TPS: Trump érige aussi un mur administratif (4)

Le Congrès contre le gouvernement

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Yvette Clarke, députée démocrate de New York au Congrès , d’origine jamaïcaine: «Je pense que nous devons vraiment nous mobiliser et amener notre pays dans un système d'immigration du XXIe siècle. C'est ridicule de la façon dont nous fonctionnons à l'heure actuelle».

(4ème partie)

LE GOUVERNEMENT MANIPULE LA LOI

Le juge fédéral Emmet Sullivan de Washington DC qui a déterminé que la nouvelle interprétation restrictive du droit d’asile par l’ancien ministre de la Justice Jeff Sessions était “arbitraire et capricieuse et contraire à la loi”, a ajouté que certaines des politiques d’asile de l’administration Trump sont “incompatibles avec l’intention du Congrès telle qu’énoncée dans la [loi sur l’immigration et la nationalité]” et que c’est “la volonté du Congrès – pas les caprices du pouvoir exécutif – qui détermine la norme pour une déportation accélérée”, soit sans passer devant un juge d’immigration.

(Incidemment, c’est ce même Sullivan qui est en train d’entendre le cas très médiatisé de l’ancien conseiller à la sécurité nationale de Trump, Michael Flynn, qui a eu des contacts avec les Russes pendant la campagne électorale de 2016 et collabore maintenant activement à l’enquête de Robert Mueller sur Trump. Ce même Flynn qui a également caché son rôle de lobbying au service du gouvernement turc de Recep Erdogan pour tenter d’extrader l’opposant Fethullah Gülen).

Le même phénomène de manipulation et d’usurpation de pouvoir par le gouvernement s’observe avec le TPS. Ainsi, dès sa nomination au poste de chef de politique du Department of Home Security (DHS), et pendant plus d’un mois, du 7 avril au 12 mai 2017, en anticipation de la décision précédente relative au TPS à déterminer pour le 18 mai (six mois avant celle de novembre), Kathy Nuebel Kovarik a fébrilement cherché à savoir combien d’Haïtiens TPS étaient des criminels ou recevaient de l’aide publique. Memo du 27 avril à 9h08 à son staff, un exemple parmi des dizaines de courriels: “Je sais qu’une partie n’est pas enregistrée, mais nous devrons trouver un moyen d’extraire plus de données de nos systèmes [informatiques]”. (Les casiers judiciaires, par exemple, ne mentionnent pas si la personne est TPS ou pas, et Medicaid n’a pas de données détaillées, ni même par nationalité). Dix jours auparavant, le 17 avril à 9h44 un fonctionnaire (nom expurgé) avait écrit à Kathy Nuebel Kovarik: “Pour le moment, je ne sais pas si nous serons en mesure de fournir des données sur la criminalité de TPS Haïti, mais nous ferons de notre mieux”.

D’abord, quelqu’un avec un casier judiciaire n’aurait pu devenir TPS, et un TPS ne peut recevoir de l’aide publique. Ensuite, précise Alicia Caldwell, reporter se spécialisant dans l’immigration au Wall Street Journal et à l’agence Associated Press qui a obtenu ces mémos internes en exclusivité: “La demande de données criminelles pour toute une communauté ethnique est peu orthodoxe. La loi fédérale ne précise pas que cela devrait être pris en compte pour accorder le statut de protection temporaire, et le gouvernement n’a jamais dit qu’il utiliserait le comportement d’une communauté pour décider si les citoyens d’un pays devraient être autorisés à rester”. Comme l’a dit Maria Odom, ancienne ombudsman de l’USCIS sous Obama, «On ne doit pas élaborer une politique humanitaire basée sur le petit nombre», confirmant que ses services vérifiaient déjà si le demandeur de TPS avait un casier judiciaire ou non.

Kathy Nuebel Kovarik a fébrilement cherché à savoir combien d’Haïtiens TPS étaient des criminels ou recevaient de l’aide publique.

Mais Kovarik insistait encore le 28 avril: “SVP creusez pour trouver des histoires (réussies ou non) qui montreraient comment les choses se passent en Haïti – par exemple des cas de reconstruction, le travail d’organisations à but non lucratif, la manière dont les États-Unis aident certains secteurs. Nous devrions également trouver tout rapport d’activité criminelle de toute personne avec TPS. Même si ce n’est qu’un instantané et non représentatif de la situation dans son ensemble, il nous faut plus que des histoires du genre ‘Haïti est vraiment pauvre’».

