Le mardi 23 janvier 1973, M. Clinton Everett Knox, l’ambassadeur américain en Haïti, se rendait à sa résidence à Pétion-Ville lorsqu’un commando d’une femme et de deux hommes lui tendit une embuscade. Armés de fusils et de couteaux, les ravisseurs ont forcé l’ambassadeur à monter dans leur voiture et se sont rendus à sa résidence. L’ambassadeur a été informé qu’il ne serait pas blessé si le gouvernement haïtien libérait les 31 prisonniers énumérés ci-dessous. Ils ont également exigé que le gouvernement paie une rançon de $70,000 et qu’un avion soit mis à leur disposition pour un passage sûr hors d’Haïti. L’ambassadeur a appelé à sa résidence le chef de la section consulaire, M. Ward Christensen, et les négociations ont commencé entre le commando, l’ambassadeur, le gouvernement haïtien, l’ambassade des États-Unis et Washington.
La demande des kidnappeurs: libérer les 31 prisonniers suivants:
- Elizabeth Philibert
- Guy Antoine
- Francis Georges
- Emile Almonor
- Anna Napoléon
- Rose
- Laurette Badette
- Josue Bernard
- Jacques Magloire
- Napoléon Victomey
- Emmanold Napoléon
- Ulrick Joly
- Antonio Joseph.
- Jean Napoléon
- Frank Telemaque
- Enar Francois
- Roney Lapombay
- Patrick Lemoine
- Ronald Duchemin
- Capotine Charlot
- Angénor
- Wilfrid Sanders
- Ernest Renoir
- Renald Duchene
- Edmond Pierre Paul
- Adrienne Gilbert
- Ruce Vincent
- Destin Payant
- Martelly
- Ramon Lescouflair
L’ambassadeur de France, Bernard Dorin, et le chargé d’affaires canadien ont joué un rôle très important dans le règlement des problèmes au cours des négociations qui ont duré plus de 20 heures. Pour la première fois, la presse haïtienne a pu transmettre la nouvelle sans censure. Le gouvernement n’est pas intervenu et a permis à Jean Dominique, Marcus Garcia et Mme Lacombe d’exercer leur liberté d’expression en tant que journalistes. Pour la première fois sous le régime des Duvaliers, le peuple haïtien a eu un avant-goût de ce qu’est la presse libre et de son fonctionnement dans une société libre.
Mercredi à 11 heures du matin, le gouvernement haïtien a accepté de libérer 12 prisonniers de la liste des 31, affirmant qu’ils n’avaient aucun dossier des 19 autres prisonniers dans aucune de leurs prisons ou commissariats de police. Ces 12 individus ont été amenés aux Casernes Dessalines depuis Fort Dimanche et le Pénitencier National. Le général Breton Claude et le capitaine Emmanuel Orcel les ont informés qu’ils allaient être libérés, grâce à la gentillesse du président Jean Claude Duvalier, et ils ont eu le choix de rester dans le pays ou de partir le même après-midi. Cinq membres du groupe ont choisi de rester en Haïti. Mais, comme ce scénario ne faisait pas partie des demandes formulées dans le processus de négociation, les prisonniers n’avaient d’autre choix que de prendre la route de l’exil.
À 14 heures, les 12 prisonniers ont été emmenés à l’aéroport militaire Bowen Field pour monter à bord d’un avion DC-6 Cargo. A l’extérieur de l’aéroport, une foule de citoyens inquiets s’était déjà formée; des journalistes, ainsi que des reporters de radio et de télévision se sont réunis pour fournir une couverture de presse. Peu de temps après, les 3 membres du commando et leurs otages – l’ambassadeur et le consul général – sont arrivés en voiture avec les ambassadeurs mexicain et français – Le commando a sauté à bord de l’avion-cargo et l’ambassadeur Knox et le consul Christensen ont marché avec le mexicain et l’ambassadeur de France part pour l’avion.
Les portes étaient verrouillées avec tout le monde à bord prêt à partir, mais l’avion est resté au sol quelques heures de plus pour le ravitaillement et l’entretien. Ce retard avait créé dans la presse un niveau élevé d’incertitude et de malaise, qui est devenu alarmant et a fait sérieusement douter du départ du vol ce jour-là avec le groupe.
Enfin vers six heures, l’avion a commencé à se déplacer lentement puis a décollé rapidement pour Mexico avec le commando et les 12 prisonniers secourus: Adrienne Gilbert, Jacques Magloire, Emmanold Napoléon, Ulrick Joly, Anna Napoléon, Rose, Elizabeth Philibert, Emile Almannor, Josue Bernard, Napoléon Victomey, Antonio Joseph et Agénor.
Wilfrid Sanders s’était pendu aux Casernes Dessalines plusieurs mois auparavant.
Parmi les 19 dont la présence dans les prisons haïtiennes et leur localisation étaient supposément inconnues le 24 janvier 1973 par le gouvernement de Jean Claude Duvalier. Ronald Duchemin était toujours en vie à cette date, incarcéré à la prison du Cap Haïtien. Il a été exécuté le 25 mars 1976 à Fort Dimanche. Gérard Toussaint, Ernst Renoir et Laurette Badette ont également été détenus au Pénitencier National et ont été libérés le 21 septembre 1977, mais ils sont restés au pays. Patrick Lemoine était à l’isolement dans les mêmes Casernes Dessalines, qui a été le point focal des négociations. Il a également été libéré le 21 septembre 1977 et expulsé d’Haïti quatre jours plus tard. Deux autres étaient décédés avant l’enlèvement sous la houlette des négociateurs: Jean Napoléon le 26 décembre 1972 à Fort Dimanche, et Wilfrid Sanders s’était pendu aux Casernes Dessalines plusieurs mois auparavant.
Le colonel Breton Claude a été contraint de prendre sa retraite au début de 1974 de l’armée et est mort dans son lit quelques années plus tard. L’Ambassadeur Clinton Knox a quitté Haïti le lendemain de l’enlèvement pour Washington et du contrôle médical; il n’est pas revenu à son poste. Il a pris sa retraite peu de temps après et est décédé en 1980. A ce jour, Emmanuel Orcel est toujours vivant et libre en Haïti.