Lettre ouverte au Président Joe Biden et son Administration

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Monsieur le Président,

Nous, du journal Haïti Liberté, sommes extrêmement préoccupés face à l’obsession, sinon, l’intérêt manifeste de votre pays, les Etats-Unis d’Amérique, d’intervenir militairement en Haïti. Nous vous adressons cette lettre ouverte pour vous dire que l’inadmissible a été atteint et même dépassé. De grâce, ayez un peu de respect pour le peuple haïtien.

Depuis la domination plus que centenaire de notre pays par les Etats-Unis d’Amérique, Washington et toutes les institutions qu’il influence telles que : les Nations-Unies, l’OEA, la Banque Mondiale et le FMI ont catégoriquement décidé à leur manière et à leur goût de l’avenir d’Haïti et dans certaines circonstances historiques, ces décisions portent gravement atteinte à notre souveraineté et à nos droits fondamentaux de peuple.

Si le peuple affamé, méprisé, humilié est dans les rues manifestant sa colère, ce n’est guère à vous de décider de quoi que ce soit, sous quelque forme que ce soit. Vous aviez eu tout le temps pour agir. Considérant que le pays vit à l’heure actuelle des circonstances extrêmement difficiles, savez-vous que nous sommes en colère contre votre ingérence, de votre domination néocoloniale ? Oui monsieur le Président, nous en avons assez !

Votre pays par ses ambitions hégémoniques et impériales nous a imposé des collabos à la présidence, à la Primature, au Parlement et dans toutes les sphères clés du pays.

Maintenant, c’est à nous, Haïtiennes, Haïtiens de vous demander, qu’avez-vous fait de notre pays dont l’aigle étoilé tient fermement sous ses serres ? Justement, c’est récemment, en 2017, que vos soldats de la force d’occupation militaire sous couverture des Nations-Unies ont laissé le pays. Et aujourd’hui encore, une instance liée à l’ONU, le BINUH (Bureau Intégré des Nations-Unies Haïti), dirigé par une américaine, Mme Helen La Lime, est la vraie, pour ne pas dire, la seule responsable des décisions visant l’avenir de la Nation haïtienne.

Monsieur le Président Biden, si Haïti est dans cet état déplorable, inacceptable, c’est à votre Administration de rendre compte de tout ce qui s’est passé. N’est-ce pas à nous de vous demander, comment Haïti en est-il arrivé à cet état de décomposition, comment est-il devenu un État failli ? Quoi qu’il en soit, si le pays est entré dans une ère de bouleversements sans précédent, c’est le résultat découlant de la politique sinistre de vos prédécesseurs.

Cette situation chaotique que nous vivions maintenant, rabaissant le citoyen haïtien à un niveau inférieur à celui d’un animal, nous ne l’avions pas connue avant la prise de contrôle de la gestion du pays par les Etats-Unis. Et si désormais le pays ressemble à un capharnaüm, qui en est, selon vous, le premier responsable, si ce ne sont pas les principaux gouvernements antérieurs des Etats-Unis d’Amérique ? Ce sont eux qui ont tout décidé. Ce sont leurs derniers mots qui donnent accès à une élection en Haïti, ou en valident les résultats. C’est à Washington de dire si tel ou tel scrutin est honnête ou pas, acceptable ou non, si un gouvernement, même légitime et constitutionnel, doit rester ou partir.

En fait, ce n’est jamais le peuple haïtien qui décide de son avenir. Comment peut-il être responsable de la gabegie et de l’effondrement de l’Etat pourri qui a été installé par la seule volonté d’une puissance d’exploitation assoiffée de richesses, de gloire et dépourvue de toute dignité.

Votre pays par ses ambitions hégémoniques et impériales nous a imposé des collabos à la présidence, à la Primature, au Parlement et dans toutes les sphères clés du pays.

Des soumis, des insouciants purs sous-produits du colonialisme et maintenant vous prenez le malin plaisir à les sanctionner comme s’ils seraient les seuls coupables et que vous, vous étiez blanc comme neige dans cette descente en enfer.

Les fautes dont vous reprochez à vos hommes de mains, vos anciens employés, vous les connaissiez depuis belle lurette. Vous les aviez tolérés dans toutes leurs forfaitures, leurs trafics illégaux, leurs liaisons dangereuses.  Mais qu’est-ce qui vous prend, maintenant, de les jeter à la poubelle, de les livrer à la curiosité de l’opinion publique comme s’il s’agissait d’une découverte ? Non, monsieur le Président, ils sont vos salauds, ils travaillaient pour vous et peut-être même qu’ils continuent de travailler pour un ou deux de vos multiples Services.  C’est vous qui les aviez employés pour paraphraser le soi-disant sénateur Joseph Lambert, victime aujourd’hui d’un excès de confiance en son employeur.

Monsieur le Président Biden, l’Administration américaine s’est toujours engagée dans une politique qui permettait le maintien, sinon, le développement des privilèges des nantis, la corruption et les manœuvres de freinage de tout projet de développement national. On a assisté à une politique de sabotage systématique, téléguidée par l’impérialisme et ses alliés objectifs locaux. Avez-vous oublié, monsieur le Président, leur participation ouverte aux événements qui ont abouti au renversement du régime Lavalas, deux fois consécutivement et de leur soutien au PHTK de Michel Martelly ?

Que voulez-vous cacher maintenant, quand les forces de la réaction sont les complices conscients de votre politique déstabilisatrice ? Aussi ne pouvons-nous, aujourd’hui comme toujours d’ailleurs, de dire que la voie empruntée est celle que vous aviez tracée et imposée. Qui avait armé des assassins comme Guy Philippe et Emmanuel Constant ? Qui étaient les vrais instigateurs de leurs crimes ? Tout désignait bien sûr, l’impérialisme américain.

Les coupables, ce sont vos salauds, monsieur Biden, le peuple haïtien n’a rien à y voir. En rendant publique la liste des trafiquants de toutes sortes, pour s’attaquer aux causes qui sous-tendent la récente escalade de violence, en dénonçant leurs abus et leurs carences dans la gangstérisation du pays, vous ne faites rien d’autre que vous avilir vous-mêmes, dans la mesure où vous en êtes le chef d’orchestre.

Monsieur le Président Biden, votre administration et toutes celles qui l’ont précédée nous ont déstabilisés et désorganisés à dessein. La vôtre ne pourrait se présenter comme notre sauveur. Le mieux est de laisser le peuple haïtien prendre en main la destinée de son pays de sorte qu’il jouisse d’un minimum vital, qu’il regagne sa dignité et sa souveraineté. Le moment est venu pour que les Haïtiennes et les Haïtiens puissent édifier une société humaine, fraternelle, un Etat d’orientation socialiste afin que cesse l’exploitation de l’homme par l’homme en Haïti. De leur laisser cette opportunité, ce serait une façon de vous racheter, vous et vos prédécesseurs, et de nous prouver votre attachement affiché à la démocratie et aux déclarations jusqu’ici creuses de l’« amitié » des États-Unis pour le peuple haïtien.

Monsieur le Président,

Il est déjà très tard. Pour l’honneur, hâtez-vous de faire montre d’un brin d’humanité, pour aider à vous faire accepter comme un être enfin humain. L’Histoire vous en saura gré.

Berthony Dupont
Directeur

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