Police Nationale d’Haïti: Il faut «épurer» voire «refonder» cette institution de «ripoux contre ripoux»!

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Dans quelle mesure la police nationale ne serait-elle pas un « cadeau empoisonné » pour les Haïtiens, comme l’étaient les forces armées créées sous l’occupation américaine de 1915

« Toute l’histoire du contrôle sur le peuple se résume à cela : isoler les gens les uns des autres, parce que si on peut les maintenir isolés assez longtemps, on peut leur faire croire n’importe quoi. »
Noam Chomsky

Tout va de travers dans ce pays que l’on appelait autrefois  –  et non par ironie  – la Perle des Antilles. À cette époque-là –  qui était aussi celle du Bicentenaire du président Dumarsais Estimé   –  les touristes venus des quatre coins de la planète déambulaient par dizaines dans les rues des villes accueillantes et longeaient sans inquiétude les sentiers des campagnes verdoyantes, noyées dans l’exubérance des forêts vierges. Ce temps béni et enchanteur n’existe plus dans cette presqu’île mourante. Aujourd’hui, la République  incarne, symbolise aux yeux des populations planétaires une « clocharde lépreuse » qui attend sa dernière heure dans la honte grisailleuse, une pestiférée malchanceuse que même une  frange  complexée  de  la « diaspora haïtienne » cherche volontairement à fuir.

Un ancien camarade de classe, que nous avions rencontré par hasard au Canada,  nous   avoua qu’il ne révélait jamais sa nationalité aux étrangers. Il  laissait toujours croire qu’il était venu d’une autre région francophone de la Caraïbe. « C’est dur de trainer partout derrière soi l’héritage d’une perception nettement péjorative de son pays natal forgée de toutes pièces par les Canadiens, les « Américains », les Français… » Les peuples des sociétés occidentales nous voient effectivement mal. Cependant, cela devrait-il enlever un iota à notre fierté d’être  nés  Haïtiennes et Haïtiens sur une terre de combat et de révolution anti-esclavagiste?

En 2016, la population haïtienne était évaluée à 10 847 334 habitants. 75% du nombre se retranchaient dans les bas-fonds d’une misère au goût de fiel. Aujourd’hui, en 2017, le tableau devient encore plus sombre. Ces échantillons d’individus ne possèdent pour tout bien matériel que leurs vieux chapelets de pénitence qu’ils égrènent le jour et la nuit. Devant les larges portes  – souvent fermées – des cathédrales ou des chapelles, ils implorent Notre-Dame des sept Douleurs pour qu’elle intercède en leur faveur auprès de son fils « Jésus », le célèbre charpentier nazaréen. Mais le miracle n’arrive pas! Ou du moins, pas encore! En fait, certains diront  –  et avec raison   –  que ce pays, sous le regard oublié du « Créateur », dépérit à la vitesse de la lumière. Il ne représente même pas l’ombre de ce qu’il fut avant la période coloniale. Et même avant la date maudite du 22 septembre 1957, qui a hâté sa descente aux enfers. Haïti expose pitoyablement sa laideur cadavérique. Enfin, nous n’y voyons que des loques humaines abandonnées dans un désert immense de « pariatisation » sociétale, politique, économique et culturelle.  Parvenue à ce stade avancé de misère et de décadence, la société haïtienne, sincèrement, n’aurait-elle pas besoin d’une cure psychanalytique?

Sans  exagération, Quisqueya ne laisse-t-il pas l’impression aux historiens, aux anthropologues, aux sociologues, aux politologues d’avoir  entamé le  processus d’une  « disparition  » imminente? Et plus tard, peut-être  –  ce que vous et moi ne souhaitons guère  – n’aurait-elle pas été effectivement qu’un rêve, qu’un souvenir lointain et cauchemardesque, comme Sodome et Gomorrhe dans la mémoire collective ? La corruption, la prostitution, la fornication, les mœurs dépravées, toutes ces sources de contagions chroniques ne les auraient-elles pas rongés, gangrenés tous les trois à un niveau similaire? Tous les « crimes » reprochés à Pompéi et à Sodome et Gomorrhe ne pourraient-ils pas être inscrits dans l’acte d’accusations dressé contre cette République au visage  blafard, à la face livide comme le « jour des morts », constituée  de  politiciens parasites, débaucheurs et même libertins ?

