Intervention militaire, James B. Foley et Pamela A. White reviennent à la charge !

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De gauche à droite : l'ambassadeur James B. Foley, le secrétaire d'État Colin Powell, le Premier ministre par intérim Gérard Latortue, le ministre haïtien de l'Économie Henri Bazin et le ministre haïtien de la Justice Bernard Gousse lors d'une rencontre au Palais présidentiel à Port-au-Prince, le mercredi 1er décembre, 2004.

L’intervention militaire internationale sollicitée par le gouvernement de Transition haïtien depuis le mois d’octobre 2022 continue de faire débat en Haïti comme à l’étranger, notamment dans les milieux politiques aux Etats-Unis d’Amérique et au Canada. Réclamée avec insistance par le Premier ministre de facto, Ariel Henry, l’affaire paraît de plus en plus compliquée dans la mesure où Washington ne veut pas assurer seul le dossier et continue donc de chercher des partenaires pour l’aider à intervenir.

Si le Canada du Premier ministre Justin Trudeau, pressé par les autorités américaines, s’engage à aller vendre le dossier auprès des autres partenaires américains en Amérique du Sud et des Caraïbes, il peine à trouver des alliés. A Washington, les partisans de l’occupation font monter la pression sur le Président Joe Biden en dramatisant sur ce qui se passerait en Haïti si l’on continue de retarder l’intervention.

Ainsi, le mois de décembre 2022 a été le mois d’une intense campagne médiatique orchestrée par les « va-t-en-guerre » que sont James B. Foley et Pamela A. White sur la question de l’intervention militaire en Haïti. Chacun a sa façon de faire miroiter le danger et pour les Etats-Unis, si les autorités ne décident d’envoyer le plus rapidement des troupes sur le terrain à Port-au-Prince, et pour la population haïtienne si on laisse les groupes armés continuer leur pénétration de plus en plus sur le territoire sans qu’aucune force n’intervienne pour les arrêter, selon eux, la République n’existera plus. Mais, dans cette guerre de communication lancée depuis la capitale américaine pour faire pression sur la Maison Blanche, certains ont choisi clairement leur camp parmi les multiples Accords politiques mis sur la table pour une sortie de crise. C’est le cas, entre autres, de l’ancien ambassadeur américain en Haïti, James B. Foley qui plaide, certes, pour une intervention étrangère rapide mais sans oublier de dire vers quelle entité politique en Haïti penche sa préférence. Dans une sorte de « Mémorandum », James B. Foley a fait ce qu’on peut appeler un diagnostic de la situation sociopolitique du pays à l’intention du Président Joe Biden afin de le convaincre d’agir rapidement, sinon il sera trop tard.

Mais, il a essayé de rester objectif dans son analyse justement pour donner plus de crédit à ses propos. En effet, dans une Tribune publiée dans la revue politique américaine Politico en date du 1er décembre 2022, l’ancien ambassadeur ne va pas avec le dos de la cuillère sur la situation en Haïti. Partisan depuis longtemps d’une intervention militaire américaine en Haïti afin d’éradiquer les gangs et la corruption politique, il souligne néanmoins que ce ne sera pas une mission facile. Car, Foley reconnaît sans détour que « Les perspectives d’une mission de sauvetage internationale semblent actuellement sombres. Il existe une opposition sérieuse à l’intervention internationale en Haïti et le refus des États-Unis de participer à la force compromet sa viabilité. Bien qu’elle devienne de jour en jour plus urgente, une intervention pourrait être mort-née si l’Administration ne révise pas son approche actuelle dans plusieurs domaines clés ».

Pourtant, si l’ex-Plénipotentiaire américain dans la capitale haïtienne ne fait pas mystère d’une opposition forte et sérieuse de la population devant la perspective d’une intervention militaire américaine, donc occupation étrangère, il ne craint pas pour autant la contradiction quand il avance « Les États-Unis disposent d’une voie étroite pour éviter le déploiement d’une force militaire de grande envergure que Washington ne peut se permettre ». En clair, face à la situation qui prévaut dans le pays, l’intervention étrangère est inévitable. Mais, pour cela, celui qui se présente comme un spécialiste de la politique haïtienne a un plan, voire un mode d’emploi qu’il définit en trois points.