Une autre reporter spécialiste de l’immigration, Dara Lind de Vox, un site internet de nouvelles politiques fondé par Ezra Klein, ancien journaliste au Washington Post, écrit qu’il “est tout à fait légal que la Maison-Blanche influence les décisions prises par le Department of Homeland Security […], Mais il y a une différence entre influence et contrôle. La loi fédérale est claire en ce qui concerne le TPS, c’est-à-dire que le choix d’un pays, ou d’une prolongation, appartient au secrétaire de la Homeland Security, et non au président”. Et nous avons vu le cas où la Maison Blanche a fait rabaisser le délai de 18 mois à 12 mois pour les TPS nicaraguayens.

Ainsi, le procès intenté par les TPS du nord de la Californie, “conteste la capacité de l’administration Trump à simplement réinterpréter un statut et de réviser sa politique pour l’atteindre”, tout comme celui intenté à Brooklyn. Mais, continue Lind, “Il est tout aussi important de souligner que l’interprétation juridique est une feuille de vigne – que l’administration Trump tue le TPS parce qu’elle a un programme plus large de restriction de l’immigration aux États-Unis».

Dans cette manipulation, l’administration Trump fait fort attention de ne pas utiliser des termes susceptibles d’être illégaux. Ainsi, dans le cas de la séparation de familles à la frontière dont nous avons parlé dans la 3ème partie de cet article, Roque Planas, encore un reporter se spécialisant dans l’immigration, cette fois au Huffington Post, dit que “Les tribunaux fédéraux ont statué à plusieurs reprises que changer la politique de détention des immigrés comme moyen de dissuader les sans-papiers de venir aux États-Unis est illégal”.

Obama avait déjà tenté cela en 2015, mais le juge fédéral James Boasberg avait statué qu’on ne peut emprisonner des immigrants que“s’ils posaient un risque pour la communauté ou risquaient de fuir” et non pas dans le seul but de dissuasion. Pourtant, c’est bien de dissuasion qu’il s’agit dans le cas de séparation des familles sous Trump. Lors d’une réunion en août 2017, des fonctionnaires du DHS ont fait un brainstorming sur de nouvelles méthodes pour  renforcer l’application des lois en matière d’immigration et un participant a dit à  Jonathan Blitzer, reporter au New Yorker ayant reçu un prix de l’Association des avocats d’immigrations (AILA): “[Gene] Hamilton [le chef de la discussion, nous reviendrons en détail sur lui] nous a dit qu’au cours des prochains jours, nous devions créer des documents décrivant tout ce que nous pourrions faire pour dissuader les immigrants de venir illégalement aux États-Unis […] Certaines des idées n’avaient pas de sens. Certaines étaient illégales, et certaines, comme séparer les enfants, étaient simplement immorales”.

L’administration Trump évite également de parler de droits humains. Dans le cas du TPS pour le Soudan, ce même Gene Hamilton du DHS a dû supprimer des références aux violations des droits humains, ce qui a fait dire à son collègue, Brandon Prelogar, le directeur des droits humains au DHS mentionné dans notre 2ème partie, que sinon, “cela pourrait être interprété comme un pas supplémentaire vers une présentation incomplète et déséquilibrée des conditions du pays pour soutenir la résiliation, ce qui pourrait augmenter la probabilité de critiques de la part des parties prenantes externes à cet effet”.

IMMIGRATION: UN SYSTEME ARCHAIQUE

Il est temps de parler du Congrès et de son rôle – sa responsabilité devrait-on dire – dans le Temporary Protection Status. Le juge fédéral Damon Keith avait entamé sa conclusion sur le couple honduro-étatsunien TPS précité en notant “le caractère archaïque et entortillé de notre système d’immigration actuel”…

Nous trouvons la même opinion au Congrès avec la députée démocrate de New York, Yvette Clarke: «Je pense que nous devons vraiment nous mobiliser et amener notre pays dans un système d’immigration du XXIe siècle. C’est ridicule de la façon dont nous fonctionnons à l’heure actuelle». Elle a proposé plusieurs projets de loi pour empêcher que les destinataires du TPS soient expulsés, mais aucun n’a abouti.

