Haïti : La République des corrupteurs, des corrompus, des délateurs, des menteurs, des traîtres et des assassins!

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Ce sont la corruption socioéconomique et l’ambition politique qui ont fissuré la fondation de la République.

(1ère partie)

« Il a fallu des siècles pour rendre justice à l’humanité, pour sentir qu’il est horrible que le grand nombre semât et que le petit nombre recueillît. »
Voltaire

Il n’y a pas un seul gouvernement haïtien qui ait été épargné par les étiquettes qui font l’objet de cette réflexion plantureuse! D’ailleurs, L’État de 1804, au lendemain même de sa naissance s’est retrouvé coincé, prisonnier d’un  cul-de-sac sociopolitique et économique, qui annonçait l’échouage de la nouvelle cité. Une société construite sur des arpents d’insécurité publique, sur des acres d’injustice sociale, ne peut  déboucher que sur l’anarchie politique. Pas dans le sens développé par le théoricien socialiste Pierre Joseph Proudhon qui vécut de 1809 à 1865.

Ce sont la corruption socioéconomique et l’ambition politique qui ont fissuré la fondation de la République.

Étymologiquement, le substantif « anarchie » vient du grec « anarkhia ». On y retrouve le terme « arkhê » qui signifie « pouvoir », « principe », « commandement »… En y ajoutant le préfixe « a », on obtient « absence de principe », « absence de chef ou d’autorité », « absence de gouvernement », etc. [1]

Dans son ouvrage « Qu’est-ce que la propriété privée? » Pierre Joseph Proudhon fournit deux définitions rationnelles, méthodiques du mot « anarchie ». Celle qui est liée à l’approche négative retient le « chaos », le « désordre » et l’ « anomie » inventée en 1893 par le sociologue Émile Durkheim, et qui réfère au « désordre social et/ou individuel ». La dernière explication renvoie à une forme de société sans une force de domination, sans maître, sans souverain, sans caste… » Vous comprenez, peut-être, pourquoi nous avons hésité de parler de concept « anarchie ». Ce terme couvre des champs d’interprétations trop vastes et trop diversifiés. Comme celui, par exemple, du mot « peuple ».

Nous n’aimerions pas poursuivre notre périple rédactionnel sur cette voie de considérations théoricophilosophiques avancées. Nous risquons de perdre la plupart de nos lecteurs. Nous y reviendrons une prochaine fois avec une approche explicative plus abordable, plus légère, et dans un espace de débat plus approprié. D’ailleurs, nous sommes en train justement de réfléchir, d’élaborer et de proposer dans l’ouvrage « Idées pour une Révolution » une nouvelle philosophie sociale, politique et économique baptisée le « sodaliciocratisme ». C’est un « concept nouveau » pour la naissance d’un « nouveau monde ». À ce stade de réflexivité, notre démarche ne fait que s’arc-bouter au mur d’une certaine « prétention » intellectuelle et méthodologique. Confucius, duquel nous sommes devenu un humble adepte, recommande : « Écoute tout ce qui se dit autour de toi, et mets entre parenthèses les points douteux, parler avec prudence que du certain, tu es sûr de commettre peu d’erreurs. Regarde bien ce qui se fait autour de toi et évite les entreprises risquées pour ne t’aventurer que sur du solide, tu as peu de chance de t’en repentir. Or, quand on a peu à regretter pour ce qu’on a dit, et peu à se reprocher pour ce qu’on a fait, promotion et honoraires suivront naturellement. »

L’existence de l’État bourgeois est une entrave au bien-être des classes ouvrières. Il faut donc remplacer cette entité scabreuse par un système altruiste, compatissant, qui soit capable d’abolir les circuits dichotomiques de fonctionnement sociétal sur l’ensemble des continents. Le « sodaliciocratisme » nourrit donc cette difficile, – mais pas impossible –, « prétention » pour Haïti.

Ce sont la corruption socioéconomique et l’ambition politique qui ont fissuré la fondation de la République. Le combat héroïque de Jean-Jacques Dessalines visait la «Libération » générale des esclaves et des Affranchis. Il faut voir cette « Libération » sous trois angles connexes : l’esclavage, l’humiliation et la misère. Les esclaves travaillaient dans les plantations agricoles du matin au soir. Sans repos. Sans loisir. Sans nourriture adéquate. Pour renouveler leur énergie. Comme des animaux domestiques, ils étaient parqués dans des cases qui fragilisaient davantage leur état de santé déjà précaire. Pour les Mulâtres et les Noirs libres, donc les Affranchis, les problèmes se situaient au niveau de leurs conditions sociales humiliantes par rapport aux « colons ». Ce n’était pas facile pour les Mulâtres de gérer les frustrations causées par le fait d’avoir un père colonisateur et une mère noire exploitée, réduite à l’état bestial pour assouvir les caprices du « maître » à tous les niveaux. Les Mulâtres ont donc commis un « parricide », en acceptant de se battre contre les « Blancs » français dans la guerre de la « révolution saint-dominguoise ».

