Haïti, un État en déliquescence programmée

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Luis Abinader 54è Président de la République Dominicaine

La nation est exténuée et la Dominicanie la nargue. Qui est surpris de ce scénario ? Toi, moi, lui ? Non ! Personne ! Nul n’est étonné. C’était écrit dans le ciel. Avec ses exigences tonitruantes, avec le bruit des tambours de guerre, le voisin d’à côté veut nous imposer l’arrosage de nos terres avec nos larmes. Dans cette rivière qui demeure une cicatrice mémorielle, un nouveau chapitre s’écrit.

Hier, jeune et fougueux, le fier écolier, la tête altière, chantait les louanges des pères fondateurs. Il se voyait déjà et était prêt à défier n’importe qui et à offrir sa vie en holocauste pour sa patrie. Mais les années passent et les ardeurs se froissent. La vocation se fait hésitante, le tableau s’étiole, le voile tombe et la déception s’enracine. Sa terre natale est embrayée en marche arrière.

Rattrapé par l’obsédante réalité, il découvre l’horreur d’un peuple avec des mœurs d’une autre époque, comme au temps des flibustes où les vagabonds européens, des hommes de sac et de corde, sans aucun sens de la mesure, ne faisaient point de cadeau.

Un gouvernement qui vend ses citoyens, ses forces vives, à Cuba, à la Dominicanie, à titre d’esclaves pour les travaux des champs, ne doit s’attendre à aucun respect de ses vis-à-vis, bénéficiaires de cette aubaine. Pour l’amour de l’argent, tu vends tes propres enfants, de quoi tu t’étonnes ? Quand le président Abinader déclare : j’exige le retrait immédiat de ce canal hors de la rivière Massacre, c’est un ordre sec d’un maître à un valet. Voilà le résultat de la gabegie, de la corruption, de la concussion et de la couardise. Ils récoltent les conséquences de leurs inconséquences.

Comme l’a soutenu le journaliste Lemoine Bonneau, un pays qui partage ta frontière devrait être contrôlé au plus haut point. C’est de la géostratégie élémentaire. Haïti se lave les mains, elle ne connaît rien de ce voisin rancunier qui est loin d’oublier le passé. Or, gouverner, c’est prévoir, selon la logique de la littérature politique. Pour nos dirigeants, administrer c’est voler. Point barre !

C’est là que le bât blesse. Toujours selon Bonneau, le voisin dominicain sait tout d’Haïti, jusqu’à la pointure des chaussures de chaque dirigeant. L’argent dérobé en Haïti passe en transit d’abord chez lui avant de prendre le large. Par conséquent, il peut faire chanter qui il veut en vociférant des ordres sans enfiler de gant blanc.

Comment se sentent ces Haïtiens qui ont pillé, ruiné Haïti pour investir en République Dominicaine ? Sincèrement, le sentiment de honte ne gêne pas un poil de leur narine. Ils s’y connaissent en humiliations et sont imperméables à la déception. D’ailleurs, devant l’impudence ou l’insolence des arrogants dominicains, ils n’auraient jamais dû se retrouver sur ce territoire où nos compatriotes croupissent dans les « Bateys ». Même quand ils sont riches à millions et habitent des châteaux, les Dominicains les voient déjà dans leur lorgnette et les déshabillent de l’autre côté de la bouche à propos de leur richesse providentielle.

Tout va de travers chez nous. La démographie galopante résultant de notre misère proverbiale asphyxie ce cher voisin qui ne se gêne nullement pour faire jouer la caméra en vue d’immortaliser notre humiliation en déportant nos frères exilés sans aucune forme de procès.

Et pourtant, dans un passé pas trop lointain, durant les années 1940 -1950, les statistiques glorifiaient Haïti comme le pays à imiter. Tout cela, est anecdotique. Personnellement, j’aurais honte de brandir ces chiffres qui soulignent simplement, aujourd’hui, notre incompétence crasse pour corroborer notre dégringolade en enfer. Alors que la connaissance évolue, nous vivons avec la douloureuse impression qu’on a fermé toutes les écoles de ce côté de l’île, tant notre cuisant échec défie l’analyse.

Au rythme où se déroule la ronde de l’humiliation, certains vont jusqu’à prédire une occupation d’Haïti par ce voisin insolent. Là encore, ces stratèges de salon ignorent la géopolitique et se trompent d’histoire.

Quelle raison, quel intérêt pousseraient Abinader à commettre un tel impair? Un idiot aurait posé ce geste gratuit, je n’en disconviens pas, mais un minimum d’intelligence suffirait pour démontrer à ce dernier qu’il n’a aucun avantage à doubler sa population, même pour un clin d’œil au passé. Ce serait une perte de temps. Le jeu ne vaut pas la chandelle. Mais la carte cachée de ce personnage semble miser sur la faim généralisée qui s’annoncerait pour ce pays dirigé par des gangs. Une fois la nation figée, il viendrait y recruter des esclaves volontaires pour le bonheur de son agriculture, de ses usines, de ses chantiers de construction. Et la boucle serait bouclée.

 

Note

1 – Bateys : C’est un campement où vivent des coupeurs de canne. On en trouve à Cuba et en République Dominicaine.

 

Haiti Connexion 17 septembre 2023

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