Le feuilleton kenyan en Haïti (20)

(20e partie)

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Des policiers kenyans et haïtiens au siège de la Police Nationale d’Haïti à Port-au-PrinceJuly 8, 2024. (AP Photo/Odelyn Joseph)

De la date de la demande, le 9 octobre 2022, à cette date fatidique du 25 juin 2024, le jour du débarquement, comme il a été démontré tout au long de cette chronique, beaucoup d’eau ont coulé sous les ponts et de nombreux évènements ont été enregistrés dans le pays avec le plus significatif: la chute surréaliste du Premier ministre de Transition, Ariel Henry, suite au soulèvement armé du 29 février 2024 de la coalition des groupes armés « Vivre Ensemble » dirigé par l’ancien policier Jimmy Chérizier alias Barbecue.

Signalons qu’entre-temps, le ministère de l’Économie et des Finances dirigé alors par Michel Patrick Boisvert a publié, à la fin du mois de juin 2024, un avis de liquidation de la pension de retraite concernant l’ancien chef du gouvernement intérimaire. On apprend, en effet, dans le journal officiel Le Moniteur datant du jeudi 27 juin 2024, que «  Le ministère, sur recommandation favorable de la Direction de la Pension civile en date du 31 mai 2024, a approuvé une allocation mensuelle de 150 000 gourdes pour M. Ariel Henry. Cette allocation reflète un droit auquel l’ancien Premier ministre peut prétendre et elle est effective à partir de la date de publication de l’avis. »

Terminons enfin ce récit avec les premiers pas de ces kenyans sur le sol d’Haïti qui, à cause de la dangerosité du terrain, ne sont pas autorisés à quitter leur base en dehors des heures de travail. Presque trois mois, en effet, après l’arrivée des premiers contingents, rien ne semble se passer comme les dirigeants l’auraient espéré. Et pour cause. Les policiers ou militaires kenyans tournent en rond dans leurs casernes tout au moins dans certains quartiers de la capitale sous la protection de nos pauvres policiers haïtiens dont ils sont censés venir renforcer les actions. Comme disait un responsable étranger d’une organisation humanitaire internationale évoluant en Haïti, c’est le monde à l’envers.

En fait, pour comprendre la déception de certains citoyens haïtiens et d’une grande partie des ONGs (Organisation Non Gouvernementale) en Haïti sur le peu de résultat obtenu ou observé de la part de cette mission internationale en un peu plus de deux mois, il faut chercher la faute chez les autorités haïtiennes qui ont souhaité cette présence étrangère et la Communauté internationale, notamment les Américains qui ont tout pris à leur compte, c’est-à-dire, tout le déroulé de cette opération militaire du début à la fin.

Pire que la MINUSTAH, la MMAS est arrivée dans le pays sans aucune ligne directive, sans mission définie. Juste quelques vagues idées selon lesquelles des militaires kenyans et des militaires d’une foultitude d’autres Etats devaient venir soutenir les  forces de l’ordre locales à combattre les gangs. Visiblement sans plan, ni méthodologie, ni agenda pour vraiment affronter les gangs qui ont déjà une bonne longueur d’avance dans la maitrise du territoire, en tout cas, les lieux qu’ils contrôlent, les kenyans peinent à faire face. Surtout, comme il a été dit plus haut, ils dépendent du soutien physique des policiers haïtiens pour entreprendre quoi que ce soit. D’ailleurs, lors de leur première tentative de sortie de leur base de Clercine au début du mois de juillet pour faire connaissance avec les rues de la capitale, au moins deux d’entre eux ont été blessés dans une brève altercation armée avec un noyau de bandits au bas du Centre-ville.

Les policiers ou militaires kenyans tournent en rond dans leurs casernes tout au moins dans certains quartiers de la capitale sous la protection des policiers haïtiens dont ils sont censés venir renforcer les actions.

Ils ont été vite expédiés en République dominicaine pour se faire soigner. Un geste qui a encouragé le Commandant en chef de la Mission Multinationale d’Appui à la Sécurité en Haïti, Godfrey Otunge, à rendre une visite de courtoisie à l’ambassadeur de la République dominicaine en Haïti, Farouk Miguel Castillo, le mardi 6 août 2024 en guise de remerciement. Le Kenyan n’a cessé d’exprimer sa gratitude envers les autorités dominicaines pour leur appui quasiment sans limite aux forces militaires de la mission internationale. Pour sa part, le diplomate dominicain avait réitéré le soutien du gouvernement de son pays à la Mission et se disait disposer à aider Godfrey Otunge dans sa difficile mission à Port-au-Prince.