Les ennemis de l’empereur fomentèrent son assassinat dans le but aussi de prendre possession des biens laissés par leurs géniteurs qui périrent dans les affrontements et les massacres, ou qui furent contraints de regagner la métropole pour échapper à la fureur de la vengeance des victimes de l’esclavagisme européen. L’idéologie dessalinienne voulait être garante d’une société indigène fondée sur la « Justice ».  Cette Nation libre, souveraine et indépendante tenait à apporter à l’Humanité un modèle d’État qui prendrait en charge le bonheur de ses citoyennes et citoyens, le développement durable de la cité. Les êtres humains peuvent vivre heureux sans être égaux. Aujourd’hui, nous sommes moins convaincus du postulat qui tente de faire admettre que « tous les hommes naissent libres et égaux en droit ».  La « nomocratie » n’est-elle pas la source de tous les maux de la terre? La Loi, étant une œuvre humaine, est discriminatoire. Comme telle, son application, à tous les égards, tient compte de tous les facteurs discriminants : origine sociale, accointance politique, niveau d’études, degré de fortune… Pourquoi Donald Trump, malgré toutes les accusations qui pèsent contre lui, n’est-il pas jusqu’à présent destitué pour « crime de haute trahison », traduit en justice et incarcéré, selon les prescrits de la constitution états-unienne? Alors que de pauvres itinérants qui passent la nuit dans des endroits prohibés aux passants peuvent se retrouver en prison à New York, Los Angeles, Chicago pour plusieurs mois.

L’idéologie dessalinienne voulait être garante d’une société indigène fondée sur la « Justice ».

Dessalines ne visait pas à placer les Haïtiens sur un axe sociétal égalitariste. Le Chef révolutionnaire réclamait quelque chose pour ceux-là dont les pères étaient restés en Afrique, et qui avaient, eux aussi, affronté héroïquement les Français à Vertières. La révolte dirigée par Boukman, Toussaint, Dessalines fut également un combat harassant et sanglant contre la « pauvreté extrême ». Contre la « misère » générée par l’esclavage.

Les Mulâtres et les Noirs libres montèrent un vaste réseau de « corruption » dans le but d’accaparer les biens mobiliers et immobiliers qui revenaient au nouvel État. L’Empereur paya de sa vie ses sentiments d’indulgence et de compassion envers les couches sociales défavorisées. Après son assassinat, les individus libérés de l’esclavage avaient peu d’espoir de sortir de leurs rudes conditions de misérabilité. Et jusqu’à présent, les masses  végètent dans l’insécurité sociale et économique.

Tous les chefs d’État qui ont succédé à Dessalines  ont exploité la naïveté et l’analphabétisme des gens du peuple à leurs intérêts personnels. Ils se sont enrichis honteusement, illicitement, ignoblement, avec les membres de leurs familles et leurs amis. Ils se sont mis à l’abri des besoins pour plusieurs générations. Le président Alexandre Pétion a soudoyé et corrompu des officiers, sous-officiers, soldats de l’armée indigène pour qu’ils se débarrassent du fondateur de la patrie. Et si nous étions superstitieux, nous dirions que la terre de la République d’Haïti était en train de porter les malédictions du meurtre crapuleux de l’Empereur. Comme l’univers semble être persécuté par le crime horrible de Caïn contre son frère Abel.

Après avoir été les esclaves des Espagnols et des Français, les masses populaires haïtiennes commençaient, dès 1806, à connaître une autre forme d’exploitation exercée par les élites économiques et politiques qui avaient remplacé les colonisateurs déchus. Au fur et à mesure que le temps passait, le nouveau pays s’éloignait de la rive du grand rêve dessalinien. L’abolition de l’esclavage, la proclamation de l’indépendance, pouvons-nous comprendre, ne permettent pas encore aux Haïtiens  d’arrimer leurs ambitions aux souhaits exprimés dans le discours du 1er janvier 1804 de Jean-Jacques Dessalines : « Nous avons osé être libres, osons l’être par nous-mêmes et pour nous-mêmes. Imitons l’enfant qui grandit : son propre poids brise la lisière qui lui devient inutile et l’entrave dans sa marche… Quel peuple a combattu pour nous? Quel peuple voudrait recueillir les fruits de nos travaux? Et quelle déshonorante absurdité que de vaincre pour être esclaves? »