« Premièrement, un accord entre les Haïtiens pour forger un gouvernement de transition sur la base de l’Accord de Montana. Deuxièmement, l’accord du nouveau gouvernement potentiel pour soutenir une Mission internationale de sécurité afin d’aider la police nationale haïtienne. Troisièmement, la participation des États-Unis à la force internationale, sans laquelle elle manquera de crédibilité – et sans laquelle les efforts des États-Unis pour obtenir un Accord politique auront peu de chance d’aboutir. En bref, toutes les parties – Ariel Henry, l’opposition et les États-Unis eux-mêmes – devront quitter leurs positions actuelles à un égard ou à un autre », propose l’intéressé.

Fin diplomate et fin politique pourrait-on dire, James B. Foley, dans ses propositions, ne tente pas moins de faire passer le groupe de Montana comme le recours possible à une solution politique à la crise et pourquoi pas le soutien tant recherché par la Communauté internationale pour l’intervention militaire sollicitée par les autorités en place mais qui bute sur l’hostilité d’une grande partie de l’opinion publique nationale notamment, les acteurs politiques.

James B. Foley

Persuadé qu’il tient là le bon argument pour convaincre Washington d’agir militairement en Haïti, par le plus grand paradoxe, l’ancien ambassadeur, de manière subtile, continue de présenter les signataires de l’Accord du 30 août comme les meilleurs alliés de Washington et les seuls pouvant faire avaler la pilule de l’occupation à l’opinion. De ce fait, celui qui fait, sans se cacher, la promotion d’une intervention militaire en Haïti ne voit qu’une entité politique capable d’assurer la suite de la Transition en l’absence d’un Ariel Henry qu’il voit comme « Un dirigeant isolé, discrédité et défaillant d’un État défaillant ; le soutien indéfectible dont il bénéficie de la part des États-Unis est aussi déconcertant que contre-productif. Les États-Unis feraient bien de suivre l’exemple du Canada, qui vient d’imposer des sanctions au patron politique présumé de Ariel Henry, l’ancien Président Martelly, un message symbolique mais puissant » ajoute James D. Foley.

Cette entité est, naturellement, l’Accord de Montana qui demeure aux yeux de l’ex-ambassadeur le seul consensus politique qui vaut la peine d’être cité dans le débat. Alors, il préconise que Washington écarte le Premier ministre de facto, Ariel Henry, de la Primature et passe les rênes du pouvoir au Groupe de Montana estimant qu’il est le plus à même à conduire les suites des évènements. « Sur le plan politique, la Communauté internationale devrait chercher à donner aux Haïtiens les moyens d’assumer la responsabilité de l’avenir du pays. À cet égard, l’Accord de Montana représente un espoir singulier de progrès. Ses membres disparates ont déjà atteint le résultat le plus rare en Haïti « le consensus » sur un plan visant à relancer les défuntes institutions exécutives, législatives et judiciaires du pays et à gouverner avec une légitimité constitutionnelle jusqu’à ce que des élections puissent être organisées de manière sûre et crédible » suggère James B. Foley dans sa Tribune de Politico du 1er décembre 2022.

Dans sa plaidoirie en faveur du Groupe de Montana qu’il croit être une des pièces maitresses dans sa campagne relative à l’intervention américaine en Haïti, ce diplomate qui n’est certainement pas le seul dans cette démarche militaro-politique sur Haïti depuis les Etats-Unis, formule le vœu que « La Communauté internationale doit insister sur la formation d’un gouvernement soutenu par un consensus pour guider Haïti à travers une Transition nécessaire vers des élections démocratiques – un gouvernement qui soit au moins basé sur le concept de l’Accord de Montana, sinon centré sur le groupe lui-même. Cela signifie que M. Ariel Henry qui a officiellement demandé aux Nations-Unies de déployer une force internationale doit être prêt à céder le pouvoir à un gouvernement de transition. La perspective d’une intervention étrangère et d’un soutien international continu semble avoir renforcé sa conviction apparente qu’il n’a pas besoin de négocier sérieusement avec ses opposants. » Enfin, pour conclure son appel à l’occupation du pays dans la revue Politico, l’ancien ambassadeur James B. Foley estime que « Le peuple haïtien ne peut attendre plus longtemps. Si la situation se détériore encore, il est impensable que les États-Unis restent à l’écart alors que des millions de personnes risquent de mourir à seulement 800 miles de nos côtes.

