Peut-on rendre possible l’impossible ?

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Depuis l’assassinat odieux du président Jovenel Moïse, Haïti s’enfonce dans l’anarchie et l’arbitraire. Malgré l’indignation, il semble que la tendance se dirige vers une intensification des manœuvres d’envergure sans avenir. Au niveau de l’Exécutif,  notamment au sein du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), les Conseillers ont procédé à la dernière passation de la présidence tournante, comme le souhaitait le Groupe Montana, au-départ à l’origine de cette idée néfaste. En effet, le représentant de l’oligarchie, Laurent Saint-Cyr, vient de succéder à Fritz Alphonse Jean pour continuer la démagogie. Rien de surprenant quand 24 heures plus tard, le Directeur de la police nationale, Normil Rameau, est remplacé par Vladimir Paraison.

Que présagent réellement ces deux actes politiques ? On le voit, ces deux événements ne suscitent guère d’enthousiasme au sein de la population. La raison est que tout ce qui s’est passé depuis le parricide de Pont-Rouge ne sert que les intérêts de la classe dirigeante, afin qu’elle  préserve ou réajuste ses intérêts politiques et économiques, et consolide son pouvoir face aux masses populaires. Cette vérité s’inscrit dans la lutte entre deux projets de société antagoniques. L’une vient d’une classe sociale qui détient les rênes du pouvoir comme sa propriété privée, dans le but évident d’assurer la continuité d’un féodalisme greffé au système capitaliste, tout en exploitant l’autre depuis des siècles, celle des exploités et des opprimés.

Évidemment, pour tromper l’opinion publique et gagner le soutien des naïfs, des indécis ou des hésitants, les renégats de la classe possédante ne font que fabriquer des boucs émissaires.  En réalité, il s’agit d’un sombre complot. C’est ainsi qu’il faut comprendre certains remaniements ministériels dont le limogeage de l’ancien Premier ministre Garry Conille, remplacé par Alix Didier Fils-Aimé et la toute récente nomination d’un nouveau chef de police parmi le personnel de cette institution.  De nouvelles manœuvres de la classe dirigeante  de manière à masquer la réalité, à savoir la faillite totale du système.

On limoge des gens et on installe d’autres à la tête d’un appareil d’État pourri depuis longtemps. Qu’est-ce qui a changé depuis qu’on procède à ces jeux de chaise musicale ? La réalité est qu’aucune amélioration, aussi minime soit-elle, n’a été constatée. La raison c’est que cette minorité qui s’enrichit et gaspille les deniers de l’État, n’est pas formé pour apporter le moindre changement. Leurs patrons les placent au pouvoir uniquement pour exécuter leurs ordres, sans se soucier de l’avenir du pays. Ils facilitent la mise en œuvre des réformes insignifiantes et fragmentaires pour jeter la poudre aux yeux de la population, semer la confusion et dissimuler l’incompétence et la collaboration des dirigeants des classes dirigeantes.

De qui se moque-t-on ? Changer les individus ou quelqu’un de la machine gouvernementale n’a aucun sens si ce n’est pas suivi d’un changement de cap. Remplacer un élément de l’appareil de domination impérialiste par son équivalent et prétendre que cela peut changer la situation est un total mépris de la volonté populaire. Quelles que soient les contradictions entre la volonté des masses et la politique gouvernementale, toutes ces opérations participent au maintien de la domination impérialiste contre les droits du peuple. Derrière ces réformes cosmétiques se cache, en fait,  une véritable tromperie dont le seul but est de détruire l’avenir des jeunes et d’encourager la précarité et l’exploitation les plus brutales.

Se contenter de changer les techniciens ne suffira guère à empêcher l’augmentation de la corruption d’État et la continuité de la délinquance politique. Ce sont toujours les mêmes politiques injustes, les mêmes abus de pouvoir qui persistent. Ce sont toujours les mêmes gouvernements, ceux qui sont responsables du chômage, de la vie chère et de l’extrême insécurité dans tous les domaines de la vie nationale. Pour relancer le pays, il faut rendre possible l’impossible, c’est-à-dire, prendre une autre direction. Inutile d’avoir des anciens ou nouveaux gouvernements, les mêmes traîtres comme Conzé qui continuent à trahir le peuple et la nation. Des Conseillers Présidentiels, dont l’un ne vaut pas l’autre, sorte d’authentiques vendeurs de patrie, des subalternes  à l’instar de Sudre Dartiguenave. Des chefs de la police, agents patentés et laquais à la merci des puissances tutrices. Devant le tribunal populaire, ils répondront de leur trahison et devront être  condamnés pour leur allégeance à l’ennemi et leur participation à la déstabilisation du pays.

Oui, le peuple est capable de rendre possible tout ce qui parait impossible aux yeux des caméléons. Grâce à sa conscience de révolté et sa volonté de rupture, imprégné du serment révolutionnaire de ses ancêtres au Congrès de Bois-Caïman du 14 Août 1791 et au soulèvement général une semaine plus tard des esclaves des plantations, il peut changer l’histoire. Cette volonté constitue la preuve la plus éclatante que seul le peuple est capable de transformer complètement cet appareil d’État néocolonial, en jetant toutes ces composantes humaines à la poubelle.

Le  peuple haïtien opprimé, privé depuis deux siècles de son droit le plus fondamental, celui de disposer de ses territoires historiques peut arrêter à jamais la spirale infernale qui le gangrène. Il ne s’agit pas de changer de commandeur et de garder intact l’appareil d’Etat criminel formellement  attaché au service de la cause impérialiste qui perpétue un système contre les droits des peuples de décider de leur destinée. Il s’agit plutôt de transformer complètement cette machine politique et de la reprogrammer afin qu’elle cesse de reproduire ces ordures multiformes de la classe politique traditionnelle.

Actuellement dans le pays, on recycle certains déchets toxiques humains sous prétexte de dirigeants gouvernementaux. Il faut se rebeller contre cela afin de changer radicalement l’appareil d’État dans le cadre d’une lutte de libération nationale. C’est une vérité qui doit être constamment répétée : le droit du peuple à la paix et son droit à décider de son propre avenir de sorte que nous devenions un Etat fort politiquement, économiquement et idéologiquement. Une Nation créatrice d’une nouvelle génération de femmes et d’hommes de mentalité différente, conscients et conséquents.

 

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