Le Temporary Protection Status est particulièrement dépassé. Est-il normal qu’on autorise une personne à vivre temporairement dans un pays, donc à s’installer, trouver un emploi, parfois ouvrir un commerce (*), payer ses impôts, développer des relations, tant personnelles que sociales, faire des enfants, et puis – parfois au bout de 20 ans, comme dans le cas des Nicaraguayens – on leur dit de vider les lieux? Surtout dans le cas des enfants, qui sont nés et ont grandi aux Etats-Unis, sans aucune exposition à la vie dans le pays ancestral?

(*) Rappelant que la richesse des Etats-Unis vient des immigrés, Leon Rodriguez, l’ancien directeur des services d’immigration (USCIS) au sein du Department of Homeland Security, mentionnait en février 2018 que “28% de toutes les nouvelles entreprises sont créées par des immigrés, une part disproportionnée”.

La défense a martelé le caractère temporaire du TPS, inclut dans son nom. Mais le Congrès n’a pas limité le nombre de fois que le TPS peut être reconduit, et la loi prévoit d’ailleurs des extensions automatiques de 6 mois. On pourrait argumenter que, après une longue série de reconductions, couvrant dix ans et plus, une situation à l’origine temporaire acquiert un caractère semi-permanent. C’est d’ailleurs ce que soulignent les plaignants devant le juge Chen: “bien que la protection dont ils bénéficiaient était nominalement temporaire, elle est devenue ‘permanente’ ou ‘à long terme’ dans l’application et la pratique réelles”.

le Congrès, auteur en 1990 du TPS, devrait compléter son oeuvre en normalisant maintenant la situation tant des TPS que des DACA

Ce qui est certain est que le Congrès, auteur en 1990 du TPS, devrait compléter son oeuvre en normalisant maintenant la situation tant des TPS que des DACA – ces jeunes illégaux – et leur offrant la possibilité de rendre leur statut permanent par l’obtention, par exemple, de la fameuse carte verte.

En automne 2017, au moins 100 membres bipartisans du Congrès, les gouverneurs républicains de Floride et du Massachusetts, 15 maires de grandes villes, 416 dirigeants religieux, 550 médecins, huit comités de rédaction importants dans au moins 15 éditoriaux et de nombreux autres ont préconisé une extension généreuse du TPS pour Haïti. Récemment [octobre 2017], les huit sénateurs de Floride, du Massachusetts, de New York et du New Jersey ont demandé une prolongation de 18 mois, rejoignant la Conférence des maires étatsuniens, le gouvernement haïtien, le conseil municipal de Philadelphie, les commissions de comté, les 49 membres du Caucus noir du Congrès et beaucoup d’autres en le faisant.

Daphne Campbell, sénatrice Démocrate de Miami, d’origine haïtienne: “[Les TPS haïtiens] ont construit des vies fructueuses et productives en Floride et sont la preuve du rêve américain à tout point de vue. Ils ne doivent pas être obligés d’abandonner tout ce qu’ils ont accompli à cause d’un agenda politique mal conçu”.
La sénatrice Daphne Campbell (Démocrate de Miami) a résumé leurs sentiments: “[Les TPS haïtiens] ont construit des vies fructueuses et productives en Floride et sont la preuve du rêve américain à tout point de vue. Ils ne doivent pas être obligés d’abandonner tout ce qu’ils ont accompli à cause d’un agenda politique mal conçu”.

UNE VISION PRAGMATIQUE PLUTOT QU’ALTRUISTE

A noter que ces politiciens ne sont pas totalement altruistes. Ainsi le sénateur démocrate de Floride, Bill Nelson, veut une solution car “un exode massif de 60.000 Haïtiens des États-Unis aurait des répercussions sur les économies du sud de la Floride et d’Haïti”, la majorité des Haïtiens vivant autour de Miami – et en général la Floride étant le deuxième Etat avec le plus de TPS (60.969) après la Californie (80.636) sur un total de 436.866 (octobre 2017).

De son côté, le 26 octobre 2017 la Chambre de commerce des Etats-Unis d’Amérique a exhorté Duke, la secrétaire du DHS, de prolonger le TPS car une étude de l’Immigrant Legal Resource Centre montre que l’annulation de TPS pour Haïti, El Salvador et Honduras, entraînerait une réduction du PIB des Etats-Unis de 45,2 milliards de dollars au cours de la prochaine décennie.