Ce sont les truands de Wilson Jeudi, le cousin du « vampire » Michel François, qui ont abattu de sang-froid le jeune homme Reginald Cassy.

Haïti, comme vous le notez vous-mêmes,  n’a pas cessé de subir l’assaut de ses anciens conquérants rusément, habilement travestis avec des accoutrements d’un humanisme bourgeois. Ce sont eux qui œuvrent  voracement  au sein de la « mondialisation » appauvrissante,  insatiable et ruineuse. Albert Jacquard rappelle : « Conquérir, c’est soumettre, assujettir, avec l’espoir d’exploiter. »

Dans le cas d’Haïti, il faudrait remplacer « l’espoir d’exploiter » par la « méchanceté d’exploiter ». L’Espagne, la France, l’Angleterre, les États-Unis…, l’ont saignée à blanc… Ils lui ont réservé le sort d’une vache écorchée vivante dans un abattoir insalubre…

Et c’est loin d’être fini…! 

Depuis plusieurs années, le phénomène de l’insécurité a élu domicile en Haïti. Notamment à Port-au-Prince. Des vies humaines sont fauchées tous les jours. Le banditisme frappe aveuglément. Toutes les couches de la société sont prises pour cible : riches, pauvres, professionnels, savants, écoliers, étudiants, illettrés, femmes, hommes, enfants, gens du troisième et du quatrième âge… Les assassins kidnappent, violent, rançonnent, libèrent ou tuent sans pitié. Et impunément. Les riverains vivent constamment dans la crainte de se faire enlever. D’être massacrés chez eux ou dans la rue par des hors-la-loi amoraux, sans pudeur, qui bénéficieraient  – selon les apparences –  d’une complicité haut perchée… Le problème est gravissime. Mais les autorités du « gouvernement jovenélien » affichent un laxisme impénitent. Elles ne semblent pas intéressées à ramener la paix et la sécurité dans le pays. L’État  – dirigé actuellement par les extra-terrestres du PHTK   –  regarde mourir des gens honnêtes et se croise les bras. Comme s’il n’avait rien à foutre de ce fléau.

Les témoignages des malheureuses familles qui logent dans les quartiers chauds, comme Grand-Ravine, La Saline, Cité Soleil, affluent sur les ondes des médias. Des malandrins armés de mitraillettes s’entretuent. Des compatriotes paisibles tombent sous les balles des bandits légaux. Les crépitements des armes automatiques retentissent sans arrêt comme dans la sale guerre du Vietnam. Fort de l’appui d’un pouvoir mafieux, les assassins qui se retranchent dans les zones défavorisées de la capitale, se promènent à visage découvert après leurs forfaits. Ils font trembler les honnêtes gens. Lorsque l’on a un pays dirigé par un Jovenel Moïse, ainsi connu, un Lee Van Clef à la fois dans les rôles de la brute et du truand, un blanchisseur d’argent illicite, un « grossier individu » arrogant et ignare, un escogriffe sans culture et sans classe, quel autre résultat pourrait-on obtenir? Au palais national, cette race de vipères, ne  serait-elle pas capable de trinquer aux malheurs, de boire à la  maladie, et même de se saouler à une éventuelle disparition de Moïse Jean-Charles de la scène politique? D’ailleurs, n’avons-nous pas entendu dans les émissions de libre tribune des énergumènes danser sur une valse d’invectives et de souhaits néfastes, après avoir appris que l’ex-sénateur Moïse Jean-Charles traversait une période alarmante de détérioration sanitaire.

À bien y réfléchir, la montée des actes de kidnapping en pleines rues et la prolifération des homicides sous le soleil de midi ne peuvent pas tenir d’un malheureux hasard. Le professionnalisme qui entoure les pratiques du banditisme en Haïti suggère, commande même aux observateurs d’élaborer une problématique en rapport à la situation, de construire un questionnement, afin de mieux saisir le sens, de bien mesurer la portée, d’identifier les enjeux, d’évaluer les conséquences d’une telle dérive sociopolitique. Et nous sommes tout à fait sûrs que les premières hypothèses feront carrément remonter à la surface une filière mafieuse, étonnamment méthodique. Minutieusement structurée. Impeccablement organisée. Notre flair journalistique nous indique que rien dans cette puissante et lucrative activité criminelle n’est laissé au hasard d’une improvisation gauche, irrationnelle et compromettante.

