Assassinat de Jovenel Monel Moïse, retour sur un meurtre politique ! (3e partie)

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Des policiers à Port-au-Prince devant une peinture murale du président assassiné Jovenel Moise

Pendant que la Communauté nationale, inquiète pour la suite des événements et surtout de ce que révèlera l’enquête tout en envoyant ses condoléances au peuple haïtien, demande justice pour la famille du défunt alors que certains versent des larmes de crocodiles sur le cadavre du feu Président, le Premier ministre a.i. et le Conseil des ministres avaient déclaré 15 jours de deuil national en hommage au Président assassiné. Par arrêté ministériel publié au journal officiel Le Moniteur en date du 7 juillet 2021, « du jeudi 8 au jeudi 22 juillet 2021, ont été déclarés jours de deuil national en hommage au Président de la République Son Excellence Monsieur Jovenel Moïse, assassiné en sa résidence privée le 7 juillet 2021 » pouvait-on lire dans ce numéro spécial N° 37 de Le Moniteur.

Enfin, dans la panique et sans doute sous le choc, les autorités se sont entretenues avec des organisations internationales comme l’ONU et l’OEA et tout particulièrement avec les pays « amis » d’Haïti, principalement les Etats-Unis d’Amérique et ont vite sollicité une présence de militaires étrangers en Haïti. D’après elles, pour garantir la sécurité de certains Sites stratégiques et sensibles à Port-au-Prince (Ports, aéroports, raffineries de pétroles, etc). Mais, préférant attendre pour voir comment allait évoluer la situation dans le pays tout en observant le comportement des politiciens haïtiens qui se déchirent déjà pour la succession du Président, Washington a préféré mettre un bémol et dire attendre sans écarter la possibilité d’envoyer les Marines Corps à Port-au-Prince comme il l’avait déjà fait il y a cent six ans. Alors que Paris, par le biais de son Ministère des Affaires Etrangères, fait remarquer que la situation en Haïti n’a pas besoin d’une présence de militaires étrangers. Elle a juste besoin d’envoi de policiers internationaux et de gendarmes.

Entre-temps, l’Organisation des Nations Unies (ONU) et l’Organisation des Etats Américains (OEA) ont rendu un vibrant hommage au chef d’Etat haïtien assassiné. Ainsi, le mercredi 14 juillet 2021, soit huit jours après l’horrible massacre, lors de l’ouverture de la 91e réunion plénière de l’Assemblée générale, une cérémonie d’hommage a été organisée en mémoire de Jovenel Moïse dont le corps mutilé était arrivé dans une morgue au Cap-Haïtien où ses dépouilles avaient été transférées pour les funérailles qui devaient avoir lieu le 23 juillet 2021. Avec le drapeau de l’ONU en berne durant toute la journée du 14 juillet et avec un grand poster à l’effigie du chef de l’Etat placé à gauche de la tribune, ce sont les peuples du monde par l’intermédiaire de leurs représentants aux Nations Unies qui ont rendu hommage au Président haïtien au cours de cette cérémonie spéciale. En ouvrant les travaux de la de la 91e session plénière de l’Assemblée générale, la représentante du Secrétaire général de l’ONU a déclaré : « J’ai l’honneur de rendre hommage au Président de la République d’Haïti, Jovenel Moise, assassiné chez lui le 7 juillet.

Nous sommes en face d’une tragédie pour qu’aucun pays n’ait pas à la subir » disait-elle au nom du Secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres. Pour sa part, Volkan Bozkir, Président de l’Assemblée générale, réclame une enquête approfondie pour que les auteurs et co-auteurs de cet assassinat soient punis « Je condamne en les termes les plus fermes l’assassinat du Président Jovenel Moise. La haine, le racisme n’a pas sa place dans quelle que soit la société en question » a-t-il formulé. Quant à la vice-Secrétaire générale de l’ONU, Amina J. Mohammed, dans son intervention en hommage au Président défunt, elle a de préférence mis en évidence, selon elle, la vision de celui-ci « Nous avons vu et compris sa vision d’une Haïti avec de l’électricité  partout, avec des infrastructures durables et un secteur agricole fort. Comme le Président Moïse l’avait compris, les nombreux défis complexes qui lui faisaient face ne pouvaient pas être relevés de n’importe quelle manière. Il a grandement influencé nos efforts pour faire avancer la prévention des conflits, maintenir et consolider la paix en Haïti ».