Ironie du sort, après la fondation de ce soi-disant État indépendant, le  peuple haïtien est resté esclave de la France, des États-Unis, du Canada, du Japon, de l’Espagne, de l’Angleterre et de l’Allemagne. Et aussi, esclave d’une catégorie d’indigènes qui endossent l’uniforme des «éboueurs », des « majordomes » au service de l’impérialisme. Les États néolibéraux sont des « corrupteurs », des traîtres, des « mythomanes » et des « assassins ». Et les gouvernements périphériques qui les supportent sont dirigés par des  « corrompus ». Il faut continuer de rendre hommage à Fidel Castro, Che Guevara, Omar Torrijos, Hugo Chavez, Thomas Sankara, Amilcar Cabral, et toutes les autres personnalités politiques et révolutionnaires qui ont eu la bravoure héroïque d’affronter les monstres du néocolonialisme et de l’hégémonisme.

Il faut continuer de rendre hommage à Fidel Castro, Che Guevara, Omar Torrijos, Hugo Chavez, Thomas Sankara, Amilcar Cabral, et toutes les autres personnalités politiques et révolutionnaires qui ont eu la bravoure héroïque d’affronter les monstres du néocolonialisme et de l’hégémonisme.

Il faut saluer aussi le courage et la détermination de Nicolas Maduro dans cette lutte inégale qu’il mène contre les puissances occidentales pour achever et préserver l’œuvre du Grand Penseur de la « Révolution bolivarienne ». Grâce au Commandante Hugo Chavez, le pétrole de Caracas n’engraisse plus la panse des « capitaux » états-uniens. L’État chaviste a fermé le robinet du pillage des ressources naturelles sur son territoire. Les multinationales corruptrices et corrompues de l’Amérique du Nord sont enragées.

Hier encore, nous relisions « J’accuse l’économie triomphante » d’Albert Jacquard. Sous le sous-titre « L’économisme et la misère du monde », le généticien écrit : « Comme tous les intégrismes, l’intégrisme « libéral » pratique le prosélytisme. Détenteur de la seule vérité, il adopte une organisation de la société supposée la plus efficace et n’a de cesse de la transmettre et de l’imposer à tous… Cette attitude a été celle de la plupart des religions. Pour répandre la bonne parole, les chrétiens n’ont guère hésité, durant de nombreux siècles, à recourir à la force… [2]»

Le peuple frère du Venezuela manifestera certainement sa reconnaissance envers les pays qui lui apportent dignement leurs supports matériels et logistiques. Parmi lesquels, la Russie, la Chine, la Turquie, Cuba, Nicaragua, Bolivie. Quelle tristesse de constater que l’équipe de Jovenel Moïse, noyée dans la corruption économique, dans l’ingouvernabilité politique, dans la dégradation environnementale, dans l’écurie sociale, a privé la République d’Haïti du privilège et de l’honorabilité de joindre sa voix à celles des États qui se sont érigés en  défenseurs sincères et fidèles des intérêts du peuple vénézuélien!

Dans « Le Marchand de Venise [3]», l’écrivain anglais William Shakespeare constate : « Si les empires, les grades, les places ne s’obtenaient pas par la corruption, si les honneurs purs n’étaient achetés qu’au prix du mérite, que de gens qui sont nus seraient couverts, que de gens qui commandent seraient commandés. »

Les chefs d’État haïtiens, –à l’exception d’une infime minorité, peut-être –, sont entièrement visés par la remarque shakespearienne. La prise du pouvoir politique, depuis l’assassinat de Dessalines, passe avant tout par les couloirs multiformes de la corruption.  N’est-ce pas ce qui explique l’arrivée de certains « énergumènes » au timon des affaires de l’État dans ce pays où les dents de la pauvreté ne cessent de broyer la majorité de la population? Cela ne nous permet-il pas du même coup d’éclaircir les causes et de mesurer les conséquences des échecs essuyés par les nombreux citoyens, – pourtant compétents, honnêtes et patriotes –, ces femmes et ces hommes brillants qui aspiraient à gouverner la République dans l’intérêt des couches sociales marginalisées? Le philosophe et écrivain prolifique Michel Onfray – Il vient de publier « Sagesse », son centième ouvrage –  rappelle que ce n’est pas avec les « vertus » que l’on réussit dans la vie, mais avec les « vices ». Et cette considération, à notre humble avis, s’applique tout à fait aux milieux politiques, financiers et économiques de la planète. L’intellectuel l’a surtout insinué par ironie, dans ce débat qui l’imposait à l’équipe d’une chaîne de télévision locale.

