Philippe Vorbes (Port-au-Prince, 1947)
‘’Le magicien en question’’
Ces deux larrons (Pipo et Tom) ont eu une évolution similaire aussi bien qu’une sorte d’affection bien fraternelle qui les ont toujours liés. En effet, Vorbes s’est hâtivement manifesté au sein du Violette Athletic Club de Port-au-Prince. Formation mythique du foot-ball national. Au sein de laquelle il s’infiltra comme une bouffée d’air frais au milieu des années 1960, qui fut une époque de vâche maigre pour le Vieux Tigre .A ce compte, il n’est qu’un feu follet qui aima muter dans les ailes pour s’adonner à ses utiles ou ultimes fantaisies. Sa prépondérance dans l’art du spectacle ainsi mis en évidence, il joignit un groupe restreint d’intouchables tels: Guy Sainvil, Obas, Tom-Pouce, C. Legros, Barthelmy etc; qui furent disponibles après l’exode d’une lignée de vedettes établies comme: Chadin Délisce, Germain Champagne, Gérard Dêlpêche, Michel Blain, Michel Morin, Raphael Manoyrine, Gabriel Fleury, Edner Breton, etc. Autant de brèches, ayant permis à ‘’Pipo’’ de se faire une place de titulaire pour la campagne de Mexique 1970.
Entretemps, sa maestria l’autorisa d’être repéré par les responsables de la American Soccer League et fut de ce fait engagé par le New-York Generals, au sein duquel il côtoya le célèbre argentin, et futur champion du monde en 1978, César Menotti qui fut son coéquipier. Et avec lequel il a su bien se bonifier. D’où ce style ‘’argentin’’ qui caractérisa sa touche flamboyante, auréolée d’une élégance naturelle et d’une vision toute opportune qui l’habitèrent en pourvoyeur d’élite, ou en gratificateur des passes concluantes. Un certain Platini s’y montrera après dans une posture presqu’identique; hormis le sens du but que Philippe n’avait pas. Car, le Nancéien était un spécialiste de tirs divers et buteur sans pareil. Ce qui fut le talon d’Achilles de ‘’Pipo’’. Les années durant les éliminatoires de Mexico-1970, le virent prendre de la bouteille. Il devint le duo du milieu avec Obas dans ce 4-2-4 élastique qui vit le capois en essuie-glace devant la défense et en tornade offensive. Tandisque ‘’Pipo’’ faisait l’éponge, tamponant le jeu par effet de temporisation pour permettre à l’ensemble de transitionner.
Cependant, il y avait une sorte de complicité entre Philippe et Tassy qui fut défavorable à ‘’Joe’’ Obas, lorsque après l’élimination de 1970, ce dernier fut exclus des onze nationaux pour que Zoupim puisse faire de ‘’Pipo’’ le nouveau meneur de la Sélection Haïtienne, repositionnée autour de ‘’Timano’’, après le départ de ‘’Tiguy’’. Tandis que Guy François, le fringant ailier gauche de la sélection et du Violette fut recyclé comme demi défensif. A ce stade, P.V devint la plaque tournante de la Nationale et fit l’unanimité parmi les adhérents. Ramenant Team Haïti à sa dimension au point que celle-là lui fut acquise. Spécialement quand il s’élevait en leader du groupe pour la recherche de la cohésion et de la finition. Le début des années 1970 le trouva fort au poste et, à ce tournant, il s’empara du capitanat, pour guider le onze national en 1971 au Concacaf de Trinidad ou Haïti fut classée deuxième, invaincue derrière le Mexique, pendant que ‘’Pipo’’ fut consacré meilleur joueur du tournoi. Dans ce même engouement, à cause d’une blessure, il fut moins en vue au mini tournoi du Brésil qui a vu une sélection de la Concacaf entrainée par Tassy se faire massacrer par l’Argentine et la France. Entre temps au bercail, il s’innova en entraineur-joueur du Vieux Tigre (assisté par Tassy dans l’ombre), dans une compétition féroce pour le titre de la Coupe Pradel 1971-1972 que domina le Racing.
Puis celle de 1972-73, que remporta (scandaleusement) le Violette, du fait d’un match acheté à l’Aigle Noir. Et pour la suite, des performances à tout casser contre les Chiliens, les Argentins, les Péruviens, Equatoriens tous conquis par sa rayonnance. De là vint Le Pré-Mondial de 1973 en Haïti. Lequel constitua en même temps les éliminatoires de la Concacaf pour Munich 1974. Malheureusement diminué par une blessure, il ne put prendre une part active, jusqu’au dernier match contre le Mexique durant lequel il alla se cacher au flanc gauche de la défense laissée vacante après l’expulsion de Formose Gilles. Heureusement qu’il s’est remis à temps pour jouer un rôle en Allemagne; lorsque sur une passe millimétrée dont il avait les secrets, il permit à Emmanuel Sanon d’aller abattre Dino Zoff. Après le mondial, d’Allemagne, il prit un peu de recul blessé par les ingratitudes, les promesses non tenues des autorités et les abus subis autant que des préjugés dont if fut victime à cause de sa position sociale et de sa couleur de peau. Mais ‘’Pipo’’ magnanime revint à la charge avec une Violette remaniée, explorant le semi- professionnalisme. A ce carrefour, et en fin de cycle à 28 ans, il était fatigué et avait les pieds lourds, malgré une offre de France qui tourna en eau de boudin du fait que Marseille et aussi le NY Cosmos exigèrent des stages avant toute signature, il se désista.
