Le seul aspect clair de la pandémie de coronavirus est que les politiciens mènent une guerre de propagande en se blâmant mutuellement (les Chinois disent qu’elle est originaire d’un laboratoire étatsunien, à Fort Detrick, les États-Unis disent qu’elle est originaire d’un laboratoire chinois, à Wuhan), tandis que les scientifiques du monde sont parvenus à un consensus sur le fait qu’il s’agit d’un phénomène purement naturel provenant de la jungle (de la nature). Parallèlement aux théories du complot que l’on trouve dans la jungle (de l’Internet), les autorités étatsuniennes et britanniques à la mentalité de guerre froide et anti-sciences font pression sur une nouvelle génération de Chinois plus déterminée et plus sûre d’elle-même.
Chronologie
Juillet 2019 – à Fort Detrick, Maryland, un laboratoire manipulant des virus hautement dangereux est fermé en raison de procédures et d’installations inadéquates.
Août-septembre 2019 – début d’une épidémie aux États-Unis d’une nouvelle maladie pulmonaire associée au vapotage et cigarettes électroniques.
18 octobre 2019 – à New York, le Johns Hopkins Center for Health Security, le Forum économique mondial et la Fondation Bill et Melinda Gates organisent un exercice fictif sur une pandémie de coronavirus.
18-27 octobre 2019 – Les 7èmes Jeux Mondiaux Militaires se déroulent à Wuhan, en Chine, avec près de 10.000 athlètes de 110 pays, dont 172 de l’armée des Etats-Unis.
20-22 octobre 2019 – 9ème Forum de Xiangshan à Beijing sur le “Maintien de l’ordre international et la promotion de la paix dans la région Asie-Pacifique”, auquel participent plus de 1300 responsables, dont 23 ministres de la défense, au sein de 76 délégations nationales.
Novembre 2019 – Des cas de coronavirus COVID-19 sont identifiés à Wuhan, en Chine.
3-9 novembre 2019 – Atelier international sur la gestion et les techniques des laboratoires de biosécurité à Wuhan, en Chine, organisé par l’Institut de virologie de Wuhan.
Ces jeux dont on ne parle pas
Tout comme les Jeux Olympiques, les Jeux Mondiaux Militaires ont lieu tous les quatre ans et ont désormais une édition d’hiver. Ils sont organisés par le Conseil International des Sports Militaires (CISM). La différence est que les participants sont des militaires. Ironiquement, le département étatsunien de la Défense dit qu’ils servent à «promouvoir la paix en unissant les militaires des nations du monde entier à travers le sport». Si les militaires se préoccupaient vraiment de la paix, ne préconiseraient-ils pas tout simplement de s’auto-dissoudre?
Les derniers jeux se sont déroulés à … Wuhan, en Chine, du 18 au 27 octobre 2019. 9.308 athlètes de 110 pays ont participé à 27 sports, dont 172 athlètes de l’armée des Etats-Unis (épaulés par une centaine de personnel) et 553 Chinois, dans 35 établissements à travers toute la ville fatidique.
Fin mars 2020, un tiers de tous les cas de coronavirus aux États-Unis étaient des patients de moins de 45 ans, et un sur cinq nécessitait une hospitalisation. Le Centers for Disease Control and Prevention gouvernemental (CDC) dit qu’un adolescent sur quatre aux États-Unis vapote ou fume des cigarettes électroniques – la Food & Drug Administration l’a même déclaré une épidémie à l’échelle nationale – et a mis en garde contre une maladie de vapotage potentiellement mortelle appelée EVALI, ou «E-cigarette ou Vaping-Associated Lung Injury [Lésion pulmonaire associée au vapotage].” En bref, “le vapotage peut augmenter l’inflammation pulmonaire et peut altérer d’autres mécanismes de défense pulmonaire”, a déclaré Christy Sadreameli, pneumologue pédiatrique à l’hôpital Johns Hopkins de Baltimore, Maryland. En d’autres termes, cela “diminue l’efficacité des cellules immunitaires responsables de la lutte contre les agents pathogènes”.
En ce qui concerne le vapotage, le pédiatre de l’Université Columbia, le Dr Alok Patel, a déclaré à ABC News: «Lorsque les gens tombent gravement malades à cause de COVID-19, cela touche également les poches profondes de leurs poumons. C’est vraiment effrayant de penser à ce qui pourrait se passer chez ceux qui ont les deux ensemble», c’est-à-dire le coronavirus et EVALI.
Le 11 septembre 2019, il y avait 380 cas de maladie pulmonaire associés au vapotage, dans 36 États, avec six décès en Californie, Illinois, Indiana, Kansas, Minnesota et Oregon. Trois semaines plus tôt il n’y avait encore que 149 cas dans 15 États.
