Henry T. Wooster, le nouveau Gouverneur US en Haïti !

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Le nouveau Gouverneur US en Haïti, Henry T. Wooster

Depuis le 12 juin 2025, les Etats-Unis d’Amérique ont un nouveau visage en Haïti. Il se nomme Henry T. Wooster. A n’en pas douter, c’est un pilier de la diplomatie américaine. Il succède à l’ambassadeur Dennis B. Hankins qui prend sa retraite diplomatique mais pas complètement retiré du service de Washington. Puisqu’il est dorénavant Conseiller en politique étrangère au Pentagone (Ministère de la Défense) au Bureau de la Garde nationale. Par ailleurs, en regardant bien le parcours de son successeur, on s’aperçoit qu’il est un vétéran dans la diplomatie surtout dans les pays rebelles au diktat occidental où Washington cherche à imposer sa politique et celle occidentale en général. Selon la biographie de celui qu’il faut considérer comme le nouveau Gouverneur US en Haïti, on lit qu’« …Il a été Conseiller politique à l’ambassade des États-Unis à Islamabad.Il a également été directeur pour l’Asie centrale au Conseil national de sécurité, conseiller en politique étrangère auprès du général commandant les opérations spéciales conjointes des États-Unis.

Secrétaire d’Etat-adjoint par intérim pour l’Iran ; directeur du bureau des affaires iraniennes ; directeur adjoint du bureau des affaires provinciales, ambassade de Bagdad ; assistant spécial du Secrétaire adjoint Jack Lew ; directeur adjoint du bureau des affaires iraniennes ; responsable du bureau de l’Iran ; responsable politique, ambassade de Moscou ; responsable exécutif, mission des États-Unis auprès de l’OTAN ; responsable du bureau des affaires russes ; consul, ambassade de Port-au-Prince ; et responsable politique, ambassade de Tbilissi. Avant de rejoindre le Service extérieur, Henry était officier de l’armée.Il est titulaire d’un M.A. (Master of Arts) de l’Université de Yale et d’un B.A. (Bachelor of Arts) du Amherst College… » Bref, sa mission sera de continuer à mettre les bâtons dans les roues des autorités haïtiennes pour parachever l’œuvre néfaste de l’Oncle Sam envers Haïti.

En effet, Haïti est l’un des rares, très rares États du monde, où l’arrivée de chaque nouvel ambassadeur étranger, notamment américain et français, suscite les commentaires de la rue et obligent presque tous les observateurs politiques et géopolitiques locaux à se pencher sur son dossier et son installation à Port-au-Prince. Cette quasi-obligation commande deux explications relatives à l’histoire. D’abord, l’influence de la politique de Washington sur les affaires internes d’Haïti depuis l’occupation américaine de 1915. Ensuite, les crises politiques successives qui se poursuivent dans le pays sans qu’aucune solution durable n’ait pu être trouvée malgré cette omniprésence continue des américains dans la conduite de la politique haïtienne. Nous disons ayant rapport à l’histoire, c’est peut-être exagéré. Il serait plus exact de dire depuis la fin de la dictature de Duvalier père et fils en 1986, bien que cette dictature héréditaire était soutenue à bout de bras par Washington jusqu’à sa chute.

Car la vérité historique veut que les Duvalier, surtout François, savaient se faire respecter quand les limites de la décence étaient dépassées par l’ingérence extérieure. En effet, l’ingérence étrangère, entre autres, celle des États-Unis d’Amérique, sous la dictature du Dr François Duvalier, voire de son fils Jean-Claude, était, somme toute, très relative dans la mesure où le pouvoir laissait faire jusqu’à une certaine limite afin de sauvegarder son régime. Mais jamais pour ridiculiser la République d’Haïti, pour qui, la première République noire du monde était une référence historique en matière de lutte pour l’égalité des droits des États, des droits des Nations et des droits des peuples à se disposer d’eux-mêmes. Les historiens haïtiens, les vrais, ou tous ceux qui s’intéressent à l’histoire politique et diplomatique de ce pays, connaissent et n’oublieront jamais l’humiliation subie par un ambassadeur américain au Palais national sous Papa Doc qui pensait venir rencontrer directement le chef de l’Etat sans être invité par celui-ci – crime de lèse-majesté – sans passer par le Service du Ministère des Affaires étrangères en vue de discuter d’un dossier.

Après une journée passée à poiroter (attendre) dans une salle d’attente jouxtant le Bureau du Président, à 16 heures, heure de la fermeture des bureaux, Duvalier lui fait dire d’aller prendre rendez-vous comme c’est la règle auprès de son ministre des Affaires Extérieures suivant le protocole habituel. Suite à ce clash diplomatique que certains aujourd’hui auraient qualifié de signe irrespectueux, irrévérencieux envers l’ambassadeur, même les oppositions de l’époque, pourtant vent debout contre le régime, n’avaient pas considéré qu’il s’agissait d’un impair et que la Maison Blanche devait diligenter un contingent de Marines, aujourd’hui, on parlerait de mercenaires privés, pour venir soit assassiner soit renverser le Président. Et pour cause. Tout le monde sait qu’il y a un protocole à suivre avant d’accéder à un chef d’État et à un Premier ministre qui se respecte.

