Après avoir plaidé coupable, Guy Philippe a négocié pour alléger sa peine !

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Guy Philippe a plaidé coupable de « Conspiration pour blanchir des instruments monétaires ». Il est passible d'une peine maximale de 20 ans, mais dans le cadre de l'accord, les procureurs ont recommandé que Philippe soit condamné à neuf ans seulement.

L‘ancien chef paramilitaire haïtien et sénateur élu de la Grande Anse Guy Philippe a scellé le lundi 24 janvier une entente avec le bureau du procureur des États-Unis pour obtenir une peine plus légère en se plaignant coupable justement d’un seul cas, des trois qu’il a été accusé, en l’occurrence celui de blanchiment d’argent.

Dès lors, le gouvernement des États-Unis a laissé tomber  les deux autres accusations à savoir « Conspiration pour importer de la cocaïne aux États-Unis », passible d’une peine d’une durée de 30 ans à vie d’emprisonnement et « S’engager dans des transactions dérivées d’activités illégales », passible d’une durée de 10 ans.

Cette charge pour laquelle Philippe, 49 ans, a plaidé coupable – « Conspiration pour blanchir des instruments monétaires » – comporte elle-même une peine maximale de 20 ans ; mais dans le cadre de l’accord, les procureurs ont recommandé que Philippe soit condamné à neuf ans seulement.

Le 24 avril, Guy Philippe a signé un accord admettant qu’il «a sciemment utilisé son poste d’officier de police national haïtien de haut rang pour protéger les livraisons de drogue en Haïti en échange de paiements en espèces».

C’est le mercredi 5 juillet 2017 à 8h30 soit dans 3 mois que la juge Cecilia Altonaga rendra publique et définitive à Miami la sentence de Philippe. Comme dans la plupart des offres de plaidoyer, elle suivra probablement la recommandation du procureur américain.

La libération conditionnelle ne peut être accordée dans les affaires fédérales, mais le gouvernement peut accorder à Philippe une réduction de 15% de sa sentence pour «bonne conduite», ce qui signifie qu’il pourrait sortir de prison après sept ans et demi soit en 2024.

L’audience visant à modifier le plaidoyer de «non-coupable» du 13 janvier de Philippe a eu lieu à Miami le lundi 24 avril à 14h30 et a pris toutes les 21 minutes. En plus de Philippe, il y avait les avocats Mark A. Irish, Lynn M. Kirkpatrick et Andy Camacho pour le bureau du procureur américain, et Alan Shelley Ross et Zeljka Bozanic, représentants de Philippe.

«Nous avons été contactés par le bureau du procureur des États-Unis tout récemment, en proposant une entente de plaidoyer», a déclaré Ross. « Nous étions disposés nous à aller au procès, mais si vous procédez au procès et que vous perdez, vous obtenez le coup ».

Au mois de  Mars dernier, le juge Altonaga avait rejeté la requête du procureur fédéral Benjamin Greenberg pour limiter les preuves qui pourraient montrer que l’argent que Philippe a blanchi provenait du « gouvernement des États-Unis ou des personnes autorisées à travailler au nom des États-Unis ».

La juge Cecilia Altonaga rendra publique et définitive à Miami la sentence de Philippe le mercredi 5 juillet 2017 à 8h30.

Interrogé sur le fait que le gouvernement avait lancé un accord, la conseillère spéciale du procureur des États-Unis, Sarah Schall, a déclaré à Haïti Liberté: « le gouvernement ne commentera pas les négociations du plaidoyer ».

On a demandé à M. Ross si la décision de Mars d’Altonaga aurait pu inciter le gouvernement des États-Unis à conclure un accord, il ne s’est pas engagé. « C’est difficile à dire », a-t-il déclaré. « Ils ont compris, comme chacun l’a fait, l’histoire de mon client qui a participé au coup d’Etat contre Aristide, où les États-Unis ont eu un rôle. Ceci a été discuté dans le cadre de cette affaire, et on a pu être concerné à propos de fuite qu’ils ne voudraient pas ».

Mais Ross soupçonne que « l’âge de l’affaire a joué un rôle important dans la décision » de conclure un accord parce que « l’affaire est ancienne, remontant à 1999-2003. Il est difficile de faire l’effort parce que certaines personnes qui étaient en prison n’y sont plus, et il est difficile d’obtenir certains dossiers et témoins ».

« Je ne me soucie pas du motif », a conclu Ross. « Je me soucie juste du résultat ».

