Quel immense, succulent, exquis plaisir ai-je ressenti le mardi 5 septembre écoulé lorsque le sénateur Antonio Cheramy, l’ami Don Kato, eut rageusement, copieusement, goulûment, avidement, chaudement mais aussi froidement, longuement, hardiment, fièrement, bravement, papadessalinement, charlemagnepéraltement, haïtiennement, carrément, rondement, courageusement, joyeusement, gaillardement, passionnément si ce n’est amoureusement, déchiré en miettes et morceaux le document du rapport de la commission chargée d`analyser le projet de la très décriée, machiavélissime, duvaliérissime, perfidissime. et scélératissime loi des finances.
Mon sang faisait mille fois à la seconde le tour de mes veines, mon pouls bondissait et exultait de joie, chaque systole cardiaque déversait une furibonde poussée de sang vif et généreux dans mon système artériel, le nœud de Keith et Flack auriculo-ventriculaire de mon cœur laissait échapper de bondissantes pulsions électro-physiologiques s’épanouissant en rouges gerbes cardio-vasculaires de fierté pour célébrer le courage, la dignité, la passion, la force, la force d’âme, la véhémence de conviction du sénateur Antonio Cheramy qui sonnait la cloche de rassemblement des vertus citoyennes et scandait: «bare vòlè! ». Intérieurement je me laissais aller à réclamer: barrez-les, cernez-les, coffrez-les, jugez les!
Mettez la main au collet des vendeurs du temple, des parvenus de la 50ème législature, des gueux de la 50è en transfert de classe, en ascension de classe, en montée de classe, en changement de classe, en grimpance de classe, en enjambance de classe, en traversance de classe, en escaladance de classe, en assautance de classe. Certes, tous les trente sénateurs ne sont pas des grimpeurs, des enjambeurs, des escaladeurs, des assauteurs, mais ils sont plusieurs à s’être abaissés, rabaissés, prostitués, aplatis, punaisés, à se laisser acheter par les billets verts, tout neufs, au parfum de servilité, d’indignité, d’asservissement de l’Oncle et de la présidence.
Bravo Kato! Bravo, l’élu du département de l’Ouest! «Si triste est la saison qu’il est venu le temps» pour un sénateur de la république de s’en prendre rageusement à un document officiel, de le déchirer en miettes et morceaux pour mieux et plus effectivement dénoncer le comportement veule, à-plat-ventriste, infâme, immonde, abject, sordide, scandaleux, ignominieux, crapuleux, anti-national, anti-peuple de ses pairs. Et chaque fois que Kato déchirait les morceaux de papier, chwapchwap, chwipchwip, le bruit chwapchwapant me causait un vif sentiment de victoire sur le mal, la malhonnêteté, la fourberie, la friponnerie, la canaillerie, la malpouwonterie, la sans-vergognerie de sénateurs félons vautrés dans la boue de la corruption. Cochons de parlementaires!
Bravo Don Kato! Bravo Don Dignité! Bravo Don Haïtianité! Les hypocrites ont été saisis de vous entendre les dénoncer: bare vòlè! Ils couraient dans tous les sens, fourmis folles d’indignité, ne sachant comment arrêter la foudre Donkatonique qui leur déversait dessus le feu de la révolte et de leur mise au ban d’accusation. Bravo mon ami, bravo l’ami Cheramy! Vous qui terrassâtes cette clique de voyous au sein du parlement du haut de votre plus vrillant mépris, vous qui leur réclamâtes de «retourner ce qu’ils ont en main», le salaire de la honte, les 2 millions de gourdes reçus de l`exécutif pour voter sans aucune modification le projet de loi de finances 2017-2018, vous qui comprîtes l’astuce de la présidence et fìtes cet heureux vacarme qui bloqua la séance de vote, vous qui sûtes leur dire zut pour s’être révélés des agents zélés de zòt, kidonk du pouvoir et de l’impérisalisme corrupteur.
