellement les organes qui actionnent, dynamisent et perpétuent l’État, pour le bien-être des individus et des collectivités territoriales.

Nous avons rédigé trop de phrases, écrit des mots trop compliqués pour révéler une « vérité », à notre avis, déjà immanente. Qui saute aux yeux. Qui s’expose sans appareil microscopique. Qui s’exhibe à l’œil nu. Les conditions biosphériques sans cesse dégradantes révèlent la nature autodestructrice des terriens. L’espèce humaine se détruit et détruit son environnement. Sans même s’en rendre compte. L’Homme est l’unique producteur de ses malheurs. L’université nous a transmis la mauvaise manie de compliquer la pensée avec des considérations philosophiques, méthodologiques, argumentologiques, dialectologiques… Alors qu’une phrase simple aurait suffi à décrire un phénomène objectif, une situation subjective et un fait subversif. Les Haïtiens représentent la  « Honte » de leurs descendants. Pourquoi y aller par quatre chemins? Il est extrêmement difficile pour quiconque de se dédouaner de l’affirmation qui se pose même en terme de postulat.

Il est extrêmement embarrassant de réfléchir sur l’avenir d’un État défaillant, comme celui qui caractérise le pays pris en otage

L’incompétence, le nombrilisme (Fanon dirait le narcissisme), l’absurdisme, l’amorphisme aliènent et annihilent graduellement la société haïtienne. À observer les attitudes incorrectes, répréhensibles  de la plupart de nos concitoyens, nous, qui passons des nuits à écrire et à publier des textes avant-gardistes, devrions peut-être nous arrêter un moment, prendre le temps de cerner, d’appréhender, de décoder les aspirations véritables de l’être haïtien. Que veut-il exactement pour lui-même et pour les autres?

C’est complètement irrationnel de répéter, comme le font plusieurs : « Haïti passe avant toutes choses. Tout ce que je fais, c’est pour mon pays. » En fait, la langue française appelle ce procédé langagier une métonymie. Il existe une relation logique entre « Haïti et Haïtiens ». Notre amour de la patrie n’est autre que celui qui caractérise, relativise nos sentiments à l’égard de nos compatriotes. Nous sommes en train de franchir la frontière du monde métaphysique réservé aux « dieux » des grandes pensées philosophiques. Et ce n’est pas du tout le but de notre démarche. Nous ne saurions nous élever à la hauteur de Platon, d’Aristote, d’Avicenne, de Heidegger, de Mill…  « Changer Haïti » signifie concrètement « changer les conditions de vie de la population haïtienne ». La « révolution » est réalisée au profit et pour le bien-être du peuple. Haïti est un archétype.

Frantz Fanon écrit : « De partout m’assaillent et tentent de s’imposer à moi des dizaines et des centaines de pages. Pourtant, une seule ligne suffirait. Une seule réponse à fournir et le problème noir se dépouille de son sérieux. Que veut l’homme ? Que veut l’homme noir? » Il nous faudrait poser ces deux questions interreliées à chaque Haïtien indistinctement.

Jusqu’à quel point peut-on s’engager pour un peuple qui, dans quelques jours, va commencer à  cadenasser ses malheurs et ses revendications pour défiler comme des mouches charognardes derrière le char carnavalesque du « régent » des crânes rasés? Dire que la ville des Gonaïves, le berceau de la proclamation de l’indépendance et de la souveraineté nationale, le lieu héroïque du suicide de l’Amiral Killick, la municipalité qui donna naissance au député « antiyankee » Raymond Cabèche, a été désignée hôtesse des festivités de clôture du mardi gras par l’inculpée Jovenel Moïse. Cette promesse fallacieuse du blanchisseur d’argent sale à  Youri Latortue aurait-elle annoncé la mort dans l’œuf du procès sur la mauvaise gestion et la dilapidation des fonds PetroCaribe?

Il est extrêmement embarrassant de réfléchir sur l’avenir d’un État défaillant, comme celui qui caractérise le pays pris en otage, séquestré par les puissances impériales qui ont sur la conscience les malheurs de  l’Humanité. Le mot conscience pourrait ne pas convenir, lorsqu’il s’agit de décrire les conséquences désastreuses occasionnées par les situations de déprime sociétale que nous évoquons dans cette réflexion? Plus de deux cents ans d’errance politique, d’égarement social, de dystrophie économique et financière pour un peuple aliéné par les pays néolibéralistes et trahi par ses propres enfants! La traversée du désert se révèle longue et pénible pour des individus déboussolés, kidnappés, arrachés à la terre nourricière, dépersonnalisés et transformés en objet, vidés de leur énergie, incapables jusqu’à présent de trouver un Moïse, un Aaron et un Josué pour les guider… Quel espoir peuvent-ils garder du désir d’arriver un jour quelque part? Les Haïtiens ignorent où se trouvent le paradis et l’enfer. Ils ne vont nulle part.

