Deux mots qui n’en font qu’un

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Ces deux mots sont une force latente sommeillant au fond des laissés-pour-compte, des exploités, des refoulés, des exclus, des marginalisés, des oubliés, des persécutés qui ne se doutent même pas de ce dont ils sont capables

« Tout être humain véritable doit sentir dans son visage le coup donné au visage d’un autre être humain ».

José Martí

 

«Le présent est fait de lutte de lutte; l’avenir nous appartient.»

Ernesto Che Guevara

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Ce sont deux mots qui à eux seuls renferment, protègent, alimentent les luttes, les avancées,  les rêves, les aspirations, les espoirs de l’humanité souffrante courbée sous le poids de toutes les injustices et oppressions, politiques, idéologiques, raciales, sociales, linguistiques, ethniques, religieuses, économiques. Bien qu’appelés à guider les peuples, à être leur boussole, leur horizon, leur arme de combat,  leur rendez-vous, leur seul moyen universel de communication, de se donner la main, de s’entraider, de se battre, de défier l’ordre régnant, inique, multiséculaire, et de vaincre, ils sont de plus en plus critiqués, censurés, désavoués, délaissés, dénaturés,  dépréciés, dévalorisés, discrédités et même trahis.

Deux mots annonciateurs de saisons nouvelles, de fécondes semailles pour faire pousser le maïs d’une puissante, agissante, vivante, efficiente, éminente, transcendante solidarité humaine. Deux mots qui cristallisent, synthétisent l’essence même de ce que devrait être la pensée humaine. Deux mots lumineux, ignés; creusets en quelque sorte d’hommes et de femmes de grand courage, de grande détermination qui ont forgé une pensée neuve, une vision nouvelle, rationnelle, objective des rapports  devant régir les êtres humains. Deux mots qui ont animé des multitudes à la recherche d’autres pistes qui servent mieux le destin de l’humanité.

Ce sont deux mots qui, mis ensemble, font trembler les puissants, les puissances d’argent, les forces malfaisantes, malveillantes, maléfiques, haineuses, égoïstes, gardiennes du statu quo, hostiles à tous changements positifs. Deux mots qui leur enlèvent le sommeil, leur font déployer leur arsenal de répression, d’endiguement de la force océane des idées qui promeuvent une société plus juste, des rapports de force équilibrés, un monde où l’homme ne soit plus un loup pour son pareil, un monde où le mot dialogue en soit vraiment un, et qui ne tourne pas en définitive en faveur du plus fort, un monde où le mot changement ne soit pas creux et vidé de son sens.

Ce sont deux mots que devraient apprendre à bien connaître, à bien comprendre, à bien assimiler ces millions de personnes qui depuis leur naissance n’ont connu que le dénuement, la précarité, la misère, la faim, la maladie, l’amertume de vendre leur force de travail à vil prix, sans oublier l’humiliation de la mendicité. Car ces deux mots ouvrent au moins des fenêtres d’espoir, ouvrent sur des perspectives de changer le monde, changer la façon dont le monde est divisé en catégories à l’intérieur desquelles pénètrent les plus forts, les mieux lotis qui s’acharnent à créer diversion et division.

Ces deux mots sont une force latente sommeillant au fond des laissés-pour-compte, des exploités, des refoulés, des exclus, des marginalisés, des oubliés, des persécutés qui ne se doutent même pas de ce dont ils sont capables (si jamais cette force arrivait à être  canalisée, comprise, organisée jusqu’à maturation, éclosion, sinon explosion). Ce sont justement les puissants, eux-mêmes bien organisés depuis des siècles, les puissances d’argent qui savent comment neutraliser, disperser, et au besoin écraser cette force si jamais elle arrivait à bien se structurer, au point de menacer leurs intérêts, leurs sordides privilèges.

Ces deux mots sont subversifs, d’autant qu’ils montrent la vraie voie, la bonne voie à suivre vers la lumière au bout du tunnel de mille malheurs, d’amères souffrances, de dures vicissitudes, d’atroces misères, d’attentes vaines, d’efforts brisés, de cris de désespoir, de combats perdus, de promesses trahies, de mille frustrations et déceptions vécues par les masses souffrantes. Ces deux mots sont des explosifs, des bâtons de dynamite aux mains des exploités pour faire sauter la Bastille de leur éternelle spoliation,  frustration et colère.                                                                                                                                   Ce sont deux mots appelés à jouer un rôle clé pour faire avancer les doléances, les revendications, les appels à de meilleures conditions de travail des salariés. Ils servent de guides au grand combat à mener pour l’avènement de sociétés nouvelles partout dans le monde où les prolétaires, les paysans, les travailleurs dans tous les secteurs de la production s’échinent à travailler, sans savoir ce que sera demain, sans savoir si jamais leurs conditions de vie sont appelées à être meilleures.

