Doudou pour sa part, ainsi que son célèbre frère ainé Loubert, ont tous deux hérité de cette vocation musicale d’un père guitariste, leur ayant inspiré de devenir musiciens. Même si c’est sur les traces de son grand-frère que Ardouin a décidé de se lancer. En devenant, à la fois oiseleur et souffleur d’artifice et de volupté, s’imposant en saxophoniste aux multiples contours. Formé à l’école de toutes les fusions par le truchement du groupe « Splash », alimenté des rythmes de climat aux formes les plus exotiques : jazz, bossa-nova, rock, blues, reggae etc ; en passant par toutes les tendances standardisées. Et, c’est fort de ces capacités qu’il devient constamment solliciter par différents courants musicaux qui aiment se servir de sa marque de saxophoniste d’ascendance. Autant de qualités qui lui ont épargné d’être l’ombre de son fameux frère.
Musicien chevronné et pourvoyeur d’ingénieuses nappes sonores, au jeu nourri de phrasés allégoriques et en même temps cérébraux ; en plus d’une tendance versatile qui lui ont valu de s’immiscer à toutes les sauces. En passant par le « Skah-Shah » d’Haïti au sein duquel il a constitué le parfait complément pour émuler le maestro Loubert. Subséquemment à d’autres randonnées épisodiques ; puis une excursion éphémère avec le « Boukman Eksperyans » avec lequel, Ardouin a fait entrevoir sa facette explorant la musique rasin et fusion. A la prochaine étape, il est repéré brièvement par le « Bossa Combo », continuant à répandre son souffle fluide et limpide dans la musique ambiante. Avant de s’esquiver une nouvelle fois pour d’autres prospectives ; en se vêtant de son habit de « free lancer », lui permettant de mieux se servir.
Une position qui irrite grand-frère Loubert qui lui dédie son premier album en solo : « Doudou » et, le succès foudroyant qui en a résulté. Mais, impassible Doudou Chancy a persisté dans sa démarche d’artiste baladin. Ne donnant son allégeance qu’à la musique et offrant ses expertises à tous ceux qui en apprécient. Faisant sa marque dans une kyrielle de collaborations dans les milieux de la diaspora. Tout en restant dans les circuits des « Shleu-Shleu » de Smith J. Baptiste pour lesquels Ardouin a fait des arrangements ainsi que des compositions. Il a aussi pris le temps de retourner à l’école pour des études musicales approfondies. Lui donnant droit de mieux cerner les complexités de l’art au pluriel, tout en produisant une œuvre ‘’en solo’’ ayant abordé les divers styles qu’il a explorés, qui n’a pas eu l’effet escompté.
Toujours en cavalier solitaire, Chancy s’est attelé à mieux se divulguer dans des prestations intimistes et sociales ; ainsi que dans les bistrots. Où il est dans sa zone de confort, faisant face à une audience attentive pouvant jauger sa valeur. Parallèlement, il s’est aussi trouvé une vocation de pédagogue, s’activant à retransmettre à d’autres son savoir et expérience à travers l’éducation musicale. Donnant même le ton dans la philanthropie avec sa fondation JAKAM dont le but est d’approvisionner les enfants déshérités de son Artibonite natale des instruments et livres usagés, qu’il collectionnait à cet effet. Tout en entretenant d’autres projets encourageants. Souffleur éclectique, habité toujours d’un souci de renouvellements. Doudou avait atteint un palier qui aurait fait rougir Loubert lui-même.
Mais malheureusement, c’est avec la tête pleine d’idées que la mort impitoyable vient le ravir à l’affection de ses proches et de ses fans. Un beau jour de célébration, alors qu’il exaltait son sax au milieu d’une prestation accompagnant Léon Dimanche au club Brasserie Créole à Queens, NY. Avec des spectateurs et acteurs ébahis qui n’en revenaient pas de la manière dont Doudou leur avait légué son dernier souffle. Laissant le souvenir d’un musicien adaptatif, nanti d’une vaste culture musicale.