Au début de ce XXIème siècle, la République d’Haïti est étonnamment  devenue un amoncèlement de parias qui cherchent un ailleurs impossible pour renflouer le fossé d’une misérabilité chronique. Pour marcher, il faut avoir une destination en vue? Sinon, l’on tourne. On n’avance pas. Marcher, c’est se déplacer dans une direction quelconque. Les enfants de Toussaint, de Dessalines, de Christophe, de Pétion ne savent pas que le soleil existe à l’extérieur de la « caverne de Platon ». Ils n’ont pas accès au « monde intelligible ». Ils courent après les ombres qui représentent pour nous, dans cette métaphore, les États occidentaux, les pays impérialistes gloutons, les puissances hégémoniques. Ils ne voient pas les régions du soleil levant. Ils restent prisonniers du « monde sensible », celui qui symbolise la ruse, l’hallucination, la désillusion, la fausseté, la tromperie consciente, l’affabulation, le mensonge…

L’élite intellectuelle de la République d’Haïti devrait prendre le temps de parler à la Nation  d’Anténor Firmin, Jean Demesvar Délorme, Edmond Paul, Jean Price Mars, Jacques Roumain, Jacques Stephen Alexis, ces comètes qui ont brillé dans le ciel de la littérature universelle et qui font la gloire de notre patrie.  C’est le rôle aussi des politiques de revenir de temps à autre dans leurs discours sur ces différentes personnalités qui représentent des modèles et des valeurs sures de l’avenir d’Haïti. Anténor Firmin disait sur la tombe de Jean Demesvar Délorme le 28 décembre 1901, à Paris : « Il avait des paroles, des gestes, jusqu’à des mièvreries qui exerçaient une espèce de magie sur la jeunesse enthousiasmée qu’il ensorcelait. Je ne sais pas si la politique réserve de plus grande satisfaction, un plus beau triomphe ! Sans doute, nous avons toute une pléiade d’hommes remarquables, en plus d’une spécialité…mais nul d’entre eux ne partage avec Demesvar Delorme l’immense gloire d’avoir ouvert chez nous l’ère du vrai épanouissement littéraire… [1] »

Le Parlement haïtien devrait se souvenir actuellement d’Edmond Paul pour sortir le pays de l’impasse sociale, politique et économique gravissime, dans laquelle il s’enfonce davantage tous les jours. L’intelligence financière et économique d’Edmond Paul est arrivée à tirer l’État du mauvais pas. Comme les deux gouvernements illégitimes du PHTK, le président Sylvain Salnave avait conduit les finances publiques au désastre et à la ruine.

Nous avons demandé au défunt Gérard Pierre-Charles, dans une entrevue qu’il nous avait accordée en 1998, de nous parler de l’implication des élites haïtiennes dans les causes des malheurs du peuple haïtien. Sa réponse était on ne peut plus tranchante et claire : « Cela correspond sans doute au 19ème  siècle, c’est-à-dire, quand le pays a obtenu son indépendance en 1804. Dans un monde dominé par le colonialisme et le racisme, le fait de l’indépendance de cette nation nègre a constitué vraiment une gifle pour les grandes puissances, pour les mentalités de l’époque. Durant le 19e  siècle, Haïti a été victime de discrimination et d’apartheid dans ses rapports avec l’étranger, ce qui a marqué profondément la nation. En termes de développement économique et social d’Haïti, on ne peut pas se libérer de toutes les fautes et les attribuer seulement aux autres. Je crois que l’élite haïtienne, l’élite gouvernementale, l’élite politique, l’élite économique de ce pays sont  responsables du fait qu’Haïti n’ait pas pu entrer dans une phase dynamique de développement.  À partir du 19e siècle, une telle dynamique a suscité le progrès de beaucoup de pays de l’Amérique Centrale et des Caraïbes: Guatemala, Honduras, Nicaragua, République Dominicaine et Jamaïque, qui étaient encore très arriérés. Au début du 19e  siècle, l’impérialisme s’est manifesté dans ces pays par des occupations militaires et par toutes les formes de main mise économique; en même temps aussi, dans ces pays, les élites ont su arriver à créer des processus d’accumulation, des processus de transformation qui leur ont permis à partir d’une époque d’arriération, où le latifundio excellait, de prendre le train du développement capitaliste et de la modernisation. Et aujourd’hui, la mondialisation, la globalisation…

