Numéro 6 : Joseph « Joe » Gaetjens (Port-au-Prince, 1924 -Port-au-Prince, 1964?)
« Héros d’outre-mer et Martyr national »
‘’Joe’’ fut propulsé dans l’arène athlétique nationale à une époque marquée de grandes mutations sportives. Le foot-ball avait atteint sa croissance, grâce à des adhérents qualifiés qui s’y adonnaient pleinement et adroitement et, une pléiade de talents individuels dont : Rock Pierre, Gérald. Haig, Antoine Tassy ‘’Zoupim’’, Sonson Alerte, Les frères Lavelanet, Fito Régnier, Edouard Baker, Yvon Martin, Roland Lacossade, Joseph Coby, André Vieux dit ‘’Dadadou’’ etc. dominaient les ébats sportifs. C’est ainsi qu’apparut dans une éclipse, comme la fine fleur du sport roi, le bien né ‘’Joe’’ Gaetjens qui conquit d’emblée comme prodige de l’Etoile Haïtienne, à coté d’un autre surdoué Phito Joseph (disparu hâtivement), au sein de laquelle, il remporta le championnat national en 1942 et 1944. Et fut du même coup appelé au sein de la Sélection Haïtienne. Entre temps le foot-ball ne pouvant nourrir son homme, J.G dont la famille de souche allemande faisant partie de l’élite commerciale du pays fut envoyé aux E.U pour entreprendre des études de comptabilité au Colombia University à New-York.
C’est ainsi que parallèlement à ses études, Joe tenait un petit boulot comme laveur d’assiettes au’’ Brookhattan Restaurant’’ dont le propriétaire possédait coïncidemment un club de foot-ball du même nom, composé de joueurs de Brooklyn et de Manhattan. Lequel participait à l’American Soccer League. Subséquemment, ‘’Joe’’ devint le talisman de cette formation; gagnant pour son compte le titre de ‘’Meilleur Buteur’’. A cette étape, il fut vite repéré par les responsables du Soccer American qui l’incorpora sur le champ dans la Sélection états-unienne, en vue de sa participation au Mondial de 1950 qui se tenait au Brésil. Bien que Gaetjens était de nationalité haïtienne, il joua tous les matches pour les E.U, marquant trois buts spectaculaires dont le plus mémorable fut celui scoré contre l’Angleterre, alors super favori qui baissa pavillon devant le cendrillon yankee. Tout cela, grâce à l’astuce de ‘’Joe’’ qui prit le gardien britannique Bert William’s à contre pied. Pour une victoire retentissante 1-0 des états-uniens. Donnant à l’Haïtien Joseph Gaetjens l’honneur de rentrer dans l’immortalité.
Suite à cet exploit ‘’Joe’’ fut recruté par le Racing Club de Paris, avant de passer deux années après à l’Olympique de Alès, toujours en France. Pour finalement regagner les pénates natifs en 1954 en réintégrant à nouveau les rangs de l’Etoile Haïtienne, ainsi que ceux de la Sélection Haïtienne. Subséquemment, après avoir raccroché les crampons, il resta actif dans le milieu du foot-ball tout en s’engageant dans des activités entrepreneuriales. Mais à cause de ses liens de parenté avec la famille de Louis Déjoie (vainqueur des élections présidentielles de 1957, usurpées par la CIA et l’Armée Haïtienne pour le compte du sanguinaire papadoc), ‘’Joe’’ innocemment pensa qu’il pouvait demeurer dans son pays, alors que les membres de sa famille avaient tous fui pour l’exil. Puisqu’il ne s’intéressait nullement à la politique. Mais, Duvalier et ses sadiques de macoutes ne l’entendaient pas de cette oreille et arrêtèrent le fameux athlète en plein jour, le matin du 8 Juillet 1964.Et depuis, son corps ne fut jamais retrouvé. Dès lors, sa famille n’a cessé de demander lumière sur sa disparition qui est restée lettre morte jusqu’à aujourd’hui.
En 2010, son fils Lesly Gaetjens publia une biographie sur sa vie et sa tragédie:’’L’Histoire de Joe Gaetjens:Le tir entendu à travers le monde’’. Son récit est aussi mis en filigrane à travers le film :’ Le Jeu de leurs vies’’’, dans une performance de l’acteur Jimmy Jn. Louis. En 1976, il fut intronisé de manière posthume dans la National Soccer Hall of Fame aux E.U. Dans cette même veine, la FiFA désirant perdurer sa légende lors de la Coupe du Monde de 1998 en France avait voulu émettre un timbre-poste à son effigie. Mais les hommes de loi haïtiens restèrent froids à cette idée. Ayant toujours d’autres chats à fouetter que d’honorer la mémoire d’un martyr national.