Beaucoup d’entre  nous admettraient  facilement  que l’incompétence, l’« incapabilité  » en matière d’ « organisation » occupent une place impériale dans tous les débats où intervenants et participants ergotent sur les caractéristiques dysfonctionnelles et la nature improductive des institutions politiques haïtiennes. Ce constat, en toute franchise, est manifeste. Il objective les facteurs de causalité et de risque par lesquels les bailleurs de fonds et les États du Centre évaluent eux-mêmes les retards qu’ils attribuent à certaines régions du Sud – dont fait partie Haïti  – en matière de développement durable? La société haïtienne, à n’en plus douter, souffre d’un déficit de savoir sur le plan de « capacité organisationnelle ». C’est l’amateurisme rebutant qui prévaut à tous les niveaux des organes dont l’appareil de l’État est constitué. Le monde contemporain ne marche pas. Il court. Sans stratégie d’action, les dirigeants des pays retardés n’arrivent pas à suivre le rythme du « marathon » toujours dominé par les oligarques financiers, en vue d’améliorer les conditions de vie de leurs citoyennes et citoyens.

Les ouvrages du sociologue Jacques Grand’maison nous offrent une bonne compréhension du concept d’ « organisation ». Ce terme évoque l’art de combiner et d’associer un ensemble d’éléments qui sont utilisés comme tremplin pour atteindre des objectifs spécifiques…

À la lumière de ces réflexions éparses, nous croyons qu’il est à présent nécessaire de s’interroger sur les origines véritables des cas de déviance sociale grave qui sèment la terreur au sein des populations urbaine et rurale après l’éjection du « duvaliérisme jean-claudien » du fauteuil de la gouvernance. Depuis 1986, le pays est pris en otage par les spectres de la criminalité galopante. La chronicisation du problème  – qui projette un profil d’insolubilité   –  ralentit considérablement le rythme des investissements privés et freine tout élan de progrès social et d’épanouissement culturel.

Qui tirent les ficelles derrière le rideau de l’insécurité ? 

Tout indique que cette grande calamité nationale a été pensée, construite et finalement érigée en système institutionnalisé dans le but de déstabiliser la société haïtienne qui a déjà du mal à trouver un chemin normal et viable pour s’éloigner de la misère.

De la date de la création et de l’installation de cette force nébuleuse appelée « Police Nationale » – dont le véritable rôle était de remplacer en tous points les forces armées accouchées par l’occupation américaine  de 1915  – à aujourd’hui, le nombre d’individus tués par balles ou à l’arme blanche en Haïti dépasse l’entendement en matière d’actes criminels.

Les cerveaux et les exécutants de ces horreurs jouissent d’une impunité scandaleuse qui révolte la conscience citoyenne. Les enquêtes, dans la majorité des cas, n’aboutissent pas. Les coupables se seraient comme volatilisés. Évaporés dans la nature. La corruption a putréfié l’appareil judiciaire.

Aux dernières nouvelles, après le meurtre du pauvre et malheureux bouquiniste à Pétionville par les mercenaires de Dominique Saint-Roc  – lui-même suspecté dans l’assassinat du policier Rigaud Claude survenu le dimanche 11 décembre 2016 à Mono-Ville – ce sont les truands de Wilson Jeudi, le cousin du « vampire » Michel François, qui ont abattu de sang-froid un jeune homme d’une trentaine d’années. Ce meurtre gratuit a révolté les riverains de Delmas 65 où habitait la victime. Des pneus brûlaient sur la chaussée, en guise de protestations contre cette barbarie innommable. Pendant ces derniers jours, plusieurs policiers eux-mêmes ont succombé sous les tirs d’individus lourdement armés. À Croix-des-Bouquets, le dimanche 13 octobre 2017, les agents de la Brigade d’opération et d’intervention départementale (BOID), une unité féroce de la police nationale, mise en place par la Minustah et le Core group pour protéger le régime des « crânes rasés », ont semé la panique parmi les habitants de Lilavois 10. Ces « voyous », dont pour la plupart des repris de justice, ont incendié des maisons et des véhicules, tué des innocents, blessé des compatriotes traumatisés,  volé des objets précieux, molesté des jeunes garçons et  des jeunes filles, des pères et mères de famille… Jusqu’à présent, les « bourreaux » de l’institution policière pourrie, corrompue ne sont l’objet d’aucun blâme sérieux de la part de leurs supérieurs hiérarchiques. Nous aurions pu évoquer aussi l’assassinat du militant politique Maxo Gaspard le 10 novembre 2015 qui ne fait l’objet d’aucune considération de la part des juges qui sont incapables d’exercer leur profession par peur de perdre leurs maigres moyens de subsistance économique dans un pays où le taux de chômage bat tous les records. Les pratiques et les méthodes de cooptation leur font  oublier que l’autonomie de judiciarité est protégée par le principe d’inamovibilité.