Bravo Kato! En solidarité avec votre franchise, votre courage, votre fermeté, le peuple souffrant victime de toutes les misères, de tous les malheurs, de toutes les agressions, de tous les abus, de toutes les violations de leurs droits, du rejet de leurs cris de désespoir, de leur refoulement dans la crasse et l’ignorance, oui, un peuple avili a crié de toutes ses forces: barrez-les, cernez-les, coffrez-les, jugez les! On finira sans doute par savoir qui sont-ils ces crocodiles voraces des étangs saumâtres de l’empire, gueules ouvertes en attente d’avaler les mouches vert dollar de la corruption.
Bravo Kato! Bravo sénateur pourchasseur de ti visye sou pòtay, sénateur accusateur de chenapans obsédés par la soif du dollar. Bravo Kato, giboyeur d’occasion pour avoir poursuivi des malfrats avides de billets verts, un soir où tous les démons de la corruption étaient lâchés avec en poche les deux millions de l’exécutif. Vous ne les avez pas cités nommément ces sénateurs veules, cupides, mercenaires à l’esprit mercantile. Mais on soupçonne qui ils peuvent bien être. Car, en mettant de côté Kato et les trois autres sénateurs de l’opposition, Evalière Beauplan, Ricard Pierre et Nènèl Cassy, il reste bien vingt-six sénateurs parmi lesquels doivent figurer les sacripants, les arsouilles, les fripouilles, les canailles qui ont “mangé l’argent de Chango”.
Le peuple interpelle les canaillards, les mangeaillards, les arsouillards, les fripouillards, les protégés de Chango qui ont touché 2 millions de la présidence. Que ceux-là dont on n’a pas graissé la patte, le museau et le groin se déclarent innocents de connivence avec “l’inculpé” siégeant au palais national! Dès lors, par soustraction, on arrivera bien à faire le compte des scélérats, des ennemis du peuple qui doivent «retourner ce qu’ils ont en main». On saura qui devrait avoir la corde non pas au cou mais aux poignets. Ainsi saura-t-on qui a bu au calice du déshonneur, de la corruption et de la honte dans les salons de la présidence.
Hey! Youri Latortue (AAA), Carl Murat Cantave, Gracia Delva (AAA), Wilot Pierre (PHTK), Rony Célestin (PHTK), Sorel Jacinthe, Jean Rigaud Bélizaire, Wilfrid Gélin (PHTK), Francenet Denius, Denis Cadeau (Bouclier), Dieudonne Luma (PHTK), Nawoon Marcellus (Bouclier), Jean Marie Ralph Féthière (PHTK), Wanique Pierre(PHTK), Ronald Larèche, Jacques Sauveur Jean (PHTK), Omondieu Louis, Kedlaire Augustin (PHTK), Jean Renel Sénatus, Patrice Dumont, Jean-Marie Salomon, Ricardo Pierre, HervéFourcand (PHTK), Pierre-François Sildor (PHTK), Joseph Lambert, Dieupie Chérubin, vous avez la parole. Présumés accusés, levez-vous! L’heure a sonné pour vous. Défendez-vous!
Le peuple vous interpelle messieurs et dames qui avez reçu de l’argent, beaucoup de pognon, pour voter contre les intérêts du peuple. N’avez-vous pas encore écouté la dernière production musicale, le dernier numéro phare, le dernier morceau choc de BIC Tizon Dife, de son vrai nom Roosevelt Saillant? Son Pote kòd est un véritable raz-de-marée musical de dénonciation en règle de vos dérives et comportements malhonnêtes, frauduleux d’escrocs aux crocs de misérables trafiquants, un ouragan de revendications populaires dont BIC s’est fait l’écho et qui a inondé les ondes et les réseaux sociaux. Comme j’ai été ravi et stimulé par ce déploiement musical haut de gamme contre des malfaiteurs-Papa-Gede habillés tout de noir pou y al monte opalè.