Par ailleurs, le mercredi 7 août 2024, ce fut le tour du Secrétaire général Adjoint du Département de la sureté et de la sécurité de l’ONU (UNDSS), Gilles Michaud et Maria Isabel Salvador, cheffe du Bureau Intégré des Nations-Unies en Haïti (BINUH) et Représentante en Haïti du Secrétaire général des Nations-Unies, Antonio Guterres, de se rendre à la base la Mission Multinationale d’Appui à la Sécurité en Haïti pour rendre visite au Commandant en chef de la MMAS, Godfrey Otunge. Etonnamment, selon les informations fournies par les deux parties, cette visite avait pour but de s’enquérir du « niveau de préparation de la mission ». Curieux, en effet, qu’il fallait près de trois mois après le début du déploiement pour que l’ONU chercherait à connaître à quel niveau de préparation se trouve la mission, alors même que des hommes et des femmes des troupes sont déjà à pied d’œuvre sur le terrain. Drôle de mission dirait l’autre !

Ceci démontre aussi à quel point personne ne prend aux sérieux cette mission de soutien qui se disait internationale en vue de secourir le peuple haïtien face à des bandits ne reculant devant rien ni devant aucune force pour terroriser tout un pays et les habitants de la région métropolitaine de Port-au-Prince notamment. C’est aussi un exemple supplémentaire démontrant que les Etats-Unis, la France et le Canada, les vraies parties prenantes de ladite mission n’en ont cure des dirigeants haïtiens faisant preuve d’irresponsabilité dans ce qui devrait être leur devoir de protéger la vie et les biens de la population face au danger et à l’insécurité qu’imposent les groupes armés. Pendant que l’ONU et les Américains en particulier cherchent à savoir si le niveau de préparation de la mission était satisfaisant ou pas, les gangs eux ne chôment point.

C’est tout le contraire d’ailleurs, dans la mesure où ils profitent de l’incapacité des dirigeants haïtiens, de l’indécision de la Communauté internationale et du cynisme tout particulier de Washington pour accroitre leur territoire. Comme en attestent les faits d’arme du gang 400 Mawozo sur la frontière haïtiano-dominicaine du côté de Fonds-Parisien et de Fond-Verette où ces bandits s’emparent sans coup férir du Commissariat de police de ces localités situées à seulement quelques kilomètres de la République dominicaine et non loin de la Commune de la Croix-des-Bouquets. Ce même 7 août 2024, soit plus de deux mois après la présence des militaires kenyans dans ce département de l’Ouest, les gangs ont multiplié leurs exploits militaires, d’autres écrivaient leurs prises de guerre, tant ils sont sans limite.

Ce jour-là, au nord de la capitale, dans la localité dénommée Bercy, à un jet de pierre de la ville de l’Arcahaie, berceau du Congrès qui a donné naissance au drapeau bicolore haïtien, tout le monde pouvait admirer, si on ose le dire, tranquillement sur les réseaux sociaux, comment des bandits s’adonnaient à la pratique du 7e art, c’est-à-dire, en train de filmer leurs forfaits. Pourtant, le Premier ministre Garry Conille avait reconduit, quelques jours auparavant, ce que les autorités appellent « l’État d’urgence  sécuritaire» dans le département de l’Ouest et une partie du département de l’Artibonite afin de donner carte blanche aux forces de l’ordre haïtiennes et bien entendu à la force multinationale pour combattre les gangs qui, selon Garry Conille sur la chaîne de télévision britannique BBC World, sont au nombre de « 200 », un décompte dont on ignore  d’où viennent les sources du chef du gouvernement de la Transition.