Ce serait intéressant de connaitre l’âge, l’occupation et les lieux où se trouvaient les athlètes étatsuniens à Wuhan, en Chine, à un moment où explosaient aux États-Unis les cas EVALI (encore appelés «pneumonies mystérieuses» par le CDC), une maladie immunosuppressive.
Au moins quelques athlètes venaient d’un petit triangle formé par trois grandes installations militaires du Maryland et de la Virginie, tout autour de Washington DC: Fort Meade, Fort Belvoir dont l’hôpital communautaire aurait traité des cas de vapotage, et Fort Detrick où se trouve le Medical Research Institute of Infectious Diseases. Il s’agit du seul laboratoire du département étatsunien de la Défense équipé pour étudier des virus hautement dangereux au niveau de biosécurité 4 (BSL-4), le plus élevé en termes de sécurité. En tant qu’épicentre de la recherche sur les armes biologiques de l’armée étatsuniennne depuis le début de la guerre froide, ils traitent des organismes pathogènes de haut niveau tels qu’Ebola, variole et anthrax. En fait, ils les traitaient car, en juillet dernier, le Centers for Disease Control and Prevention (CDC) – l’organisme gouvernemental de santé publique – a, dans une “procédure peu habituelle”, retiré à Fort Detrick son permis pour gérer des agents sélectifs “très restreints”, en raison d’installations et de procédure non qualifiés.
«Ce n’est pas la première fois que le laboratoire est temporairement fermé en raison de défaillances dans la gestion des pathogènes dangereux à l’intérieur. En 2009, la recherche a été suspendue à Fort Detrick parce qu’il a été découvert qu’is stockaient des agents pathogènes qui ne figuraient pas dans leur inventaire». Mentionnons que Fort Detrick a été le centre du programme étatsunien d’armes biologiques de 1943 à 1969.
quelques athlètes venaient d’un petit triangle formé par trois grandes installations militaires du Maryland et de la Virginie, tout autour de Washington DC
Ces 11 et 12 mars, le Comité de surveillance et de réforme de la Chambre des États-Unis a tenu une audience sur la préparation et la réponse aux coronavirus en interrogeant trois hauts fonctionnaires, le Dr Anthony Fauci, directeur du National Institute of Allergy and Infectious Diseases, National Institutes of Health, le Dr. Robert Kadlec, secrétaire adjoint pour la préparation et l’intervention, et le Dr Robert R. Redfield, directeur du Centers for Disease Control and Prevention (CDC).
À un moment donné, Harley Rouda, représentant démocrate de Californie, a demandé à Robert Redfield si «sans kits de test, est-il possible que ceux qui avaient été sensibles à la grippe aient été mal classés […] [et est-il] tout à fait possible qu’en fait ils aient eu covid-19?” Sur une réponse positive, il a poursuivi: «Et si quelqu’un décède de la grippe, faisons-nous des tests post-mortem pour voir s’il s’agissait de la grippe ou du covid-19?» Après une réponse négative, le représentant a conclu: «Ainsi, nous pourrions avoir des gens aux États-Unis qui sont morts de ce qui semble être la grippe alors qu’en fait il pourrait s’agir du coronavirus ou covid-19». Le directeur du CDC a répondu: «Certains cas ont été diagnostiqués de cette façon aux États-Unis aujourd’hui».
En conclusion, en octobre, cela aurait pu être, soit des soldats étatsuniens ayant amené à leur insu le virus avec eux à Wuhan, soit ils ont attrapé le virus à Wuhan et l’ont ramené aux États-Unis, bien que dans ce dernier cas, cela ne cadre pas bien avec la période d’incubation de 2 à 14 jours, le premier cas étatsunien ayant été signalé le 21 janvier dans l’État de Washington (ce qui n’est pas absolu, comme en témoigne le témoignage de Redfield), tandis que l’épidémie a commencé 2-3 semaines plus tard à Wuhan.
Il ne s’agit pas de blâmer une nationalité mais de suivre l’origine et l’évolution de la pandémie, et de contrer la lourde campagne du gouvernement étatsunien pour l’appeler «virus chinois ou de Wuhan», au point que le G7 et le Conseil de sécurité de l’ONU ont refusé de publier une déclaration sur la pandémie avec ces termes. Il convient également de mentionner le parti pris permanent des médias occidentaux grand public contre la Chine, qui, par exemple, parlent de «diplomatie du masque» lorsque la Chine envoie de l’aide coronavirus (équipement, masques, médecins, etc.) en Italie, en Serbie et dans plusieurs autres pays de l’Union Européenne, prétendant qu’ils utilisent leur soft power ou qu’ils espèrent en retour des contrats commerciaux lucratifs. La très conservatrice National Review avait ce titre le 3 avril: «La Chine veut utiliser le coronavirus pour conquérir le monde».
