Le procès mondialisé du système capitalisme impérial

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1ère partie 

La mise en accusation de ce système destructeur par le Centre de Recherche et d’Analyse en Histoire Contemporaine d’Haïti (CRAHICH) en 217e année de l’indépendance

 

L’observation et l’analyse minutieuse, du système capitaliste, d’un simple point de vue humanitaire, indique qu’il s’agit, dès le départ, d’un projet « humanicide » D’ailleurs, il est reconnu par plus d’un que le capitalisme (1) peut tout faire, sauf le bonheur de l’humanité. Car dans son essence, il est l’expression parfaite de la négation du bien-être collectif, d’égalité et de justice sociale.

À contrario, ce système se développe aux dépens des intérêts d’autrui. Les deux principales caractéristiques du capitalisme peuvent être, à elles-seules, justifier l’affirmation ci-dessus. Car, la loi fondamentale du capitalisme réside en : la primauté de la propriété privée des moyens de production ; une dynamique fondée sur l’accumulation du capital productif guidée par la recherche du profit. Cette recherche systématique de la plus-value (2) se fait grâce à l’exploitation des travailleurs par les détenteurs des moyens de production en vue de la transformer d’une partie de cette plus-value en capital (3) Par exemple, pour se développer, après l’esclavage et le travail forcé, le capitalisme a « enfoncé dans la plaie », à travers les mécanismes d’accumulation primitive du capital, tel qu’il est expliqué par K. Marx dans les chapitres 26 à 33 du livre 1 du capital (4), tout le fondement du capitalisme s’assoit sur le vol, l’exploitation et la domination d’autrui, pour ainsi dire, sur l’assujettissement ou encore sur la déshumanisation, purement et simplement, de l’espèce humaine.

En fait, en établissant les bases de la révolution industrielle du XIXe siècle, Marx a montré clairement comment ce système capitaliste a ses jalons dans le l’esclavagisme, son ancêtre légitime et dans l’accaparement des biens du domaine public de l’État aux dépens de tout le reste de la société. Descendant de l’esclavagisme et du féodalisme, le capitalisme se déshumanise davantage en instituant un dispositif impliquant, à la fois, un mode de production et un système de pensées (l’idéologie bourgeoise) suivant lesquels, s’organisent les rapports sociaux tout en imposant, du même coup, son appareillage de « gouvernementalité (5)». Il s’agit, pour ainsi dire, d’un système dont le capital prime sur tout, y compris sur la vie humaine. Et, cette vaste « machine » infernale s’érige envers et contre tous via des instruments d’aliénation et de déshumanisation les plus « efficaces » et les plus « efficients » pour le malheur de l’espèce humaine. Ce faisant, un tel système basé fondamentalement sur la corruption, le vol, l’injustice, l’exploitation, l’assujettissement, la domination et même l’abêtissement de l’Homme, nécessite un procès d’exception, mondialisé dont le verdict doit être, inexorablement, la « peine de mort ». En témoignent, pour le moins, ces principaux voies et moyens présentés par Marx, pour expliquer la base du développent du capitalisme impérial contemporain (6) au début du XIXe siècle. Par les capitalistes anglais. L’accumulation primitive du capital s’acquiert à partir de :

  1. L’enrichissement par vagues successives des capitalistes anglais qui ont spolié l’Eglise de ses biens, aliéné les domaines de l’Etat, pillé et enclos (7)les terrains communaux, ce qui entraine la révolution agricole tout en entrainant, par voie de conséquence, l’exode rural et des gains de productivité en leur faveur.
  2. L’explosion des bénéfices du commerce colonial au milieu du XVIIIe siècle en particulier grâce aux plantations sucrières de la zone caraïbes en général, et plus spécifiquement d’Haïti, appelé à l’époque Saint-Domingue, profitant du travail gratuit des esclaves(8)

Par ces faits et motifs, nous déclarons la mise en accusation de ce « système cannibale » et injuste en vue de l’épanouissement et le bien-être du genre humain tout entier. Sachant que les biens de la terre sont suffisants à nourrir tout le monde. Sachant qu’il est un principe inaliénable que personne n’a le droit exploiter autrui ; considérant qu’il s’agisse, pour ainsi dire, des droits naturels, inaliénables et sacrés de l’homme qui sont bafoués par le capitalisme, les hommes étant nés libres et égaux en droits.

Ce principe étant consacré par l’article 1e de la déclaration universelle des droits de l’homme (9) et du citoyen de 1791, il est repris dans l’article premier de la déclaration universelle des droits de l’homme (10), proclamée par l’assemblée des nations-unies le 10 décembre 1948 et adoptée à l’unanimité par les 58 États membres qui constituaient l’assemblée générale à l’époque. Il y a lieu d’accuser le capitalisme [dans son fondement même] comme étant un système fonctionnant à contre-courant de tous ces principes « universels » corollaires de ces valeurs d’éthique pris en compte dans les deux déclarations ci-mentionnées, à savoir : le respect de la dignité et de la valeur de la personne humaine. Bref, le capitalisme est, à nos yeux, un système opposant aux droits humains les plus fondamentaux. D’où la nécessité et le fondement de son procès.