Henry T. Wooster s’entretient avec le secrétaire d’État américain Marco Rubio

Après cet épisode humiliant qui avait fait le tour des salons et des dîners diplomatiques de Port-au-Prince, non seulement tous les diplomates étrangers dans la capitale haïtienne se tenaient à carreaux par crainte d’être expulsés manu militari, mais ils se gardaient bien de se mêler de ce qui ne les regarde pas, s’agissant de la politique intérieure du régime de Duvalier. Mêmes les portes de certaines ambassades étaient définitivement fermées pour de nombreux opposants politiques, pourtant traqués, pourchassés et surveillés jours et nuits par la police politique du régime et les tristement célèbres Tontons Macoutes. En 2004, selon les aveux mêmes d’un « ami » diplomate français à Port-au-Prince, après l’exil du Président Jean-Bertrand Aristide : « La chute du régime dictatorial de la famille Duvalier en 1986 nous a en quelque sorte réhabilités, en clair, on a retrouvé notre mission première en Haïti, celle qui consiste avant tout à avoir les dirigeants haïtiens sous tutelles ». Tout est dit.

Et en effet, depuis plus de quatre décennies, cet « ami » ne croyait pas si bien définir le rôle des diplomates étrangers à Port-au-Prince qui font et défont la politique de ce pays, certes, avec le soutien actif et complice de tous les dirigeants qu’ils soient élus ou non. D’où l’intérêt que ces messieurs et dames les diplomates nous obligent à porter chaque fois que l’un d’entre eux part ou arrive à la tête d’une mission diplomatique en Haïti. Comme nous le disions plus haut, surtout pour les deux principaux – Etats-Unis , France – sans oublier bien évidemment le Canada qui joue depuis quelque temps dans la cour des « Grands » soit pour son propre compte quand c’est possible en jouant sur la corde sensible de l’immigration haïtienne au pays d’Erable, soit en sous-traitant comme il avait fait pour les Etats-Unis en favorisant et finançant diverses rencontres de la CARICOM sur Haïti à la Jamaïque jusqu’à la signature de l’Accord du 3 avril 2024 créant le fameux Conseil Présidentiel de Transition (CPT) devenu un an après l’ombre de lui-même.

Personne ne peut dire le contraire, aujourd’hui ce sont les ambassadeurs de ces trois capitales – Washington, Paris et Ottawa – qui mènent la danse en Haïti. Tout ou presque passe par ces représentants diplomatiques qui s’invitent comme bon leur semble à la Primature, au Palais national, l’Assemblée Nationale, au Palais de justice et aujourd’hui à la Villa d’Accueil pour dire leurs quatre vérités aux dirigeants haïtiens. En clair, donner des directives et le tempo politique à suivre bien que, depuis des décennies, les Haïtiens peinent à comprendre et à voir le résultat de cette ingérence étrangère tripartite dans leur pays. On a eu l’occasion de le souligner à maintes fois, tous les dirigeants haïtiens, mêmes élus, ce qui est tout de même curieux et paradoxal à la fois, pensent que sans le soutien et l’appui déclarés des ambassadeurs de ces trois pays, ils ne peuvent passer l’été ou l’hiver en poste.

D’où l’allégeance déclarée principalement à l’ambassadeur ou le Chargé d’affaires américain en poste en Haïti, qui, il est vrai, ne se gêne pas pour jouer le père fouettard ou à la peur sur les autorités d’un pays qui, légalement et selon tous les critères régis en matière de droits internationaux, est indépendant, libre et souverain. Par cette ingérence sans limite, les Etats-Unis s’emploient à faire d’Haïti même pas un Etat associé, voire une colonie mais bien moins que cela : un simple « Territoire » où Washington envoie quand bon lui semble n’importe qui mais ayant pour unique mission : de cantonner les dirigeants dans des tâches subalternes.

Les vraies décisions ne doivent pas dépendre d’eux, mais de ses représentants qui appliquent à la lettre la politique de destruction lente qui a été définie, théorisée, pensée par ceux qui n’ont jamais compris et ne veulent surtout pas comprendre comment ces bandes de « nègres » ont pu mener une guerre victorieuse contre leur allié français il y a plus de deux cents ans, se libérer de l’esclave jusqu’à se croire indépendantes. Il se trouve que, depuis qu’un complot international a tué dans l’œuf le rêve des fondateurs et les bâtisseurs de cet Etat à peine né, à part de rares moments de l’histoire, les dirigeants successifs se contentent de se plier aux diktats des comploteurs locaux et internationaux pour qui ce pays doit disparaître et ils feront tout pour que cet objectif soit atteint. Le profil de chaque diplomate envoyé en Haïti démontre qu’il ne vient pas pour conseiller encore moins pour apporter quelques brides de solutions aux problèmes que leurs pays respectifs ont imposés aux haïtiens.

