L’évènement ne nous a pas surpris. La fameuse Commission de vérification ayant pour principale mission de rétablir la sincérité des votes et la confiance dans le processus électoral, a été bel et bien mise en place ; toutefois, elle se garde encore de souligner les obstacles qui restent à surmonter. Mais, cette commission que la classe politique dans sa majorité toute entière attendait avec intérêt et curiosité va-t-elle devenir une force crédible et efficace face aux graves problèmes structurels du pays ? Suffira-t-il de résoudre l’impasse actuelle pour débarrasser la machine électorale de toutes ses pesanteurs ?
Loin s’en faut, puisque l’état de la situation est à l’image du pays. Il n’est que d’observer les réactions de la classe politique à l’aube de l’installation de la Commission pour présager dans quel sens que ce jeu mesquin de coquins ne sera pas facile. Comment va-t-on faire accepter à l’un ou à l’autre sa défaite ? La commission n’a même pas fini encore de s’installer, voire commencer son boulot, que déjà certains secteurs, certains acteurs impliqués dans la crise mettent en doute son travail. La question à se poser maintenant est de se demander si cette classe politique va réellement accepter les résultats de cette commission ?
C’est dans cette conjoncture encore très incertaine que des interrogations nous poussent à croire que cette étape de la crise ne saurait être qu’une phase pour établir des réformes transitoires allant vers la continuité. C’est une manque de principe et d’éthique qui est en jeu et elle porte bien un nom : Déclin total. Ce n’est pas en remplaçant une solution boiteuse par une autre aussi boiteuse que les problèmes seront résolus.
A notre avis, la précipitation de certains dirigeants politiques n’a fait que contribuer à compliquer la situation. Alors que Léopold Berlanger précise que les recommandations de la Commission ne seront pas imposables au Conseil Electoral Provisoire, Jean-Charles Moïse de Pitit Desalin n’attend qu’un résultat en sa faveur ; aucun autre ne sera agréé, si ce n’est lui. La candidate de Fanmi Lavalas Maryse Narcisse a félicité la mise sur pied de la Commission; sauf que Shiller Louidor, porte-parole du Parti, a indiqué d’emblée que « nous n’allons pas accepter toutes les recommandations de la Commission de vérification » ; Jude Célestin pour sa part, met les membres de la commission en garde contre tout « rapport préfabriqué ». Jovenel Moïse lui-même dont ses concurrents demandent l’exclusion continue de déclarer que la commission d’évaluation et de vérification est illégale, vu qu’elle n’était pas prévue dans l’accord du 5 février.
L’honnêteté politique commande de dire que la situation est pourrie, voire même nauséabonde ; parce que quel que soit le rapport de la dite Commission, il va être tout bonnement contesté. La réalité, ce n’est pas qu’il y ait un manque d’hommes ou de femmes honnêtes, ou bien qu’ils soient tous de la Commission des gens malhonnêtes. Non ! Le contraire est que, nous vivons depuis des temps dans un système épuisé, qui porte un vieil habit qu’on ne peut plus réparer. Mais à l’heure des brasiers, pour le véritable changement, les réformes cosmétiques ne feront que désorienter les masses populaires. Les conditions d’un vrai changement ne se créent pas artificiellement. Tous considèrent qu’il faut changer de fond en comble ce désordre inique, de là à évoquer un grand champ de bataille qui aboutira à la libération totale du peuple haïtien. Sans la mise en place d’un véritable processus de changement radical, nous n’arriverons jamais à venir à bout de ces maux encouragés par les forces impériales et qui ont pour noms : Corruption, Gabegie et Népotisme.
Il y a vraiment quelque chose de pourri au royaume de la politique haïtienne. Ainsi, une sainte alliance populaire annonce une manifestation en support à la Commission, est-ce une façon de l’influencer ? Mais, la colère est déjà dans les rues. Alors qu’au cours d’une conférence de presse pour annoncer cette mobilisation en appui à la Commission, des individus se réclamant également de la base populaire demandaient le partage du gâteau, puisque pour eux, ils sont en train d’être utilisés ; disant quelques uns dans leurs rapports avec le nouveau pouvoir se la coulent douces ; alors que pour eux, ils n’ont encore bénéficié de rien.
Ce genre de frustration n’aide pas vraiment, puisqu’il n’y a jamais eu une mobilisation ni même une quelconque velléité de la part de ces mêmes courants de s’allier contre l’occupation du pays, contre le sous-développement et la pauvreté chronique et contre l’analphabétisme. On ne cherche seulement qu’à se faire caser.
Quels que soient les échos que cette Commission suscitera dans le pays, elle constitue l’illustration exemplaire d’un échec que seul un mouvement patriotique basé sur un projet national peut aider à surmonter et gagner cette guerre contre le sous-développement politique et économique, afin que nous puissions développer notre propre capacité d’initiative sans aucune interférence négative des forces obscures jamais intéressées à l’avancement des masses populaires.