Emanation du syncrétisme musical qui a caractérisé les années 1970, Alan Cavé a d’abord eu ses premières intuitions bourdonnantes dans son lieu d’extraction. A New-York, qui est le creuset culturel de toutes les sonorités imaginables. Avec toutes les ramifications qui s’impliquent. Avant d’être introduit enfant dans sa terre d’origine, Haïti. Alors, en proie à tant d’expérimentations musicologiques. Donc, à la croisée de tant de paramètres à la fois autochtones et allochtones ; lesquels vont constituer la genèse d’une nouvelle vague de canevas. Entamée dans l’arène ambiante par le groupe « Zèklè » dont le talentueux leader et musicien versatile Joël Widmaïer va être son inspiration. Notamment au niveau vocal, avec un timbre d’orientation féline qui va amplement l’influencer.
Dès qu’il s’est installé en terre parentale, Alan a eu l’avantage d’évoluer dans une atmosphère didactique, imbibée de musique et de prosodie. Spécialement dans un encadrement où son père tient la renommée de poète du milieu. Ce qui lui donne l’opportunité de fréquenter artistes et musiciens établis du pays. Lesquels l’adoptent et lui permettent de faire des apprentissages qui vont majorer son atout vocal. De même que son initiation à la guitare ; l’habilitant de mieux cultiver son sens musical. La deuxième partie des années 1980 le repère à New-York complétant ses études à Jamaïca High. Tout en entretenant ses aptitudes artistiques autour d’un groupe restreint d’aspirants artistes composé de son frère ainé Sito Jr., Wuydens, Zshéa parmi d’autres.
Un début convaincant pour cet artiste d’entrailles qui a fini par édicter son falsetto créole
C’est l’époque marquée par tant de tendances nouvelle vague ; transformant le milieu ambiant en un vrai grenier d’explorations. Avec chacune, prospectant sa propre résonance. Dont l’une est élaborée par un jeune instigateur nommé Alex Abellard dans son propre studio de fortune à Brooklyn. C’est là que Alan va lui être introduit ainsi que son frère ainé Sito Jr, par Wuydens Joseph qui de son côté va s’imposer à la tête du groupe « Papash ». De toute façon pour Alan, les premiers signes ne sont pas encourageants dans son nouveau campement. N’ayant pas fait l’unanimité au sein de l’ensemble qui pense que sa voix drolatique ne va pas être tolérée par l’auditoire haïtien. Pas si vite ! leur a dit le maestro Alex qui pense qu’au contraire ; qu’il a le timbre qui peut bouleverser les orientations vocales conventionnelles. Spécialement avec la dominance des voix félines à la Michael Jackson qui était le chouchou de cette génération.
C’est ainsi que le jeune vocaliste a fini par convaincre tout le monde. Jusqu’à s’approprier le premier tube de l’œuvre introductive du groupe « Zin », ‘’ Fèm vole’’, préalablement chanté par son compositeur, le guitariste et chanteur Eddy Saint-Vil. Un succès phénoménal charrié par un gosier hors commun qui a complètement conquis le cœur des aficionados de la nouvelle génération musicale. Un début convaincant pour cet artiste d’entrailles qui a fini par édicter son falsetto créole dans un environnement qui y était un peu hostile. Dans la foulée, le « Zin » s’est aussi établi comme groupe phare de sa filiation. Gratifiant des opus à la queue leu leu, avec le timbre de Cavé en porte-orchestre, enluminant les morceaux : fèm vole, konpa Zin, nou tout ansanm, pa dekouraje, vini, opa, tou kale, men paw, tou piti, chalatan, manyen w, pataje, macho siwo, ou se, zonbi, kat la bat, pale palew, etc.
