Le pays traverse la plus grande crise de son histoire. Il est incapable d’envisager son avenir avec confiance et sérénité et de prendre la place qui lui revient parmi les nations véritablement libres et souveraines. Parmi les principaux responsables de cette situation désastreuse de déception, que les masses haïtiennes vivent et ressentent avec indignation, se trouvent ceux qui se réclament de la gauche haïtienne. Ils ont passé leur vie à suivre les traces de la bourgeoisie corrompue et, tout en critiquant les gouvernements bourgeois antipopulaires, certains de ces gens trouvent le courage de s’intégrer à leur entreprise politique. Il est ironique que cette catégorie d’individus, tous bords confondus, n’ait jamais véritablement réussi à s’organiser en mouvement autonome. Ils se comportent comme des renégats, n’osant jamais s’unir au peuple pour lui faire confiance et construire ensemble une alternative susceptible de contribuer à libérer le pays de l’impérialisme et du néocolonialisme.
Par conséquent, ces petit-bourgeois se sont éloignés de la voie des masses défavorisées pour s’allier à leurs partenaires de droite. Bien souvent, la position de cette gauche ne reflète pas celle de la majorité de la population, mais celle de la droite réactionnaire. Les revendications des ghettos ne sont pas les leurs. Autrement dit, ils défendent de manière superficielle les intérêts de la classe ouvrière, la majorité des laissés-pour-compte. Ils préfèrent rester attachés à la classe politique corrompue pour ne pas trahir la confiance de leurs patrons bourgeois. Néanmoins, cela ne les empêche pas de continuer à se présenter comme des progressistes de premier plan et, pour couronner le tout, des « révolutionnaires ».
Quoi qu’il en soit, ils sont pour la plupart très critiques à l’égard de certains régimes, notamment duvaliéristes, lavalas, PHTK, et pourtant ils collaborent avec eux du mieux qu’ils le peuvent sans se gêner. Actuellement, tout le comportement de cette gauche, si elle existe réellement, est contraire aux principes de la lutte révolutionnaire. Sans exagérer, certains vont jusqu’à s’aligner, dans certaines circonstances, sur les positions du quotidien Le Nouvelliste, véritable représentant de la classe aisée et dominante. N’est-il pas absurde que des personnes se réclamant de la gauche puissent se comporter en opportunistes et se faire des illusions sur le rôle de l’impérialisme dans le pays ? Bien entendu, une large majorité avait ouvertement soutenu le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) imposé par Washington et la nouvelle occupation du pays par la Mission dirigée par le Kenya.
Or, ces fossoyeurs au pouvoir causent le plus grand tort à la nation, car ils continuent d’appliquer les mêmes politiques néolibérales dictées par l’impérialisme américain. En vérité, Haïti est aujourd’hui l’un des rares pays où les dirigeants sont pratiquement tous des traîtres patentés et surtout dénués de tout sentiment patriotique et de fierté nationale. Puisqu’ils ne se gênent guère de faire reculer leur pays au lieu de le voir progresser, ceci au profit des puissances impérialistes et néocolonialistes. Il suffit que leurs patrons étrangers soient satisfaits et les félicitent « Bravo et maintenez-les au pouvoir !» La gauche n’a rien proposé d’autre en termes de perspective et de leadership politique que celle des imposteurs du groupe Montana avec Fritz Alphonse Jean. Le peuple n’obtiendra rien de ces individus inertes, soumis aux désirs des puissances dominantes, dont ils sont les instruments dociles.
C’est pourquoi, tout autre secteur qui tente de construire une autre alternative pour se démarquer de cet environnement complotiste, ils sont les premiers à le combattre, et sans aucun doute c’est là leur véritable mission. Ces mercenaires au propre comme au figuré coopèrent avec la bourgeoisie pro-impérialiste tout en empêchant le développement de tout autre mouvement de résistance à la domination et à l’exploitation du capitalisme américain. Lorsque l’homme d’affaires, l’oligarque Pierre Reginald Boulos, alors propriétaire-fondateur du Mouvement Troisième Voie (MTV-Haïti), s’est autoproclamé le « Fidel Castro haïtien », ils n’ont rien dit, certains l’ont même rejoint. Mais lorsqu’un membre de la classe opprimée prétend vouloir faire la révolution, ils trouvent toutes les étiquettes possibles pour lui coller à la peau.
Il n’y a aucune solidarité avec les plus pauvres, sachant pertinemment que seuls les membres de cette classe humiliée et exploitée peuvent véritablement accomplir un tel exploit, dans la mesure où leurs conditions sociales déterminent leur pensée, leur engagement et accroissent leur conscience politique. Ils ont utilisé le slogan de « Transition de rupture » pour bien simuler leur ruse sachant qu’il n’y aurait pas eu de rupture ; au contraire, ils nagent nus dans la perpétuation du système corrompu. Pour l’instant, ils n’ont aucun discours capable de gagner la confiance du peuple. Ils n’attendent qu’un miracle pour réapparaître comme de grands militants révolutionnaires venus de la mouvance de gauche. Est-ce là la vocation de la gauche haïtienne ? Attentiste ! Collaborationniste ! À Haïti Liberté, nous avons toujours assimilé cette gauche à la classe politique traditionnelle corrompue. Cette gauche, comme la droite, ne peut pas inventer l’avenir.
Nous parlons en toute connaissance de cause, étant donné que nos idées sont systématiquement boycottées, combattues par cette fausse gauche afin de valider les arguments mensongers provenant de branches ou de courants pro-impérialistes. Selon eux, ce ne sont pas les impérialistes et le système capitaliste qui détruisent le pays, mais bien ceux-là que les impérialistes appellent les « terroristes » des quartiers populaires. Kemi Seba, le militant Panafricaniste qui sait de quoi il parle, a tenté, lors de son voyage historique en Haïti, de les remettre sur les rails. Mais tels des perroquets, ils répètent en continu toujours le même refrain, la même leçon. Résultat d’un vrai lavage de cerveau. C’est aussi un choix politique, une véritable position de classe qu’ils reflètent en refusant de rompre avec les idéaux de l’oligarchie criminelle. Actuellement, des manœuvres de toutes sortes s’effectuent au sein du Pouvoir. En réalité, ce sont les puissances dominantes, notamment les États-Unis qui se contentent de diversions et de tactiques mesquines afin de protéger ou de faire avancer leurs intérêts.
Cela n’a rien à voir avec les aspirations populaires ; au contraire, toutes ces menaces, ces sous-entendus se font au détriment du peuple. Il s’agit simplement de définir lequel des protagonistes pourrait le mieux servir le colonisateur. Dans ce duel fratricide, le lobbying du Premier ministre à Washington a apporté des fruits. Le Bureau des Affaires de l’hémisphère occidental a félicité les membres du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) pour leur rejet de la corruption et salue la collaboration entre le CPT et le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé en faveur de la stabilisation d’Haïti. « Nous tiendrons pour responsable toute personne cherchant à perturber cette coopération » menacent les américains. Face à la puissance des impérialistes, la gauche haïtienne n’a pas le courage de lutter, de prendre des risques, même ses slogans d’antan ont été abandonnés. Elle a tout simplement capitulé devant l’ennemi en baissant les bras.
Quelle honte ! A quoi bon exister, si elle ne peut se surpasser pour apporter une réponse, appropriée à cette dérive destructrice qui ne cesse de s’amplifier en détruisant le premier pays Nègre anti-esclavagiste et anticolonialiste du monde ?