Danger également sur le plan de l’immigration. Le département d’Etat non plus n’agit pas par altruisme; la politique étrangère des Etats-Unis a toujours comme haute priorité de protéger leurs intérêts. Et dans ce cas, les diplomates avaient souligné que renvoyer un demi-million de personnes est “contre les intérêts des Etats-Unis” et risquait de “déstabiliser la région et déclencher une nouvelle poussée d’immigration illégale”. Et nous avons le résultat en ce moment même, il y a une nouvelle caravane d’un millier de personnes précisément de ces pays: El Salvador, Honduras et Guatemala, qui sont entrés au Mexique par le Guatémala pour rejoindre les quelque 7.000 déjà massés sur la frontière mexico-étatsunienne, dont 347 qui sont passés ce vendredi 18 janvier sur le sol des Etats-Unis en empruntant sept tunnels sous la grille frontalière.

Au vu de cette situation, à l’époque où le DHS devait statuer sur le TPS, en octobre-novembre 2017, toute la délégation de Miami au Congrès fédéral, démocrates comme républicains, était en faveur d’une proposition de l’ancien représentant républicain Carlos Curbelo (opposé à Obamacare mais en faveur de l’environnement) permettant à tous les TPS de pouvoir bénéficier de la résidence permanente, Haïtiens, Salvadoriens, Honduriens et Nicaraguayens. Ses initiales étaient la loi ESPERER de 2017, soit Extending Status Protection for Eligible Refugees with Established Residency (Extension de la protection du statut pour les réfugiés éligibles avec résidence établie). Tant cette proposition de loi que celle de la sénatrice floridienne Campbell, suscitée, sont mortes – le terme officiel – au sein des comités judiciaires respectifs de la chambre des représentants des Etats-Unis et du sénat de Floride.

La majorité des membres du Congrès “ne sauraient pas ce qu’est le TPS si on le leur demandait’

Ce n’est pas seulement une question de marchandage politique. Comme l’a dit Ileana Ros-Lehtinen, l’ancienne députée républicaine de Miami qui a signé plusieurs propositions de loi offrant au TPS la possibilité de changer leur statut en résidence permanente: “la plupart des membres du Congrès ne sont même pas au courant du problème”! La majorité des membres du Congrès “‘ne sauraient pas ce qu’est le TPS si on le leur demandait’ et de toute façon il n’y a aucune volonté des Républicains de donner aux bénéficiaires du TPS un moyen d’obtenir la résidence permanente. Il n’y a tout simplement pas de place dans le cœur des gens pour le moment”, a-t-elle déclaré avant de se retirer ce mois-ci après 30 ans de politique.

Pareil au niveau du public. Comme dit le représentant démocrate de Californie, Jimmy Gomez, où se concentrent la majorité des TPS et DACA, “il est plus difficile de faire comprendre au grand public la différence entre les bénéficiaires de Dreamers [DACA] et ceux de TPS”, les premiers étant des jeunes et ayant été fort médiatisés. D’où le manque d’intérêt chez des représentants et des sénateurs qui réagissent surtout sous la pression de leurs électeurs.

LES TPS COMME MONNAIE D’ÉCHANGE

L’administration Trump également fait appel au Congrès. Lors de notre procès, la défense s’est fermement référée au Congrès comme seule autorité – au lieu du juge – à pouvoir contester la décision de terminaison du TPS haïtien et changer les statuts du TPS. On note la même référence au Congrès dans plusieurs terminaisons de TSP ou DACA par le DHS. Fin du TPS Nicaragua et Honduras: “La secrétaire par intérim Duke appelle le Congrès à adopter une solution permanente pour ce programme fondamentalement temporaire”. Fin du TPS El Salvador par Kirstjen Nielsen, successeuse de Elaine Duke: «Seul le Congrès peut légiférer pour trouver une solution permanente à l’absence d’un statut d’immigration légale durable des personnes actuellement protégées par le TPS qui vivent et travaillent aux États-Unis depuis de nombreuses années. La résiliation différée de 18 mois laissera au Congrès le temps d’élaborer une solution législative potentielle ». Pareillement avec DACA. La terminaison de ce programme par la même Duke le 5 septembre 2017 déclenchait un délai de six mois pour que le Congrès trouve une solution durable. (Ce qu’il n’a pas fait).

