La visite de prospection du Secrétaire général de l’ONU (2)

(2e partie)

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Le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres lors de son passage en Haïti

Le Coordonnateur du Sant (Centre) Karl Levêque, Jean Gardy Maisonneuve, estime qu’aucune visite de haut niveau international en Haïti n’a jamais apporté rien de bon ou pas grand-chose, avant d’évoquer une rencontre que les responsables du Centre Karl Levêque ont eue avec l’Expert indépendant des Nations Unies en Haïti quelques jours auparavant. «Au niveau du Sant (Centre) Karl Levêque, nous croyons dans l’autodétermination, ceci dit, c’est à nous de faire front commun pour le rétablissement d’un climat de paix en Haïti. Nous l’avons dit mercredi dernier lors d’une réunion avec l’Expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en Haïti, William O’Neill. Nous lui avons dit clairement que ces rencontres ne font que brûler le temps, rien de plus. Leurs conditions d’existence ne dépendent que des conflits, des problèmes auxquels font face certains pays comme le nôtre. »

Rappelons tout de même que cette visite éclair de Antonio Guterres a eu lieu quelques semaines après les deux importantes rencontres lors desquelles la crise haïtienne a été au centre des discussions.

Il s’agissait de la rencontre des chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté des Etats de la Caraïbe ayant eu lieu à Naseau, dans les Bahamas et le fameux Sommet de la Jamaïque où la quasi-totalité de la classe politique et de la Société civile haïtienne ont participé dans des pourparlers sur la crise politique et la Transition haïtienne sans qu’aucun résultat probant n’ait été enregistré entre les acteurs, mis à part une Déclaration conjointe dite Déclaration de la Jamaïque signée uniquement par les entités des oppositions au Premier ministre Ariel Henry et ses alliés, notamment le parti Secteur Démocratique et Populaire (SDP) dirigé par Me André Michel.

cette visite éclair de Antonio Guterres a eu lieu quelques semaines après les deux importantes rencontres lors desquelles la crise haïtienne a été au centre des discussions.

Après cette brève visite, le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a donné une Conférence de presse à l’aéroport de Port-au-Prince avant de quitter le territoire haïtien pour se rendre à Trinidad-and-Tobago où il devait d’une part intervenir au Sommet du 50e anniversaire de la création de la Communauté caribéenne et d’autre part rencontrer différents dirigeants de la région dont le Premier ministre haïtien Ariel Henry.

Lors de cette rencontre avec la presse, le Secrétaire général de l’ONU a redit son soutien au chef de la Transition et surtout souligné sa solidarité avec le peuple haïtien qui, selon lui, traverse une épreuve sans précédent en déclarant « Je suis venu avec un message simple : les Nations Unies sont avec vous. Ma solidarité va au peuple haïtien, qui fait face à un terrible cycle de crises sécuritaires, politiques et humanitaires qui s’exacerbent mutuellement. La violence brutale des gangs touche chaque aspect de la vie publique et privée du pays. Port-au-Prince étant encerclé par des gangs armés qui bloquent les principales routes menant aux départements du Nord et du Sud, contrôlent l’accès à l’eau, à la nourriture et aux soins de santé ». Mais, le visiteur d’un jour n’a point oublié de dire ce qui le préoccupe le plus : l’envoi d’une force militaire robuste en Haïti pour contenir, selon les promoteurs de cette option, l’insécurité et rétablir l’ordre et la sécurité publique.

Devant la presse haïtienne et internationale, Antonio Guterres a réitéré son appel envers les membres du Conseil de sécurité des Nations Unies et réactivé la demande des dirigeants haïtiens de l’envoi de cette force armée internationale en Haïti.

Pour clôturer son point de presse, le Secrétaire général de l’ONU, sur un ton on ne peut plus grave, triste, voire paternaliste, a imploré la Communauté internationale de venir au secours des Haïtiens « La gravité de la situation exige une attention urgente et soutenue qui place les victimes et les populations civiles au centre de nos préoccupations et nos priorités. Il ne peut y avoir de sécurité durable sans un rétablissement des institutions démocratiques et il est impossible de parvenir à des solutions politiques pérennes et pleinement représentatives sans une amélioration drastique de la situation sécuritaire. Chaque jour compte. Si nous n’agissons pas maintenant, l’instabilité et la violence auront un impact durable sur des générations d’haïtiens. Mais, nous avons besoin de beaucoup plus pour restaurer l’autorité de l’État exhortant le Conseil de sécurité à autoriser le déploiement immédiat d’une force de sécurité internationale robuste qui viendrait assister la PNH dans sa lutte contre les gangs. Ce n’est pas le moment d’oublier Haïti ou d’affaiblir notre solidarité envers son peuple » conclut le Portugais qui dirige actuellement le Secrétariat général de l’Organisation des Nations Unies.