Ils sont nommés, justement, pour accélérer la descente aux enfers de ce peuple trop fier qui pensait entrer dans l’histoire avec un grand « H » alors qu’il est censé payer la hardiesse et l’affront de leurs ancêtres pensant pouvoir apporter un brin d’humanité dans un monde inégalitaire, humain, esclavagiste, voire de sauvagerie. Depuis 1986, Haïti a vu défiler une cohorte d’ambassadeurs, Chargé d’affaires américain, français et canadien. Qu’est-ce que cela a apporté en termes de relation bilatérale pour le peuple haïtien et pour Haïti ? A la différence d’autres pays, particulièrement Cuba qui a défini une politique coopérative claire, efficace et utile en matière médicale envers Haïti. Or, en dépit de cette coopération réussie que personne, même leurs pires ennemis, ne met en doute, les autorités de La Havane, à notre connaissance, n’ont jamais rien demandé en retour et ne cherchent pas non plus et loin de là à influencer la politique de Port-au-Prince, histoire d’avoir des alliés dans les Forums internationaux.

Situé pourtant à quelques encablures des côtes haïtiennes, Cuba n’a jamais cherché à imposer sa politique sur quoi que ce soit en Haïti, ni faire de l’ingérence au moment des élections dans le pays. Il pratique la doctrine de non ingérence dans les affaires internes en laissant chaque peuple disposer de lui-même. Qui, en Haïti, a déjà entendu parler de l’ambassadeur cubain en Haïti à un moment ou à un autre ? Personne. A part quelques rares journalistes et observateurs politiques sachant que l’ambassadeur s’appelle Calos Moya Ramos, pas grand monde. Ce diplomate n’intervient jamais dans les débats, discussions et autres prises de positions dans les affaires haïtiennes qu’il s’agit de l’immigration, de la politique, des élections, du gouvernement. Pourtant, son pays entretient d’excellentes relations avec les autorités haïtiennes. Mais, comme les dirigeants de son pays, il se garde lui aussi d’intervenir dans les affaires internes d’Haïti.

Il n’est pas comme ses homologues américain, français et canadien, ces donneurs de leçons, ces censeurs qui ordonnent, passent des ordres, nomment et révoquent comme bon leur semble qui, quand et comment les dirigeants haïtiens comme s’il s’agissait de nommer ou congédier un employé d’une quelconque entreprise américaine, française ou canadienne. D’ailleurs, il suffit de lire ce que l’ambassade des Etats-Unis a écrit sur les priorités du nouvel ambassadeur Henry T. Wooster pour comprendre que ce sera lui le véritable patron en Haïti. « L’ambassade des États-Unis à Port-au-Prince accueille l’ambassadeur Wooster en tant que nouveau chargé d’affaires. Fort d’une carrière remarquable, avec notamment des missions en Haïti, en France, en Irak, au Pakistan, en Géorgie, diverses affectations à Washington et un rôle d’ambassadeur en Jordanie, l’ambassadeur Wooster dirigera une approche pangouvernementale de la politique américaine en Haïti. Le rétablissement de la stabilité sera sa priorité. » Qui a dit que ce n’est pas lui le patron ? D’ailleurs, le jeudi 3 juillet 2025, le nouveau patron ne s’est pas privé lors d’une réception donnée à son ambassade la veille de l’anniversaire de l’indépendance américaine du 4 juillet 1776 de donner une petite leçon de patriotisme aux élites et à la classe politique haïtienne qui se liguent contre leur pays.

« Les analystes d’Haïti, tout comme les Haïtiens eux-mêmes, évoquent souvent les « élites » lorsqu’il s’agit de parler de la culture politique du pays, et en particulier de sa classe dirigeante. Il ne surprendra personne ici de reconnaître que les fondateurs de l’Amérique étaient eux aussi des élites – un groupe d’hommes aisés, cultivés et influents. Ces élites savaient que la création d’un nouvel ordre impliquerait des sacrifices, voire leur mort. Ce qui est remarquable, c’est que la décision de rompre avec le statu quo ait été prise par ceux-là mêmes qui en bénéficiaient le plus ; autrement dit, par ceux qui avaient le plus à perdre. Ceux qui connaissent l’histoire des États-Unis savent que ce choix leur a coûté très cher, personnellement, financièrement et professionnellement ». Pour une fois, on est obligé de lui donner raison.

 

C.C

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