Très tôt, le jeudi matin 18 octobre 2018, le président de la République Jovenel Moïse dans un tweet a écrit ceci : « L’exigence citoyenne pour que lumière soit faite sur l’utilisation des fonds PetroCaribe témoigne de la vitalité de notre démocratie. Je demande à tous les grands commis de l’Etat indexés ayant eu une part active dans la gestion de ces fonds de se mettre à disposition de la justice ».
Quelques heures plus tard, il ajouta « Je demande au chef du gouvernement de donner tous les accompagnements requis aux institutions concernées, notamment l’appareil judiciaire pour que lumière soit faite sur l’utilisation des fonds PetroCaribe. Personne n’échappera à la justice. C’est un devoir moral et de justice. ».
Enfin, dans un troisième tweet, il souligne que : « Toutes les firmes qui ont encaissé l’argent du contribuable et qui n’ont pas honoré leur engagement seront poursuivies, d’où qu’elles soient, conformément à la loi. Je demande aux représentants légaux de l’État de s’en charger suivant les formes légalement requises.»
Dans cet ordre d’idées, pour illustrer qu’il ne plaisante pas, Jovenel Moise le lundi 22 octobre 2018 passe de la parole aux actes en commençant par révoquer quelques grands potentats de son cabinet privé ; 18 hauts fonctionnaires, dont 16 conseillers parmi eux son directeur de cabinet, Wilson Laleau, le secrétaire général du Palais national, Yves Germain Joseph, tous deux des employés du premier régime Phtkiste sous la présidence de Michel Martelly.
Voilà, celui qui en visite en France le 12 décembre 2017, déclarait lors d’une rencontre avec la communauté haïtienne à Paris : « pèsòn pap pèsikite pèsòn toutotan mwen prezidan » En d’autres termes, tant qu’il est président, il ne tolérera aucun procès sur la gestion du fonds de Petro Caribe sous prétexte de persécution politique. Ainsi, le recours à cette procédure après de longs mois d’une résistance administrative floue apparait comme une perte de contrôle de la situation, une panique manifeste juste après la grande mobilisation populaire du 17 octobre 2018 commémorant l’anniversaire de l’assassinat du père fondateur de la Nation haïtienne Jean Jacques Dessalines.
Les derniers actes du président ne traduisent qu’un certain embarras du pouvoir à la suite de l’ampleur spectaculaire de la protestation qui s’est élevée sur le plan national et international, charriant une vague d’indignation de la part de larges secteurs de l’opinion publique haïtienne.
Cette panique de la Présidence aussi bien de la Primature sous pression de la rue exigeant des éclaircissements sur l’utilisation de plus de 3 milliards de dollars américains des fonds PetroCaribe a engendré une certaine inquiétude également au sein du corps diplomatique qui ne fait que multiplier des rencontres l’une après l’autre.
De son coté, le Premier ministre Jean Henry Céant pour ne pas rester indifférent annonce lui aussi au cours d’une conférence de presse donnée le lundi 22 octobre au ministère de la Communication, la nécessité de la création d’une commission indépendante de la recherche de la vérité sur l’affaire PetroCaribe et que son « gouvernement a constitué un groupe d’experts nationaux aux fins d’analyser tous les documents reçus en rapport avec le dossier #PetroCaribe. Nous allons également faire appel à une firme étrangère d’expertise comptable et d’audit en appoint à la commission indépendante »
Panique généralisée au point même que le commissaire du gouvernement Ocnam Clamé Daméus a mis ses gants pour défendre le pouvoir pourri et corrompu menacé. Ainsi il a pris soin de convoquer d’anciennes personnalités politiques dont deux anciens Premiers ministres Laurent Salvador Lamothe, Michèle Duvivier Pierre-Louis et l’entrepreneur Patrice Milfort, pour les interroger sur ce dossier qui devient de plus en plus brûlant.
Le président Jovenel Moise tout en ordonnant aux grands commis de l’État indexés de se mettre à la disposition de la justice, semblerait avoir oublié un nom puisqu’il n’en a rien soufflé. Ainsi, dans la liste il y avait : Ardouin Zéphirin, Guichard Doré, Christine Coupet Jacques, Liné Balthazar, Marie Esther Antoine, Reynold Georges, Enold Joseph, Gerd Pasquet, Jose Joseph Daniel, Erns Excéus qui ont été démis de leurs fonctions, tout comme Jean Renel Sanon, Everson Calixte, Guy Michel Vincent, Andris Riché, Georges Stanley Lucas et Lucien Jura, à leur corps défendant, se mettent à la disposition de la justice.
Pourquoi l’inculpé Jovenel Moise n’a-t-il pas mis son nom aussi dans la liste des suspects de délit pétrocaribéen quoique présumés innocents, alors que déjà dans les deux rapports du pouvoir législatif émis pas les sénateurs Youri Latortue et Évalière Beauplan, son nom serait bel et bien rapporté non seulement en tant que dilapidateurs des fonds de Petro Caribe à titre de principal responsable de l’entreprise Agritrans, mais aussi en tant qu’inculpé d’actes de blanchiment d’argent selon l’ancien commissaire de Port-au-Prince, Me Danton Léger.