Deux jours après la visite du patron des Nations Unies, certains acteurs politiques et de la Société civile ont donné leur impression. Il ne fait aucun doute pour la Responsable du Parti Fusion, Edmonde Supplice Beauzile, soutien du Premier ministre, que cette visite a été positive. Le lundi 3 juillet, elle a été interrogée par le journal Le National. Sans surprise, elle est satisfaite. « C’est un devoir pour les autres Nations d’assister Haïti dans cette crise multiforme. Il est urgent d’avoir, dans un meilleur délai, cet appui robuste à la Police nationale pour contrecarrer les actions des bandits qui opèrent sans difficulté dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince » disait Mme. Beauzile au journal. Avant de souligner : « Nous nous réjouissons de cette visite du Secrétaire général ici en Haïti et nous saluons l’engagement qu’il promet de continuer à prendre pour aider le pays à trouver la voix. Il a été très attentif aux problèmes qu’il connaît déjà et va continuer à plaider en faveur du pays.»

Antonio Guterres et la Responsable du Parti Fusion, Edmonde Supplice Beauzile

En revanche, une partie du Secteur privé peine à croire que le passage du chef de l’ONU en Haïti pourrait changer l’ordre des choses quand on analyse sereinement la situation sociopolitique du pays. Ashley Laraque, un entrepreneur dans l’agro-alimentaire doute et est très sceptique tout en condamnant même l’attitude du gouvernement américain dont il ne comprend pas le comportement en voyant le Département de l’agriculture américain empêcher l’exportation de certains produits haïtiens, notamment la mangue sur le marché américain.

 

Selon cet entrepreneur, « Cette décision représente un manque à gagner pour la population haïtienne. On est tous perdus et personne ne peut, au risque de se tromper, se prononcer sur les retombées de cette visite pour avoir déjà tellement reçue » rapporte Le National du 4 juillet 2023 citant Ashley Laraque. De retour quelques jours plus tard à New-York, au siège de l’ONU, le Secrétaire général n’hésite pas à rajouter une couche le 7 juillet afin de convaincre le Conseil de sécurité et surtout les Chinois et les Russes qui font de la résistance en refusant de voter pour l’envoi de cette force multinationale tant réclamée par le gouvernement haïtien, le Secrétaire général, Washington, Paris et Ottawa.

Au cours d’une Conférence de presse où il devait faire un compte rendu de son voyage à Port-au-Prince et à Port-of-Spain, Antonio Guterres s’employait à dramatiser au maximum la situation en Haïti quand il déclare « Les conditions humanitaires sont plus qu’épouvantables. Des gangs brutaux tiennent à la gorge le peuple haïtien. Port-au-Prince est encerclée par des groupes armés qui bloquent les routes, contrôlent l’accès à la nourriture et aux soins de santé et sapent l’aide humanitaire. Les gangs prédateurs utilisent les enlèvements et la violence sexuelle comme armes pour terroriser des communautés entières. Des récits épouvantables de femmes et de filles victimes de viols collectifs et de personnes brûlées vives. Le monde doit agir maintenant pour endiguer la violence et l’instabilité. Il y a des signes d’espoir et de possibilité. Mais, cela nécessite une action sur plusieurs fronts – et la reconnaissance d’une vérité fondamentale : Il ne peut y avoir de sécurité durable sans une solution politique permettant la restauration des institutions démocratiques. Et il ne peut y avoir de solutions politiques durables et inclusives sans une amélioration drastique de la situation sécuritaire ».

Comme nous le disons plus haut, le Secrétaire général des Nations Unies était en visite de prospection en Haïti, en quête, sans doute, de soutien au sein d’une partie de la classe politique un peu réticente sur une probable intervention militaire étrangère dans le pays.

(Fin)

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