Les savants identifient deux types de corruption qui peuvent se manifester sous des formes différentes : la corruption active et la corruption passive. La première s’applique au corrupteur. La seconde au corrompu. Le mot vient du latin corrumpere, que l’on traduit par détériorer, altérer, gâter, nuire à, falsifier

C’est le verbe « falsifier » qui  a engendré le complot mortel de Pont-Rouge, le 17 octobre 1806. C’est ce même terme aussi qui nous a donné les gouvernements illégitimes, anticonstitutionnels, dictatoriaux qui ont conduit la Nation haïtienne à l’autel de la décadence ruineuse. Dans cette chaîne de corruption, nous retrouvons les puissances impérialistes qui ont fait le serment de détruire la République d’Haïti. À l’égard des pays du Sud, les États-Unis, le Canada, la France pratiquent la corruption active. Ils font des promesses, offrent des avantages mirobolants, octroient des montants d’argent faramineux aux dirigeants locaux pour qu’ils leur livrent toutes les richesses de l’État. John Perkins l’a bien expliqué, lorsqu’il révèle, dans son ouvrage « Les confessions d’un assassin financier », les circonstances qui entourent l’assassinat du président panaméen, Omar EfrainTorrijos Herrera, le 31 juillet 1981.

Au départ de Jean-Claude Duvalier pour la France, les caisses de l’État étaient vidées.

Le 11 juin 2005, Michèle Oriol, sociologue et responsable de la Fondation pour la recherche iconographique et documentaire, a convoqué une conférence de presse au local de la Fondation Connaissance et Liberté (FOKAL), dans laquelle elle a élaboré sur les chefs d’État corrompus qui se sont succédé au palais national. Elle faisait remarquer que le premier dirigeant de la première République noire de l’univers ne fut pas réellement un homme fortuné. Nous ajoutons nous-mêmes, pour appuyer cette observation, que, jusqu’à présent, les descendants de l’empereur vivent dans la pauvreté dans la petite ville de Marchand Dessalines sur laquelle règne un sénateur inculte. Alors que la mansarde où ils habitent, qui était la résidence de leur célèbre et illustre aïeul, reçoit de nombreux visiteurs locaux et étrangers chaque année. L’État haïtien les oublie et les méprise.

Michèle Oriol explique : « C’est seulement vers la fin du 19e siècle qu’on voit arriver au fauteuil présidentiel des hommes du nord qui s’appuient sur un patrimoine foncier important et des investissements conséquents dans les industries qui sont en train de se créer dans le nord du pays. Florville Hyppolite, Tirésias Simon Sam, Nord Alexis, Tancrède Auguste, Cincinnatus Leconte, tous hommes du nord, propriétaires de magasins, d’industries dans le nord et à Port-au-Prince [5].»

Les différentes études qui abordent le phénomène de la corruption en Haïti déduisent que l’ensemble des sphères sociales, politiques et économiques sont frappées par le problème qui est devenu une préoccupation nationale. Et même mondiale. Les pratiques de corruption observées dans les organes de l’Administration publique révoltent la conscience des citoyens. Le président Paul Eugène Magloire a fui le pays avec une fortune personnelle évaluée à 40 millions [6] de dollars US environ. Cependant, c’est à partir du régime politique des Duvalier père et fils que le mot « corruption » a acquis le droit de cité en Haïti. Les macoutes, originaires pour la plupart de la paysannerie, étalaient leurs avoirs aux yeux d’une population traquée par la dictature politique et la misère. Cette nouvelle bourgeoisie noire volait, spoliait les terres cultivables, assassinait des commerçants mulâtres et accaparait leurs biens matériels, emprisonnait les maris pour ravir les épouses… Le colonel Franck Romain fut un exemple parfait des « goujats » coupables de ces monstruosités. Il circulait sans gêne dans les rues de Port-au-Prince avec la Mercédès d’une de ses innombrables victimes. Les États-Unis appuyaient et encourageaient François le vampire. Ce « Dracula » faisait valoir qu’il agissait en fonction de la politique anticommuniste adoptée par Washington pour dissuader les pays du continent américain à suivre l’exemple de Fidel Castro.

