La mémoire au service des luttes : le code de l’indigénat

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Il y a 140 ans, le 28 juin 1881, le gouvernement français adoptait l’odieux « code de l’indigénat » pour sa colonie algérienne. En 1887 ce code est étendu à l’ensemble des colonies françaises. 

Ce code impose aux colonisés les travaux forcés, l’interdiction de circuler la nuit, l’impôt de capitation et une multitude d’autres mesures dégradantes. Le code infâme est un recueil de mesures discrétionnaires destiné à faire régner l’ordre colonial sur la base de l’institutionnalisation de l’inégalité et de l’injustice. 

Il distinguait deux catégories d’habitants dans les colonies : les citoyens français et les sujets français. Chacune de ces catégories dépendait d’une législation spécifique, celle concernant les « sujets » ne comportant bien sûr que des obligations et aucun droit. 

Dans son livre De l’indigénat, l’historien Olivier Le Cour Gandmaison écrit : il y a « deux statuts opposés : celui des ‘indigènes’, qui ne sont que des assujettis, et celui des Français qui disposent seuls de la plénitude des droits civils et politiques. Les différences qui séparent ces deux conditions ne sont pas marginales; au contraire, il s’agit de différences de nature qui organisent deux mondes régis par des dispositions destinées à asservir les autochtones, à garantir les prérogatives des colons et, en dernière analyse, à assurer la domination sans faille des seconds sur les premiers comme l’exige la sécurité publique indispensable à la stabilité et à la prospérité de l’empire. » 

Le code ne respecte pas les principes généraux du droit français, en particulier en autorisant des sanctions collectives, des déportations d’habitants et en sanctionnant des pratiques que la loi n’interdit pas, sans défense ni possibilité d’appel.

Il prévoit notamment les infractions suivantes : acte irrespectueux, réunion sans autorisation, départ du territoire de la commune sans permis de voyage, propos offensant vis-à-vis d’un agent de l’autorité, même en dehors de ses fonctions, appel à la grève, refus de travail, refus de l’impôt, etc. 

Le travail forcé légalisait la mise à disposition d’une main d’œuvre gratuite pour les colons et l’appareil d’Etat colonial. À titre d’illustration, de 1898 à 1910, près de 600 000 jours de travail forcé furent appliqués aux Algériens. L’indigénat établissait des infractions spéciales en cas révolte anticoloniale et notamment le séquestre des biens individuels ou collectifs. Ainsi après la grande révolte d’El Mokrani en 1871, ce sont 500 000 hectares de terres qui passent entre les mains de l’État colonial qui les redistribue aux colons. 

Ce système d’inégalités légales perdurera jusqu’en 1946. Après cette date, de nombreuses mesures du code seront néanmoins maintenues jusqu’aux indépendances. 

Le code de l’indigénat est, on le voit, le digne successeur du « code noir » qui régissait l’esclavage. Nous devons connaître cette histoire aujourd’hui où certains osent parler de « l’œuvre positive de la colonisation ». 

N’oublions jamais.  Que la mémoire soit un ferment de nos combats pour l’égalité d’aujourd’hui.

 

Texte : FUIQP et Alain Saint-Victor

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