De Cuba qui a pris la parole aux noms du Groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC) par le biais du représentant de la Havane, Bruno Rodriguez Parrilla, qui exhorte les Haïtiens à s’entendre « Nous rejetons la violence. Nous exhortons les acteurs haïtiens au dialogue et à la paix » au représentant de Saint-Kitts et Nevis qui s’est exprimé aux noms des Etats de la CARICOM, tous se sont révoltés contre cet acte injustifié.  « La République d’Haïti lutte depuis longtemps contre les tragédies et les troubles » eut à déplorer le représentant de ce petit Etat de la Caraïbe tout en demandant devant l’Assemblée générale à ce que les auteurs soient châtiés pour leur crime. Enfin l’hommage des Etats-Unis ce 14 juillet à l’ONU à l’égard du chef de l’Etat à travers son ambassadrice aux Nations Unies, Linda Thomas Greenfield « Je m’associe à mes distingués collègues ici présents aujourd’hui pour exprimer notre choc, notre tristesse et notre ferme condamnation de l’horrible assassinat du Président Jovenel Moïse et de l’attaque contre la Première dame Martine Moïse le 7 juillet dernier. Je venais de les rencontrer en Équateur au mois de mai.

Nous souhaitons à la Première dame un prompt rétablissement et présentons nos sincères condoléances à la famille Moïse et au peuple haïtien » a déclaré la Représentante. Pendant que le pays est toujours plongé dans la stupeur et la torpeur et que des jours plus tard les activités tentent de reprendre timidement, après que Claude Joseph ait lancé un appel solennel à la reprise des activités dans le pays et dans la capitale en particulier où tout s’était soudainement arrêté après la tragique nouvelle. En demandant à chacun de vaquer à ses préoccupations, aux fonctionnaires de retourner à leur poste de travail, aux commerçants de monter leurs rideaux de fer et les transports publics de reprendre leur liaisons habituelles, les autorités tentent de calmer le jeu et de rassurer la population. Ainsi, dans le cadre des préparatifs des obsèques du chef de l’Etat assassiné, un « Comité d’organisation des funérailles nationales du Président de la République, Son Excellence Monsieur Jovenel Moïse » avait été crée.

Ce Comité créé par arrêté pris en Conseil des ministres et publié au journal officiel Le Moniteur en date du 12 juillet 2021 est composé, selon l’article 3 dudit décret de 7 personnes : 1) du Ministre des Affaires Etrangères et des Cultes ; 2) du Ministre de la Culture et de la Communication ; 3) du Ministre de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales ; 4) du Ministre de la Défense ; 5) du Directeur de Cabinet du Président de la République ; 6) du Secrétaire Général de la Présidence ; 7) du Directeur Général du Musée du Panthéon National Haïtien. Il avait pour mission « d’Organiser les funérailles nationales dans le respect, la solennité et la dignité attachés à son rang de chef d’Etat » d’après l’intitulé de l’article 2 de l’arrêté. Entre-temps, il ne se passe pas un jour sans qu’on apprenne que l’enquête sur l’assassinat progresse. Tous les jours, le chef de la police nationale présente un point de presse quotidien dans le but évident de rassurer la population et la Communauté internationale qui peinent à croire que les autorités contrôlent réellement, comme elles disent, la situation. Surtout, chaque jour qui passe, la population et les observateurs politiques s’écroulent sous des tonnes de révélations les unes plus invraisemblables que les autres.

Hier, on apprend que telle et telle personnalité de la diaspora, un certain Christian Emmanuel Sanon, totalement inconnu du grand public, serait suspecté dans l’assassinat du Président avec des preuves accablantes susceptibles de le mettre à mal devant les enquêteurs et la justice. Plus tard, ce sont d’autres individus peu fortunés du secteur privé des affaires : Marie-Jude Gilbert Dragon, Reynaldo Corvington qui ont été appréhendés avec autant d’indices sur le meurtre dans le cadre de l’enquête. Aujourd’hui, c’est un ancien petit fonctionnaire, Joseph Félix Badio et un ex-sénateur de la République, John Joël Joseph (JJJ), de concert avec un certain Désir Gordon Phenil, et Rodolph Jaar (Dodof), un homme d’affaires, Palacios Mario Antonio ; Ashkard Pierre Joseph que la police et la justice haïtienne recherchent pratiquement « mort ou vif » avec mention individus dangereux et armés.

Il y a naturellement le cas de l’ex-juge de la Cour de cassation, madame Wendell Coq Thelot dont le nom apparaît pratiquement dans tous les dossiers politiques relatifs au Président Jovenel Moïse avant et après son assassinat. Certains diraient que cela devient une habitude pour cette juge d’être toujours là où l’on ne devait pas l’attendre. Déjà le nom de ce haut magistrat de la Cour, Wendell Coq Thelot, est cité dans l’embarrassant et encombrant dossier de la tentative du coup d’Etat du mois de février 2021 en association avec d’autres collègues de la Cour de cassation. Aujourd’hui elle est directement visée et recherchée par la police et la justice haïtienne dans le cadre du meurtre politique du chef de l’Etat.