Avec le peuple bafoué jusqu’au trouillon, BIC crie sa colère, sa révolte, il se sent indigné, écœuré, outré, offensé, insulté, scandalisé, et il chante “Pote kòd, pote kòd”. Des cordes pour attacher, marrer les voleurs selon ce que réclame la bonne tradition de notre culture haïtienne. L’artiste nous assure – et il a raison – qu’il n’y aura jamais suffisamment de cordes pour attacher tous ces nèg coupables de trahison de leurs promesses électorales et de crime moral contre les espérances et les attentes des électeurs qui les ont votés. Tant il y a de nèg coupables de crime contre la nation.
N’ayant pas eu accès à cette séance historique où des parlementaires étaient prêts à voter en faveur d’une loi scélérate, c’est par le trou de la serrure que Tizon Dife a vu comment des chenapans de sénateurs se chamaillaient, se disputaient, se bagarraient, s’invectivaient pour grapiller le plus possible du gâteau. Ah qu’ils étaient dégoûtants, répugnants, détestables, exécrables, indécents, ignobles, dégueulasses à se quereller pour quelques gourdes en plus ou en moins! Aucun sens de l’éthique entre collègues, aucun savoir-faire, aucun savoir-vivre, aucune élégance, aucune tenue, aucune retenue, aucune rectitude, aucune étiquette, aucune sociabilité, aucune honorabilité, aucune probité, aucune dignité, aucune moralité, une absence totale de bonnes manières, de forme, bref, des charognards à l’état de la bête se disputant la manne de la corruption tombée du ciel de la présidence.
Pote kòd! Cette musique fait évidemment pendant à la tapageuse prestation de Antonio Cheramy, le cher Don Kato, lors de la tentative de ratification par le Sénat du projet de loi des finances: un condensé pwès de mesures anti-peuple. Elle dénonce les sénateurs qui avaient fait promesse électorale de se porter garants du bien-être de leurs constituants. Devenus des parlementaires à tu et à toi avec la présidence, avec les gros et gras bourgeois, avec l’ambassadeur cinquante-étoilé, avec des mulâtresses dekrenmen en perte de vitesse économique, ils sont prêts à trahir leurs promesses, à voter contre leurs promesses, contre les intérêts des pi piti.
Ils suggèrent à leurs électeurs de “se servir de fourchettes” pour lamanjay, d’y aller par fourchettée, alors qu’eux autres ils se servent de louches et s’mplissent le jabot à grandes louchées. Au peuple donc d’apporter les cordes pour attacher les profiteurs, les nouveaux riches, les parvenus, les grands mangeurs, les aloufa, les goinfres, les afannaaf, les voleurs de ce qui revient aux déshérités.
Alors que des déclassés, des arrivistes, des ambitieux, des malpouwont de sénateurs s’apprêtaient à se décider sur le contenu de la révoltante loi des finances que lisait le questeur Ricardo Pierre, “lwa Monndong” s’amenait en la personne de Antonio Cheramy, alias Don Kato. Posément, prestement, fermement, froidement, le sénateur de l’Ouest saisissait des mains du sénateur Pierre apparemment étonné le document assassin pour le déchirer joyeusement, calmement en mille morceaux. Une façon symbolique de signifier, d’annoncer que le peuple se tienne prêt pour un levekanpe, pour une opération pote kòd, parce que l’indécence, l’inconscience, l’insensibilité, la cruauté, l’inhumanité de nombre de ses collègues ont atteint un point inacceptable et qu’il lui a fallu se révolter, regimber, fût-ce même contre les règles internes du parlement.
Le slogan de lwa Marx et lwa Engels était: “ Prolétaires de tous (les) pays, unissez-vous!” Lwa Monndong, lwa Don Kato, lwa pèp la réclame: tout pwoletè lakay, pote kòd! Barrez-les, cernez-les, coffrez-les, marrez-les, jugez les scélérats!
24 septembre 2017