Au départ de Jean-Claude Duvalier pour la France, les caisses de l’État étaient vidées. Et comme si ce n’était pas assez, le fils du dictateur est revenu à l’intérieur d’un « cheval de Troie », espérant conquérir le pouvoir à son tour. La République d’Haïti est donc considérée comme une monarchie par cette famille qui devrait pourtant avoir honte de porter un « nom diabolique » qui symbolise le crime, le deuil, le viol, l’emprisonnement, le vol, la cruauté, le népotisme, le favoritisme, la coercition, l’exode, l’exil, la torture, l’analphabétisme… dans la société haïtienne. Nicolas Duvalier, fier de son origine, – comme s’il se prenait pour le fils de Spartacus –, est un candidat déclaré aux éventuelles joutes électorales de 2022. Les anciens et nouveaux macoutes se font déjà confectionner, peut-être, leurs accoutrements traditionnels de kaki bleu. Fasse le ciel que les vents de cette « Révolution » tant souhaitée ne viennent gâcher le festin de Babette!

Au seuil du 20ème siècle, La République d’Haïti fut plongée dans un scandale judiciaire dénommé « Le procès de la consolidation ». Il était question de démasquer, de juger et de sanctionner les coupables d’un acte de malversations économiques au détriment de l’État haïtien. 270 mille dollars furent détournés du Trésor public et partagés entre 11 fonctionnaires. Le président Nord Alexis décida de former une Commission d’enquête et de vérification pour faire la lumière sur le crime financier. Le rapport de la Commission infirma les présomptions d’innocence et renforça les présomptions de culpabilité. Le jugement eut lieu. Les coupables furent condamnés.

Sous le gouvernement de Jean-Claude Duvalier, au cours de l’année 1975, il y eut également un grand scandale de corruption qui donna lieu à l’événement qui est entré dans l’histoire sous le titre de « Le procès des Timbres ». Ce jugement, qui avait rassemblé une pléiade d’avocats brillants et éloquents, tels que Me. Gérard Gourgue, Me. Théodore Achille, Me. Jean Vandal, Me. Jacques Laroche, fut relayé par des médias nationaux et internationaux. Le juge Raymond Rock fut le Doyen du tribunal. La liste [7] des accusés était constituée du Dr. Serge Fourcand, Frantz Leroy, Jean-Robert Leroy, René Exumé,  Marlène Leroy, Fritz Denis, André Dérose Junior, Guy Leroy, Eugène Maximilien, Pierre-Richard Maximilien … Le ministère public était représenté par le commissaire du gouvernement, Me. Rodrigue Casimir et ses deux substituts, Me. Hyppolite Thermitus et Me. Joseph Nérette. Ce dernier allait longtemps après devenir président par intérim de la République d’Haïti au lendemain du coup d’État sanglant qui renversa le père Jean-Bertrand Aristide le 30 septembre 1991.

À dire vrai, ce procès, contrairement à celui de la consolidation, fut une magistrale représentation théâtrale pour amuser les citoyens de la cité. Toutes les séances furent retransmises en direct à la radio. Malgré le verdict de condamnation prononcé à l’encontre de certains accusés, les sentences n’ont pas été rigoureusement appliquées. Ni les amendes, ni les dommages, ni les intérêts et ni les frais payés à la Direction générale des impôts. Aux yeux des observateurs avisés, cette histoire ne fut qu’une vaste fumisterie. Et quelle affaire? Des faux timbres-poste mis en circulation par des personnalités influentes, dont un ministre du gouvernement. Les transactions de vente auraient rapporté plus de 23 millions de dollars aux fraudeurs. Une véritable mafia économique opérait dans les coulisses de la scène du crime. Un scénario d’un film  mafiosique digne d’Hollywood, où Frantz Leroy, l’accusé principal, remplissait admirablement son rôle de méchant.

Les rapports annuels de la Banque mondiale sur les États corrompus placent toujours la République d’Haïti dans des positions peu enviables.  S’il fallait juger les politiciens et les fonctionnaires haïtiens pour crimes de corruption, la quasi-totalité des concernés irait en prison. On trouverait certes parmi eux des citoyens pour lancer la première pierre, mais ils ne seraient pas nombreux!

(À suivre)

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Références et notes

[1] La Toupie.
[2] Albert Jacquard, J’accuse l’économie triomphante, Éditions Calmann-Lévy, 1995.
[3] William Shakespeare, Le marchand de Venise, pièce de théâtre écrite entre 1596 et 1597.
[4] La Toupie.
[5] Alter/Presse, Michèle Oriol : Les chefs d’État ont-ils été tous des corrompus et des assassins? Mardi 14 juillet 2005.
[6] André Charlier, Sur le Duvaliérisme (2), Haïti Liberté, volume 12#29, du 23 au 29 janvier 2019.
[7] Jn Mary Guillaume, Le procès des Timbres de l’été 1975 en Haïti. Ce qu’il faut retenir, 30 octobre 2013, publié par Siel.

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