La mémoire au service des luttes : Lumina Sophie

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1854
Lumina Sohpie

Il y a 141 ans, le 15 décembre 1879, Lumina Sophie surnommée « Surprise », l’une des dirigeantes de l’insurrection de 1870 contre les békés en Martinique, décédait. 

Née en 1848, quelques mois après l’abolition de l’esclavage, elle est la fille d’une ancienne esclave, Marie Sophie (dite Zulma).  

Le système esclavagiste étant aboli, les contrats d’associations laissent en jouissance aux nouveaux libres un minuscule lopin de terre et une case. Sur son lopin de terre, la famille élargie de Lumina (sa grand-mère, ses oncles et ses tantes) cultive caféiers, cacaoyers, bananiers. 

Après le décès de la grand-mère, la famille se disperse. Le père étant absent, pour survivre, la mère de  Lumina exerce de multiples métiers (couturière, cultivatrice, marchande, journalière chez les békés, etc.). Lumina accompagne sa mère dans ses différents travaux et fait ainsi l’apprentissage de la vie des ouvriers et paysans.

« Elle y fait l’expérience des inégalités subies par les populations rurales, notamment en termes d’imposition et d’accès à l’éducation. Dans une Martinique où l’abolition de l’esclavage est encore récente, les classes privilégiées tentent de préserver leurs avantages, et la ségrégation est prégnante. Lumina y est particulièrement sensible. »

En 1870, un Noir, Léopold Lubin, est lourdement condamné dans une affaire l’opposant à un jeune blanc. Un mouvement de solidarité s’organise aussitôt et Lumina connaît alors sa première expérience militante. 

Bien qu’enceinte de deux mois, elle participe au soulèvement qui se déroule le 22 septembre de la même année pour exiger la libération de Lubin. Étant une des principales dirigeantes de l’insurrection, Lumina se fait remarquer pour sa capacité à diriger le combat. 

La répression est féroce. Lumina est arrêtée et emprisonnée. 

« Lors de ses deux procès, on la présente comme la flamme de la révolte, la reine de la compagnie, la plus terrible des chefs de bande. On l’accuse d’être une incendiaire, de chercher à dominer les hommes, de nier sa condition de femme. En avril 1871, elle accouche d’un petit garçon qui est nommé Théodore par l’administration pénitentiaire, et qui lui est immédiatement enlevé; l’enfant mourra en prison quatorze mois plus tard. En juin 1871, Lumina est condamnée aux travaux forcés à perpétuité pour avoir incendié des habitations et participé à l’insurrection. »

Déportée à la Guyane, elle est contrainte d’épouser 7 ans plus tard un bagnard blanc. Elle meurt peu après d’épuisement, de maladie et de mauvais traitements à l’âge de 31 ans.

Lumina Sophie reste dans les mémoires populaires martiniquaises un symbole de fierté et de révolte contre le pouvoir des békés.

On lui prête ces paroles : « Le Bon Dieu aurait une case sur la terre que je la brûlerais car Dieu n’est sûrement qu’un vieux béké. »

Repose en paix, sœur et camarade. 

Textes entre guillemets tirés de : https://histoireparlesfemmes.com/2016/12/05/lumina-sophie-insurgee-contre-la-segregation/

Texte : FUIQP et Alain Saint-Victor

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