Ensuite, c’était trois leaders politiques de l’opposition : Youri Latortue, Steven Benoit et Jerry Tardieu qui étaient invités au Palais de justice de Port-au-Prince, par le Commissaire du Gouvernement (Procureur), Bed-Ford Claude, pour dire ce qu’ils savent de ce crime politique quand ce n’est la DCPJ (Direction Centrale de la Police Judiciaire) qui continue ses investigations sur tous les responsables de sécurité du feu Président après avoir écouté les 24 agents de police assurant la sécurité de la famille présidentielle le soir où le meurtre a été perpétué. Parallèlement, la police judiciaire recherche un autre groupe de personnalités bien connues de la place ayant pour nom : Paul Dénis, ex-sénateur, ancien ministre de la justice et dirigeant du parti politique INIFOS ; Liné Balthazar Président du parti PHTK, le parti politique de Jovenel Moïse mais toujours en désaccord avec celui-ci ; l’homme d’affaire Samir Handall qui serait en fuite grâce à la complicité des hauts gradés de la police ; enfin les pasteurs Gérald Bataille et Gérard Forge Janvier dénoncés par un membre du commando, le colonel Mike.

Ceci, après que la police des polices, l’Inspection Générale de la Police Nationale d’Haïti (IGPNH) de son côté ait entendu tous ces policiers et saisi leurs téléphones portables d’une part et placé en isolement comme mesure conservatoire d’autre part, les quatre (4) responsables de la sécurité du Président de la République qui sont, pour rappel, le Commissaire divisionnaire, Jean Laguel Civil, Coordonnateur de sécurité du Président ; le Commissaire de police Dimitri Hérard, responsable de l’USGPN ; le Commissaire Léandre Pierre Osman, responsable de l’Unité de Sécurité du Palais (USP) et l’Inspecteur Paul Eddy Amazan, responsable de Cat Team. Ces quatre hauts responsables de la sécurité présidentielle ont été eux-mêmes convoqués au Parquet de Port-au-Prince par le Commissaire du gouvernement Bed-Ford Claude. Entretemps, l’enquête avance puisque plusieurs suspects locaux policiers et autres ont été arrêtés selon la porte-parole de la PNH, Marie-Michelle Verrier entre autres : Ronald Guerrier, Alphonse Sadrac, Jean Arly,  Delica Phanec, Frantz Louis, Laurent Jude,  Ernest Germain, François Rony, Cleantis Louissaint. Sans compter la quasi-totalité des assaillants tous des ressortissants Colombiens sauf deux d’entre eux : James Solages et Joseph Vincent qui sont américains d’origine haïtienne.

Ce commando aurait été recruté par la Firme de sécurité vénézuélienne dénommée CTU Security établie à Miami, aux Etats-Unis, dont le responsable se nomme Antonio Emmanuel Intriago Valera et financé, selon les enquêteurs, par l’entreprise de financement Worldwide Capital (Lending Group) pour le compte des auteurs intellectuels de cette action gravissime qu’est l’assassinat d’un Président en exercice. Ce sont au total 44 personnes qui ont été déjà appréhendées par la Police judiciaire et 45 autres auditionnées par le Parquet de Port-au-Prince avant même que le dossier ne soit déféré au cabinet du juge d’instruction par Me Bernard Saint-Vil le doyen du Tribunal de Grande instance de la capitale un mois plus tard. Finalement, le lundi 9 août 2021 on a appris que c’est le juge d’instruction Mathieu Chanlatte qui a été désigné pour mener enquêter sur l’assassinat du Président Jovenel Moïse survenu le 7 juillet 2021. Le juge Mathieu Chanlatte n’est pas un novice dans le traitement des dossiers sensibles ou politiques. Il a déjà œuvré dans les dossiers comme Dermalog (Carte d’Identification Nationale) et de la compagnie Sogener l’affaire opposant la famille Vorbe (Dimitri)  et l’Etat haïtien.

Réagissant à la nomination de Me Chanlatte pour mener les investigations nécessaires devant faire luire la vérité sur ce meurtre politique, Me Jean Wilner Morin, Président de l’Association Nationale des Magistrats Haïtiens (ANAMAH) a déclaré « C’est une enquête qui va prendre du temps. Nous espérons aussi que les autorités mettront tous les moyens nécessaires à la disposition du magistrat Chanlatte et assureront également sa sécurité. Nous souhaitons bonne chance au magistrat Mathieu Chanlatte. Nous espérons que le juge fera preuve d’un bon magistrat dans l’application de la loi, qu’il ne se laissera pas intimider ni n’aura peur. » En attendant que toute la lumière soit faite sur cette nouvelle tragédie politique du nouveau siècle haïtien et que les auteurs, tous les auteurs : exécutants et donneurs d’ordre, auteurs intellectuels tapis dans l’ombre ou visibles soient tous arrêtés et déférés devant leurs juges naturels, le peuple qu’on a vu pourchasser les mercenaires à travers les rues de Pétion-Ville et ceux faisant partie de la grande majorité silencieuse et même pour l’honneur de l’institution de la police, bref la Nation toute entière n’attend qu’une chose : la vérité, rien que la vérité. Sinon, aucun chef d’Etat haïtien, qu’il soit démocrate ou pas, populaire ou non, ne sera à l’abri de ce genre d’incivilité archaïque et moyenâgeuse qui est loin de faire honneur au peuple haïtien, rendre service à la République, faire avancer la démocratie ou faire respecter la Nation. (Fin)

C.C

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