 « Pour moi, l’élite haïtienne a raté ce pari. Il y a un pays que j’ai étudié particulièrement : le Costa Rica. Ce pays, entre 1880-1890, avait une faible exploitation caféière en comparaison avec Haïti. Mais l’oligarchie caféière costaricaine a compris qu’elle devait se transformer en un secteur d’entrepreneurs de café. Eh bien, ils ont transféré leurs capitaux en transformant les latifundia de café, en des fermes modernes capitalistes. Les élites haïtiennes : intellectuelle, politique, économique et culturelle, ont failli à leur rôle de conduire ce pays vers les pôles de développement durable. Les responsabilités de l’environnement international ont été très fortes à un moment déterminé. Mais, à partir de la fin du 19e siècle, l’exercice de la capacité nationale devait se manifester – comme cela se manifesta, avec toutes les différences que cela suppose – en République Dominicaine, à la Jamaïque, c’est-à-dire dans des pays qui sont aussi des pays noirs ou métisses; des pays ex-coloniaux victimes de tout un exercice de discrimination et d’exploitation. Mais les élites n’ont pas pu se mettre à la hauteur des impératifs du développement [2]. »

Dure et incontournable réalité

Dès le milieu des années quarante, les pays du Nord ont cherché sérieusement – et ils y sont parvenus – à imposer leurs propres modèles de croissance économique aux pays du Sud. La course à l’augmentation des capacités de la productivité a entraîné la planète sur une pente de détérioration environnementale irréversible. Il s’en est malheureusement suivi un gaspillage phénoménal des ressources naturelles non renouvelables qui a occasionné partout des détresses sociales et des dégâts économiques aux conséquences irréparables. Soudainement, les États capitalistes exportateurs de la pollution industrielle se sont réveillés. Ils ont compris que leurs territoires faisaient partie de la même planète et partageaient les mêmes risques avec les  pays qu’ils utilisent comme poubelles pour déverser leurs déchets radioactifs. Ils ont commencé à sonner le tocsin au début des années 1990. Ils ont multiplié les « colloques sur la biodiversité » par ci, par là. Mais le mal était déjà fait. Le tissu environnemental est sérieusement, dangereusement dégradé. Le développement des pays riches s’est fait au détriment des régions périphériques.

Soudainement, les États capitalistes exportateurs de la pollution industrielle se sont réveillés.

Il n’est aisé pour quiconque, disons- nous, de tracer une ligne de trajectoire prévisionnelle en rapport au devenir de l’être haïtien. En particulier. L’espèce est menacée. Comme les animaux de la préhistoire. Comment cette Nation amputée de ses jambes  – d’abord par 29 ans de dictature politique, et ensuite par 33 années de transition politique chaotique et désordonnée –  arrivera-t-elle à se relever pour  se remettre finalement à avancer droit devant elle, en direction du « Rêve » porté par ses ancêtres légendaires? La République d’Haïti tourne comme une toupie dans le cercle des turbulences dissipatives. Elle a coulé dans le fleuve de la cruauté, de la corruption, de la nullité, de la médiocrité, de l’incompétence, de l’irresponsabilité, de l’immobilisme des opportunistes de tous bords, tous côtés, qui ont investi la scène politique après le 7 février 1986. Il faut la repêcher avant qu’elle perde le dernier souffle qui fait encore battre faiblement son pouls.

Non, en ce qui concerne les populations du Sud, « Dieu » ne devrait pas écrire la pièce et confier la direction du théâtre au « Diable », pour reprendre Victor Hugo. À notre façon. C’est profondément injuste et inhumain.  Il faut détruire le « Diable », reprendre la direction du théâtre et  repenser la dramaturgie de l’univers. Planifier et organiser une nouvelle mise en scène au moyen de laquelle les rôles seront mieux repartis. Installer les acteurs à la place qui leur convienne?

Nous avions entraîné Gérard Pierre Charles à s’exprimer également sur l’avenir d’Haïti. Il répondit sans hésitation : « La question de l’avenir de la République d’Haïti se pose aujourd’hui en termes de  création des conditions objectives qui amèneraient un groupe de politiques responsables à prendre le pouvoir. De ce fait, ils pourraient participer à l’élaboration et à la prise de grandes décisions politiques, porteuses de changement social et économique concret. Il faut parvenir à faire marcher la machine économique haïtienne, relever l’échine de l’agriculture traitée en parents pauvres, abandonnée à la voracité des produits vivriers importés des États-Unis, du Canada, du Japon, de la Chine, de la République dominicaine, etc. Cette agriculture en totale décadence doit finalement retrouver sa voie. L’État a la responsabilité de redonner confiance aux petits paysans producteurs, ruinés par les pratiques illicites d’une importation abusive. Comment arriver à canaliser tous les efforts pour installer ce pays dans la locomotive des pôles de développement durable: la seule façon, à notre avis, d’éloigner les Haïtiens du gouffre des souffrances sociales? Mais tout cela, dites-vous bien, ne pourra pas se faire sans repenser pour la nation un climat de relations internationales saines, basé sur des intérêts psychologiques et humanitaires, et qui soit capable de lui forger une place enviable et favorable au sein de l’économie mondiale [3].»