A cette étape, le meilleur semblait être derrière lui, malgré un dernier baroud avec Piontek en 1977, quand celui ci céda aux pressions des irréductibles pour intégrer les vétérans de Munich, dans une formation qui marchait pourtant bien. Finalement, il tira sa révérence sans s’éloigner du sport. Continuant à faire partie du staff technique du Violette, et devenant plus tard commentateur sportif à la télé. Ramenant encore aux souvenirs du temps qui ont consacré sa grandeur athlétique dans la mémoire d’une multitude.
Jean Claude Désir (Port-au-Prince, 1946)
« Docteur Tom-pouce »
Tom- Pouce pour sa part fut intronisé comme virtuose précoce, dès l’âge d’adolescent, pour prendre la route du stardom dans une jeune équipe de quartier du nom d’Aurore du Bel-Air. C’est ainsi qu’il attira l’attention des recruteurs de cette zone qui l’intégra sur le coup dans les rangs de leur équipe fanion, l’Aigle Noir. Dans laquelle il devait suppléer l’idole du Bel-air Chadin Délisce. Il n’a pas pris longtemps pour s’imposer, devenant d’un coup l’enfant chéri du Bel Air et vedette proclamée du terroir natal. Auréolé d’une technique hors pair faite de finesse et d’art. En plus d’une capacité d’accélération, des dribbles désorientants, supportés par une habilité de s’approprier du ballon, parfois entaché il est vrai, d’une dose de fioritures. Qu’on ne peut le lui enlever que dans la limite de l’anti-jeu. Ce qui lui a valu d’être une victime continue des briseurs de jambes. En plus, ses dons de buteur et de passeur furent tout aussi avérés. C’est ainsi que paré de tant d’atouts, il fut appelé au sein de la Sélection Nationale. Cependant, à un moment où le foot-ball fut mis sous l’éteignoire par la démence macoute de ‘’papa-dok’’; et qui a vu les meilleurs joueurs fuir le pays.
Tom trouva en ‘’Tiguy’’ Sainvil un partenaire idéal au sein de l’équipe nationale, lequel l’aida à mieux maitriser ses sujets et atteindre sa croissance d’athlète. Les deux dans une complémentarité qui leur permit de jouer comme par télépathie avaient conquis tous les théâtres sportifs qui les avaient vus à l’œuvre. A la manière du duo divin Pelé et Tostao lequel Tom posséda des démarches semblables. Une similarité que l’on ne découvrira qu’après Mexique-70. Lorsque la télé sportive fit irruption dans les salons de Port-au-Prince. Entre-temps JCD toujours captivant fut repéré par les responsables du soccer états-unien et fut engagé par le Detroit Cougar aux EU. Ces périples terminés, il revint au bercail tout en rejoignant l’Aigle Noir. Parallèlement, Le Bicolore était engagé dans les éliminatoires de Mexique 1970, et ce fut pour Tom l’opportunité de faire étalage de sa maestria, toujours en tamdem avec Sainvil. Cependant, l’aventure mexicaine s’étant terminée dans la tristesse, le docteur devint fer de lance d’une sélection qui fit peau neuve sans ‘’Gwo René’’, Legros, Guy, Obas et autres. Avec ‘’Pipo’’ ils constituèrent l’âme de la Sélection laquelle maintiendra bien sa course ascendante sous leurs directives.
Jusqu’au sacre du Concacaf en Haïti en 1973; à la suprême participation dans la coupe du monde d’Allemagne en 1974, toujours en contributeur remarqué. Après le mondial, Tom alla prendre deux années sabbatiques aux ‘’states’’, où il continua à pratiquer le sport roi. Il revint au bercail juste à temps pour intégrer la formation de l’entraineur Allemand Piontek, laquelle saturée de talents tels: Romulus, Ponpon, Dorsainvil, Brévil, Sonche Pierre, Malenkov, Domingue, J. Marie, Labissière, Mathieu, Viellot etc; n’avait pas trop besoin de ses services. De ce fait, abusé par le poids des ans et des tacles méchantes, il n’était plus le même. Malgré tout, aligné pour le match de barrages contre Cuba en 1977 au Panama, il marquait les deux buts d’Haïti qui éliminèrent l’île de Marti et de Castro. Subséquemment, il joua une saison supplémentaire avant de raccrocher dans un Jubilée qui ne fit pas stade comble comme le fut celui de ‘’Zocil’’Obas. Les Racinistes qui n’ont jamais pardonné l’Aigle pour ce match ‘’donné’’ au Violette en 1973, boudèrent la rencontre au grand désarroi du docteur. Philippe Vorbes ulcéré qui prit son bol d’aumône le lendemain pour aller faire la quête dans les rues pour Tom; priant la population d’y remédier.
Après ce bronca, J. Désir alla encore se fixer à New-York et, continua à émerveiller les afficionados du foot dans les championnats de vacances. Entre multiples boulots de père de famille, trimant durement et dignement pour gagner sa vie. Il s’imposa en porte parole de l’Aigle à NY, dirigea le ‘’Club Veterans de NY’’, puis ‘’The Masters’’ de NY. Et jusqu’à nos jours, continue à prodiguer son expertise sur les terrains périphériques aux jeunes de la place. Toujours faisant l’objet de révérence et de respect de la part des amants du sport, afin de le remercier du temps où il les ensorcelait de son Grand Art.