Plus de deux mois après le débarquement, le même Garry Conille reconnaît, lors de son interview avec la BBC, que « c’est 80 à 85 % de la capitale qui sont contrôlés par les gangs » en clair, beaucoup plus qu’avant l’arrivée du premier contingent kenyan. Le problème, il semblerait que malgré tous les tapages que faisaient les autorités haïtiennes et leurs homologues américains, canadiens et kenyans autour de cette mission soutenue par les Nations-Unies avec la Résolution 2699, les équipements militaires nécessaires pour équiper les policiers haïtiens surtout les troupes kenyanes n’ont jamais été suffisants, pire, beaucoup ne sont toujours pas arrivés en Haïti à l’inverse des tonnes d’armes et de munitions beaucoup plus sophistiquées et de toute qualité qui se déversent quasi-quotidiennement à Kiev, en Ukraine pour soutenir l’effort de guerre de ce pays face à la Russie. Finalement, le quotidien haïtien Le Nouvelliste, citant une source anonyme, laissait entendre que des « équipements, des armes, des munitions, des blindés sont en route pour la PNH, les FAD’H et la MMAS. Oui, c’est le cas, il y a des commandes d’équipements létaux pour la PNH et les FAD’H. Les commandes effectuées par l’Etat prennent beaucoup de temps à arriver. Il y a des tracasseries administratives, beaucoup de restrictions. Par rapport à ce problème, il y a eu des appels pour faire bouger les lignes. Cependant, l’augmentation drastique des équipements ne changera pas les choses du jour au lendemain. Il y a la question des hommes, du renseignement, la nécessité d’approcher le problème de manière holistique » Le Nouvelliste du 7 août 2024.

Cette lenteur pour l’arrivée des armes et d’autres équipements pour la mission en Haïti devient tellement critique et préoccupante que la Communauté des États de la Caraïbe (CARICOM) qui travaille en sous-traitance pour les Etats-Unis depuis le début sur ce dossier a dû intervenir le 13 août 2024 à travers son Groupe des Personnalités Éminentes qui était en mission dans la capitale haïtienne suite à divers scandales dont des accusations de corruption concernant, Smith Augustin, Emmanuel Vertilaire et Louis Gérard Gilles, trois membres du Conseil Présidentiel de Transition (CPT). En effet, lors de la visite de cette délégation composée de neuf personnalités de la CARICOM dirigée par l’ancien Premier ministre de Sainte-Lucie et Coordonnateur du Groupe des Éminentes Personnalités, Kenny Anthony et de Bruce Golding ex-Premier ministre de la Jamaïque, il y eut le mardi 13 août 2024 une table- ronde à l’hôtel Montana avec le Commandant de la MMAS en Haïti, Godfrey Otunge, Inspecteur général adjoint de la police du Kenya.

L’ordre du jour de la rencontre est aussi surprenant qu’inquiétant pour la population qui attend des résultats palpables de la part des kenyans. Il s’intitulait « Comprendre comment la Mission dirigée par le Kenya a pris son envol et fait face à des défis et problèmes de démarrage qui devraient être résolus pour permettre aux autres pays contributeurs d’envoyer leur personnel en Haïti pour la Mission ». A l’issue de ladite table-ronde, les deux parties se sont engagées à tout faire pour que la Mission réussisse.

Les membres de la délégation de la CARICOM, selon un communiqué émis le jour même, disaient « Apprécier les démarches et les mesures prises par la Mission pour travailler en tandem avec la Police Nationale d’Haïti (PNH), pour récupérer certaines des infrastructures critiques et ont promis de catalyser le déploiement d’autres pays contributeurs, en particulier ceux de la CARICOM. La CARICOM regrette la lenteur de la livraison par les américains des équipements et des véhicules essentiels. » Quant au chef de la Mission, Godfrey Otunge, celui-ci a « Remercié la délégation pour cette réunion opportune et a informé de l’état d’avancement du déploiement de la Mission. Soulignant la logique derrière la création de bases d’opérations avancées (FOB) et la nécessité de disposer d’hélicoptères pour la Mission. »

Signalons que les autres membres de la délégation du Groupe des Éminentes Personnalités de la CARICOM étaient : l’Ambassadeur Colin Granderson (Conseiller spécial pour Haïti auprès du Secrétaire général de la CARICOM), l’Ambassadrice Jerusa Ali des Bahamas, Mme Elizabeth Solomon, Secrétaire générale adjointe (relations étrangères et communautaires, Secrétariat de la CARICOM), Mme Anna Lisa Jones-Reis, Responsable des relations étrangères et communautaires, Secrétariat de la CARICOM et le capitaine Chapell Whyms, Ministère des Affaires Étrangères. Le 16 août 2024, Godfrey Otunge qui passe davantage de temps à recevoir des diplomates et officiels étrangers de passage à Port-au-Prince, faute d’avoir une mission claire sur le terrain en Haïti pour ses hommes, a reçu dans son bureau l’ambassadrice des Bahamas Jerusa Ali en visite auprès des dirigeants haïtiens. Elle était accompagnée du Chargé d’affaires de l’ambassade des Bahamas à Port-au-Prince, le Commandant Julain Smith, lors de sa rencontre avec le chef de la Mission.

