Doit-on défendre le mensonge ?

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Nous vivons une époque en Haïti où le mensonge est devenu plus que de coutume, la norme en politique. Il n’est pas possible de continuer dans cette voie car le mensonge est abandon, pour ne pas dire négation de la dignité humaine. Bien qu’il ne soit pas interdit de mentir dans le pays, on ne peut pas pour autant utiliser le mensonge à toutes fins utiles.

L’accroissement de la corruption et la montée de la délinquance ont, de surcroit, augmenté également le nombre de personnes atteintes de mythomanie. Une maladie psychologique au cours de laquelle le malade a une forte tendance à mentir tout le temps, consciemment ou non. En d’autres termes, il cherche toujours et inconsciemment refuge dans le mensonge pour échapper à la réalité ambiante.

Cette maladie, en soi, n’est pas vraiment dangereuse. Mais quand quelqu’un en est atteint, d’un point de vue politique, on peut s’attendre au pire.  Car, un mythomane authentique reste quelqu’un qui vit de ses fabulations sans même y prendre garde, il pourrait être identifié à un mercenaire payé pour dire le mensonge. Comme l’a écrit Aristote : « Dans les oligarchies, les oligarques devraient prétendre favoriser les intérêts du peuple.» Plutôt que de jurer benoîtement «je serai malintentionné envers le peuple (…), ils devraient, au contraire, concevoir et feindre des sentiments tout opposés».

L’actuel Premier ministre de facto en Haïti, le Dr Ariel Henry est l’exemple concret du parfait mythomane. Rien de ce qu’il dit ne reflète aucun brin de vérité. Il fait du mensonge une stratégie politique. Voilà pourquoi, dans le cas du dossier d’assassinat du Président Jovenel Moise, Ariel Henry par ses déclarations contradictoires s’est piégé lui-même. Les menteurs n’ont pas de mémoire, ils oublient facilement ce qu’ils avaient dit auparavant.

Les mythomanes ont la faculté de croire en eux-mêmes, en leurs propres mensonges et finissent par faire accepter aux autres, particulièrement les naïfs, leurs tromperies. Ils accumulent les mensonges pour que leur histoire reste crédible en un sens. C’est dans ce contexte, qu’on trouve dans la société haïtienne d’aujourd’hui des gens qui, non seulement, croient à n’importe quoi mais qui aussi se solidarisent avec les mensonges éhontés d’autrui. Ainsi, la publication de notes de presse pour apporter un honteux soutien aux pires élucubrations construites par un mythomane pour se donner de l’importance.

Attaquer c’est la meilleure tactique de défense du menteur. Si vous doutez de son histoire, il est possible qu’il vous accuse à son tour de mentir sinon de vouloir l’éliminer. Les histoires des menteurs sont souvent truffées d’insignifiants détails.  Les menteurs jouent souvent le rôle de victimes. Une manière de détourner votre attention et de vous éloigner encore davantage de la vérité qu’ils souhaitent vous cacher.

Il faut d’ailleurs noter ce fait concret, passé quasiment inaperçu, le cas d’un directeur d’une organisation privée qui s’est plongé dans la boue immonde de la corruption. Il avait reçu un chèque totalisant 1 million 500 mille gourdes du BMPAD. Dans un premier temps, il a plaidé mordicus qu’il ne l’avait pas reçu. Après bien de tergiversations de sa part, prétextant même à un acte d’intimidation et de persécutions politiques, il a fini par avouer sa forfaiture.

Il l’a cyniquement fait tant et tant de fois qu’il devrait être couvert de ridicules. Pourtant, il trouve une multitude de mains au sein de la classe politique pour l’applaudir en signe de solidarité. Pire, ce directeur reste très sollicité dans certains milieux sociaux et ses propos sont reçus par ses fidèles partisans comme des versets bibliques. Ils n’ont pas à démêler le vrai du faux en s’appuyant sur des faits concrets et vérifiables. Ils ne font que persister à croire en ceux qui mentent à la population et font du mensonge un modus operandi.

« Ce qui caractérise le mensonge, ce n’est pas tant la transgression de la vérité, mais la mauvaise foi, l’envie d’induire son interlocuteur en erreur, la volonté de lui cacher, avec le plus de vraisemblance possible, ce que l’on pense être, à tort ou à raison, la vérité », c’est ce que   nous enseigne Sabrina Laubisse*. A ce compte,il n’est pas possible de continuer à défendre des politiciens prompts au mensonge. Les masses populaires ne doivent pas suivre ces organisations qui s’engagent à apporter leur solidarité aux fieffés menteurs et certains médias qui ne font que propager leurs mensonges et colporter leurs faux récits.

Les menteurs n’ont aucune volonté de changer la réalité, car ils vivent d’elle.  Ce sont les agents, alliés et partenaires de l’impérialisme, qui veulent tromper le peuple pour lui faire croire qu’un pseudo Accord, une mystification appuyée par l’impérialisme, pourrait déclencher le dynamisme d’une transformation totale de la société.

« Seule la vérité est révolutionnaire » nous enseigne Lénine. Oui, il faut dire la vérité. Et dire Non au mensonge ! Notre rôle est de combattre les menteurs au lieu de les défendre.  Jean Jaurès dans le Discours à la jeunesse, l’a si bien précisé « Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe et de ne pas faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques »

 

* Sabrina Laubisse. Professeure de philosophie à l’Institut Supérieur Européen de Gestion (IÉSG).

 

 

 

 

 

 

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