Washington n’aurait d’autre choix que d’intervenir une fois de plus de manière massive sur le plan militaire – sauvant des vies mais ne faisant rien pour aider à briser le cycle du dysfonctionnement et du désespoir. » Quelques jours après le plaidoyer de James B. Foley, c’est une autre diplomate qui a pris le relais dans la campagne de communication en faveur de l’intervention militaire en Haïti. Cette diplomate n’est autre que l’ex-ambassadrice américaine à Port-au-Prince, Pamela A. White. Connue pour être le porte-étendard de l’option armée en Haïti, Pamela A. White, après sa sortie il y a quelques mois, revient à la charge. C’est dans le quotidien de centre gauche The Washington Post, qu’a réapparu Pamela A. White afin, dit-elle, de mettre le Président américain, Joe Biden, devant ses responsabilités dans la crise haïtienne. Dans une Tribune intitulée « Le mal triomphe en Haïti, et les Etats-Unis ne font pas grand-chose », l’ex-ambassadrice réclame l’envoi en urgence d’au moins 2000 soldats de l’U.S. Army, sur le terrain sous prétexte de protéger l’aide destinée à la population.

Pamela A. White

En réalité, l’article de l’ancienne ambassadrice va au-delà de cette recommandation urgente. Elle commence par reprocher aux autorités de son pays de faire des discours sur le dossier haïtien tandis que le pays s’écroule et meurt à petit feu. Pamela A. White fait elle aussi un descriptif de la situation socio-politique dans lequel elle livre ce qui est aujourd’hui la réalité, selon elle. « En Haïti, des enfants se remettant de blessures par balle sont allongés sur des lits en carton en plein air. D’octobre 2021 à septembre, les Garde-côtes ont intercepté plus de 7 000 personnes (contre 1 527 les 12 mois précédents) qui tentaient d’échapper à l’enfer sur terre. Des gangs rivaux tuent les maris devant les épouses et violent les mères devant leurs enfants. Le choléra fait rage et des bébés meurent. Les rues sont des zones de guerre » décrit l’ex-ambassadrice américaine en Haïti entre 2012 à 2015.

Partisane de  première heure de l’occupation d’Haïti, Pamela A. White renouvelle sa demande à l’Administration de Joe Biden: l’envoi dans l’immédiat d’une force militaire américaine pour sécuriser la population et rétablir l’ordre dans le pays. Comme à son habitude depuis qu’elle mène campagne pour cette intervention militaire, elle pousse un « coup de gueule » vis-à-vis des responsables de son Administration « Il semble que l’on parle à huis clos de ce qui ne peut être fait en Haïti. Hommes et femmes de bien, arrêtez de ne rien faire. Le mal triomphe en Haïti », fait-elle remarquer dans The Washington Post au cours du mois de décembre 2022. D’après Pamela A. White, l’Administration Biden est indécise et donc laisse pourrir la situation en Haïti. Elle profite de sa Tribune dans le même journal pour s’en prendre aux médias américains qui, selon elle, ne s’intéressent pas non plus au drame humanitaire et politique des Haïtiens. Pour l’ex-ambassadrice, il y trop d’indifférence de la part des médias faisant peu de cas au quotidien de ce pays se trouvant à quelques milles des Etats-Unis, tout en leur donnant, au passage, un cours sur le journalisme.

Illustrant ses propos, en effet, elle avance qu’« Il n’y a aucun sentiment d’urgence de la part des médias télévisés ou des politiciens aux États-Unis quant au fait que la population de notre pays voisin souffre de difficultés insupportables. Les médias, en particulier les médias télévisés, devraient rendre compte des crises en Haïti. Montrer la brutalité des gangs, mettre en évidence les personnes qui s’accrochent à des radeaux faits de bois pourri, faire des vidéos d’enfants déshydratés et cholériques qui se battent pour vivre», enseigne-t-elle. Mais, comme son collègue James B. Foley, Pamela A. White reste persuadée que seule une intervention militaire américaine en Haïti pourrait changer la donne, faire la différence et sortir le pays du pétrin. Donc, elle espère de ses vœux que Washington et Ottawa arrivent à convaincre suffisamment de partenaires de la Communauté internationale afin de concrétiser son rêve. Pour Pamela A. White, Haïti doit être officiellement mise sous tutelle des Etats-Unis. Point barre !

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