A suivre

 

Notes

1 Il convient de noter qu’en critiquant le capitalisme, nous l’abordons à partir de la « définition classique » connue de tout le monde, celle de Karl Marx, suivant laquelle, le capitalisme se définit comme étant un mode de production fondé sur « l’exploitation des uns par des autres » et que le capitaliste (propriétaire du capital) ne rétribuant pas le travail de l’ouvrier à son juste prix, tire de ce travail  « non payé » une plus-value qui lui permet d’accroitre son capital,  et donc d’accumuler de nouveaux profits. Dans le même temps, « ce que le salarié s’approprie par son labeur est tout juste suffisant pour produire sa vie », c’est-à-dire pour continuer à travailler.

2 Le surplus prélevé sur le travailleur. La plus-value (ou parfois survaleur1) est un concept forgé par Proudhon, puis repris et développé par Karl Marx dans sa critique de l’économie politique, et détaillé dans Le Capital. Karl Marx reprend et complète la théorie de la valeur des économistes classiques (Adam Smith, David Ricardo, etc.), selon lesquels la source de la valeur d’échange d’une marchandise est le travail qui y est incorporé.

Dans la théorie de la valeur de Marx, la plus-value a une signification précise : c’est la différence entre la quantité de valeur ajoutée par le travailleur à la marchandise initiale et la valeur de la force de travail nécessaire (le travail lui-même étant “incommensurable” au sens de non-marchandisable puisque le travail, c’est l’individu, un être vivant, pensant, et non une marchandise).

3 Il est le résultat de la transformation des plus-values réalisés par les capitalistes (ceux qui détiennent les moyens de productions) grâce à la force de travail des prolétaires.

  1. 4. Voir la section huit du livre I (du capital) dans la traduction française publiée en 1872, la toute dernière qui a été révisée par l’auteur avant sa mort.
  2. 5. Foucault, le courage de la vérité – le gouvernement de soi et les autres II (1984), où il précise le contenu de ce concept dans son analyse du pouvoir : « cette approche « impliquait que l’on place au centre de l’analyse non le principe général de la loi, ni le mythe du pouvoir, mais les pratiques complexes et multiples de gouvernementalité qui suppose d’un côté des formes rationnelles, des procédures techniques, des instrumentations à travers lesquelles elle s’exerce et, d’autre part, des enjeux stratégiques qui rendent instables et réversibles les relations de pouvoir qu’elles doivent assurer » cf. Texte de 1984, Dits et écrits, T. IV, [Gallimard] 1994, p. 584. Cité par Pierre Lascoumes. Pierre Lascoumes, « La Gouvernementalité : de la critique de l’État aux technologies du pouvoir », Le Portique [En ligne], 13-14 | 2004, mis en ligne le 15 juin 2007, consulté le 18 septembre 2021. URL : http://journals.openedition.org/leportique/625 ; DOI : https://doi.org/10.4000/leportique.625
  3. Suivant un concept d’Alain Badiou dans À la recherche du réel perdu, Fayard 2015, p.26.
  4. Ces propos sont présentés dans les mêmes termes que Marx par Michel Beaud dans son essai intitulé : Histoire du capitalisme de 1500 à nos jours, publié dans les Éditions du Seuil, France 1990, (4e édition), p. 58. Où il a écrit à propos de l’émergence du capitalisme qui prit sa vitesse de croisière au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle, lequel considéré comme étant le siècle d’élargissement des échanges marchands […] et plus spécifiquement, celui du renforcement du capitalisme anglais. En fait, écrit-il, « […] l’indépendance des colonies d’Amérique entraîne l’entreprise de la nouvelle vague des enclosures et la prolétarisation de masses rurales, avec le mouvement cumulatif d’accumulation, avec les progrès techniques, les conditions de la grande révolution industrielle du XIXe siècle ».
  5. En effet, Michel Beaud a écrit plus loin : qu’au XVIIe siècle « la traite des esclaves atteint aussi de hauts niveaux : cinquante-cinq mille par an en moyenne pour l’ensemble du siècle (alors qu’il était de l’ordre de deux mille par an au XVIe siècle), avec des périodes où elle atteint cent mille par an ; […]. Des millions africains arrachés à leurs sociétés et à leur terre par la violence et le troc ; des millions de travailleurs non payés, dont beaucoup ne recevaient pas de quoi reproduire leurs forces et s’épuisaient en quelques dizaines de mois : c’est là, ne l’oublions jamais, une base essentielle (mais largement gommé dans la pensée occidentale) de l’enrichissement bourgeois dès XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles. […] En effet, le travail forcé des esclaves noirs et des populations d’Amériques du Sud permet de dégager une énorme masse de plus-value ; celle-ci est appropriée sous forme monétaire par des négociants et des fabricants, des banquiers et des financiers d’Angleterre, principalement, mais aussi d’Europe et des colonies d’Amérique du Nord soit directement ou indirectement… » Cf. Michel Beaud, Op. Cit.

9 L’article premier de cette déclaration votée par l’assemblée nationale de France après la révolution de 1789. Il dit précisément : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. Cf. https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/menu/droit-national-en-vigueur/constitution/declaration-des-droits-de-l-homme-et-du-citoyen-de-1789#:~:text=Les%20hommes%20naissent%20et%20demeurent,Art.&text=Ces%20droits%20sont%20la%20libert%C3%A9,la%20r%C3%A9sistance%20%C3%A0%20l’oppression.

  1. https://www.un.org/fr/udhrbook/pdf/udhr_booklet_fr_web.pdf

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