C’était ce jour-là…

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Le 21 février 1848, le Manifeste du parti communiste, écrit par Karl Marx avec l’aide de Friedrich Engels, est publié à Londres, dans la clandestinité, en réalité commandé par un groupe de socialistes révolutionnaires d’origine allemande connu sous le nom de Ligue des communistes. C’est en fait un programme politique à la fois théorique et pratique. C’est l’année même de la troisième révolution française qui fait naitre la seconde république. Une époque qui est au changement. Le manifeste reprend en les simplifiant des éléments déjà théorisés par Marx dans ses Manuscrits de 1844 et dans L’idéologie allemande écrite avec Engels en 1846. La première partie du Manifeste du parti communiste intitulée « bourgeois et prolétaires » montre comment l’histoire humaine peut être comprise à travers le concept de luttes des classes. La seconde partie, « prolétaire et communistes », cherche à donner des pistes d’actions politiques visant à se débarrasser de la bourgeoise et du capitalisme. La troisième et la quatrième partie comparent et critiquent les doctrines et les partis socialistes et communistes de l’époque.

Dans la première partie, Marx affirme que l’histoire de toute société peut se comprendre à travers l’histoire de la lutte des classes : à chaque époque, toute société est organisée en fonction de hiérarchies sociales complexes qui peuvent se réduire à un antagonisme entre des groupes sociaux aux intérêts différents. Ainsi, « Dans la Rome antique, nous avons des patriciens, des chevaliers, des plébéiens, des esclaves ; au Moyen-âge des seigneurs féodaux, des vassaux, des maîtres de corps de métier, des compagnons, des serfs, et en outre, dans presque chacune de ces classes, à leur tour, des hiérarchies particulières. » (Marx) La société bourgeoise est alors née des ruines de la société féodale qui présentait une hiérarchie complexe de classes sociales. La société bourgeoise moderne est plus simple en ce sens qu’elle oppose deux classes seulement : les bourgeois et les prolétaires. La bourgeoisie est la classe qui possède les moyens de production des marchandises et le prolétariat est constitué par les individus qui n’ont que leur force de travail à vendre pour survivre.
Marx et Engels montrent ensuite comment la bourgeoisie s’est constituée. Plusieurs facteurs expliquent l’émergence de la bourgeoisie : d’abord les grandes découvertes puis la colonisation, puis plus tard l’essor de l’industrie et des manufactures grâce à  l’invention des machines à vapeur. La colonisation du reste du monde par les pays européens a éventuellement permis de créer un grand marché mondial à même d’écouler les marchandises produites par les premiers capitalistes. Par le jeu des révolutions bourgeoises, la bourgeoisie a pu acquérir le pouvoir politique et détruire le système féodal. Mais peu à peu, la bourgeoisie subit des crises économiques et commerciales. Ces crises sont le fait d’une surproduction des marchandises qui ne parviennent plus à s’écouler. La bourgeoisie peut surmonter les crises en trouvant de nouveaux marchés ou en exploitant toujours plus les plus anciens, mais cela ne fait que produire un cycle de crise toujours plus violentes. Ce faisant, la bourgeoisie continue à créer l’armée qui, selon Marx et Engels, la mènera à sa perte : celle constituée par le prolétariat. Alors que le capital et les richesses des bourgeois s’accumulent, le prolétariat s’appauvrit tout en augmentant en nombre.

La division capitaliste du travail et l’usage des machines font en plus perdre aux ouvriers tout attrait pour leur travail. Ils deviennent eux-mêmes des rouages d’une machine qu’ils ne contrôlent pas. Le salaire qu’ils reçoivent ne leur sert qu’à reproduire leur force de travail pour le lendemain et nourrir leurs enfants qui rejoindront bien vite la masse des prolétaires. L’augmentation de la masse prolétaire amène un conflit, une lutte ouverte entre deux groupes : la bourgeoisie et le prolétariat, une lutte entre deux classes. Pour Marx et Engels, la stratégie de lutte des prolétaires doit être de s’emparer des forces sociales de production. Pour ce, il faut qu’ils parviennent à détruire le mode de production qui les exploite, à savoir le capitalisme qui se fonde sur la propriété privée des moyens de production. Dans la deuxième partie du manifeste, Marx et Engels s’attachent à montrer les liens qui unissent les communistes et le prolétariat. Les communistes ont une vue à plus grande échelle de la situation des prolétaires partout dans le monde et peuvent alors les représenter. Ils aident également les prolétaires à se structurer en une classe organisée, en un groupe social homogène doté des mêmes intérêts, à savoir la destruction du système bourgeois et la prise du pouvoir politique. Le but final du communisme et des prolétaires est alors l’abolition de la propriété privée, non la propriété en général mais la propriété bourgeoise des moyens de productions.

Marx en arrive à faire le distinguo entre la manière dont est considéré le travail dans la société bourgeoise et dans la société communiste. Dans la première, le travail ne sert qu’à accroitre le capital au détriment l’ouvrier qui perd sa liberté, sa personnalité, ainsi que le produit de son travail. Par contre, dans la société communiste, le travail ne doit être qu’un moyen pour élargir et enrichir la vie des ouvriers. Marx et Engels établissent comment les rapports bourgeois de production et de propriété produisent des idées elles-mêmes bourgeoises mais qui ont tendance à être prises et comprises comme valant pour tous. D’un point de vue théorique, la production intellectuelle change avec la production matérielle. En termes pratiques, le droit des bourgeois n’est ainsi que la volonté de la classe bourgeoise promulguée en loi pour tous.

La pensée bourgeoise, libérale, qui défend la propriété et la liberté reflète les intérêts de la classe bourgeoise. Enfin Marx et Engels en arrivent à la notion explicite de la prise du pouvoir politique par les prolétaires qui doit passer par la « dictature du prolétariat ». Il est donc question de renverser la bourgeoisie en faisant du prolétariat la classe dominante. En abolissant la propriété privée des moyens de productions, on peut alors en venir à abolir le système des classes. Marx et Engels concluent ainsi la deuxième partie du manifeste : « A la vieille société bourgeoise avec ses classes et ses oppositions de classes se substitue une association dans laquelle le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous. » Les troisièmes et quatrièmes et dernières parties entrent dans le détail très élaboré de pensée idéologique et de fonctionnement des autres socialistes de l’époque. Toujours est-il que les derniers mots du Manifeste résonnent comme un mot d’ordre révolutionnaire : Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !

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