Après la destitution de Jovenel Moïse, la République d’Haïti doit solliciter l’aide économique et militaire de la Russie et de la Chine pour tenter d’aplanir les sentiers des difficultés devant son peuple.

Cependant, l’Organisation du peuple en lutte (OPL) n’a pas fait mieux que les autres mouvements politiques qui ont enterré la République sous le sable de l’échec flagrant. Aujourd’hui, OPL, – devenue plus que jamais un groupement de politiciens désorientés –, n’a-t-elle pas intégré sans embarras, sans gêne, le cercle cabalistique de la mafia politique, économique et financière? Depuis que l’Organisation du peuple en lutte a perdu son cerveau, elle ne fait que louvoyer sur le fleuve de toutes les opportunités de survie. Bientôt, il ne restera plus rien d’elle, sinon qu’une « raison sociale » mal logée dans les annales de l’histoire nationale. De préférence, ne faudrait-il pas aujourd’hui parler de « la Désorganisation du peuple en lutte  (DPL) ».

Quelques lecteurs diront probablement que l’auteur de cet énoncé n’a fait aucune remarque désobligeante sur les attitudes politiques de La Fanmi lavalas. Nous répondons tout de suite que le mouvement de Jean-Bertrand Aristide, – comme tous les autres –, ne porte pas la marque de l’immaculation. Seulement, pour avoir été deux fois victime d’un coup d’État sanglant, – en 1991 et en 2004 –, son échec au niveau de la gouvernance nationale ne doit-il pas être mesuré à l’aune d’un jugement a posteriori,  basé sur des circonstances atténuantes?

Fini l’esclavage de l’esprit causé par l’ignorance et la peur

Depuis que nous avons commencé à porter les épaulettes des artisans d’une révolution mondiale, nous avons perdu quelques amitiés sur la route de l’existence terrestre. Certains appels téléphoniques se raréfiaient avant de disparaître complètement du radar. Néanmoins, ce qui compte avant tout, ce qui valorise une vie, c’est le devoir d’appliquer la leçon tirée de la conscience morale de Guevara, en ayant la force nécessaire, la bravoure infaillible d’embrasser et de défendre toutes les causes qui dépersonnalisent, déshumanisent les êtres vivants retenus prisonniers dans les cavernes obscurantistes de l’impérialisme.

Après la destitution de Jovenel Moïse, la République d’Haïti doit solliciter l’aide économique et militaire de la Russie et de la Chine pour tenter d’aplanir les sentiers des difficultés devant son peuple. Les États-Unis, le Canada, la France, l’Angleterre, l’Allemagne, le Japon, l’Espagne ne sont pas des alliés sûrs pour les populations de la périphérie. Leur présence sur le sol national coïncide avec des situations d’inhumanité et de cruauté indescriptibles : trafic de drogue, assassinat, gangstérisme, exode massif, misérabilité… Nous plaidons ardemment pour le refiletage des relations diplomatiques d’Haïti avec les États septentrionaux. Un gouvernement révolutionnaire y pourvoira. Il faudra privilégier les rapprochements avec la Russie, la Chine, Cuba, le Venezuela, la Bolivie, les pays de l’Afrique, du Proche-Orient et du Moyen-Orient.

Frantz Fanon déclare : « L’avenir doit être une construction soutenue de l’homme existant [4]. »  L’année 2018 a été particulièrement éprouvante pour nos compatriotes. Nous regardons à l’horizon les vents d’une insurrection populaire mondiale qui commencent à se lever tranquillement. Demain ne sera plus comme hier. Désormais, l’espoir du « Changement » est présent.

Robert Lodimus

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Références

[1] Cité dans les notices biographiques des Éditions Fardin qui ont réédité l’ouvrage de Jean Demesvar Delorme, Réflexions diverses sur Haïti, paru pour la première fois en 1873.

[2] Robert Lodimus, La guerre des Lavalassiens ou Le scrutin de la discorde, ouvrage inédit.

[3] Robert Lodimus, La guerre des Lavalassiens ou Le scrutin de la discorde, ouvrage inédit.

[4]  Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, page 29, Éditions du Seuil, 1952.

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