Haïti chronique d’une crise électorale (137) Présidentielle, vers la fin du processus !

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Jude Célestin, Moïse Jean-Charles et Maryse Narcisse, les trois candidats contestataires qui refusaient de reconnaître la victoire de leur concurrent du PHTK

Doucement et sûrement, le pays avance vers la fin du processus électoral. Malgré la résistance acharnée des trois candidats contestataires, Maryse Narcisse de Fanmi Lavalas, Jean-Charles Moïse de la Plateforme Pitit Dessalines et Jude Célestin de la Ligue Alternative pour le Progrès et l’Emancipation Haïtienne (LAPEH) pour faire obstacle à la publication des résultats définitifs par le Conseil Electoral Provisoire (CEP), la roue continue à tourner. En effet, malgré un énième report de la date du 29 décembre 2016, compte tenu du retard accumulé au Centre de Tabulation des Votes (CTV), les neuf (9) Conseillers Electoraux ont fini par publier le mardi 3 janvier 2017 dans  l’après-midi les résultats définitifs des élections générales ayant eu lieu le 20 novembre 2016. Sans grande surprise, la quasi-totalité des résultats préliminaires publiés le 28 novembre 2016 a été confirmée. Pour la présidentielle, c’est toujours le candidat du Parti Haïtien Tèt Kalé (PHTK) qui a été officiellement élu Président d’Haïti dès le premier tour avec un score pratiquement inchangé, avec 590,927 voix, soit 55. 60%  de vote exprimé contre 207,988 voix soit 19.57% pour Jude Célestin de LAPEH arrivant en deuxième position. Quant au candidat de la Plateforme Pitit Dessalines, Jean-Charles Moïse, il avait gardé sa troisième place avec 117,349 voix soit 11.04% suivi de Maryse Narcisse de Fanmi Lavalas avec 95,765 voix, soit 9.01% de vote.

Pour arriver à ce point du non retour, le chemin a été parsemé d’embûches à l’initiative de ces trois candidats qui ont tout fait pour empêcher le tribunal électoral, le BCEN (Bureau du Contentieux Electoral National), de trancher dans le conflit qui les opposait à celui du PHTK donné gagnant dès les résultats préliminaires. Après des tours de passe-passe à n’en plus finir au CTV entre les avocats des contestataires, ceux de Jovenel Moïse et les juges du BCEN, l’affaire paraissait bloquée pour tout le monde qui ne voyait aucune issue à ce jugement. En récusant une nouvelle fois et pratiquement à la fin des opérations de vérification au CTV tous les juges du BCEN par 3 lettres de sommation  avec Huissiers, le tribunal composé des juges : Josette Jean Dorcély, Jean Simon St-Hubert, Agnès J. Joazéus, Jacky C. Pierre et Joseph Briel Latice, s’était déclaré encore incompétent tout en ayant transporté de nouveau l’affaire devant le Conseil Electoral Provisoire. Celui-ci, sans perdre de temps avait retourné, pour le même motif que le précédent, le dossier par devant le BCEN, seul selon le décret électoral 2015 apte à juger les contentieux entre les candidats.

Du coup, ce sont ces mêmes juges, qui, après décision du CEP, étaient maintenus au Bureau du Contentieux Electoral National pour poursuivre le jugement. Vu qu’il ne restait que 261 procès-verbaux à vérifier, le reste du processus de vérification a été effectué très vite. Travaillant pendant toute la période des fêtes de fin d’année y compris durant la soirée de la Saint Sylvestre, les juges, les observateurs et les représentants du PHTK avaient fini par boucler leurs travaux. En clair, autoriser le Centre de Tabulation des Votes à remettre au CEP les résultats définitifs de ces élections pour publication officielle à la date prévue du 3 janvier 2017. Après la dernière vérification en l’absence des représentants des trois candidats en question, les juges Josette Jean Dorcély, Jean Simon St-Hubert, Agnès J. Joazéus, Jacky C. Pierre et Joseph Briel Latice avaient invité ces derniers à venir au tribunal électoral pour la plaidoirie finale. Mais, restant cohérent avec leur démarche, aucun n’avait mis les pieds au CEP où siège le Bureau du Contentieux Electoral National pour réintégrer le processus. Ainsi, c’est à l’unanimité, cette fois, que les neuf (9) membres du Conseil Electoral Provisoire ont reconnu et signé les résultats définitifs proclamant Jovenel Moïse 58e Président d’Haïti. Dans la foulée de la publication des joutes présidentielles, le CEP avait aussi publié les résultats définitifs pour les élections législatives.