Pour obtenir l’arrangement, Philippe a dû accepter le compte rendu par le gouvernement américain du crime qu’il a commis, connu sous le nom de «offre factuelle», dont une copie a été obtenue par Haïti Liberté.

Dans le document de deux pages, signé par Philippe et ses avocats, il accepte d’avoir « sciemment utilisé son poste de haut rang de Commissaire de police national haïtien pour protéger les expéditions de drogues vers Haïti en échange de paiements en espèces. Plus précisément, à partir de juin 1999 et vers la fin de l’année 2003, Philippe et d’autres ont été payés en Haïti à partir du produit des ventes de cocaïne qui se sont produites à Miami, en Floride et ailleurs aux États-Unis. Ces produits en vrac seraient passés en contrebande des États-Unis à Haïti, et Philippe recevait une partie du produit ».

Guy Philippe et sa femme

Philippe admet en outre que sa femme et lui « ont maintenu un compte bancaire conjoint à First Union National Bank à Miami, en Floride. Entre juin 1999 et décembre 2002, Philippe a sciemment transporté plus de 376 000 $ en dollars américains provenant de la vente de cocaïne d’Haïti et de l’Équateur à ce compte First Union National Bank sous le nom d’autres personnes. Philippe a s’est également sciemment arrangé pour que plus de 70 000 $ U.S. des ventes de la drogue soient déposés dans ce compte. Chacun de ces dépôts en espèces a été effectué en montants inférieurs à 10 000 $ pour éviter les exigences de déclaration ».

Philippe a convenu en outre que, entre juin 1999 et avril 2003, alors qu’il était engagé dans une guerre de déstabilisation du gouvernement de l’ancien président Jean-Bertrand Aristide, il avait reçu entre 1,5 et 3,5 millions de dollars à titre de « paiements venant des trafiquants de drogue, sachant que les paiements constituaient des produits de vente du trafic de cocaïne ».

Il a ensuite « partagé les produits de drogue qu’il a recueillis avec des fonctionnaires de la Police nationale haïtienne et d’autres membres du personnel de sécurité pour assurer leur soutien continu aux futurs transferts de drogue arrivant en Haïti, pour acheter une résidence dans le comté de Broward en Floride et pour pourvoir à lui-même et à sa famille aux États-Unis ».

Dans l’accord de plaidoyer entre les États-Unis et Philippe, il est stipulé que « la Cour peut imposer une peine d’emprisonnement légal maximum 20 ans, suivie d’une durée de liberté supervisée jusqu’à 3 ans » ainsi qu’ « une amende de 500 000 $ ou le double de la valeur impliquée dans les transactions, selon la plus élevée des deux, et peut ordonner la confiscation et restitution ».

De 2001 à 2004, Guy Philippe a dirigé le Front pour la libération et la reconstruction nationales (FLRN), une force de quelques centaines de «rebelles» paramilitaires basés principalement en République dominicaine, dans des raids frontaliers contre le gouvernement d’Aristide, qui a finalement été renversé, avec l’aide d’une équipe US SEAL, lors d’un coup d’Etat le 29 février 2004.

En novembre 2005, un grand jury américain a publié un acte d’accusation de trois accusés contre Philippe pour le trafic de drogue et le blanchiment d’argent, mais il s’est caché dans la ville côtière haïtienne de Pestel, où il a échappé à quatre raids par des agents américains et haïtiens sur une période de 11 années.

Après une attaque mortelle en mai 2016 contre un poste de police haïtien aux Cayes, le gouvernement du président intérimaire Jocelerme Privert a délivré un mandat d’arrestation contre Philippe, accusé d’avoir été l’auteur intellectuel du raid. Le mandat a provoqué plusieurs sorties intempestives à la radio et sur internet de Philippe, mettant la police haïtienne en défi de venir l’arrêter dans sa forteresse.

Après avoir été élu sénateur pour le département de Grand’Anse en novembre 2016, Philippe a eu envie de faire une tournée de victoire à Port-au-Prince au début de janvier 2017, puisqu’il avait été invité par le Conseil électoral Provisoire a venir lui-même recueillir son certificat de sénateur.  Ce fut un coup bien monté puisqu’une unité spéciale de la police haïtienne, soutenue par l’Agence américaine pour la lutte contre la drogue ( DEA), surveillait ses mouvements et l’a arrêté alors qu’il sortait de la station de radio Scoop FM  le 5 janvier. Le même jour, la police haïtienne sur les ordres de l’Ambassade américaine a fait passer Philippe aux agents américains qui l’ont conduit à Miami.

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