Ce ne sont pas les employés du Palais national qui se sont syndicalisés pour défendre un salaire et des conditions de vie meilleure. Loin de là ! Mais ce sont les syndicats des usines de sous-traitance revendiquant un salaire de 800 gourdes par jour qui ont été invités au Palais national le jeudi 20 juillet 2017 dernier par le président Jovenel Moise pour essayer de résoudre à l’amiable le problème du salaire minimum, mais sans oublier sans doute de faire passer les desiderata des patrons aux ouvriers.
La délégation syndicaliste était composée des agents Jean-Jacques Charles, Saint-Eloi Dominique, Saint Clair Camito, François Gérard, Jude Pierre, Lafontant Reginald, Pierre Télémaque et Etienne Chrismène, et ils étaient accompagnés de leur avocat Me Evel Fanfan.
Au cours de cette réunion, les syndicalistes ont adressé la question des 800 gourdes tout en rejetant à la face même du président le salaire minimum de 335 gourdes proposé par le Conseil supérieur des salaires (CSS). En somme, ils se sont montrés déterminés à ne pas trahir leur revendication, espérant que le président leur proposerait quelque chose de satisfaisant. Les syndicalistes en ont également profité pour adresser le dossier de leurs collègues révoqués dans le cadre de leurs activités syndicales sans oublier de rappeler au chef de l’état les avantages sociaux auxquels aspirent les employés de la sous-traitance et des autres secteurs dans les domaines du transport, de la restauration, de l’assurance médicale et du logement.
Jovenel pour sa part voulant jouer au bon pasteur, en embrassant son ennemi pour mieux l’étouffer, n’a pas cessé de montrer aux syndicats qu’il travaille également pour les intérêts de la classe ouvrière et son administration est tout à fait prête et dévouée à accompagner socialement les travailleurs afin qu’ils reçoivent un salaire appréciable et des conditions de travail plus humaines.
Malheureusement, la rencontre a pris fin sans une réponse concrète de Jovenel ; sauf de multiples promesses présidentielles qui ressemblent à celles fallacieuses du ministre des affaires sociales et du travail Roosevelt Bellevue.
A ce stade le syndicaliste Dominique Saint-Eloi reste optimiste en prenant aux mots le chef de l’Etat en disant que « le président se dit prêt à la concertation, il promet de travailler sur le dossier avec son chef de cabinet ainsi que deux de ses conseillers, et de nous contacter sous peu […] ».
Nous l’attendrons certes, mais pas éternellement « S’il compte nous rouler dans la farine comme l’a fait le ministre des affaires sociales, et si nous n’obtenons pas de réponse du président d’ici la fin de cette semaine, nous regagnerons les rues » a rapporté Alterpresse.
Dans un sens, Jovenel est comme pris dans un étau puisque le président du Forum économique du secteur privé Bernard Craan a confié catégoriquement au quotidien le Nouvelliste, le lundi 24 juillet 2017« Les recommandations du CSS ne sont que ça, des recommandations. C’est l’exécutif qui prend la décision d’arrêter un salaire minimum ou des salaires minima en fonction des différents secteurs. Le patronat a sa position. Il faut maintenant que l’exécutif tranche », pour ajouter ensuite que « Nous nous sommes déjà prononcés sur la question des 800 gourdes. En ce qui me concerne et en ce qui concerne le secteur privé en général, un ajustement à 800 gourdes n’est pas possible pour des raisons évidentes ».
Par ailleurs, la Confédération internationale syndicale (Csi) et la Confédération syndicale des travailleurs et travailleuses de l’Amérique (Csa) dans une lettre commune dénoncent les actes antidémocratiques des patrons à l’égard des dirigeants syndicaux qui ont été révoqués. A ce compte, elles dénoncent les violations des conventions de l’Organisation internationale du travail (Oit) dans les entreprises Interamerican wovens de Andre Apaid et Sewing international Sa, où près de 200 travailleuses et travailleurs ont été révoqués et exigent que tous les révoqués depuis la mobilisation pour l’augmentation du salaire, soient tous réintégrés.
Jovenel Moise va-t-il trancher en faveur des ouvriers ou des patrons, ses alliés historiques de la classe dominante haïtienne ?