Sur cette lancée, il va apporter sa marque toute personnelle de vedette à part entière, dans son premier album, Alan +Zin: ‘’Lage m’’, contenant les titres : pou ou, kwele kwekwe, ma rose, nan nannan, rablabla, sa, move van, lap tann mwen. S’attribuant en même temps du statut de sexe symbole et de musicien jovial; lequel va lui assurer une audience loyale. Qui le supportera ainsi que le groupe « Zin », même durant les creux de la vague. Et conjointement, il va s’accoutumer dans une double carrière avec le « Zin », à travers les disques : ’’Yo pou Zin’’, Sa Zin gen la a ?’’, ‘’Kanpe sou yon bit’’, ‘’3 lèt sèlman’’, ‘’Pi Rèd’’ ; toujours en délivrant les tubes tels :yo pou Zin,konesans, w ale, konpa nou, kanpe, toi, mennem ale, banm tikal, kouraj,woule ou,bad boy, vakans, i don’t know (sa Zin gen la a ?), kanpe sou yon bit, ti randevou, souke dada w, chofe, all i want, 3 lèt sèlman, chokola, pa okipe l, (en duo), di papi wi, boubout, gansta etc. qui le campent comme la voix fétiche du groupe, ainsi que celle d’une ascendance qui lui est bien acquise.
Tandis qu’en solitaire, il livre l’opus : ‘’Se pa pou dat’’, muni des méga-hits : 365 jou, please baby, je t’aimerai toujours, ban mwen lanmou, manman mia, menm jan, m’ tonbe, selebre qui le propulse au rang de star du music-hall antillais. Et va l’exposer à une plus large audience que celle du groupe. De même que : ‘’Collabo’’ doté de : yèreswa, j’ai besoin de toi, fanm dous mwen, vye frè, falling, lapèsonn, beauté cachée, ban mwen lanmou entre autres. Une kyrielle de refrains alternant les allures de cadence compassée aux ballades rythmées qui vont perpétuer son timbre au murmure de l’aube, dans l’esprit d’une multitude. Tout en contribuant à tant d’autres réalisations avec : Malavoi, Mario de Volcy, Haïti Twoubadou, Mini All Stars entre autres. En plus d’avoir influencé une lignée de suivistes tels : Daan Junior son sosie vocal, Krys Pierre, Kenny Desmangles, Richard Cavé etc. Tout en montrant ses facettes de compositeur et de producteur qui vont l’autoriser à mieux gérer son avenir de musicien.
Ce qui l’a mis en état de combat et, dispos à octroyer des coups de pied au cul de ces énergumènes.
Ainsi que d’autres dimensions plurielles qui ont fait voler en éclats son image de mou et de baladin impénitent. Notamment comme partenaire idéal de l’équipe de foot du « Zin » à laquelle j’ai pris part au milieu des années 1990. Projetant son côté vaillant, lorsque des voisins anglophones : Jamaïcains, Trinidadiens, Guyanais et autres ont voulu nous intimider pour nous faire déguerpir du terrain sur lequel on jouait. Ce qui l’a mis en état de combat et, dispos à octroyer des coups de pied au cul de ces énergumènes. Lesquels ont dû battre en retraite ; réalisant qu’ils avaient affaire à des durs. Je me souviens aussi de sa douleur profonde, lors du décès de sa mère ; montrant sa façade de fils prodigieux. Il y a aussi sa renommée de radin. Celui qui tient au prix de quelques accrochages dévastateurs à faire respecter jusqu’aux derniers centimes les termes d’un contrat. Ce dont on ne peut lui en tenir rigueur ; sachant combien il tient à honorer son devoir de père de famille et ses responsabilités de pourvoyeur financier.
Ce qui l’a poussé au début de ce millénaire à montrer des signes d’indépendance par rapport au « Zin ». Auquel les aléas de la compétition et plus d’une décade dominante avaient fait bien des rides. De plus, son statut d’homme marié réclamait plus d’émoluments. Pendant que ses autres partenaires Alex et Eddy munis de leur haut degré professionnel, pouvaient bien se passer de musique pour vivre. Ce qui l’a emmené à demander une trêve, pour se lancer dans une carrière de soliste. C’est ainsi qu’il a continué depuis, persistant dans cette démarche qui lui va comme un gant. Ayant le charisme et le talent pour s’y accrocher. Bien qu’il soit resté disponible pour les tournées de réunion annuelle avec le « Zin ». Prouvant sa fidélité et sa reconnaissance à Alex Abellard d’avoir cru en lui, et aussi à Eddy Saint-Vil pour son support. Ceux qui l’ont découvert, façonné et révélé au grand public.