L’ambassadrice a visité plusieurs locaux au sein de la base de la Mission dont un hôpital, une usine de traitement et de recyclage d’eau, etc. D’autre part, un autre militaire, le capitaine Brown, celui qui a mis en œuvre le concept d’opération militaire de la Mission et qui accompagnait madame Jerusa Ali en Haïti, devait indiquer que « Les Bahamas sont un partenaire essentiel de la Mission en assurant la sécurité maritime. Le Gouvernement bahaméen cherche à conclure des accords bilatéraux avec Haïti afin d’obtenir une base juridique solide pour son déploiement ». Dans la foulée, la France annonçait qu’elle a versé plus de 800,000 euros à l’OIF (Organisation Internationale de la francophonie).

Visite de courtoisie du Commandant en chef de la Mission Multinationale d’Appui à la Sécurité en Haïti, Godfrey Otunge, à l’ambassadeur de la République dominicaine en Haïti, Farouk Miguel Castillo, le mardi 6 août 2024

Cet argent devait servir à l’apprentissage du français et du créole aux différents contingents militaires étrangers qui rejoindront la Mission en Haïti. L’organisme francophone devrait s’assurer que les policiers kenyans en premier lieu aient une parfaite maitrise de la langue de Molière pour mieux communiquer avec la population en dehors du créole, la langue parlée par cent pour cent de la population. Le mardi 27 août 2024, le Premier ministre de la Transition, Garry Conille, était sur les barricades dans le cadre de l’« État d’urgence sécuritaire » qui, selon son propre constat, n’a point donné le résultat escompté malgré le renforcement et le soutien aux forces de l’ordre avec la présence des centaines de militaires kenyans dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince.

« Le Premier ministre, Dr Garry Conille, est au Centre des opérations de la Police nationale, tôt ce mardi, pour superviser les interventions menées dans plusieurs points de la capitale dans le cadre de l’État d’urgence sécuritaire.  Le chef du gouvernement est accompagné du ministre de la Justice, du directeur général de la Police nationale, du général en chef des Forces Armées d’Haïti (FAD’H) et du commandant de la Mission Multinationale d’Appui à la Sécurité en Haïti, pour discuter de la stratégie des opérations au centre-ville de Port-au-Prince » devait indiquer un communiqué de la Primature.

Accompagné de son chef de la police, Rameau Normil, du ministre de la Justice et de la Sécurité Publique, Me Carlos Hercule, du général en chef des Forces armées d’Haïti (FADH), Derby Guerrier, et, bien entendu, du Commandant de la MMAS, Godfrey Otunge, Garry Conille voulait s’enquérir du résultat de plusieurs opérations conjointes menées dans divers points stratégiques de la capitale et ses proches banlieues qui, apparemment, n’ont pas changé d’un iota dans la stratégie des gangs dont l’objectif semble de conquérir totalement les départements de l’Ouest et de l’Artibonite avant de se lancer à l’assaut d’autres territoires à travers la République.

On se rappelle que lors d’un entretien avec des médias de la capitale, l’ex-ministre de la Justice et de la Sécurité Publique, madame Emmélie Prophète-Milcé, répondait sans détour : jamais elle ne prendrait les routes conduisant au Bicentenaire, Martissant et de Carrefour qui sont pour elle des « territoires perdus » de la République. La veille de cette tournée à travers les rues de Port-au-Prince, la chaîne de télévision américaine CNN publiait dans son édition du lundi 26 août 2024 un article dans lequel les policiers kenyans déployés en Haïti dans le cadre de la force multinationale se plaignent de n’avoir pas reçu l’intégralité de leur salaire. « Les agents se sentent frustrés de ne pas avoir été payés pendant deux mois. Nous entendons dire que l’argent a déjà été envoyé au Kenya mais qu’ils ne nous ont pas payés, alors s’il vous plaît, aidez-nous », devait indiquer un officier de l’un des contingents kenyans à CNN.

