La crise haïtienne n’a jamais été aussi forte et les inégalités aussi grandes. Dans ce climat délétère, le projet de la classe politique luttant pour le pouvoir à travers ses partis et ses différents « Accords » de consensus, Musseau, Karibe, Montana et autres, soi-disant pour nous sortir de la crise, ne fait que nous enfoncer davantage au plus profond de l’abime.
Le plus grand bluff est qu’il n’existe aucune divergence fondamentale ou position contradictoire au sein de cette classe politique, sauf une lutte interne entre ces larrons qui ne veulent pas s’entendre. Il s’agit de coteries entre deux courtiers, chacun flattant le patron dépendant de son degré de bassesse, de soumission ou même de prostitution pour tenter de lui offrir un meilleur service comparé à l’autre.
Le projet de se mettre au service des multinationales capitalistes révèle une certaine conscience de classe complètement opposée aux aspirations de ceux luttant justement pour la transformation de la société dans une perspective de lendemain meilleur pour le peuple haïtien. Un peuple qui, par son combat déterminé, ses lourds sacrifices, n’a jamais cessé de prouver son attachement farouche à la liberté et au droit à l’autodétermination.
Voilà pourquoi il y a deux projets en lutte qu’on peut illustrer comme deux chemins parallèles. Celui de la classe politique représentée par les promoteurs des Accords et qui reçoit largement la garantie et le soutien de l’impérialisme américain. Ces mercenaires manœuvrés sont définitivement un handicap pour le pays, car ils préfèrent s’attarder sur l’élimination des symptômes au lieu de s’attaquer aux causes profondes du mal les menaçant dangereusement.
Les masses populaires doivent prendre de nouvelles dispositions pour combattre le jeu des forces réactionnaires et impérialistes
Et celui du projet des masses combatives ; le camp de la résistance de ceux qui s’accrochent à des droits arrachés au prix de multiples sacrifices, pratiquant une politique différente de ceux qui se réclament ouvertement de la défense du capitalisme. Le camp de ceux qui croient dans un idéal humain et dans l’esprit de fonder le développement sur la volonté collective, consciente et harmonieuse de la classe ouvrière haïtienne.
En somme, nous sommes en présence de deux mondes distincts, sinon deux projets politiques antagoniques. L’un qui veut collaborer avec le système dont les intérêts sont indissociables de ceux de l’impérialisme. Et l’autre, qui, catégoriquement lutte pour changer fondamentalement le sort de la population. Celui qui veut la fin du système d’exclusion et d’exploitation éhontée dans lequel vit le peuple, afin de mettre en place des structures nouvelles et forger un instrument de lutte pour garantir une action efficace de libération et de changement constructifs. En clair, sortir de l’emprise de l’impérialisme, de son orbite, pour édifier une nouvelle économie nationale planifiée qui permettra un développement harmonieux de la société.
Le peuple ne doit pas se laisser berner par de vaines illusions de changement de la part de ces politiciens sans colonne vertébrale soumis à l’ignominieux système d’exploitation à outrance de l’homme par l’homme. Tout compromis avec les « vendus » et les « achetables » signifierait trahison. La résistance haïtienne devra être, plus que jamais, sur ses gardes, vigilante et devra rejeter tout compromis pouvant menacer gravement son existence et compromettre irrémédiablement sa noble cause et sa lutte légitime et sacrée.
Les masses populaires doivent ouvrir de nouvelles perspectives et prendre de nouvelles dispositions pour combattre le jeu des forces réactionnaires et impérialistes à travers ses représentants authentiques au sein de la classe politique des « vendus ». Ceux qui s’assemblent, se ressemblent tout en défendant les mêmes intérêts de classe ! L’amalgame et la confusion qu’on constate au sein des multiples Accords ne sont pas une erreur. Ils sont la démonstration pure et simple de l’idéologie dominante de façon à nous faire marcher main dans la main avec nos bourreaux, y compris les oligarques, sous le fallacieux prétexte de consensus.
Les masses opprimées et exploitées ne doivent pas se tromper. Elles ne doivent pas être sur la même route que ces forces politiques pourries, réformistes défendant les privilèges de la domination de l’impérialisme et assurant un certain changement dans la continuité.
Si nous sommes sur la même route, cela signifie que nous allons dans la même direction et sans doute visant le même objectif final.
Deux voies parallèles ne se rencontrent guère. Tous ceux qui se rencontrent, d’une manière ou d’une autre, vont vers la même destination finale. Ces deux voies parallèles peuvent être aussi identifiées par ces deux visions idéologiques antithétiques et irréconciliables : le capitalisme et le socialisme.
Ces deux protagonistes ne sauraient partager une vue commune. Le souvenir de la fin du système esclavagiste ou de l’émancipation générale ne saurait avoir la même signification pour un ancien esclave et son ancien maître. De même qu’un patron et un ouvrier ne sauraient voir la question de salaire avec les mêmes consciences d’intérêts comme l’a si bien dit Rudyard Kipling (Prix Nobel de littérature en 1907) : « l’Est est l’Est et l’Ouest est l’Ouest et les deux sont inconciliables ».
Nous, du journal Haïti Liberté, nous ne serons jamais sur la même route de combat que les opportunistes, les défaitistes, promoteurs d’Accords de toutes sortes dont les intérêts sont identiques avec ceux de l’impérialisme, le principal responsable de ce lamentable aboutissement auquel est parvenu notre pays. Point de cohabitation possible avec nos ennemis de classe, puisque nos voies sont incompatibles, voire inconciliables.