Il suffit d’ouvrir un journal, d’allumer la télévision, d’écouter n’importe quelle station de radio ou de se connecter sur les réseaux sociaux pour s’en rendre compte qu’on fait face dans le pays à une situation exceptionnellement prérévolutionnaire et qui exige un travail ou une réponse appropriée pour atteindre certains objectifs.
C’est un grand pas, assurément, que le pouvoir ne soit pas arrivé à faire taire la voix des masses populaires pour que s’élève seule, celle des diplomates accrédités dans le pays, défendant la cause des institutions au service des puissances impérialistes. Quant à elle, l’opposition traditionnelle s’est seulement contentée de joindre ses efforts au peuple, elle n’a fait que prendre une roue libre. Ce n’est sans doute pas négligeable, mais sa force réelle, concrète, a laissé très nettement l’impression d’une impuissance politique déplorable à faire quoi que ce soit pour capoter le régime défaillant en place. On ne peut malheureusement pas dire que cette situation ait évolué de manière favorable en termes de renversement du pouvoir de la bourgeoisie.
se méfier des riches, des nantis à l’instar d’un Reginald Boulos populiste, opportuniste, représentant d’une bourgeoisie parasite
Nous n’avons aucune inquiétude que les masses populaires haïtiennes ont été, sont et seront toujours le maître, l’exécuteur ou le constructeur de la lutte pour un vrai changement. La question est de savoir maintenant qui canalisera cette force créatrice des masses opprimées en lutte opérationnelle effective ?
Qui dira aux jeunes qui vivent déjà en état de révolte intérieure, qu’ils ne doivent pas se perdre dans la logique aberrante, les consensus démagogiques, opportunistes, les ambitions individuelles effrénées des politiciens. Qu’ils doivent se méfier des riches, des nantis à l’instar d’un Reginald Boulos populiste, opportuniste, représentant d’une bourgeoisie parasite, elle-même satellite des puissances capitalistes, de sorte qu’il ne les conduise pas dans l’application d’une quelconque orientation politique contraire à leurs aspirations et intérêts. N’est-il pas impératif de combattre un tel projet de droite de sorte qu’il ne parvienne à utiliser la force des masses défavorisées en sa faveur ?
L’expérience a toujours montré que les politiciens s’appuient sur les masses populaires, les mettent en action seulement pour satisfaire leurs intérêts personnels non pas la cause de la collectivité. Le peuple ne doit guère agir comme doublure de la classe politique bourgeoise. Car, il se retrouvera victime de ce qu’il aura cru être un espoir.
Alors, la grande mobilisation en cours, quoique valable et importante, reste également une grande menace, une épée de Damoclès sur la tête des masses, en ce sens que celles-ci restent le fer de lance de la bourgeoisie jointe aux cultes religieux de toutes tendances, traditionnellement du côté du pouvoir et symboles eux-mêmes de l’exploitation et de l’oppression des peuples. Quel est le but précis de cette alliance de circonstance dans une éventuelle situation post-Jovenel ? Ces alliés d’un moment peuvent recourir à diverses ruses, car ils ont plus d’une corde à leur arc.
À ce compte, qui devra organiser et canaliser la force infinie des masses populaires haïtiennes de façon non seulement à « collectiviser la lutte » mais aussi à la rendre plus effective, plus méthodique ? Cette organisation ne peut être que l’expression d’émancipation des travailleurs dans un cadre de « Lutte des classes », à la lumière de l’héritage marxiste-léniniste pour la transformation radicale des relations sociales, économiques et politiques de la société haïtienne.
Face au phénomène d’insécurité grandissant, le mécontentement et la frustration contre l’inaction du gouvernement bien que croissants ne suffisent pas. Il ne faut pas le dissimuler. Cela implique qu’il faut avant tout organiser le peuple dans une perspective de résistance, de fermeté pour leur éviter de compter sur la bourgeoisie formelle, religieuse, élitiste soumise à l’impérialisme.
La lutte pour le changement qualitatif ne doit pas être inscrite seulement contre le pouvoir politique mais également contre tous les représentants de l’oligarchie corrompue surtout ceux des propriétaires fonciers et des capitalistes compradores qui forment le pouvoir économique, le pouvoir judiciaire, culturel, religieux et autres.
À l’avenir comme par le passé, cet amalgame continuera d’œuvrer avec conséquence à renforcer la solidarité des classes possédantes au détriment des masses appauvries, méprisées et humiliées. Le peuple doit être clair, entre la continuation catastrophique de dépendance capitaliste et la rupture pour la transformation de cette société, il doit trancher. Et il doit le faire guidé par une avant-garde révolutionnaire. Tant que cette contradiction ne sera pas claire, la porte sera ouverte à toutes les machinations.
Le peuple organisé doit pleinement participer à l’élaboration et à l’exercice du pouvoir.
Aussi longtemps que nous continuerons ainsi dans un environnement d’amalgames, de confusion, de diversion et de collaboration avec l’ennemi de classe, les dictatures combinardes et cruelles n’arrêteront pas d’émerger au lieu de disparaitre. Il n’y aura jamais de paix, jamais de pain et la nation haïtienne n’aura d’autres visages que ceux que veulent façonner les forces obscures. Pour que l’aube révolutionnaire soit rédemptrice dans le pays, il convient de raviver l’espoir, la solidarité et l’enthousiasme de la jeunesse. De faire progresser la dynamique de l’indépendance et de l’unité politique du mouvement populaire afin de mener à bien la tâche gigantesque, de parvenir à l’objectif rêvé. Le peuple organisé doit pleinement participer à l’élaboration et à l’exercice du pouvoir.
En vérité, il n’y a pas d’autre issue que celle définie par le peuple lui-même dans la forme et le contenu. Et c’est elle, la seule qui puisse nous sauver des périls, et des dangers mortels du capitalisme.