Sans hésitation aucune, le phénomène de l’insécurité qui étouffe la capitale et assiège plusieurs villes de province est une arme de déstabilisation sociale et politique sciemment utilisée par certains secteurs nébuleux de la communauté internationale pour achever de ruiner le pays. Gommer entièrement son statut de souveraineté et d’indépendance sur le parchemin des épopées mondiales. Les origines sociales et/ou ethniques des quelques individus détenus à la prison dorée de la Croix-des-Bouquets, pour leur présumée implication dans des activités criminelles, nous laissent comprendre que les véritables « têtes pensantes » du réseau vivent en dehors du territoire. Ceux-là sont des « agents subalternes » au service de la mafia politique internationale.

La criminalité systémique, telle qu’elle a pris forme après février 1986, doit être vue et interprétée comme l’invention et la manifestation d’une cruauté paroxystique. Il s’agit d’un instrument de frayeur contraignante pour casser la résistance des masses qui luttent pour l’émergence d’un lendemain meilleur. Prises de panique devant les ravages du kidnapping, des familles entières ont fait le choix regrettable de s’expatrier. Elles sont allées grossir le nombre des « misérables » cosmopolites qui suent sang et eau dans les « usines de torture » de l’Amérique du Nord pour gagner le salaire minimum. D’un autre côté, certains immigrants haïtiens ont dû renvoyer aux calendres grecques leur rêve de retour au pays natal, de peur de se faire assassiner – comme Benigno Aquino (2)  – dès leur descente d’avion ou à leur sortie de l’aéroport, comme c’était déjà le cas sous Gérard Latortue et sa bande de « pirates des Caraïbes »…

Nous sommes de plus en plus convaincus que le phénomène du banditisme est scientifiquement théorisé par des « cerveaux étrangers » qui utilisent, comme toujours, une « main-d’œuvre » locale, à bon marché. Mais extrêmement bien entraînée. Psychologiquement bien préparée…! Haïti, à cause de sa situation de « pauvreté extrême », est un terreau fertile pour toutes les activités criminelles. Des renégats faméliques abattraient la population d’un village entier pour un bol de semoule  de maïs…!

Ce que nous avons appris 

L’Académie de police nationale située à Pernier (Pétion-Ville) a été le théâtre d’un vol spectaculaire sous le premier gouvernement de M. Préval. Peu de gens le savent. Les autorités ont évité d’ébruiter l’affaire. Directeur à l’époque de Radio plus, J’en étais « informé » par un haut responsable de la Direction des écoles et de la formation permanente (DEFP), qui m’invitait à venir sur place et à faire le constat par moi-même. Il s’agit d’une vieille connaissance  – dont le nom est omis volontairement  –  que j’avais l’habitude de rencontrer à l’époque de la dictature duvaliérienne dans une métropole de l’Amérique du Nord. Il avait été formé à l’étranger pour participer activement à la matérialisation du projet de création du « corps armé controversé » appelé « Police Nationale ».