Dès la confirmation de l’élection du candidat du PHTK, très tard dans la nuit du mardi 3 janvier 2017, Jovenel Moïse qui avait établi son Quartier général (QG) à l’hôtel Best Western Premier à Pétion-Ville avait convoqué la presse, certains de ses partisans et amis pour sa première déclaration publique en tant que Président élu de la République. Comme pour les résultats préliminaires, à part Jude Célestin, Jean-Charles Moïse et Maryse Narcisse, les trois candidats contestataires qui refusaient de reconnaître la victoire de leur concurrent du PHTK, tous les autres postulants ont immédiatement fait savoir qu’ils acceptaient le verdict des urnes. Certains, à l’instar du candidat Eric Jean-Baptiste du MAS, ont même téléphoné au Président élu pour le féliciter. Celui qui faisait partie du Groupe des huit (G-8) et soutenait la candidature de Jude Célestin aux scrutins du 20 novembre 2016, dit reconnaitre sa défaite et se disait prêt à apporter ses conseils au nouveau chef de l’Etat tout en se réservant le droit de critiquer là où il serait nécessaire. Des personnalités aussi comme Daly Valet, ancien Directeur de campagne de Jean-Charles Moïse en 2015, ou encore Dimitri Vorbe, de l’équipe de Jude Célestin en 2016, ont salué l’élection de Jovenel Moïse même si leurs propres candidats refusent de le considérer comme leur Président.

Naturellement, la Communauté internationale qui a toujours cru dans l’élection de Jovenel Moïse dès 2015 et qui s’était même fâché momentanément avec le Président provisoire, Jocelerme Privert, pour avoir formé une Commission de vérification électorale, a immédiatement manifesté son soutien au nouveau Président et bien entendu reconnu sans condition l’élection du successeur élu de l’ex-Président Michel Martelly. De la France aux Etats-Unis d’Amérique en passant par le Canada et l’Espagne jusqu’au « Core Group » mené par la cheftaine Sandra Honoré patronne de la MINUSTAH en Haïti et Représentante Spéciale du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (ONU), tous se disaient prêts à travailler avec l’Administration de Moïse durant les cinq années de sa présidence et saluaient sa victoire. Pendant que les félicitations arrivent, le processus de normalisation constitutionnelle est lancé par le pouvoir de transition.

Le jeudi 5 janvier 2017, au moment où les nouveaux sénateurs et députés élus en même temps que Jovenel Moïse étaient en train de se faire inscrire au Parlement avec leur Certificat d’élu délivré par le Conseil Electoral Provisoire (CEP) avec leur exemplaire du Journal officiel, Le Moniteur, sous les bras, le Président élu était au Bureau de la Transition à Pétion-Ville. Il devait recevoir le numéro spécial de Le Moniteur, le journal officiel de la République, relatif aux résultats définitifs des élections du 20 novembre 2016. Une petite cérémonie avait été organisée au Bureau de Transition où une équipe du Palais national et celle du Président élu travaillent et préparent ensemble la transition ou la passation des pouvoirs le 7 février prochain. C’est le ministre des Affaires étrangères, Pierrot Délienne qui a présidé cette cérémonie au nom du gouvernement et de la présidence de la République et était chargé de remettre le document officiel à Jovenel Moïse l’habilitant à jouir de toutes les prérogatives dues à son nouveau statut de chef d’Etat.

Signalons que très tôt le matin du 3 janvier  2017, il y avait quelques coups de feu qui se faisaient entendre dans certains quartiers de la région métropolitaine de Port-au-Prince. On avait aussi observé quelques pneus enflammés du côté du bas de Lalue à Port-au-Prince, vers le Bicentenaire à La Saline, dans les communes de Cité Soleil, Carrefour et même vers Pétion-Ville. Il y a eu une tentative d’organiser une manifestation en prévision de la publication des résultats. Mais la police a tué dans l’œuf cette manifestation devant les ruines de l’église Saint-Jean Bosco au Portail Saint Joseph dans la capitale haïtienne. En revanche, les habitants de Port-au-Prince et ses banlieues avaient préféré rester chez eux par prudence, vu le contexte. Il faut dire que la police était assez visible dans les points stratégiques de la capitale : Boulevard Toussaint Louverture, Place du Champ de mars, aux alentours du Palais national ou encore sur l’autoroute de Delmas, etc. Même les transports publics se faisaient rares en ce mardi 3 janvier 2017 dans la région métropolitaine.

Enfin, la journée du mercredi 4 janvier 2017 est passée dans l’indifférence générale. En gros, les gens vaquaient sans aucun problème à leur occupation. C’est le signe que le pays avance doucement vers la fin du processus électoral de 2014-2016. Même quand l’arrestation par surprise de Guy Philippe sénateur élu de la Grand’Anse, le jeudi 5 janvier par la Brigade anti-drogue BLTS haïtienne et de la DEA, l’Agence anti-drogue américaine peut toujours replacer le pays dans l’œil du cyclone.

C.C

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