L’évêque du diocèse de Jacmel et président de la Conférence épiscopale d’Haïti, Monseigneur Launay Saturné, a pris certaines positions qui n’ont pas fait plaisir au gouvernement Moise-Lafontant. En effet, dans un discours de circonstance à l’occasion de la fête patronale de la Vallée de Jacmel, Saint Jean Baptiste le dimanche 24 juin 2018 dernier, Mgr Saturné a catégoriquement dénoncé la décision d’augmenter les prix de l’essence. Il critique le fait qu’on continue d’ajouter de nouvelles taxes sur la population malgré les conditions déplorables et de vie chères dans lesquelles vivent les masses défavorisées.
Il a même interrogé les autorités concernées en ces termes : « est ce que les services sociaux seront améliorés pour satisfaire les droits de tous les citoyens si les prix de l’essence sont obligés d’être augmentés ? Cela permettrait-il de satisfaire les besoins fondamentaux de tous les citoyens. Est-ce que l’augmentation des taxes nous permettra d’améliorer les infrastructures sanitaires, routières et éducatives ? Ces mesures permettront-elles à la population de bénéficier de meilleurs soins de santé ? L’augmentation des taxes permettra-t-il de scolariser gratuitement les enfants ? »
Les dirigeants doivent être conscients que le pays est pauvre et qu’il ne faut plus gaspiller les maigres ressources. Il faut diminuer le gaspillage et créer des emplois pour que nos jeunes restent au pays. « Il faut créer plus d’emplois et diminuer le chômage. Cela empêchera nos frères d’aller en terre voisine à la recherche de ce qu’ils auraient pu trouver ici »
Saturné se présente comme au temps lointain de la théologie de libération, quand des prêtres prennent des positions allant dans l’intérêt des masses populaires, positions qui n’ont pas été celles des dirigeants de la haute hiérarchie de l’église catholique.
Dans ce sermon, il s’est fait l’avocat défenseur de la classe ouvrière, position qu’aucun des partis politiques traditionnels visant le pouvoir n’a jamais prise « Après avoir augmenté les taxes, allez-vous également réviser à la hausse le salaire minimum des ouvriers ». Question fondamentale puisque les ouvriers ne cessent de réclamer une augmentation décente et raisonnable à leurs salaires soit de 1000 gourdes pour une journée de travail.
Il a touché du doigt la plaie à savoir la corruption, le gaspillage et la mauvaise gestion des fonds publics et des ressources du pays en s’adressant directement au président inculpé dans une affaire de blanchissement d’argent, Jovenel Moise. « Notre pays est pauvre alors que ses ressources sont gaspillées. Il faut que l’on soit conscient de la situation précaire de notre pays et éviter les gaspillages à tous les niveaux »
Le ministre de la Culture et de la Communication Guyler C. Delva, mercenaire payé pour être le propagandiste du Parti au Pouvoir le PHTK n’a pas tardé à répondre. Ainsi dans une conférence de presse le mardi 26 juin, le coquin et mesquin de nature a pu trouver des mots pour essayer de défendre sa clique « Nous avons beaucoup de respect pour les autorités religieuses. En plus, il s’agit d’un évêque. Cependant, je veux lui demander comment le gouvernement peut améliorer la situation de la population sans ressources financières »
« Nous ne pouvons pas financer les programmes sociaux à l’intention de la masse défavorisée. Sans moyens financiers, on ne peut entreprendre aucune action pouvant avoir une incidence sur les conditions de vie de la population. Ceux qui possèdent plus donnent plus, et vice versa. C’est un devoir civique. Un citoyen doit se sentir fier de contribuer au Trésor public. Jusqu’à présent, personne ne peut prouver le contraire. Ce gouvernement ne gaspille pas les ressources. Nous sommes en train de construire beaucoup de routes. Nous réalisons beaucoup d’investissements dans différents secteurs ». Propos creux qui en quelque sorte n’ont pas changé en rien des préoccupations du président de la Conférence épiscopale d’Haïti face à la politique économique du gouvernement.
Mercredi soir 27 juin, au stade Sylvio Cator, à la célébration des 75 ans de consécration d’Haïti à Notre-Dame du Perpétuel Secours, le président Jovenel Moise, lui a profité pour répondre au président de la conférence Episcopale d’Haïti, Mgr. Lauré Saturné « On ne peut construire un pays sur le mensonge, sur des fausses informations, des rumeurs, la haine, la violence et l’hypocrisie. Ces actes sont contraires à l’Évangile ». Qu’est-ce qu’il veut dire par là ; puisque, c’est son gouvernement qui annonce la possibilité absolue d’augmentation du prix des carburants. Ou est le mensonge et les fausses informations ?
Pour fermer la bouche du président Jovenel Moise ; l’évêque de Jacmel Launey Saturné dans son homélie au stade Sylvio Cator lui frappa en pleines joues « Si depuis 1978 l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que la maladie de la petite vérole est éradiquée à travers le monde, Haïti a d’autres formes de petite vérole qui le ravagent. Les formes de petite vérole touchent plusieurs domaines, y compris l’appareil judiciaire. Des gens qui devaient répondre de leurs actes circulent dans les rues sans se soucier le moindre du monde. Pire encore, des gens qui étaient derrière les barreaux sont relâchés tout simplement après un appel téléphonique. Ces choses ne peuvent en tout cas provoquer qu’un climat d’insécurité dans le pays ». Pour ajouter ensuite : « la corruption, l’insécurité, l’injustice, le chômage sont entre autres maux qui nous rongent »
Enfin « Je vous exhorte à remercier Dieu et prier afin que les conditions de vie s’améliorent au profit de tous les Haïtiens »
« Plus d’emplois, moins de chômage, plus de transactions financières et moins de pauvreté. On a besoin de moyens financiers, de moyens économiques pour que nos enfants aient accès à l’école et que la population ait accès aux soins de santé »
« Il faut prendre conscience que le pays ne peut rester dans cet état » exhorta-il !
Certes, le pays ne peut plus rester dans cet état, les masses organisées et conscientes de la situation doivent faire le nécessaire, elles doivent agir pour combattre leur ennemi de classe, allié des puissances tutrices exploitantes, source de leur misère et de leur pauvreté. Seule une lutte de libération nationale peut nous en sortir de ce labyrinthe.