La situation devrait plutôt être qualifiée de «guerre du masque», car le gouvernement et le secteur privé étatsuniens surenchérissent sur les autres pays – et détournent même parfois des envois dans ce que le London Guardian a qualifié de «piratage moderne» – pour obtenir des fournitures médicales chinoises dont l’Occident a grandement besoin.
Cependant, quand les États-Unis envoient de l’aide, celle-ci est présentée comme de la générosité. Lorsqu’ils ont annoncé début février qu’ils enverraient jusqu’à 100 millions de dollars pour aider la Chine et d’autres pays touchés par le coronavirus, le secrétaire d’État Mike Pompeo a déclaré: «Cet engagement – ainsi que les centaines de millions généreusement donnés par le secteur privé américain – démontre un fort leadership étatsunien en réponse à l’épidémie”. Peut-être que l’envoi par Albanie – le pays le plus pauvre et parmi les plus petits d’Europe – de 30 médecins en Italie pour combattre le coronavirus était également le fruit d’une décision géopolitique!
(L’Italie est le pays le plus touché d’Europe, tandis que l’Albanie a peu de cas – 197 à l’époque, le 28 mars, avec 10 décès – et peut se permettre d’aider, se souvenant également de l’aide qu’elle a reçue de l’Italie voisine lorsqu’ils risquaient la famine au début des années 1990 et l’anarchie en 1997. De plus, environ 400 000 Albanais vivent et travaillent en Italie.)
Dans le cas des Jeux Mondiaux Militaires, les Chinois ont demandé aux États-Unis de tester leurs athlètes, une solution simple pour mettre fin à la controverse, mais ils n’ont eu aucune réponse. Je me demande pourquoi on mentionne si peu ces jeux militaires dans les médias grand public. Tout au plus certains d’entre eux les mentionnent de manière superficielle, et seulement en réponse à des accusations contre les États-Unis. Un exemple typique de l’Associated Press du 30 mars 2020: «Un porte-parole du ministère des Affaires étrangères [chinois] a déclaré que le virus aurait pu être apporté par des responsables militaires étatsuniens en visite, une affirmation qui a provoqué une réaction de colère de Washington». Point à la ligne. Aucune mention des circonstances.
“Quand la CHine envoit de l’aide on dit que c’est pour exercer leur influence, quand les Etats-unis envoient de l’aide on dit que c’est de la generosite”
Les médias grand public sont très rapides à apposer l’étiquette de théorie du complot sur toute accusation contre les États-Unis. Comme quand un journaliste, George Webb, a commencé à parler à la mi-mars des États-Unis qui utilisent des courriers diplomatiques (c’est-à-dire sans contrôles aux frontières / de sécurité) pour transporter des échantillons biologiques d’un pays à l’autre pays à 29 centres faisant du développement d’armes à travers le Programme coopératif d’amélioration biologique, il a été rejeté comme théoricien du complot. Pourtant, quelques jours plus tard, le 30 mars, Yahoo News affichait en évidence une histoire vieille de 1,5 an (de novembre 2018) à propos d’un biologiste chinois qui a été arrêté alors qu’il entrait aux États-Unis avec trois flacons pouvant contenir un Syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) viable et des matériaux du Syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS). Ils étaient destinés à un chercheur d’un laboratoire de recherche étatsunien qui se trouvait être chinois.
Premièrement, une majorité de chercheurs de laboratoire aux États-Unis sont d’origine chinoise, car c’est une tâche laborieuse et peu rémunérée. Deuxièmement, la collaboration et les échanges entre laboratoires de différents pays est une pratique standard. “Il y a eu plusieurs incidents où cela s’est produit avec des chercheurs de diverses nationalités”, a admis Elsa Kania, attachée de recherche adjointe au Center for a New American Security. Cependant, cet incident a été présenté par les médias comme une information réelle et pertinente. Dans ce cas, il y avait également un parti pris de la part du FBI. “Je suis préoccupé par le fait que la tendance actuelle en matière de sécurité nationale est le profilage des personnes d’origine chinoise”, a déclaré Nicholas Evans, professeur adjoint à l’Université du Massachusetts Lowell, spécialisé en éthique médicale. “Ce n’est pas seulement raciste, c’est une mauvaise pratique. Le FBI et d’autres tentatives de profilage des services de renseignement et des forces de l’ordre ont très souvent été néfastes sans nous mettre plus en sécurité”.
Une arme biologique?