Ce personnage influent – qui est aujourd’hui à la tête d’une importante congrégation protestante basée à Port-au-Prince – m’a remis une copie de la liste des équipements dérobés, ou plutôt détournés. L’importance du méfait, la diversité et la quantité des unités qui figurent dans ce document confidentiel – d’ailleurs que je conserve encore avec les noms de tous les inculpés –  m’ont permis de constater qu’il ne s’agissait pas d’une simple affaire d’«escroquerie » pour gagner illicitement de l’argent. Cela est d’autant plus vrai que le présumé auteur principal du délit est un ressortissant étasunien qui travaillait dans ce projet comme responsable de la logistique pour le compte de l’International Criminal Investigative Training Assistance Program (ICITAP). Cette entité, comme vous le savez, relève du Département de la Justice américaine. D’autres fonctionnaires étrangers seraient aussi associés de loin ou de près à cette histoire obscure et mystérieuse de vol ou de détournement de matériels destinés à la Police Nationale : véhicules, uniformes, caméras, machines à écrire Olivetti, meubles de bureau, radios de communication, microphones… C’est un indigène, agent de sécurité haïtien affecté à l’Académie de police, qui a conduit à la découverte de la vérité.

Sans hésitation aucune, le phénomène de l’insécurité qui étouffe la capitale et assiège plusieurs villes de province est une arme de déstabilisation sociale et politique sciemment utilisée par certains secteurs nébuleux de la communauté internationale pour achever de ruiner le pays.

Ces « missionnaires de la cosmocratie » qui ont ramené le président Aristide en 1994 auraient-ils reçu des instructions précises et formelles de leur hiérarchie pour créer deux forces de police parallèles en Haïti, dont l’une serait officielle, tandis que l’autre, souterraine ? Par conséquent, clandestine… Et encore, avec des attributions occultes… Si tout cela s’avère, quelle utilisation en font les « Jules Césars » contemporains, ceux-là que Jean Ziegler appelle les « cosmocrates »? Ce dilemme embrouille les esprits : dans cet étrange amalgame, comment peut-on reconnaître le vrai policier du faux, puisqu’ils portent la « même uniforme » et ont été formés par les « mêmes instructeurs »? En définitive, dans quelle mesure la police nationale ne serait-elle pas un « cadeau empoisonné » pour les Haïtiens, comme l’étaient les forces armées créées sous l’occupation américaine de 1915, et qui se sont alliées à tous les pouvoirs politiques dictatoriaux pour assassiner des opposants et des simples citoyens ? Au sein de l’institution policière, il existerait donc des cellules mystérieuses et clandestines actives. Leur  mission consisterait à éliminer des collègues sérieux et honnêtes qui combattent et résistent contre la corruption mafiosique, qui se mettent loyalement au service de leur pays et de leurs concitoyennes et concitoyens. Ils ne sont pas nombreux. Mais il en existe encore quelques-uns dans les commissariats de la capitale et des villes de province. Les « policiers délinquants » sont eux-mêmes chargés  de perpétuer un climat de désordre politique et de chaos sociétal par lequel les forces de l’occupation étrangère justifient leur présence sur le territoire national, afin de continuer à protéger les intérêts des États impériaux, des multinationales et de la bourgeoisie du bord de mer (BBM).

De 1995 à nos jours, les nouvelles n’ont-elles pas rapporté de nombreux cas de policiers morts en devoir, assassinés par leurs propres collègues? Et les meurtriers, ne sont-ils pas – pour la plupart  – demeurés introuvables? Les « ripoux » sont aussi utilisés dans la perpétration des crimes politiques qui ne sont jamais élucidés. Un simple coup d’œil sur le fonctionnement du Parquet du tribunal civil de Port-au-Prince gardé par le laquais épais,  Ocname-Clamé Daméus, suffit à convaincre l’opinion publique de l’état de décomposition avancée des tribunaux de la République.

Les autorités gouvernementales et judiciaires de l’époque sont au courant du « vol audacieux et mystérieux » que nous avons rapporté dans ce texte. Elles pourraient difficilement en nier l’authenticité. Un mandat d’arrêt – dont nous avons eu le privilège de prendre connaissance – a été décerné contre les trois suspects principaux. Mais le président René Préval  – pour répéter notre source qui nous demandait même de la citer nommément, tellement il était révolté  – s’est fait dire par l’ambassade des États-Unis  à Port-au-Prince « qu’il n’était pas question que les tribunaux de la République d’Haïti jugent  des citoyens américains et sévissent contre eux!»

