Non à l’exclusion du peuple !

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Pour ne pas se faire condamner par l’Histoire, il convient de choisir entre apporter un soutien efficace, concret, croissant à la lutte du peuple, initier le pas nécessaire vers son progrès  et continuer sans aucune hésitation les pratiques erronées anti-peuple d’antan !

Il y a deux semaines de cela, nous avons proposé au Président provisoire Jocelerme Privert  de prendre l’initiative de convoquer les forces vives de la Nation en un gros « Woumble National» pour déterminer ce qui devrait être fait pour l’avenir électoral à moyen terme du pays.  De sorte que nous assumons nous-mêmes que soit d’abord défendue la prise en charge du grave problème humanitaire national causé par l’ouragan Matthew, soit restaurer les zones sinistrées à un niveau d’humanité digne, puis finalement organiser dans l’ordre les élections tant souhaitées à une date  raisonnable.

Or la façon dont nous voyons les dirigeants se démêler, laisse entrevoir que  le pays n’a pas les hommes qu’il faut à la place idéale qu’il faut ; et que nous sommes loin, bien éloignés de la prise de conscience nationale nécessaire pour hisser au mât du pays le drapeau de l’honneur, de la dignité et du changement dont rêve le peuple haïtien. Il nous faut, certes, des élections ; mais  pas sur le cadavre des 546 morts selon le dernier bilan officiel, pas sur la détresse aiguë des centaines de familles sinistrées. Non ! Mille fois non !

C’est sur ce mépris que se fonde justement l’idée qu’on peut aller aux urnes sans une participation concrète et efficace de chaque citoyen, selon le principe sacré : un homme, un vote ;  Ne vous rendez-vous donc pas compte, messieurs et dames des classes dirigeantes que des milliers d’haïtiens authentiques comme vous autres, sont aux abois, sinistrés dans le pays en dehors  de la République de Port-au- Prince ? Comment pouvez-vous continuer à fermer vos yeux pour poursuivre votre tranquille petit bonhomme de chemin, comme quoi tout va bien madame la marquise ? Alors que plusieurs départements sont figés dans la souffrance. Votre comportement, mieux, votre stratégie peut être considérée, à maints égards, comme le reflet criminel de la politique d’une classe, minoritaire,  qui ne voit qu’elle-même et se fout cordialement du malheur des autres, particulièrement les plus vulnérables.

Ce que vous faites aujourd’hui, messieurs et dames des classes dirigeantes, comme hier, et que vous continuez à faire, c’est mettre le peuple le dos au mur, devant un fait accompli pour ne lui apporter aucun  secours concret, effectif et efficace auquel il a droit, et l’abandonner à son douloureux sort. Ne l’avez-vous pas fait après le tremblement de terre de janvier 2010 ? Vous récidivez, n’est-ce pas ?

Qui pis est, personne ne sait par quelle magie le Conseil électoral Provisoire est arrivé à fixer finalement le 30 Novembre prochain pour la poursuite des élections; alors que c’est la semaine dernière, plus précisément du 21 au 24 octobre 2016, qu’il a été  dans les départements des Nippes, du Sud et de la Grand Anse vérifier l’état des lieux pour faire un bilan des dégâts. Après s’être rendu compte de l’immensité de la destruction et du désespoir, et  pour se dédouaner, il a voulu, dans une correspondance ouverte, mettre le gouvernement au défi de réparer les infrastructures détruites par le cyclone en… dix jours !!! Autrement, il ne peut garantir  les élections promises pour le 20 novembre. Mais quelle incompréhension doublée d’outrecuidance !

La question à se poser maintenant, est sur quelle toile de fond s’inscrit la visite du Cep dans le Grand Sud, après avoir déjà  publié le calendrier électoral ? Sa correspondance qui jusqu’à l’heure où nous écrivons est restée sans aucune réponse officielle, ni de la part de la présidence ni du  gouvernement  en général a une signification très claire et toute particulière ; à savoir préparer l’opinion nationale pour un autre renvoi qui serait tout à fait normal, compréhensible, souhaitable, vu l’immense drame humain que vit un tiers de la nation sinon plus. Mais c’est le faire cabotin, la façon magouillante de procéder qui laisse à désirer et fait soupçonner autre chose.

On risque alors de se trouver en présence d’une situation relativement honteuse : les élections ne se feront seulement que pour les candidats et les partis politiques ; non pas pour le pays et pour le peuple. A l’évidence, ce peuple psychologiquement meurtri et matériellement détruit  n’est pas encore en mesure de faire face au stress électoral. Alors, il faut lui donner le temps nécessaire de reprendre son équilibre intérieur, de sembler commencer à retrouver ne serait-ce qu’une parcelle de ce qu’il a perdu. Ainsi, il serait plus à même d’agir en pleine conscience ; même quand les élections n’ont jamais été la solution qui ait révolutionné sa vie.  Il nous faut cesser de gouverner sans donner satisfaction au peuple. Il faut que les masses populaires du pays  se sentent protégées par l’environnement politique de sorte qu’elles participent de plein gré à la cause de la nation, la leur. Mais la façon avec laquelle on prépare à  l’humilier, à l’exclure, ne va-t-elle pas l’encourager davantage à l’idée d’aller vers d’autres cieux ?

Œuvrer à la justice sociale, c’est intéresser avant tout le plus grand nombre : les masses populaires. Nous souhaitons, même, nous réclamons que le gouvernement mette l’accent qui convient sur la douloureuse tragédie des victimes. De sorte qu’il choisisse la voie que nous avons proposée et que nous estimons être la bonne pour notre peuple, et non celle qu’on veut nous  imposer.

Le peuple haïtien, à son tour,  malgré déceptions, frustrations et douleur contenue, doit continuer sa lutte en s’organisant pour éviter l’exclusion  jusqu’à ce que ce soit lui-même qui arrive à mettre en place le régime honnête, populaire et progressiste qu’il a toujours souhaité voir s’établir dans le pays.

Non à l’exclusion du peuple ! Non aux élections sans le peuple ! Non à l’inhumanité de nos classes dirigeantes !

 

Haiti Liberté Vol 10 # 17

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