Le Parti Solidarité Africaine pour la Démocratie et l’Indépendance (SADI) condamne la frappe de l’armée française contre la localité de Bounti et exprime sa solidarité et son soutien aux victimes de cette tragique bavure.
Le Parti SADI a invité à son siège les représentants, les parents de victimes des localités de Bounti et de Douentza pour échanger sur l’ampleur de la tragédie qui frappé le village de Bounti, au pied de la Falaise, au Nord-Ouest de Douentza, le dimanche 3 Janvier 2021 entre 14H30 et 15 Heures, suite à des frappes d’une rare violence de l’armée française ayant visé des populations qui célébraient un mariage.
A l’issue de nombreuses séances d’écoute, de recoupements et de la confrontation de différentes versions, auxquels s’ajoute un faisceau de preuves irréfutables du lieu d’intervention de l’armée française, le Parti SADI déclare sans ambages que l’armée française a commis une tragique bavure qui a coûté la vie à de nombreux innocents et décimé partiellement une lignée familiale.
Pour le Parti SADI, Il ne s’agissait nullement de Groupes Armés Terroristes, mais d’un rassemblement festif pour célébrer un mariage.
Vouloir occulter cette réalité et conclure à la présence de Groupes Armés Terroristes pour justifier une quelconque frappe de l’armée française, est une insulte à l’intelligence collective de notre peuple profondément attristé par cette tragédie.
La version que l’armée française tente de nous faire avaler ressemble à une fable. Elle n’est ni crédible, ni acceptable. Parce que dans sa version, elle soutient que les observations qui ont précédées la frappe ont établi qu’il s’agissait de Groupes Armés Terroristes. Alors des questions méritent d’être posées:
– Quels sont les éléments qui l’ont conduite à identifier formellement ces Groupes terroristes ?
– Des armes ont-elles été repérées? Quelle est la nature de ces armes ?
– Les mouvements observés étaient-ils ceux des GAT?
– Par ailleurs, l’armée française soutient n’avoir effectué qu’une seule frappe.
Pourtant, ce sont deux Mirages 2000 basés à Niamey qui ont largué trois bombes. Ce qui confirme les témoignages recueillis qui parlent de deux frappes: une première qui a fait 16 morts et une seconde qui a fait 3 blessés qui succomberont au cours de leur évacuation (1 est mort avant d’atteindre le Centre de santé, le second meurt au dispensaire, le 3 ème, évacué à bord d’une ambulance vers Sevaré a été intercepté à un barrage tenu par la malice donso. Le blessé en fut extrait et exécuté).
– Ces mêmes témoignages établissent qu’aucun Djihaddiste n’était présent, qu’il n’y avait ni arme, ni moto;
– Pourquoi, l’armée française d’habitude prompte à célébrer ses trophées contre les Groupes Armés Terroristes a -t-elle gardé le silence durant 48 heures sur les évènements de Bounti ?
– Quelle crédibilité peut-on accorder à sa version lorsque c’est elle même qui envoie une mission d’enquête sur les lieux de la frappe et écarte d’emblée la thèse d’une bavure ?
– Comment un nombre si élevé de Djihaddistes peut-il se rassembler en plein jour dans une zone où les armées françaises, maliennes, le G5 Sahel concentrent leurs efforts dans leur traque et leur élimination ?
– Où se trouvent les carcasses des motos repérées par la chasse française ?
Le Parti SADI rappelle que ce n’est pas la première fois que l’armée française commet des bavures sur le territoire malien. Dans la nuit du 23 au 24 octobre 2017, elle a bombardé un camp de groupes djihadistes dans le secteur d’Abeibara, près de la frontière algérienne où étaient détenus des soldats maliens Kidnappés par le Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans.
L’action qui a mobilisé des chasseurs Mirage 2000, des Hélicoptères Tigre, les forces spéciales « Sabre » et des soldats de la Force Barkhane, a couté la vie à 11 soldats maliens. Il a fallu une forte pression de l’opinion publique nationale pour contraindre la France à admettre la bavure.
Il est fort à craindre que la tragédie de Bounti ne se répète ailleurs. Le refus d’une franche collaboration de Barkhane avec les Forces armées maliennes et celles du G5 Sahel , contrairement aux homélies hypocrites et aux convenances diplomatiques, sa volonté affichée de continuer à se comporter en terrain conquis au Mali depuis 2013 et sous la couverture juridique de l’accord de coopération militaire qui interdit toute poursuite ni même interpellation sur d’éventuelles infractions, actes criminels et dégâts, constituent un véritable passeport à la bavure et à l’impunité.
L’armée française circule sans restriction sur toute l’étendue du territoire national. Elle n’a pas besoin de solliciter l’armée malienne. L’État du Mali n’a aucun droit de regard, encore moins un contrôle sur ses agissements. Dans ces conditions, comment croire aux propos tenus par le ministère malien de la Défense qui soutient avoir été associé à cette boucherie?
Dans la prétendue collaboration, la France ne fait qu’intégrer au sein des unités maliennes des détachements de liaison et d’appui, dans le but évident de mieux surveiller et d’espionner les unités maliennes. Aussi, l’armée française peut-elle mettre sur écoute les dirigeants politiques, les acteurs sociaux ou toute autre personne pouvant représenter un danger quelconque. Une possibilité qui est également élargie à la MINUSMA.
Cette triste réalité confirme aisément le renforcement d’une situation d’inféodation de notre armée nationale à l’armée française. Ceci n’a hélas pas été remis en question par le Gouvernement de Transition.
L’attitude du Gouvernement de Transition qui manifeste clairement son soutien à l’Accord de défense avec la France n’est pas de nature à créer les conditions d’un débat profond et serein entre les maliens qui doivent, sur la base d’une saine évaluation de cette présence française sur notre territoire, décider du destin du Mali et de son armée.
Du reste, le Gouvernement de Transition a raté l’occasion de se taire. Ses propos sur le déroulé des faits qui s’inscrivent dans le cadre d’une opération conjointe baptisée « Eclipse », sont en nette contradiction avec son engagement et sa promesse d’envoyer une mission d’enquête sur le terrain.
Le Parti SADI :
– Condamne le bombardement de la localité de Bounti par l’armée française ;
– Exige la prise en charge des blesses et des orphelins, leur indemnisation par les autorités ;
– Exige du Gouvernement de Transition, une évaluation de l’Accord de Coopération militaire entre la France et le Mali et de la présence des armées étrangères avec l’ensemble des forces politiques et sociales ;
– Demande aux autorités maliennes la dénonciation de l’accord de défense inique ;
– Exige que la France reconnaisse la bavure et présente solennellement ses excuses publiques aux familles des défunts, aux blessés, à tout le peuple malien.
Bamako, le 18 janvier 2021
Le Bureau Politique