Pourtant, les États-Unis arrêtent aisément des Haïtiens en Haïti, les jugent et les incarcèrent en Floride. Sans la moindre intervention voire protestation de la part des dirigeants locaux. Et même la France de François Hollande s’est permis de le faire.

La tentative pour les puissances hégémoniques d’installer une filière d’insécurité en Haïti remonte au gouvernement de facto de Prosper Avril. Des femmes, des mères de famille étaient violées toutes les nuits sous les regards impuissants et rageurs de leurs progénitures et proches parents. Ou contraintes de se laisser violer par leurs fils, leurs frères, leurs cousins… Le défunt journaliste Sony Bastien, dont le 2 juin 2017 ramenait la neuvième année de décès, avait inventé le mot « zenglendos » pour qualifier les malfaiteurs qui opéraient en toute liberté et autorité sous le règne avrilien.

Demain n’est pas rassurant, mais il faut garder l’espoir… 

Le piège se referme progressivement sur les masses populaires haïtiennes. L’insécurité, si elle n’est pas jugulée, basculera tôt ou tard le pays dans l’« ingouvernabilité ». Et l’anarchie sociale ouvrirait davantage les portes d’une « mise sous tutelle » aux États-Unis, au Canada et à la France. La Minujust vient de remplacer la Minustah. Cependant, les flammes des vols, des viols, des assassinats spectaculaires ne baissent pas. Les bandits armés sèment la terreur de plus belle à Grand-Ravine et dans les autres quartiers de Martissant. Le palais de la présidence abrite des malfaiteurs de tous poils. Jovenel Moïse et son épouse attendent de répondre des éventuels crimes qui leur sont reprochés par devant le tribunal pénal. Le pays n’a pas encore franchi la ligne de l’ « ingouvernabilité ». Mais il n’est pas gouverné. La barque de la gouvernance dérive sur un fleuve agité. Moïse Jean-Charles est allé se soigner à Cuba. Néanmoins, les manifestations massives contre la présence illégitime de Jovenel Moïse dans les affaires de l’État se poursuivent fougueusement. Le mot d’ordre ne change pas : les bénéficiaires des fraudes électorales d’Opont et de Berlanger doivent déguerpir. Les lavalassiens semblent reprendre du service. Les catégories hégémoniques de la communauté internationale regardent le futur d’Haïti à travers des loupes faibles. Elles voient trouble. Tout peut arriver dans cette République qui explose de misère, de dégoût, de chômage, de migration externe, d’analphabétisation, d’assassinat, de népotisme, de corruption, de coercition, de cooptation… Les États-Unis, le Canada, la France le savent : « Les voies du Seigneur sont impénétrables.» Et les voies du peuple –  dirions-nous – sont imprévisibles. Complètement imprévisibles. C’est comme la rivière qui cherche à reprendre son lit au moment où dorment profondément – dans leur sommeil d’oubli et d’entêtement – les individus qui l’ont chassée. Un manifestant qui se plaignait d’actes de brutalité policière prophétisait  aux micros de la presse locale que demain, c’est l’équipe de Jovenel Moïse, de Wilson Laleau, de Guichard Doré qui sera à sa place et qui implorera le pardon des masses maltraitées. C’est vrai que l’histoire se répète. Et que les acteurs changent souvent de rôle! Au cinéma, on l’a assez vu : la victime devient plus tard le « Justicier ». Et elle prend le temps de savourer sa « victoire » finale et de siroter sa « vengeance » légitime. Me vient en tête « Le dernier des salauds » de Ferdinando Baldi, avec Leonard Mann et Peter Martell.

D’un gouvernement à l’autre, la police nationale n’a jamais su protéger son « talon d’Achille ». Elle a toujours mal choisi son camp. Ses dirigeants l’entrainent du mauvais côté. On se souvient d’un Godson Orélus habillé en rose qui se pavanait fièrement en Floride aux côtés du « Chef indigeste » des « crânes rasés ». Personne ne sait où l’individu grossier, plat et honteusement flatteur est allé se terrer!

L’institution policière de la République d’Haïti est « malade de la peste ». Il faut l’assainir. L’épurer. Voire la démanteler. Pour la refonder. Comme Carthage, vers le neuvième siècle, après sa destruction par les Romains.

Robert Lodimus

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