Cette insistence remonte à une réunion du 3 novembre 2017 – juste avant la décision de mettre fin aux TPS – à la Maison Blanche avec les hauts bonnets de l’administration Trump ainsi qu’Elaine Duke et d’autres hauts responsables du DHS. Notons qu’ils se sont réunis, dans les sous-sols de la Maison Blanche où se trouve la “Situation Room” – équipée pour les cas de crise, avec le dernier cri technologique en communications et confidentialité. Les participants ont reçu un “document de travail” qui recommendait la terminaison des TPS d’Haïti et Amérique centrale pour le 5 janvier 2019 dans le but d’“engager le Congrès à adopter une réforme globale de l’immigration comprenant un système d’entrée basé sur le mérite ».

le but est d’engager le Congrès à adopter une réforme globale de l’immigration comprenant un système d’entrée basé sur le mérite

Dès février 2017, juste après son accession à la présidence, Trump avait annoncé cette politique selon laquelle un demandeur de visa obtient des points en fonction de son âge, son éducation et sa connaissance de l’anglais. Aspect important: s’il/elle est accompagné(e) par l’époux/se, c’est un point négatif ! Ce qui veut aussi dire, en théorie du moins, que ces travailleurs n’émargeront jamais à l’assistance publique, paieront davantage de taxes et seront de pays dit développés. A noter que l’administration n’a pas donné tout le détail de cette politique mais qu’elle sera sûrement faussée en faveur d’immigrés blancs. Ceci est en effet une approche totalement nouvelle de l’immigration aux Etats-Unis qui depuis un demi-siècle favorise l’immigration de personnes ayant déjà un membre de la famille avec la nationalité étatsunienne, avec pour résultat un fort accroissement d’immigrants venant d’Asie et d’Amérique latine.

Ce désir de pousser le Congrès à agir utilise les TPS et DACA comme pions de marchandage, et est loin d’avoir pour but de leur offrir une solution permanente. C’est jouer avec le sort de quelques centaines de milliers d’immigrants pour refouler à moyen terme des millions d’autres venant de ces mêmes régions.

Tout dernièrement on a vu cette manoeuvre sournoise à l’occasion de la fermeture du gouvernement étatsunien à la suite du refus des Démocrates de financer les 5,7 milliards de dollars pour le mur de Trump sur la frontière mexico-étatsunienne. Ce 19 janvier Trump a annoncé une “proposition” pour ré-ouvrir le gouvernement: s’il recevait cet argent, il accorderait “trois ans de répit” aux TPS et DACA.

Mais si l’on analyse la proposition de loi au Sénat – finalement défaite par 50/47 voix – elle “ne prolonge pas DACA mais la remplace plutôt par un programme totalement différent qui exclura d’innombrables milliers de Dreamers qui auraient été éligibles au titre de DACA”, rapportent deux spécialistes de l’immigration, David Bier du Center for Global Liberty and Prosperity du Cato Institute et Stuart Anderson, directrice du National Foundation for American Policy, et ancienne fonctionnaire de l’immigration tant au gouvernement qu’au Congrès.

Quant aux TPS, seuls ceux d’Haïti, El Salvador, Honduras et Nicaragua seraient couverts. Ils devront payer le double de frais, avoir un revenu au moins à 125% au-dessus du niveau de pauvreté, rembourser tout crédit d’impôt obtenu légalement – une exigence “sans précédent” dans la loi étatsunienne sur l’immigration – et refaire une demande sous de nouveaux critères qui se traduisent par “Un fardeau de preuve pour les immigrants de prouver de nombreuses choses impossibles à prouver”. Par exemple montrer – “par des preuves claires et convaincantes” – que leur emploi ne serait pas “contraire à l’intérêt national”! De plus, “Le projet de loi élimine la disponibilité de TPS pour l’avenir en modifiant fondamentalement le statut actuel du TPS”, réservant ce statut à toute personne étant déjà légalement aux Etats-Unis lors des faits désignant son pays d’origine comme TPS!

La proposition ampute également le droit d’asile, avec pour effet en pratique “de mettre fin à l’asile pour tous les mineurs du Honduras, El Salvador et Guatemala arrivant à la frontière étatsunienne”, en leur imposant de faire la demande dans des centres situés hors des Etats-Unis, d’avoir un parent ou tuteur déjà aux Etats-Unis, d’attendre des mois, voire des années et d’être dans les limites d’un plafond de 15.000 enfants admis par année.

Dans les faits cette proposition de loi cherchait à financer le fameux mur de Trump en prenant les TPS, les DACA et les enfants en otages, tout comme les employés du gouvernement fédéral fermé.

(Précédent TPS 3, suivant TPS 5)

(A suivre)

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