Il s’agit de deux mots qui aident à comprendre la relation entre oppresseurs et opprimés. Ils interpellent les responsables qui nous gouvernent: l’État, le secteur privé dont une partie détient les leviers de production de la richesse nationale. Plus les marginalisés, les exploités à l’intérieur d’un système oppresseur comprendront les mécanismes de leur oppression, plus ils seront à même de faire corps avec la résistance populaire, plus ils pourront s’organiser de façon à faire face à la machine infernale qui freine leur accès aux loisirs, broie leur force de travail, leur jeunesse et handicape leur avenir.

Ces deux mots nous exhortent continuellement à ne pas laisser tomber la lutte pour l’éclosion de la pleine conscience politique des travailleurs, d’autant que les hommes et les femmes de conviction peuvent aujourd’hui plus que jamais remettre en question l’état déplorable de la société et déployer la puissance et le bien-fondé d’un vrai projet politique, articulé, rassembleur, qui prenne en compte les besoins urgents et ceux à long terme des classes nécessiteuses.

Ces deux mots, bien appris, bien intériorisés permettront de garder une ligne juste, constante, dans les luttes à venir pour protéger les acquis gagnés en faveur des opprimés, et éviter que  “les gens qui ont lutté pour l’avènement de régimes progressistes soient chassés de la vie politique active par une nouvelle élite plus prédatrice que salvatrice qui instrumentalise les mouvements de libération pour contenir les aspirations populaires et légitimer leurs machination”.

Dans nos pays dits sous-développés, ces deux mots nous mettent en garde contre le rôle négatif des bourgeoisies nationales nullement orientées vers la production, l’invention, la construction, le travail, tout ce qui devrait aider les classes travailleuses à s’arracher à un destin ingrat. Bourgeoisies  tout entières caractérisées par des activités combinardes, des affaires souvent louches. “La bourgeoisie nationale a une psychologie d’homme d’affaires non de capitaines d’industrie”. Justement, on ne peut s’attendre à ce que cette classe se sacrifie pour le bien national. Bien au contraire.  D’où l’importance de ces deux mots qui ouvrent la porte au « Que faire? » pour être du bon côté de l’Histoire, du côté du changement, un changement qui soit réel, durable.

Il faut enfin arriver à écrire en lettres de feu ces deux mots qui font la force et sont la raison d’être et d’espérer des “damnés de la terre”: révolution et socialisme. Deux mots qui n’en font qu’un car indissolublement liés. Ils doivent être bien compris pour être bien mis à profit. Ils doivent se fondre dans un humanisme révolutionnaire qui prenne résolument en compte les intérêts des classes qui s’échinent à la besogne et demandent à être partie prenante du processus de changement en cours. On l’a vu en Union soviétique où le leadership a été éventuellement accaparé par une meute, une élite prédatrice au point où la vision léniniste du pouvoir aux soviets, au peuple travailleur, a été complètement détournée de son cours pour être trahie, récupérée par des oligarques milliardaires.

Là où révolution et socialisme se sont liés pour trouver une sortie rationnelle à la misère (aussi bien matérielle que morale) engendrée par l’impérialisme capitaliste, ces deux mots se sont toujours heurtés à l’hostilité sinon à la violence de l’ennemi de classe, l’ennemi des classes laborieuses. On en veut pour preuve, par exemple, le Burkina Faso de Thomas Sankara et le Chili de Salvador Allende. Certes deux révolutions qui ne sont pas nées d’une guérilla ou d’une guerre de libération, mais certainement deux processus révolutionnaires qui, par le biais du socialisme, visaient à rendre aux peuples burkinabé et chilien la dignité et leur pleine souveraineté. On sait ce qui arriva.

On sait comment la révolution bolivarienne, d’essence socialiste, a rendu au peuple vénézuélien toute sa souveraine liberté à choisir la voie qui convient le mieux à son avenir, celle commencée par le commandant Chávez, de très regrettée mémoire, et poursuivie avec dignité par le président Nicolás Maduro. On sait aussi comment l’impérialisme aidé par la grande presse occidentale semble avoir juré la perte des acquis révolutionnaires, socialistes du pays de Bolívar.

Gloire à la révolution cubaine qui a donné et donne encore espoir aux peuples luttant pour leur liberté, leur dignité, leur pleine souveraineté, parce que dès le premier jour, Fidel et ses compagnons de lutte étaient convaincus qu’«un autre monde est possible». Un monde auquel a accédé le peuple cubain et qu’il chérit; un monde que les peuples en lutte admirent et voient comme un modèle à adapter à leur propre réalité. Un monde pour lequel se bat bravement le peuple vénézuélien.

Révolution et socialisme: deux mots appelés à guider la lutte des peuples; deux mots qui n’en font qu’un et que je désignerai par le néologisme « révolucialisme ».

18 mars 2018

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