Il y a beaucoup de déchets dans la jungle de l’Internet y compris des affirmations que le SARS-CoV-2 serait une arme biologique. Francis Boyle, professeur de droit international à la faculté de droit de l’Université de l’Illinois et rédacteur du Biological Weapons Anti-Terrorism Act de 1989 – loi promulguée quand George H.W. Bush était président – est catégorique: le SARS-CoV-2 a (accidentellement) fui de l’Institut de virologie de Wuhan où ils faisaient des recherches sur le SRAS afin de le militariser. C’est le seul laboratoire BSL-4 en Chine, c’est-à-dire capable de manipuler des virus très dangereux comme Ebola et Marburg, et il est situé à 14 km du fameux marché de produits de mer et d’animaux sauvages, appelé Huanan. Et il a collaboré avec un laboratoire étatsunien. Aux États-Unis, le nombre et la plupart des emplacements de ces laboratoires de haute sécurité BSL-4 ne sont pas connus, mais en 2007, le Government Accountability Office des États-Unis en avait identifié 15, alors qu’il est dit qu’il existe plusieurs milliers de types BSL-3. “Tous ces laboratoires militaires sont utilisés pour développer des armes de guerre biologique offensives avec ingénierie génétique ADN, et tous ont des fuites”, dit Boyle qui ajoute que nous ne pouvons pas faire confiance à l’Organisation mondiale de la santé dont 50% du financement provient de sociétés pharmaceutiques, ni bien sûr au CDC étatsunien.
Pour faire une arme biologique, il y a des agents pathogènes plus effrayants et plus virulents que le coronavirus
Ci-après un exemple de théorie non-fondée. Une équipe de chercheurs du Centre national des sciences biologiques de l’Inde et de la faculté de médecine Duke-National University of Singapore a effectué une étude sur le terrain en 2017 dans le Nagaland, au nord-est de l’Inde, où la tribu Bomrr chasse les chauves-souris dans des grottes. Ils ont découvert qu ‘«un type de virus appelé filovirus, qui comprend les virus Ebola et Marburg, aurait pu passer des chauves-souris aux humains dans la région de l’Asie du Sud» et ont publié leurs résultats en octobre 2019 dans la bien connue revue en accès libre PLOS Neglected Tropical Diseases. Cette étude a été signée par 12 scientifiques, dont deux de l’Institut de virologie de Wuhan. Ajouté au fait que l’étude a été financée en partie par le Département indien de l’énergie atomique et que l’Université Duke-National de Singapour avait reçu des fonds de la Defense Threat Reduction Agency (DTRA) du Département étatsunien de la Défense, l’Agence officielle de soutien au combat pour lutter contre les armes de la destruction massive, et certains médias – dont le site Web prolifique The Hindu and Great Game India – ont proposé une théorie liant les chasseurs de chauves-souris du Nagaland, le Wuhan Institute of Virology et ce virus SARS-CoV-2 comme arme biologique. Cependant, les scientifiques de Wuhan n’avaient pas participé à l’étude, mais ont simplement fourni des réactifs et ont été mentionnés comme cela se fait de «façon standard”, et l’étude ne concerne en aucune façon le virus SARS-CoV-2.
Les scientifiques sont tout aussi catégoriques que ce coronavirus n’est pas une arme: il provient d’un animal, comme son prédécesseur, le SRAS, qui “est probablement passé des chauves-souris aux civettes – vendu comme délicatesse sur de nombreux marchés – aux humains”, explique le biologiste évolutionniste Kristian Andersen de Scripps Research. Cela a été confirmé par Richard Ebright, professeur de biologie chimique à l’Université Rutgers: “Il n’y a aucune raison de soupçonner qu’il s’agit d’une construction de laboratoire. Il n’a aucune des signatures attendues qui seraient présentes pour une construction délibérée”.
Vous voulez davantage de contributions scientifiques? Vincent Racaniello, professeur de microbiologie et d’immunologie au Columbia University College of Physicians & Surgeons, a discuté d’un nouveau document dont la principale conclusion est que le SRAS-CoV-2 n’est «ni une construction de laboratoire ni un virus délibérément manipulé. Les humains n’auraient jamais pu imaginer cela».
En effet: «Quelqu’un fabriquant un virus pour cibler des êtres humains aurait commencé avec un virus attaquant les humains», a écrit en mars le directeur des National Institutes of Health (NIH) Francis Collins dans la revue Nature Medicine. Le SRAS-CoV-2 n’est pas aussi mortel ou transmissible que d’autres pathogènes potentiels. “Pour en faire une arme biologique, si c’est ce qu’on voulait faire, il y a des agents pathogènes plus effrayants et plus virulents avec lesquels travailler”, a déclaré Gerald Keusch, professeur de médecine et de santé internationale et directeur associé des Laboratoires nationaux des maladies infectieuses émergentes de l’Université de Boston. Telle que la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, une maladie transmise par les tiques qui a un taux de mortalité de 30 à 50% … comparé à (beaucoup) moins de 3% pour Covid-19. Et un malade ne le propage qu’à une moyenne de 2,2 personnes.