Toujours dans la même lignée que celle qui a caractérisé les deux précédentes productions : «Fè l vini avan» et «Fèl ak tout kè ou», la bande à Richie et Pipo a remis ça, dans une nouvelle œuvre qui se veut le paradigme d’un genre qui ne tient pas à bousculer ses références.
En effet, «Ret nan liy ou» renferme une tonalité qui tient à affermir les bases d’un groupe qui fait courir le grand public, et dans ce cas, n’a point d’intérêt à réévaluer quelque chose qui n’en a nullement besoin. C’est ainsi que dès l’entame de la pièce introductive : «Twou vid», on revit toutes les vibrations d’un schéma musical qui occupe le haut du pavé dans la scène ambiante, depuis plus d’un lustre.
Sur une allure vivace et des envolées de Pipo, les engueulades de Richie, les extravagances de Pozo et autres pour faire démarrer le bamboula, rien de plus. Tandis que «Black -out» est joué sur un tempo modéré, un synthé synchronisé, des cordes harmoniquement adaptées, des percussions timorées. Ce qui permet à Pipo de mettre à nu son «pitch» florissant sans galvauder les octaves. Un coup de clarté. Etre à la fois un vocaliste technique et caractéristique.
«Ret nan liy ou» nous est servi dans du konpa musclé, avec des combinaisons qui nous sont bien familières : cordes, pédales, vent, percussions, voix qui nous renvoient tous au lieu commun, comme un pétaradant leitmotiv. Mais, tout coule comme ça se doit, grâce à des intervenants qui savent bien comment s’y prendre. «Klike sou li» est du konpa tout en ballade, harmonieusement concocté, sans bousculade, pendant que toutes les sections s’y adonnent avec flair, spécialement les cordes et synthés, dans des antiennes qui sont les marques déposées du groupe. Permettant ainsi que Pipo puisse s’investir avec suffisance pour délivrer des vocalises tout en» vibrato». Cependant, il doit aussi maitriser son «crescendo». «Kout papa», est une autre trouvaille de Richie, dans sa démarche de diseur (et ‘rubrique’ de choses et gens vus et entendus}. Un style qu’il a fini par faire sien. Un peu de raga-tone infusé de katas que Richie (le chanteur) a gratifié avec son exubérance habituelle. Et puis, la démarche peut-être contagieuse à la danse.
l’album #1 était bien meilleur que le second, qui de son côté surpasse le 3ème.
«Lanmou pafè», nous offre en prélude, un slow en anglais sur un clavier tout en pianissimo ; dans lequel Pipo veut faire étalage de sa capacité de crooner. Et lorsque tout a transité sur du konpa langoureux, il continue mordicus à maintenir l’orchestre à coups de bonds vocaux, soutenu en ce sens par Pozo, qui a su bien le chaperonner dans des riffs référentiels, un synthé orchestral dans une démarche bien syncopée qui donne des idées de s’emballer. On regrette que la bande à Richie n’ait pas su explorer cette approche qui aurait permis à Pipo de mieux s’extérioriser. «Respekte fanm», avec une illustration à la passa-doble et des débordements de rabóday, Richie a encore mis à profit une de ses marques signatures. Toujours conçue pour la chaude ambiance. Mais, attention à ne pas trop en abuser. Quant à, «Joyeux Noël», réservons-nous le droit de la revisiter au moment approprié, car mal venue dans cette période de l’année. Ce qui ressemble à une façon délibée de boucher un trou.
Alors au lieu de ce pétard mouillé n’aurait-il pas fallu mettre l’accent sur la lutte du peuple haïtien ? On sait que « Klass » » comme d’ailleurs les autres groupes, a coutume d’apporter leur contribution dans le lyrisme combattif : Nou se Ayisyen, Anmwe sekou, etc. Mais, le contexte actuel demande plus que de la théorie. Et les artistes doivent comprendre que le changement va arriver, avec ou sans eux, s’ils s’acharnent à ménager la tête du consortium qui est en train de détruire le pays. Et ne pas pointer Barnabé du doigt, comme le public le mérite. En compte, avec 8 morceaux (-1), seulement à offrir, le « Klass » a le droit d’être inquiet .
Malgré tout, la bande à Richie, Pipo, Pozo, Nuxon et compagnie semble bien détenir le momentum et donc, garde le moral, et un délire de confiance. Mais, d’après les constats, les indicateurs demeurent inquiétants.
Puisque l’album #1 était bien meilleur que le second, qui de son côté surpasse le 3ème. Et c’est ce qu’on appelle une pente descendante. Car, «Ret nan liy ou» malgré sa joie de vivre, n’a pas su mettre vraiment sur des charbons ardents, tout en tenant sa promesse de rester dans sa ligne. Toutefois, avec son compte actuel, c’est peut-être normal que le groupe puisse s’asseoir sur ses lauriers et profiter d’un capital qui est au fixe. Cependant, prenez garde de ne pas déprécier le profit dans le conservatisme. Puisqu’une qu’une hirondelle ne fait pas le printemps.