Selon la chaîne donnant écho aux inquiétudes des policiers du Kenya en Haïti, « Certains officiers ont exprimé leur frustration et leur inquiétude concernant les paiements supplémentaires manquants. Avec la réouverture des écoles au Kenya cette semaine, certains disent qu’ils ont besoin d’argent de toute urgence pour payer les frais de scolarité et d’autres dépenses pour leurs familles restées au pays ». En guise de réponse et histoire de rassurer les policiers en difficulté financière au sein de leur base en Haïti, le Service National de Police du Kenyan ou National Police Service) (NPS) devait publier en urgence le dimanche 25 août 2024 un Rapport dans lequel cet organisme qui gère le salaire des policiers a donné quelques précisions concernant cette affaire juste avant que CNN ne publie son article. « Les officiers continuaient à percevoir leurs salaires du NPS en attendant le supplément de salaire pour leurs fonctions au sein de la MMAS. La MMAS a annoncé que les officiers pouvaient s’attendre à ce que les fonds manquants soient versés sur leurs comptes bancaires cette semaine. Par conséquent, il n’y a pas lieu de s’inquiéter concernant les questions de bien-être des officiers de la MMAS, étant donné que les processus généraux ont été finalisés.»

Enfin, pour terminer cette chronique au long cours, il faut signaler la première opération conjointe et officielle de la MMAS, des FADH et de la police nationale dans certains endroits à Port-au-Prince le mardi 27 août 2024. Plusieurs quartiers de la capitale, entre autres Delmas 2, le fief de Barbecue, Bel-Air et le Centre-ville, ont été visés par cette opération dans laquelle, selon des témoins, il y a eu de nombreux morts parmi les gangs. Bien que plusieurs blindés de différents corps aient pris part à cette opération antigang, on dénombre aussi trois victimes parmi les policiers, blessés au cours de l’intervention. Signe que les bandits ne s’avouent pas vaincus et sont prêts à affronter les forces de l’ordre au péril de leur vie et en dépit que les militaires des contingents kenyans, la PNH et les soldats des FADH soient supérieurs en nombre, armements, équipements et sur le plan technique et stratégique.

En interview avec le journal Le Nouvelliste à l’issue de l’opération, le chef du gouvernement de la Transition a indiqué que « Cette opération avait impliqué la PNH, les FADH et la MMAS. Il y en aura d’autres. L’idée est de récupérer maison après maison, quartier après quartier et ville après ville. Nous parlons d’abord de chaque maison parce que nous sommes en face d’une guérilla urbaine.» Pour boucler l’histoire du débarquement de ces kenyans en Haïti, on pense à certaines personnes qui désespèrent de leur arrivée tant le processus a été long, scabreux. Elles disaient, d’ailleurs, qu’elles croiront vraiment au dernier épisode de ce feuilleton que le jour de l’arrivée effective de cette force armée multinationale en Haïti sous le commandement du Kenya. D’autres, en revanche, pensaient même qu’en récompense, cette nouvelle intervention militaire pourrait déboucher peut-être sur une éventuelle candidature à la présidence d’Haïti à la demande des Etats-Unis, de l’un des acteurs haïtiens par qui l’occupation étrangère était devenue effective en 2024.

Ils se rappellent du précédent de 1915 avec Sudre Dartiguenave, le premier Président collaborationniste de l’histoire d’Haïti. Celui-ci collabora, en effet, en toute franchise, et pendant longtemps (1915-1922) avec l’occupant. En Haïti, on le sait, politiquement tout est possible, même le pire. Ainsi, depuis ce qui était devenu un vrai roman politico-diplomatique et militaire lorsqu’un Etat africain, en l’occurrence le Kenya, ce pays de l’Afrique de l’Est, a pris tout le monde par surprise en acceptant de prendre le leadership d’une force militaire multinationale pour venir combattre les gangs armés qui ont pris quasiment le contrôle de toute la région métropolitaine de Port-au-Prince et une bonne partie du département de l’Artibonite, le pays vit entre incertitude, espoir, peur et angoisse. Quant à la capitale, au moment de boucler les dernières lignes de cette chronique, tous les jours qui passent l’approche davantage de l’asphyxie. Et pour cause.

Après le Centre-ville historique de Port-au-Prince, ce sont les banlieues limitrophes constituant le Grand-Port-au-Prince : Carrefour, Mariani, Gressiers, Croix-des-Bouquets, Tabarre, Drouillard, Ganthier, etc. qui sont en passe de tomber entre les mains d’une myriade de chefs de gangs incontrôlés et incontrôlables et tout-puissants. Quant aux autorités haïtiennes, notamment, le nouveau Premier ministre Garry Conille et le Conseil Présidentiel de Transition (CPT), ils s’adonnent à communiquer quand ils le peuvent, sur des rencontres et visites par-ci et par-là tout en s’appuyant, justement, sur la présence de cette force multinationale, pour faire la différence, en attendant le miracle kenyan. Un miracle qui est encore loin, très loin de se produire.

(Fin)

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