Plaidoyer pour la non-ouverture de la frontière haïtienne !

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Le mouvement national qui se déroule sur la frontière haïtiano-dominicaine ne peut pas se résumer à une simple affaire de construction d’un canal sur la rivière Massacre. Bien qu’il existe, certes, un lien sorte de cordon ombilical entre cette construction et la lutte contre la misère et la pauvreté en Haïti.

L’imposture nationale est connue de tous depuis un bon nombre d’années, sous les pressions de l’aigle étoilé, nos gouvernements successifs ont abandonné l’agriculture du pays pour nous livrer pieds et mains liés sous la dépendance économique de la République dominicaine. Il s’agissait de créer les moyens et les conditions pour nous assujettir et nous rendre la monnaie de la pièce historique d’avoir mis fin au barbare système esclavagiste qui régnait sur cette île.

Il est évident, en effet, que le mouvement du canal marche de pair avec le projet de combattre l’insécurité alimentaire aigüe propageant dans le pays. Cette initiative pour la reconduction ou la reconstruction de notre production locale est en contradiction avec les frontières qui sont une source récurrente de tensions, de sabotage économiques et de contrebandes programmées.

Des frontières sans aucune restriction et autorités compétentes pour renforcer les décisions et les surveillances sont une source de déstabilisation pour Haïti où l’Etat est failli. Dans les circonstances difficiles actuelles, il est essentiel de s’attacher à protéger jalousement nos ressources et à favoriser notre production agricole contre le complot permanent ; puisque les classes dirigeantes de la République dominicaine ne se sont guère montrées face à notre pays qu’elles sont des partenaires économiques fiables.

Des frontières sans aucune restriction et autorités compétentes pour renforcer les décisions et les surveillances sont une source de déstabilisation pour Haïti où l’Etat est failli.

En ce sens, tenir fermées nos frontières pour barrer la route à tout trafic même celui de la migration illégale est une nécessité. Aujourd’hui, elle est devenue même prioritaire pour nous dans ce contexte de la reprise en main de notre production nationale grâce au projet de canal d’irrigation.

Pour que ce projet ait une importance signifiante comme le veulent les paysans du Comité agricole de la plaine Maribahoux, il faut qu’il représente non seulement un catalyseur de développement, mais aussi une totale rupture avec les mauvais procédés du passé. On ne peut pas à la fois construire nos propres moyens pour irriguer nos terres et continuer à tolérer, sinon faciliter, l’envahissement de notre territoire par des produits dominicains. Cette légèreté exige un point final.  La preuve est là, avec le soi-disant marché binational. Il n’est qu’une illusion, puisqu’il n’y avait qu’un marché unique fonctionnant que du côté dominicain, le pays dominant. Voilà pourquoi le marché du pays dominé à Ouanaminthe est traité en parent pauvre, abandonné, rien de comparable avec celui de l’autre côté du Pont, à Dajabon.

Ce n’est pas par hasard que les oligarques, les compradores et leurs laquais de la classe politique traditionnelle n’ont pas apporté leur plein soutien à l’initiative du canal car c’est contraire à la philosophie de leur patron l’impérialisme américain.

Aux logiques des dirigeants de la République voisine et de ceux des réactionnaires haïtiens au pouvoir, s’oppose une autre, celle du peuple-travailleur. Car le  mot d’ordre des paysans est : le canal ne s’arrêtera pas !

Toute initiative générant son propre mot d’ordre, son propre slogan « KPK : Kanal la pap kanpe » illustre qu’un mouvement est bien né, un mouvement d’indépendance qui ne va pas s’arrêter ! Et l’essence de ce mouvement révolutionnaire reste justement à consolider politiquement et à renforcer davantage.

Il faut continuer à empêcher la circulation des produits dominicains sur l’ensemble de la frontière pour protéger notre production nationale. Tout comme l’a fait la République voisine, nous devons pour le moment systématiquement interdire toute entrée et ce, sous aucune condition de produits dominicains en Haïti.

Cela ne doit pas être une action fantaisiste, mais elle doit relever d’un grand mouvement de protection agricole de façon à empêcher tout complot de sabotage et de façon à transformer notre économie nationale au niveau de l’agriculture.

Vu les complicités de l’Etat central, l’actuel régime ne saurait prendre une telle mesure.  Cette tache revient aux maires qui ont montré leur solidarité au projet. Ils peuvent déclarer interdit tout achat de produits dominicains pour revendre en Haïti. Et la fermeture de nos frontières demeurera inviolable à tout un chacun, sauf pour des cas d’urgence.

Ce serait un gage de souveraineté, de révolte et de dignité pour notre pays, symbole de la résistance face au système colonial, si en ce moment précis de la construction de notre premier canal, tous nos postes frontaliers restaient fermés jusqu’à nouvel ordre. Le message serait clair que nous ne sommes pas disposés à nous soumettre à leur diktat ni à leur obsession de coloniser la première république africaine libre et indépendante du continent.

L’heure est venue de rendre au peuple le pouvoir d’agir et de décider. Pour avoir l’espoir de gagner une bataille, il faut commencer par l’organiser et par prendre des positions adéquates, drastiques, catégoriques qui conviennent au bénéfice du peuple et du pays.

Ce n’est pas avec Ariel Henry et consorts de la soi-disant opposition que des solutions seront trouvées pour la renaissance d’Haïti. C’est au contraire sans cette classe politique et contre elle qu’on doit agir. Il faut une rupture, notamment, avec ces deux ailes d’une même politique pourrie des élites capitalistes qui continuent à assassiner le pays. L’exigence d’une rupture totale avec ces assassins de Jean-Jacques Dessalines est indispensable et sera la clef absolue de toute réponse conséquente à la situation actuelle du pays.

Mobilisons-nous partout, de Ouanaminthe à Les Irois, paysans, travailleurs, ouvriers, jeunes et moins-jeunes, pour finir avec cette honte nationale. Le moment est venu de réaliser l’unité nationale pas seulement pour construire un canal mais pour chasser l’élite anti-haïtienne, antinationaliste qui dirige le pays depuis le coup d’Etat du 17 octobre 1806 et l’assassinat du Père de la patrie, de façon à construire une véritable Nation et créer une société plus juste, prospère  et humaine.

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