L’insécurité qui s’abat sur certaines villes du pays, notamment Port-au-Prince, la capitale, n’est pas tombée du ciel. Pour comprendre ce qui se passe actuellement et surtout le phénomène d’insécurité grandissante, il faut se rendre compte qu’il s’agit d’une terreur instaurée par les classes dirigeantes et les pouvoirs tutélaires pour combattre la classe prolétarienne.
L’histoire de la lutte dans toute société et ce, jusqu’à aujourd’hui, est celle des luttes de classes. Quand on examine la dynamique de la lutte dans la société haïtienne, il faut d’abord considérer les rapports de production. La bourgeoisie possède les moyens de production, mais elle ne peut rien faire sans la classe des travailleurs qu’elle exploite. Examinons le niveau de développement des forces productives, le mode de production et les classes sociales en lutte qui ne sont autres que la bourgeoisie et le prolétariat.
L’aggravation sans précédent de la misère du côté des travailleurs a orchestré la résistance des exploités et des affamés contre un système qui ignore leurs besoins les plus élémentaires. Le mouvement populaire face à ce que l’on pourrait considérer comme une impasse des politiques empêche aux exploiteurs d’avancer. De ce fait, le système capitaliste agonise tout en mettant la classe politique au pouvoir dans l’incapacité de gouverner. Alors, pour qu’elle tienne un peu plus, elle doit à tout prix empêcher et combattre par tous les moyens possibles et imaginables, et ce jusqu’à la liquidation totale, toutes les forces vives et populaires.
Les capitalistes se sentent menacés et ont décidé de se défendre de manière brutale et cynique. D’où la genèse de l’insécurité qui n’est autre qu’une arme politique dans les mains de l’État haïtien contre tout mouvement populaire. Il en va de même pour la politique mise en œuvre aujourd’hui dans le pays. Maintenant, la grande interrogation, c’est au profit de qui travaille la police ? Qui sont les bénéficiaires des mesures que l’État a mis en place, si ce ne sont les individus de la classe sociale qu’il favorise ?
Comme cette classe a eu peur de la tournure que prenait la mobilisation populaire avec les slogans de changement de système qui étaient sur toutes les lèvres, en ce sens, l’insécurité est comme une bénédiction pour le pouvoir permettant à la bourgeoisie locale de reprendre souffle afin de mieux contrôler les masses populaires.
Les gouvernements passés et présents, tous sans exception après 1986, sont les principaux bénéficiaires du phénomène d’insécurité. Ce n’est pas un hasard s’ils avaient choisi de fournir armes et munitions dans les ghettos et aux quartiers défavorisés afin de maintenir en respect la population. En fait, ils utilisent la jeunesse opprimée contre sa propre classe.
L’insécurité est devenue un moyen tactique pour attaquer pratiquement le mental et la psychologie de la population concernée, dans le but précisément de l’empêcher de penser, de s’organiser et de fonctionner normalement. C’est une politique ayant pour objectif d’empêcher toute attaque politique motivée visant à détruire les intérêts de l’impérialisme, de la classe dirigeante et de la bourgeoisie parasitaire dans le pays. L’insécurité ainsi que la pauvreté accompagnent le capitalisme néolibéral dans ses actes et ses actions.
Cela désoriente à un point tel qu’on est presque incapable de penser à un avenir meilleur voire construire une autre société. C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre pourquoi l’insécurité, une des pièces maitresses du système capitaliste, au lieu de perdre en intensité ne cesse de s’accroître. On ne peut plus compter sur cet État-là, dans la mesure où il n’est pas là pour défendre les intérêts de la population haïtienne mais ceux d’un clan. Il n’hésite devant aucun crime, aucun démantèlement social pour satisfaire l’appétit des oligarques.
Ceux qui sont aux commandes viennent de la société civile, de la bourgeoisie, en quelque sorte des agents internationaux manifestant tout leur mépris pour les masses populaires et le pays.
Au prétexte de faire face au chaos dans lequel s’enfonce le pays, les dirigeants jouent la carte de la prière pour passer en dérision le peuple. Quand Leslie Voltaire à son retour d’Europe, faisant le bilan de sa visite au Vatican nous disait qu’il était allé prier « La Vierge Notre-Dame du Perpétuel Secours, patronne d’Haïti, afin qu’elle fasse un miracle pour le pays »… « Tout comme elle l’a fait en 1882 lors de l’épidémie de variole à Port-au-Prince, j’ai spécialement demandé à la Vierge de faire un miracle pour le pays. Je lui demande de neutraliser les gangs afin de pacifier le pays », n’est-ce pas une illustration indécente, grotesque et même plus, une sorte de banalisation des conditions d’enfer dans lesquelles vit le peuple. Il s’agit là d’une déclaration démagogique de Voltaire. Que le peuple comprenne que ce Conseil Présidentiel de Transition n’est qu’une morgue remplie de cadavres dont leur seule activité est de détourner les masses des problèmes réels, surtout politiques.
Dans la même veine, l’aveu du Premier ministre lors de sa conférence de presse à la Direction générale de la Police Nationale à propos du massacre à Kenscoff montre clairement : que l’insécurité, c’est le gouvernement et le gang impérialiste qui l’organisent.
Les travailleurs, les paysans et la jeunesse n’ont rien à attendre de la bourgeoisie et de cette classe politique pro-impérialiste. Ce n’est pas avec elles que des solutions seront trouvées. Au contraire, c’est sans elles et contre elles que nous devrons agir. Dans ce cas, on ne peut leur laisser le champ libre. Il faut que les mobilisations s’intensifient au plus vite pour stopper cette hémorragie politique. Bien que la dynamique de la bataille soit en quelque sorte affaiblie, les miettes jetées aux classes laborieuses ne doivent en aucune circonstance empêcher la mobilisation citoyenne, voire la révolution populaire de continuer sa course pour la libération nationale du peuple haïtien.